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25/10/2010 | BELGIQUE | N°S.09.0052.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 25 octobre 2010, S.09.0052.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG S.09.0052.F

FORTIS INSURANCE BELGIUM, societe anonyme dont le siege social est etablià Bruxelles, boulevard Emile Jacqmain, 53,

demanderesse en cassation,

representee par Maitre John Kirkpatrick, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, boulevard de l'Empereur, 3, ou ilest fait election de domicile,

contre

D. P. T.,

defendeur en cassation.

represente par Maitre Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Liege, rue de C

haudfontaine, 11,ou il est fait election de domicile.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassa...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG S.09.0052.F

FORTIS INSURANCE BELGIUM, societe anonyme dont le siege social est etablià Bruxelles, boulevard Emile Jacqmain, 53,

demanderesse en cassation,

representee par Maitre John Kirkpatrick, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, boulevard de l'Empereur, 3, ou ilest fait election de domicile,

contre

D. P. T.,

defendeur en cassation.

represente par Maitre Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Liege, rue de Chaudfontaine, 11,ou il est fait election de domicile.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 16 fevrier 2009par la cour du travail de Bruxelles.

Le president Christian Storck a fait rapport.

Le procureur general Jean-Franc,ois Leclercq a conclu.

II. Le moyen de cassation

La demanderesse presente un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

Articles 24, alinea 2, 63, S: 4, 65, alineas 1er à 3, et 72, alinea 1er(tel que celui-ci etait en vigueur avant sa modification par laloi-programme du 24 decembre 2002, modification qui est entree en vigueurle 31 decembre 2002 en vertu de l'article 148 de ladite loi-programme), dela loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail

Decisions et motifs critiques

Apres avoir constate les faits suivants : 1. le defendeur a ete victimed'un accident du travail le 21 decembre 1992 ; 2. par jugement du 1eroctobre 1999, le tribunal du travail de Nivelles a determine les periodesd'incapacite temporaire totale, a fixe la consolidation au 30 janvier 1995et le taux de l'incapacite permanente partielle à 15 p.c. et a reserve àstatuer sur le montant du salaire de base ; par jugement du 9 juin 2000,le meme tribunal a ordonne la production par la demanderesse des baremesde remuneration des employes exerc,ant une fonction d'inspecteur (bareme6051), adaptes au 1er decembre 1991 et au 1er decembre 1992, en l'invitantà proceder au calcul de la remuneration de base en fonction de cescriteres, et a ordonne la reouverture des debats à l'audience du 1erseptembre 2000 ; à cette audience, l'affaire a ete renvoyee au role ; 3.le 14 aout 2001, le defendeur a fait signifier les jugements des 1eroctobre 1999 et 9 juin 2000 ; seul le jugement du 9 juin 2000 a ete frapped'un appel encore pendant ; 4. par exploit du 4 juin 2002, le defendeur acite la demanderesse devant le tribunal du travail de Nivelles en vued'entendre dire que sa situation s'est aggravee, qu'il doit etre reconnuavoir subi une incapacite temporaire totale du 8 janvier 2001 au 9septembre 2001 et une incapacite temporaire partielle de 50 p.c. du 10septembre 2001 au 30 octobre 2001, et que l'incapacite permanentepartielle est de 25 p.c. avec consolidation au 30 octobre 2001 ; 5. devantle tribunal du travail, la demanderesse a fait valoir que l'action n'etaitpas recevable au motif que tant que la remuneration de base n'est pasfixee par une decision passee en force de chose jugee, le delai derevision prevu à l'article 72 de la loi du 10 avril 1971 ne commence pasencore à courir ; le tribunal du travail a rejete cette these et declarel'action en revision recevable,

l'arret, par confirmation du jugement entrepris, dit l'action en revisionrecevable ; avant dire droit au fond, designe un expert charge dedeterminer si l'etat du defendeur s'est ou non aggrave depuis le jugementdu 1er octobre 1999 et, dans l'affirmative, dire si cette aggravation estimputable à l'accident du travail, preciser l'importance de celle-ci,evaluer le pourcentage d'incapacite permanente et la date à laquellecette aggravation prend cours ; renvoie l'affaire devant le tribunal dutravail en application de l'article 1068, alinea 2, du Code judiciaire.

L'arret fonde cette decision sur les motifs suivants :

« Pour que le delai de revision prenne cours, il faut à tout le moinsque le droit de la victime à une allocation annuelle soit reconnu [...].En l'espece, tel est le cas. Le droit à une allocation annuelle decouledu jugement du 1er octobre 1999 ayant fixe la date de consolidation et letaux d'incapacite permanente. Ce droit est definitivement acquis depuisque le jugement du 1er octobre 1999 est passe en force de chose jugee,soit depuis le 15 septembre 2001. La conversion de l'indemnite journaliered'incapacite temporaire en une indemnite annuelle d'incapacite permanentea pu intervenir des ce moment. D'ailleurs, sur la base du jugement etconformement à l'article 63, S: 4, de la loi du 10 avril 1971,l'assureur-loi est tenu d'accorder une allocation annuelle. [...]. Iln'est pas requis en outre que la remuneration de base ait ete fixee parune decision passee en force de chose jugee. Des lors que l'action enrevision ne concerne que la modification du taux d'incapacite permanenteen raison de faits nouveaux qui n'etaient pas connus ou ne pouvaient etreconnus à la date de la premiere decision [...], c'est à juste titre quele premier juge a releve que le montant de la remuneration de base esttotalement etranger à l'objet de l'action en revision de sorte qu'ilserait 'incoherent de considerer que la victime doive attendre la fixationde cette remuneration de base pour introduire sa demande en revision' ».

Griefs

L'article 72, alinea 1er, de la loi du 10 avril 1971 sur les accidents dutravail, dans sa version applicable au moment de l'introduction de lademande en revision (soit le 28 mai 2002), dispose : « La demande enrevision des indemnites, fondee sur une modification de la perte decapacite de travail de la victime ou sur son deces du aux consequences del'accident, peut etre introduite dans les trois ans qui suivent la date del'homologation ou de l'enterinement de l'accord entre les parties ou de ladecision ou de la notification visee à l'article 24 ». L'article 24,alinea 2, de cette loi dispose :« Si l'incapacite est ou devient permanente, une allocation annuelle de100 p.c., calculee d'apres la remuneration de base et le degred'incapacite, remplace l'indemnite journaliere à dater du jour oul'incapacite presente le caractere de la permanence ; ce point de departest constate par voie d'accord entre les parties ou par une decisionpassee en force de chose jugee ». L'article 65 dispose en ses alineas 1erà 3 : « Les parties sont tenues de soumettre, pour enterinement, auFonds des accidents du travail, les accords concernant les indemnites duesen raison de l'accident du travail, suivant les modalites et lesconditions fixees par le Roi. L'accord ne sortit ses effets qu'apresenterinement par le Fonds des accidents du travail. A peine de nullite,ces accords sont motives et mentionnent la remuneration de base, la naturedes lesions, le taux d'incapacite de travail et la date de consolidation».

Il ressort de ces dispositions que, si un accord n'est pas trouve entre lavictime et l'assureur-loi sur la remuneration de base, la nature deslesions, le taux de l'incapacite de travail et la date de laconsolidation, elements necessaires pour que l'accord puisse etre enterinepar le Fonds des accidents du travail conformement à l'article 65, alinea3, precite, une decision judiciaire doit intervenir sur tous ces points.C'est l'enterinement de l'accord ou la decision judiciaire passee en forcede chose jugee qui constitue le point de depart du delai de revision avantlequel l'action en revision ne peut etre introduite. Cette decision doitavoir statue sur le droit aux indemnites d'accident du travail etnotamment sur la conversion de l'indemnite journaliere d'incapacitetemporaire en une indemnite annuelle d'incapacite permanente, et doit deslors s'etre prononcee sur le droit de la victime à une indemniteannuelle. A defaut d'homologation ou d'enterinement de l'accord vise àl'article 24, alinea 2, le delai de revision ne commence à courir qu'àpartir de la date ou le jugement ou l'arret fixant tous les elementsnecessaires au calcul de l'indemnite annuelle en matiere d'accidents dutravail, tels le taux d'incapacite et la remuneration de base, a acquisforce de chose jugee.

Avant que tous les elements necessaires au calcul de l'indemnite annuellesoient constates soit par un accord entre les parties homologue ouenterine par le Fond des accidents du travail, soit par une decisionjudiciaire passee en force de chose jugee, les montants verses parl'assureur-loi à la victime de l'accident du travail constituent desimples avances visees à l'article 63, S: 4, de la loi du 10 avril 1971,lequel dispose : « En cas de contestation sur la nature ou le degred'incapacite de travail de la victime, l'entreprise d'assurances est tenued'avancer à celle-ci l'indemnite journaliere ou l'allocation annuellevisee aux articles 22, 23, 23bis ou 24, sur la base du degre d'incapacitede travail presente par lui (lire : elle). Cette disposition est egalementvalable en cas d'introduction d'une demande de revision prevue àl'article 72 de la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail ».

En l'espece, il ressort des constatations de l'arret que la remunerationde base ne faisait pas l'objet d'un accord des parties et qu'aucunedecision judiciaire passee en force de chose jugee n'est intervenue sur cepoint, des lors que la demanderesse a interjete appel du jugement dutribunal du travail de Nivelles du 9 juin 2000 qui avait ordonne àcelle-ci de produire les baremes de remuneration des employes exerc,ant lafonction d'inspecteur adaptes au 1er decembre 1991 et au 1er decembre 1992et l'avait invitee à proceder au calcul de la remuneration de base enfonction de ces criteres, et que l'appel est toujours pendant.

Des lors, l'arret n'a pu legalement decider que l'action en revision etaitrecevable pour avoir ete introduite dans les trois ans qui ont suivi lejour ou le jugement du tribunal du travail de Nivelles du 1er octobre1999, qui a fixe les periodes d'incapacite temporaire totale, laconsolidation et le taux de l'incapacite permanente partielle et reserveà statuer sur le montant du salaire de base, est passe en force de chosejugee (soit le 15 septembre 2001), par le motif que « la conversion del'indemnite journaliere d'incapacite temporaire en indemnite annuelled'incapacite permanente a pu intervenir des ce moment » et que, « sur labase de ce jugement et conformement à l'article 63, S: 4, de la loi du 10avril 1971, l'assureur-loi est tenu d'accorder une allocation annuelle ».

L'arret viole des lors les dispositions visees en tete du moyen.

III. La decision de la Cour

La demande en revision des indemnites, fondee sur une modification de laperte de capacite de travail de la victime ou sur son deces du auxconsequences de l'accident, peut etre introduite dans les trois ans quisuivent la date de l'homologation ou de l'enterinement de l'accord entreles parties ou de la decision fixant le jour ou l'incapacite de travailpresente un caractere permanent et ou l'indemnite journaliere estremplacee par une allocation annuelle calculee d'apres la remuneration debase et le degre d'incapacite.

Cette decision constitue la decision statuant sur le droit de la victimeà une allocation annuelle conformement à la loi du 10 avril 1971 sur lesaccidents du travail.

L'arret, qui constate qu'il n'a pas ete rendu de decision passee en forcede chose jugee sur la remuneration de base du defendeur, n'a pu, sansvioler les articles 24, alinea 2, et 72, alinea 1er, de la loi du 10 avril1971, decider que le delai de la demande en revision a pris cours.

Dans cette mesure, le moyen est fonde.

Par ces motifs,

La Cour

Casse l'arret attaque ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretcasse ;

Vu l'article 68 de la loi du 10 avril 1971, condamne la demanderesse auxdepens ;

Renvoie la cause devant la cour du travail de Mons.

Les depens taxes à la somme de cent quatre-vingts euros quatre-vingt-neufcentimes envers la partie demanderesse et à la somme dequatre-vingt-trois euros cinq centimes envers la partie defenderesse.

Ainsi juge par la Cour de cassation, troisieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president Christian Storck, les conseillers ChristineMatray, Martine Regout, Alain Simon et Mireille Delange, et prononce enaudience publique du vingt-cinq octobre deux mille dix par le presidentChristian Storck, en presence de l'avocat general Jean-Marie Genicot, avecl'assistance du greffier Marie-Jeanne Massart.

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| M-J. Massart | M. Delange | A. Simon |
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| M. Regout | Chr. Matray | Chr. Storck |
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25 OCTOBRE 2010 S.09.0052.F/1



Références :

Origine de la décision
Date de la décision : 25/10/2010
Date de l'import : 14/10/2011

Numérotation
Numéro d'arrêt : S.09.0052.F
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2010-10-25;s.09.0052.f ?
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