Cour de cassation de Belgique
Arret
5725
NDEG P.10.1676.F
ETAT BELGE, represente par le secretaire d'Etat à la politique demigration et d'asile, dont les bureaux sont etablis à Bruxelles, rue dela Loi, 51,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maitre Elisabeth Derriks, avocat au barreau deBruxelles,
contre
O.D., etranger,
defendeur en cassation,
ayant pour conseil Me Serge Fiorentino, avocat au barreau de Liege.
I. la procedure devant la cour
Le pourvoi est dirige contre un arret rendu le 14 octobre 2010 par la courd'appel de Liege, chambre des mises en accusation.
Le demandeur invoque deux moyens dans un memoire annexe au present arret,en copie certifiee conforme.
Le president de section chevalier Jean de Codt a fait rapport.
L'avocat general Damien Vandermeersch a conclu.
II. la decision de la cour
Sur la fin de non-recevoir opposee au pourvoi par le defendeur àl'audience :
La mise en liberte invoquee par le defendeur sur la base d'une ordonnancede refere rendue le 15 novembre 2010, n'enleve pas au pourvoi de l'Etatbelge son objet. Cette decision emane en effet d'une juridiction quistatue au provisoire, alors que la privation de liberte de l'etrangerreste soumise, quant au fond, à l'examen de legalite institue parl'article 72 de la loi du 15 decembre 1980.
La fin de non-recevoir ne peut, des lors, etre accueillie.
Sur le premier moyen :
Lorsqu'elles sont saisies d'un recours de l'etranger contre une mesureprivative de liberte en vue de son eloignement du territoire, lesjuridictions d'instruction se bornent à verifier si la mesure ainsi quela decision d'eloignement qui en est le soutien sont conformes à la loi,sans pouvoir se prononcer sur leur opportunite.
Le controle de legalite porte sur la validite formelle de l'acte,notamment quant à l'existence de sa motivation et au point de vue de saconformite tant aux regles de droit international ayant des effets directsdans l'ordre interne, qu'à la loi du 15 decembre 1980 sur l'acces auterritoire, le sejour, l'etablissement et l'eloignement des etrangers.
Le controle implique egalement la verification de la realite et del'exactitude des faits invoques par l'autorite administrative, le jugeexaminant si la decision s'appuie sur une motivation que n'entache aucuneerreur manifeste d'appreciation ou de fait.
L'article 237, alinea 3, du Code penal ainsi que le principeconstitutionnel de la separation des pouvoirs interdisent à lajuridiction d'instruction de censurer la mesure au point de vue de sesmerites, de sa pertinence ou de son efficacite.
Il ressort des pieces de la procedure que le defendeur a fait l'objet d'unordre de quitter le territoire delivre le 21 septembre 2010 avec decisionde remise à la frontiere et privation de liberte à cette fin.
L'acte se refere à l'article 7, alinea 1er, 11DEG, de la loi du 15decembre 1980 et s'appuie sur un arrete ministeriel de renvoi dont ledefendeur a fait l'objet le 30 mai 2007, et dont l'autorite administrativedit qu'il n'a ete ni suspendu ni rapporte.
La requete de mise en liberte deposee pour le defendeur le 24 septembre2010 fait valoir que l'arrete susdit a cesse de produire ses effets enraison de l'adhesion, à l'Union europeenne, du pays d'origine dudefendeur. Celui-ci soutient egalement avoir droit au sejour, parapplication de l'article 10 de la loi du 15 decembre 1980, ensuite de sonmariage avec une ressortissante belge. Il invoque enfin qu'ayant eu unenfant en Belgique, il y a developpe une vie familiale dans laquelle sadetention constitue une ingerence prohibee par l'article 8 de laConvention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertesfondamentales.
Dans l'avis remis à la chambre des mises en accusation, le ministerepublic a conclu au rejet des moyens invoques par le defendeur. Il a estimeque l'adhesion de son pays à l'Union europeenne n'entrainait pas lacaducite d'un arrete de renvoi fonde, comme en l'espece, sur l'atteinte àl'ordre public visee à l'article 20 de la loi. Il a fait valoir que lemariage allegue ne creait pas l'admission de plein droit au sejour, prevueà l'article 10, S: 1er. Il a soutenu que la mesure litigieuse etaitmotivee conformement à l'article 62 et que la privation de liberteimposee au demandeur correspondait à celle prevue à l'article 7, alinea3.
L'arret attaque se borne à enoncer que « les conditions requises par laloi n
pour le maintien du requerant à la disposition de l'Office des etrangersne sont plus actuellement reunies en l'espece ».
Cette enonciation ne permet pas de discerner quelle est l'illegalitecensuree par la chambre des mises en accusation et ne met des lors pas laCour en mesure de verifier si la juridiction d'instruction a observe leslimites assignees à son controle par l'article 72, alinea 2, de la loi,ou si elle s'est immiscee dans un controle d'opportunite que cettedisposition ne lui attribue pas.
A cet egard, le moyen est fonde.
Il n'y a pas lieu d'examiner le second moyen qui ne pourrait entrainer unecassation sans renvoi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Casse l'arret attaque ;
Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretcasse ;
Condamne le defendeur aux frais ;
Renvoie la cause à la cour d'appel de Liege, chambre des mises enaccusation, autrement composee.
Lesdits frais taxes en totalite à la somme de deux cent quatre-vingt-cinqeuros trois centimes dont cent quarante-deux euros treize centimes dus etcent quarante-deux euros nonante centimes payes par le demandeur.
Ainsi juge par la Cour de cassation, deuxieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le chevalier Jean de Codt, president de section, president,Frederic Close, president de section, Benoit Dejemeppe, Pierre Cornelis etGustave Steffens, conseillers, et prononce en audience publique dudix-sept novembre deux mille dix par le chevalier Jean de Codt, presidentde section, en presence de Damien Vandermeersch, avocat general, avecl'assistance de Fabienne Gobert, greffier.
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| F. Gobert | G. Steffens | P. Cornelis |
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| B. Dejemeppe | F. Close | J. de Codt |
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17 NOVEMBRE 2010 P.10.1676.F/1