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07/10/2010 | BELGIQUE | N°C.09.0391.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 07 octobre 2010, C.09.0391.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

3603



NDEG C.09.0391.F

BELGIUM TELEVISION, en abrege BTV, societe anonyme dont le siege socialest etabli à Ixelles, chaussee d'Ixelles, 227B,

demanderesse en cassation,

representee par Maitre Michel Mahieu, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 523, ou il est faitelection de domicile,

contre

SOCIETE BELGE DES AUTEURS, COMPOSITEURS ET EDITEURS, en abrege SABAM,societe civile sous forme de societe cooperative à responsabilite limiteedont le siege

social est etabli à Evere, rue d'Arlon, 75-77,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Huguet...

Cour de cassation de Belgique

Arret

3603

NDEG C.09.0391.F

BELGIUM TELEVISION, en abrege BTV, societe anonyme dont le siege socialest etabli à Ixelles, chaussee d'Ixelles, 227B,

demanderesse en cassation,

representee par Maitre Michel Mahieu, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 523, ou il est faitelection de domicile,

contre

SOCIETE BELGE DES AUTEURS, COMPOSITEURS ET EDITEURS, en abrege SABAM,societe civile sous forme de societe cooperative à responsabilite limiteedont le siege social est etabli à Evere, rue d'Arlon, 75-77,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue des Quatre Bras, 6, ou il estfait election de domicile.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre les arrets rendus les 4 mars et18 juin 2009 par la cour d'appel de Bruxelles.

Le conseiller Martine Regout a fait rapport.

L'avocat general Andre Henkes a conclu.

II. Les moyens de cassation

La demanderesse presente quatre moyens libelles dans les termes suivants :

Premier moyen

Dispositions legales violees

- article 149 de la Constitution ;

- article 1134, alinea 3, du Code civil.

Decisions et motifs critiques

Le premier arret attaque statue sur la demande de la demanderesse tendantà entendre dire que la defenderesse a manque de transparence et, ainsi,n'a pas execute de bonne foi la convention litigieuse du 1er aout 2005 etconstate uniquement que la defenderesse a manque de transparence à denombreux egards, pour l'ensemble de ses motifs, et specialement les motifssuivants :

« 2. Sur l'obligation de transparence

a) Sur la publicite des tarifs

Il n'est pas conteste que la [defenderesse] n'a jamais publie et ne publietoujours pas les tarifs qu'elle entend appliquer indistinctement auxradio-telediffusions des oeuvres qu'elle represente.

Cette abstention est regrettable et a certainement contribue à ladegradation des relations entre les parties en faisant naitre chez [lademanderesse] une suspicion de manque de transparence (...) ;

b) Sur la transparence du mode de calcul de la tarification appliquee

(...)

Les sommes forfaitaires reclamees par la [defenderesse] pour les annees2002 et 2003 furent respectivement de 100.644,76 euros et de 115.741,48euros. Ces montants avaient ete fixes pour tenir compte des difficultes dedemarrage de [la demanderesse].

Dans le cadre des negociations entamees pour les annees 2004 et suivantes,la [defenderesse] s'est dite prete à conclure un nouvel accord si lesmontants forfaitaires etaient portes à 250.000 euros pour les annees 2004et 2005, et à 350.000 euros pour l'annee 2006.

La [defenderesse] n'explique pas sur quelles bases tous ces montantsforfaitaires etaient calcules ni les raisons pour lesquelles elle adecide, en definitive, de modifier la methode de calcul pour les annees2004 et suivantes, en prenant en consideration un montant forfaitaire parabonne au cable (qui n'est pas necessairement un spectateur des chainesAB3 ou AB4). Elle n'explique pas non plus pourquoi ce montant devait etreaugmente de 40 p.c. en 2005 (0,14 euros en 2004 et 0,1960 euros en 2005).

D'apres les decomptes de [la demanderesse], les sommes payees en 2004 et2005, sur la base de ces minima garantis, furent de 217.066 euros pour2004 et de 442.389,06 euros pour 2005, soit une augmentation, par rapportà l'annee 2003, de 87,54 p.c. en 2004 et de 282,22 p.c. en 2005 ! Cetteaugmentation demeure aussi inexpliquee.

Il y a donc lieu, comme l'a decide le president du tribunal de commerce deBruxelles, d'inviter la [defenderesse] à donner toutes precisions utilesafin de prouver que les minima garantis imposes pour les annees 2004 à2008 correspondent à la valeur economique de la prestation fournie (...).

c) Sur la transparence de l'assiette de perception

Il resulte de la production des contrats conclus avec les autresoperateurs commerciaux que l'assiette de calcul de la redevance de 2,8p.c. est la meme pour tous (...).

d) Sur la transparence des conditions appliquees aux operateurs publics

Il n'est pas conteste que la [defenderesse] ne produit pas les contratsqu'elle a conclus avec la R.T.B.F.

Ce manque de transparence ne permet cependant pas de conclure que la[defenderesse] abuserait de sa position dominante (...).

e) Sur la transparence des droits secondaires

Il resulte de la production de tous les contrats des operateurscommerciaux que la [defenderesse] a satisfait à son obligation detransparence en ce qui concerne les droits secondaires ».

Le second arret attaque dit en consequence non fondes les appels de lademanderesse.

Griefs

Premiere branche

Si le premier arret attaque est interprete comme repondant implicitementau moyen regulierement souleve en ses conclusions par la demanderesse, etpris de la violation par la defenderesse du principe de l'execution debonne foi des conventions, au motif que celle-ci n'a pas execute de bonnefoi la convention litigieuse du 1er aout 2005 en manquant de transparenceà de nombreux egards, le premier arret attaque meconnait l'article 1134,alinea 3, du Code civil.

En vertu de l'article 1134, alinea 3, du Code civil, les conventionsdoivent etre executees de bonne foi.

Il ressort du premier arret attaque que le 1er aout 2005, un contratgeneral d'autorisation et de remuneration retroagissant au 1er janvier2004 a ete conclu entre la demanderesse et la defenderesse concernantl'autorisation donnee par la seconde à la premiere d'utiliser lerepertoire gere par elle en contrepartie du paiement de redevances. Lesarrets attaques reconnaissent par ailleurs la position dominante de ladefenderesse sur le marche de service relatif à la protection des droitsd'auteur d'oeuvres musicales.

En ses conclusions communes et de synthese d'appel, la demanderesseenonc,ait :

« La mauvaise foi de la (defenderesse).

(La defenderesse) ne peut ignorer l'existence de toutes les obligationssupplementaires liees à sa position dominante, compte tenu des proceduresdont elle a fait l'objet et des griefs qui lui ont ete adresses (...) ;

Malgre l'accumulation des reproches et les demandes de (la demanderesse),(la defenderesse) n'a cependant jamais accepte une mise à plat completede ses conditions de transaction, comme l'ont fait, par exemple, laS.A.C.E.M. en France ou nos voisins hollandais publiant leur tarif surinternet.

Confrontee à la mise en evidence de pratiques discriminatoires, (ladefenderesse) a cependant continue à privilegier la conclusion d'accordsau cas par cas et à definir ses conditions tarifaires avec chaqueoperateur dans la plus grande confidentialite, et meme en utilisant latechnique des contre-lettres et des avenants confidentiels ou secrets.

Lorsqu'on lui demande d'assurer et de garantir que les conditions qu'elleapplique sont celles qu'elle applique aux concurrents, elle se retranchederriere un pretexte - celui de la confidentialite - qu'elle ne pouvaitaccepter et ne peut invoquer dans la position qui est la sienne (...) etce n'est que lorsqu'elle y est acculee ou qu'elle y voit un interetstrategique ou que l'element à cacher n'est plus d'actualite, qu'ellecede à la transparence (...) ».

La demanderesse soutenait ensuite que la defenderesse avait manque detransparence dans la publication de la tarification appliquee et dans lemode de calcul, pour lequel elle precisait quant à la mauvaise foi de ladefenderesse, que, « outre les regles de la concurrence, l'execution debonne foi des conventions (article 1134, alinea 3, du Code civil) imposeen effet à (la defenderesse) cette obligation de transparence dans lamesure ou la validite de l'autorisation generale accordee en 2005 estdependante du respect, par cette derniere, du principe denon-discrimination ».

La demanderesse soutenait egalement que la defenderesse avait manque detransparence quant au systeme des minima garantis, et precisait à nouveauque « (la defenderesse) n'avait jamais fourni aucune reponse alors ques'impose à elle une obligation de transparence, de non-discrimination etde bonne foi dans l'execution des conventions ».

La demanderesse soulevait le meme grief d'absence de transparence de ladefenderesse quant à l'assiette de la redevance et au taux de perceptionapplique, quant aux conditions appliquees aux autres operateurs, et quantà la situation des droits secondaires.

La demanderesse soutenait ainsi que la defenderesse n'avait pas execute debonne foi la convention du 1er aout 2005 les liant, en manquant detransparence quant aux conditions financieres qu'elle lui imposait.

Il apparait du premier arret attaque que la demanderesse a, à denombreuses reprises au cours de l'execution du contrat litigieux, demandeà la defenderesse des precisions quant à ces conditions financieres, etnotamment par un courrier du 14 juin 2006.

Le premier arret attaque etablit que la defenderesse a manque detransparence quant à la publicite de ses tarifs applicables auxradio-telediffusions des oeuvres qu'elle represente, cette abstentionayant « certainement contribue à la degradation des relations entre lesparties ». Le premier arret attaque etablit egalement que la defenderessea manque de transparence quant aux minima garantis imposes à lademanderesse, ainsi que quant aux conditions appliquees aux operateurspublics.

Tout contractant doit executer de bonne foi la convention qui le lie, etainsi repondre à une obligation minimum de transparence. La transparenceattendue d'un contractant, executant ainsi de bonne foi la convention, estparticulierement presente lorsque celui-ci presente une position dominantesur le marche dans lequel le contrat est conclu.

Apres avoir etabli que la defenderesse a effectivement manque detransparence dans le cadre de l'execution de la convention litigieuse du1er aout 2005, alors qu'executant de bonne foi une convention, uncocontractant doit donner à son cocontractant les informationssollicitees par lui afin de ne pas manquer à l'obligation de transparenceattendue d'un cocontractant, particulierement lorsque celui-ci se trouvedans une situation de position dominante, les arrets attaques ne concluentpas que ce manque de transparence constituait une execution de mauvaisefoi de ladite convention par la defenderesse, et violent ainsi l'article1134, alinea 3, du Code civil.

Seconde branche

A titre subsidiaire, si le premier arret attaque est interprete comme neconsiderant pas, meme implicitement, que l'absence de transparenceconstatee de la defenderesse ne constitue pas une execution de mauvaisefoi de la convention litigieuse, il ne repond alors pas au moyenregulierement souleve par la demanderesse selon lequel la defenderesse aviole le principe de l'execution de bonne foi des conventions en manquantde transparence.

En effet, le premier arret attaque, s'il repond aux griefs de l'absence detransparence de la defenderesse, et etablit cette transparence danscertains cas, ne realise cette analyse qu'afin de determiner si ladefenderesse a abuse de sa position dominante en violation de l'article 82du Traite instituant les communautes europeennes et de l'article 3, alinea1er, de la loi du 5 aout 1991 sur la protection de la concurrenceeconomique, coordonnee le 15 septembre 2006. Ni le premier arret attaqueni le second, par aucun de leurs motifs, ne repondent ainsi au moyen de lademanderesse selon lequel l'absence de transparence de la defenderesseconstituait une execution de mauvaise foi de la convention. Partant, lesarrets attaques ne sont pas regulierement motives et violent ainsil'article 149 de la Constitution.

Deuxieme moyen

Dispositions legales violees

Article 149 de la Constitution

Decisions et motifs critiques

Les deux arrets attaques, saisis de l'appel de la demanderesse contre lejugement entrepris du 15 juillet 2005, decident, l'un et l'autre et àtout le moins le premier, que la defenderesse n'a pas abuse de sa positiondominante, bien qu'elle ait manque à certains egards de transparence, deslors qu'elle a etabli le mode de calcul des minima garantis sur des basesobjectives, et que la defenderesse n'est pas critiquable au regard de latheorie des facilites essentielles, et le second arret attaque dit nonfonde l'appel de la demanderesse contre le jugement entrepris du 15juillet 2005 et l'en deboute et met à sa charge les depens des deuxinstances.

Griefs

Le jugement entrepris, prononce le 15 juillet 2005 par le president dutribunal de premiere instance de Bruxelles, constate l'existence d'uneviolation par la demanderesse de l'article 1er, S: 1er, de la loi du 30juin 1994 relative aux droits d'auteur, au motif que celle-ci a communiqueau public des oeuvres du repertoire de la defenderesse sans l'autorisationde cette derniere. Cette decision est confirmee par les arrets attaques.

En ses conclusions communes et de synthese d'appel, la demanderessesoutenait que l'absence d'autorisation d'utiliser les oeuvres durepertoire de la defenderesse constatee par le jugement entrepris du 15juillet 2005, etait imputable à la defenderesse qui refusait decontracter à des conditions transparentes et equitables. Elle indiquaitainsi :

« L'absence d'autorisation constatee par le president du tribunal depremiere instance de Bruxelles dans son jugement du 15 juillet 2005 n'estpas à imputer à (la demanderesse) mais au comportement abusif de (ladefenderesse) qui refusait de contracter à des conditions transparenteset equitables.

Il n'est pas conteste que les parties ont, au cours de l'annee 2004, tentede negocier les nouvelles conditions mises à la communication publiquedes oeuvres protegees du repertoire de la (defenderesse).

Au cours d'une reunion qui s'est tenue le 10 novembre 2004, (ladefenderesse) a exige de (la demanderesse) qu'elle formule unecontre-proposition motivee (...) tout en lui refusant, et en continuant àlui refuser, les elements d'informations necessaires pour ce faire et enla menac,ant, en outre, d'une action en cessation (...).

Force est donc de constater que c'est (la defenderesse) qui, par son refusde contracter avec (la demanderesse) à des conditions equitables ettransparentes, a engendre l'absence d'autorisation dont il a ete faitgrief à (la demanderesse) en 2005. Cette situation n'est donc en rienimputable à (la demanderesse) ».

Par aucun de leurs motifs, les arrets attaques ne repondent à ce moyenregulierement souleve par la demanderesse en ses conclusions, selon lequell'absence d'autorisation constatee par le jugement entrepris du 15 juillet2005 ne lui etait pas imputable, d'une part, au motif que la defenderesserefusait de contracter à des conditions equitables et, d'autre part, aumotif que la defenderesse refusait de contracter à des conditionstransparentes au cours de la periode precedant le jugement entrepris du 15juillet 2005. Ils violent ainsi l'article 149 de la Constitution.

Troisieme moyen

Dispositions legales violees

- articles 1er et 87, S: 1er, de la loi du 30 juin 1994 relative auxdroits d'auteur et aux droits voisins, pour le premier, tel qu'il a etemodifie par la loi du 22 mai 2005, et pour le second, tel qu'il etaitapplicable avant sa modification par la loi du 10 mai 2007 et, en outre,tel qu'il est applicable depuis sa modification par la loi du 10 mai2007 ;

- articles 1134, 1319, 1320 et 1322 du Code civil.

Decisions et motifs critiques

Le premier arret attaque confirme le jugement entrepris du 10 juillet 2008en ce qu'il a statue sur la premiere atteinte aux droits d'auteur denonceepar la defenderesse et sur les depens, particulierement par les motifssuivants :

« Il n'est pas interdit au juge des cessations de sanctionner un acteincrimine lorsque celui-ci, tout en etant contraire à un contrat, est ensoi, independamment de ce contrat, contraire à la loi. Dans le domaine dudroit d'auteur, la loi condamne les actes qui ne seraient pas expressementautorises par le titulaire du droit. La violation de toutes les clausescontractuelles qui determinent la portee et les conditions del'autorisation (mode d'exploitation, duree, territoire, paiementconditionnant l'autorisation) est, par definition, une violation de laloi. En d'autres termes, celui qui meconnait les limites d'uneautorisation du titulaire commet un acte de contrefac,on independammentd'une faute contractuelle. Il en va toutefois autrement dans les cas oul'acte querelle enfreint uniquement une clause contractuelle sansaucunement mettre en cause l'autorisation donnee par le titulaire. En cecas, la violation est purement contractuelle et l'action en cessation nes'applique pas (B. Michaux, note sous Pres. Civ. Bruxelles, 27 aout 1996,A.M., 1998, pp. 74-75).

a) Sur les minima garantis

[La demanderesse] a decide de suspendre le paiement des minima garantis enraison du differend qui opposait les parties sur l'assiette de calcul desdroits d'auteur et pour le motif qu'elle n'obtenait pas de reponse auxquestions qu'elle posait dans sa lettre du 14 juin 2006 relative aurespect du droit de la concurrence.

L'exception d'inexecution est un moyen de defense purement temporaire quipermet à une partie de differer l'execution de son obligation et deretenir ainsi ses propres prestations aussi longtemps que soncocontractant reste en defaut d'executer les siennes (Cass., 14 mars 1991,Pas., 1991, I, 652 ; Cass.,7 fevrier 1979, Pas., I, 654).

Elle doit etre invoquee de bonne foi et sans abus de droit ; il n'y a abusde droit que lorsque le droit dont se prevaut une partie est exerce sansinteret raisonnable et suffisant, notamment lorsque le prejudice cause parl'exercice du droit est sans proportion avec l'avantage recherche ouobtenu par le titulaire de celui-ci (Cass., 30 janvier 1992, Pas., I,475).

Or, en l'espece, la controverse relative au respect du droit de laconcurrence etait dejà nee avant la conclusion de la convention du 25octobre 2005 et avait ete tranchee en defaveur de [la demanderesse] tantpar le president du tribunal de premiere instance de Bruxelles que parcelui du tribunal de commerce de Bruxelles, à tout le moinspartiellement.

La convention a ete signee sous reserve des appels introduits devant lacour [d'appel] qui etaient toujours pendants. Plutot que d'attendre que lacour se soit prononcee sur les exceptions soulevees par [la demanderesse],celle-ci a remis en cause l'equilibre qui avait ete negocie et s'est faitjustice à elle-meme en suspendant le paiement des minima garantis qu'elleavait contractuellement acceptes et dont l'illegalite n'avait pas etedemontree.

[La demanderesse] n'a donc pas invoque l'exception d'inexecution de bonnefoi.

Par ailleurs, le differend relatif à l'assiette de calcul de laredevance, pour ce qui excede les minima garantis, est etranger à ceux-ciet ne peut justifier une exception d'inexecution.

Il s'en deduit qu'en s'abstenant de payer les minima garantis, [lademanderesse] s'est mise elle-meme dans une situation ou elle diffusaitles oeuvres du catalogue de la [defenderesse] sans autorisation puisque lepaiement de ces minima constituait une des conditions essentielles decette autorisation, à tout le moins à titre provisoire.

Pour constater la contrefac,on, la [defenderesse] ne devait donc pasmettre prealablement en oeuvre le mecanisme de la resolution de laconvention.

Le president du tribunal de premiere instance de Bruxelles etait donc biencompetent pour prononcer un ordre de cessation et l'appel, sur ce point,n'est pas fonde ».

Le second arret attaque dit, en consequence, non fondes les appels de lademanderesse.

Griefs

Premiere branche

L'article 87, S: 1er, de la loi du 30 juin 1994 relative aux droitsd'auteur et aux droits voisins disposait avant sa modification par la loidu 10 mai 2007 que « sans prejudice de la competence du tribunal depremiere instance, le president de celui-ci constate l'existence etordonne la cessation de toute atteinte au droit d'auteur ou à un droitvoisin » et que cette « action est formee et instruite selon les formesdu refere ».

Depuis sa modification par la loi du 10 mai 2007, l'article 87, S: 1er, dela loi du 30 juin 1994 relative aux droits d'auteur et aux droits voisinsdispose que « le president du tribunal de premiere instance et lepresident du tribunal de commerce, dans les matieres qui sontrespectivement de la competence de ces tribunaux, constatent l'existenceet ordonnent la cessation de toute atteinte au droit d'auteur ou à undroit voisin » et que cette « action est formee et instruite selon lesformes du refere ».

Le premier arret attaque constate que le 1er aout 2005, la demanderesse etla defenderesse ont conclu un contrat general d'autorisation, contratsynallagmatique permettant à la premiere d'utiliser le repertoire de laseconde, moyennant le paiement par la demanderesse d'une redevanceproportionnelle, soit 2,80 p.c. des revenus nets de la demanderesse, et,en outre d'une redevance minimale forfaitaire garantie par abonne au cableet par an.

Par deux citations, des 1er septembre 2006 et 23 novembre 2007, ladefenderesse a cite la demanderesse devant le president du tribunal depremiere instance de Bruxelles statuant en cessation sur la base del'article 87 de la loi relative au droit d'auteur et aux droits voisins du30 juin 1994. Le premier arret attaque constate que, par ces deuxcitations, la defenderesse soutenait que la demanderesse commettait quatreatteintes aux droits d'auteur en ne payant pas la remunerationcontractuellement convenue, à savoir les minima garantis et la redevanceproportionnelle, et en ne permettant pas en outre à la defenderesse dedeterminer le montant de cette derniere redevance. La defenderessealleguait ainsi la violation par la demanderesse de l'article 1er de laloi relative aux droits d'auteur, et demandait au president du tribunal depremiere instance de Bruxelles d'ordonner la cessation de cescomportements.

Par le jugement entrepris du 10 juillet 2008, le president du tribunal depremiere instance de Bruxelles a notamment dit fondee la premiere atteintealleguee à l'article 1er, S: 1er, de la loi relative aux droits d'auteuralleguee par la defenderesse, et en a ordonne la cessation, au motif quela demanderesse violait l'article 1er, S: 1er, de la loi du 30 juin 1994relative aux droits d'auteur en communiquant au public à partir du 1eroctobre 2006 des oeuvres protegees du repertoire de la defenderesse sansrespecter la condition financiere contractuellement convenue, soit lepaiement des minima garantis.

En ses conclusions communes et de synthese d'appel, la demanderessedemandait la reformation de cette condamnation au motif que, par cetteaction portee devant le president du tribunal de premiere instance deBruxelles par les citations des 1er septembre 2006 et 23 novembre 2007, ladefenderesse arguait le non-respect des clauses contractuelles relativesau paiement des minima garantis et de la redevance forfaitaire. Lademanderesse relevait ainsi que la defenderesse ne pouvait des lors pasagir en cessation, sur la base de la loi du 30 juin 1994 relative auxdroits d'auteur, contre le manquement contractuel ainsi allegue et imputeà la demanderesse, qui par ailleurs voyait en ce manquement uneapplication legitime de l'exceptio non adimpleti contractus. Lademanderesse soutenait ainsi que la defenderesse ne pouvait agir quedevant le tribunal civil sur la base de la responsabilite contractuelle.

Le president du tribunal de premiere instance n'est effectivementcompetent en vertu de l'article 87, S: 1er, dans ses deux versionssuccessives, de la loi relative au droit d'auteur et aux droits voisins,que pour ordonner la cessation d'une atteinte à un droit d'auteur ou àun droit voisin. Il n'est pas competent pour connaitre de la pretendueinexecution ou de la mauvaise execution d'une convention relative à desdroits d'auteur ou à des droits voisins, pour interpreter le contenu etla portee d'une telle convention, et pour en sanctionner la violation. Uneaction en cessation fondee sur l'article 87 de la loi relative au droitd'auteur et aux droits voisins, n'est donc pas recevable lorsqu'uneconvention concernant les droits d'auteur lie leur titulaire et lapersonne accusee de violer les droits d'auteur concernes par cetteconvention.

Lorsqu'une convention lie les parties quant à l'utilisation par l'une desoeuvres protegees par le droit d'auteur dont l'autre est le titulaire,seule une action en responsabilite contractuelle peut etre envisageelorsqu'une de ces parties se plaint de la mauvaise execution du contratqui les lie.

En consequence, la defenderesse qui, par ses citations des1er septembre 2006 et 23 novembre 2007, se plaignait du defaut de paiementpar la demanderesse des minima garantis contractuellement convenus, ainsique du defaut de paiement de la redevance forfaitaire et du defaut de lademanderesse de permettre la determination de cette redevance forfaitaire,ne pouvait pas agir en cessation devant le tribunal de premiere instancede Bruxelles sur la base de l'article 87, S: 1er, de la loi relative audroit d'auteur et aux droits voisins du 30 juin 1994, mais devait agirdevant le juge civil sur la base de la responsabilite contractuelle.

Le premier arret attaque considere cependant que la defenderesse a pu agirdevant le president du tribunal de premiere instance de Bruxelles sur labase de l'article 87 precite, que le president du tribunal de premiereinstance etait effectivement competent pour connaitre de cette demande, etconfirme le jugement entrepris du 10 juillet 2008 ordonnant la cessationde la premiere atteinte alleguee à l'article 1er de la loi relative auxdroits d'auteur du 30 juin 1994, soit l'absence de paiement par lademanderesse des minima garantis depuis le 1er octobre 2006.

En decidant que le president du tribunal de premiere instance deBruxelles, et par voie de consequence la juridiction d'appel, etaientcompetents sur la base de l'article 87 de la loi du 30 juin 1994 relativeaux droits d'auteur pour connaitre de l'action formee par la defenderesse,par laquelle la defenderesse alleguait la violation des droits d'auteurpar la demanderesse au motif que cette derniere ne payait pas les minimagarantis contractuellement convenus, alors que la demanderesse et ladefenderesse etaient liees par une convention et que la mauvaise executionde celle-ci etait donc de la competence du juge civil fondee sur laresponsabilite contractuelle, et non du juge des cessations sur la base del'article 87, dans ses deux versions successives, de la loi relative audroit d'auteur et aux droits voisins, le premier arret attaque viole cettedisposition en l'appliquant à tort.

Deuxieme branche

En vertu de l'article 1er, S: 1er, de la loi du 30 juin 1994 relative audroit d'auteur et aux droits voisins, « l'auteur d'une oeuvre litteraireou artistique a seul le droit de la reproduire ou d'en autoriser lareproduction, de quelque maniere et sous quelque forme que ce soit,qu'elle soit directe ou indirecte, provisoire ou permanente, en tout ou enpartie ».

Le premier arret attaque confirme le jugement entrepris du 10 juillet 2008en ce que celui-ci a constate et a ordonne la cessation de la premiereatteinte à l'article 1er, S: 1er, de la loi du 30 juin 1994 relative auxdroits d'auteur alleguee par la defenderesse, au motif que la demanderessene payait plus depuis le 1er octobre 2006 les minima garantiscontractuellement convenus.

Par le contrat du 1er aout 2005, la demanderesse et la defenderesses'etaient accordees quant à l'autorisation donnee par la defenderesse àla demanderesse d'utiliser le repertoire d'oeuvres musicales gere par elle(article 1er de ladite convention) en echange du paiement d'uneremuneration par la demanderesse (article 4 de ladite convention).

Le jugement entrepris du 10 juillet 2008 et le premier arret attaqueconstatent que la demanderesse a cesse de payer les minima garantiscontractuellement convenus le 1er octobre 2006, et en deduisent uneviolation de l'article 1er, S: 1er, de la loi du 30 juin 1994 relative auxdroits d'auteur, au motif qu'en ne payant plus les minima garantis,l'autorisation d'utilisation n'existait plus, et que donc, en utilisanttout de meme les oeuvres protegees du repertoire de la defenderesse, lademanderesse violait les droits d'auteur.

S'il est exact que le defaut de paiement des minima garantis par lademanderesse peut etre constitutif d'une violation de ses obligationscontractuelles et entrainer sa responsabilite contractuelle, cette absencede paiement ne permet pas de considerer que le contrat du 1er aout 2005serait resolu, alors qu'aucune decision de resolution judiciaire n'a eteprononcee. En outre, il n'apparait pas des arrets attaques que ladefenderesse aurait souleve une exception d'inexecution à la suite dudefaut de paiement par la demanderesse des redevances contractuellementconvenues. En consequence, l'autorisation donnee par la defenderesse à lademanderesse quant à l'utilisation de son repertoire continuait àexister, bien que la demanderesse n'effectuat plus quant à ellel'execution de ses obligations contractuelles, en se fondant surl'inexecution, par la defenderesse, de ses propres obligationscontractuelles.

En consequence, le premier arret attaque, qui constate que la demanderesseviolait les droits d'auteur (article 1er, S: 1er, de la loi du 30 juin1994) au motif qu'en ne payant plus les minima garantis contractuellementconvenus, l'autorisation d'utilisation du repertoire contractuellementconvenue ne pouvait plus exister, alors que le contrat du 1er aout 2005,prevoyant cette autorisation dans le chef de la defenderesse et lepaiement de redevances dans le chef de la demanderesse, n'avait pas eteresolu, et que l'inexecution par la demanderesse de ses obligationscontractuelles ne pouvait faire disparaitre le contrat et les obligationscontractuelles de la defenderesse, et qu'il n'apparait pas des arretsattaques que la defenderesse aurait fait application de l'exceptio nonadimpleti contractus, le premier arret attaque viole l'article 1er, S:1er, de la loi du 30 juin 1994 relative au droit d'auteur et aux droitsvoisins en constatant sa violation par la demanderesse alors que celle-cibeneficiait de l'autorisation d'utilisation necessaire, et viole en outrel'article 1134 du Code civil, en decidant que la demanderesse nebeneficiait pas de l'autorisation necessaire afin d'utiliser les oeuvresdu repertoire de la defenderesse. Il viole enfin la foi due à cetteconvention en lui attribuant, pour justifier sa decision, unesignification qui est inconciliable avec ses termes, en lui deniant uneenonciation ou une affirmation qu'il contient (articles 1319, 1320 et 1322du Code civil).

Troisieme branche

Le premier arret attaque statue, notamment, en appel du jugement du 10juillet 2008 du tribunal de premiere instance de Bruxelles statuant sur labase de l'article 87, S: 1er, de la loi du 30 juin 1994 relative auxdroits d'auteur.

Statuant sur la base de l'article 87, S: 1er, de la loi du 30 juin 1994,le president du tribunal de premiere instance et, en appel de sa decision,la cour d'appel ne peuvent qu'eventuellement constater et prononcer lacessation de toute atteinte portee au droit d'auteur ou à un droitvoisin. Le juge de la cessation est incompetent pour apprecier le contenuou la portee des conventions.

En consequence, le premier arret attaque, statuant en appel de la decisionentreprise du 10 juillet 2008, ne pouvait apprecier le contenu et laportee de la convention du 1er aout 2005 afin de decider que lademanderesse n'avait « pas invoque l'exception d'inexecution de bonne foi». Ce faisant, le premier arret attaque outrepasse les competencesdevolues au juge des cessations, et viole ainsi l'article 87, S: 1er, dansses deux versions successives, de la loi du 30 juin 1994 relative au droitd'auteur et aux droits voisins vise au moyen, en l'appliquant à tort.

Quatrieme moyen

Disposition legale violee

Article 149 de la Constitution

Decisions et motifs critiques

Le second arret attaque dit les appels introduits par la demanderessecontre le jugement du tribunal de premiere instance de Bruxelles du 15juillet 2005 et contre le jugement du tribunal de commerce du 18 avril2005 non fondes et l'en deboute ; il constate à cet egard quel'imposition par la defenderesse de paiements de minima garantis au titrede redevances est fonde sur des bases objectives et n'est pasdiscriminatoire, par les motifs suivants, ici integralement reproduits :

« La [defenderesse] expose que le taux de 0,1960 euro par abonne au cablequ'elle a demande est egal au droit `cable' fixe, pour la R.T.B.F. et laV.R.T. pour l'annee 2004, par le contrat `cable' du 28 mai 2003, soit0,1568 euro, majore de 25 p.c.

Ce mode de calcul peut etre considere comme etabli sur des basesobjectives, dans la mesure ou :

o une remuneration calculee uniquement sur une proportion des recettespublicitaires risque de ne pas remunerer justement l'auteur en casd'absence ou d'insuffisance de recettes, contraignant ainsi la[defenderesse] à rechercher une autre methode de calcul ;

o la reference au droit `cable' est nettement en faveur desradiodiffuseurs, des lors qu'il est etabli que ces droits secondaires sontcinq à six fois inferieurs aux droits primaires ;

o la comparaison avec les chaines publiques est egalement en faveur desradiodiffuseurs commerciaux puisque les premieres paient,proportionnellement, plus de droits que les seconds ;

o la reference au nombre d'abonnes au cable plutot qu'au public effectifest la consequence directe de la prise en consideration du contrat«cable» qui reprend la notion de public potentiel ;

o une majoration des droits secondaires est tout à fait justifieepuisqu'ils ne visent que le droit de communication au public, alors queles droits primaires dus par les radiodiffuseurs contiennent les droits dediffusion proprement dits ainsi que les droits de fixation (cf. article35.B,2 du reglement general de la [defenderesse]) ;

o une majoration de 25 p.c. des droits `cables' pour calculer les droitsprimaires est tres raisonnable, des lors que ceux-ci sont en general cinqà six fois plus eleves que les droits secondaires.

La [defenderesse] expose en outre qu'elle n'a pas applique le taux de0,1960 euro pour la premiere annee au motif que les resultats financiersde [la demanderesse] demontraient qu'elle etait toujours en periode dedemarrage et qu'il etait dans son interet de n'arriver à ce taux que parpaliers.

Les differences de droits entre 2004 et 2005 s'expliquent donc parl'instauration de ce palier en faveur de [la demanderesse] (...). Elles nepeuvent des lors constituer l'indice d'une decision arbitraire.

Par ailleurs, [la demanderesse] ne peut se plaindre d'un traitementdiscriminatoire en sa qualite de nouvel entrant. Il est en effet etablique, pour une part de marche de pres du double de celle de [lademanderesse], la chaine SBS - qui s'est vu appliquer le meme taux minimumau debut de ses activites, mais qui realise depuis des recettessuffisantes pour justifier la perception de 2,8 p.c. de ses rentreespublicitaires - a paye, en 2005, 1.113.897 euros de droits à la[defenderesse], alors que, pour la meme periode, [la demanderesse] n'en apaye que 404.897,44 euros, soit bien moins que la moitie. Toutesproportions gardees, [la demanderesse] est donc mieux traitee que SBS.

(...) Certes, la comparaison avec les redevances demandees par les autressocietes de gestion des droits d'auteur de la Communaute europeenne peutfournir des indications valables en ce qui concerne l'abus eventuel de laposition dominante d'une societe nationale de gestion de droits d'auteur.Encore faut-il que la comparaison des niveaux des tarifs puisse etreeffectuee sur une base homogene, ce qui n'est pas le cas en l'espece.

En effet, il ressort des pieces deposees par [la demanderesse] que lessocietes citees par elle pratiquent des tarifs fort peu semblables. Ainsi,la S.A.C.E.M. ne pratique pas de prix minimum, mais applique une redevanceproportionnelle de 5 p.c., beaucoup plus elevee que la [defenderesse] quine demande que 2,8 p.c. Il en est de meme de la S.U.I.S.A., dont lestarifs varient de 1 p.c. à 9 p.c. en fonction d'un seuil de recettespublicitaires et de l'ampleur du temps d'antenne consacre à des oeuvresmusicales. Quant à la S.G.A.E. espagnole, il est impossible de calculerles prix minima puisqu'ils dependent de chaque centre emetteur, donneeinconnue.

Il n'est donc pas etabli que le tableau presente par [la demanderesse] àla page 6 de ses conclusions a ete dresse sur une base homogene et que,pour un programme semblable et un mode de diffusion identique, les autressocietes de gestion auraient demande des minima manifestement moins eleveset que, partant, les tarifs de la [defenderesse] seraient susceptiblesd'affecter le commerce entre les Etats membres, ce qui n'est, parailleurs, pas demontre ».

Griefs

En ses conclusions apres reouverture des debats, la demanderesse soutenait:

« Il peut egalement etre verifie si le niveau de la redevance appliqueeà la [demanderesse] est disproportionne par rapport aux redevancesimposees par la meme societe à d'autres categories de clients.

La [demanderesse] reviendra plus loin sur la comparaison à faire entreediteurs de services de radiodiffusion immediatement concurrents.

La comparaison avec les radios est, elle aussi, edifiante. Alors que toutle systeme de la [defenderesse] repose, aux dires de celle-ci, sur les`premisses de l'utilisation faite du repertoire et du succes genere parcette utilisation', les radios - qui, par hypothese, font, en principe, unusage plus intensif du repertoire protege d'oeuvres musicales que lestelevisions generalistes - paient en realite à titre de minima garantis,pour les radios ayant un public potentiel de plus de 25.000 habitants, unforfait A qui est fonction de l'horaire de diffusion par semaine (de206,19 euros à 1.443,33 euros) et un forfait B de 0,0138 euro àmultiplier par le `public potentiel' et donc un tarif unitaire treslargement inferieur à celui qui est applique par la [defenderesse] alorsque le taux proportionnel de base est le meme :

+--------------------------------------------------------+
| Minima garantis radio 2008 | 64.145, 22 | euros ^2 |
|----------------------------+------------+--------------|
| Minima garantis tele 2008 | | |
| | 306.475, 8 | euros (htva) |
| (AB3) | | |
| | 294.659,1 | euros (htva) |
| (AB4) | | |
+--------------------------------------------------------+

^2 L'hypothese de travail est la suivante : Dans la mesure ou AB3 et AB4sont diffusees en region bruxelloise et en region wallonne, on peutconsiderer qu'elles ont un public potentiel de 4.543.615 habitants.Forfait A : 1.443, 33 euros pour 145-168 heures de diffusion par semaine +
Forfait B : 0,0138euro x 4.543.615 habitants, soit 62.701, 89 euros = montant total duminimum garanti pour 2008 de 64.145, 22 euros ».

Par aucun de ses motifs, le second arret attaque ne repond à ce moyen,regulierement souleve par la demanderesse, selon lequel les stations deradio beneficient d'une imposition par la defenderesse de minima garantis,nettement inferieure à celle qui est imposee à la demanderesse, alorsque, par hypothese, celles-ci font un usage plus intensif du repertoire dela defenderesse que les televisions generalistes, et que la defenderessefonde son systeme sur l'utilisation de son repertoire et le succes qui enresulte (violation de l'article 149 de la Constitution).

III. La decision de la Cour

Sur le premier moyen :

Quant à la premiere branche :

Il ressort des pieces auxquelles la Cour peut avoir egard que lademanderesse n'a pas demande à la cour d'appel de constater que ladefenderesse a meconnu ses obligations contractuelles en executant demauvaise foi la convention du 1er aout 2005, mais qu'elle s'est bornee àfaire observer, à l'appui de son action en cessation pour abus deposition dominante dirigee contre la defenderesse, qu' « outre les reglesde droit de la concurrence, le principe de l'execution de bonne foi desconventions impose [à celle-ci une] obligation de transparence, dans lamesure ou la validite de l'autorisation generale accordee en 2005 estdependante du respect, par cette derniere, du principe denon-discrimination ».

Le moyen qui, en cette branche, est pris de la violation d'une dispositionlegale qui n'est ni d'ordre public ni imperative, qui n'a pas eteappliquee par le juge du fond et dont celui-ci n'etait pas tenu de faireapplication, est nouveau et, partant, irrecevable.

Quant à la seconde branche :

Par les motifs reproduits au moyen, l'arret attaque du 4 mars 2009 repondaux conclusions de la demanderesse qui soutenait que l'absence detransparence reprochee à la defenderesse constituait des « indicesgraves, precis et concordants de l'application de conditions inequitableset discriminatoires par la defenderesse ayant pour incidence de fausser lerapport de concurrence existant entre la demanderesse et les autresediteurs de radiodiffusion televisuelle generaliste ».

Ni cet arret ni le second arret attaque n'etaient tenus de repondre plusamplement à l'argument de la demanderesse selon lequel le principe del'execution de bonne foi des conventions imposait une meme obligation detransparence à la defenderesse, qui ne constituait pas un moyen distinct.

Le moyen, en cette branche, ne peut etre accueilli.

Sur le deuxieme moyen :

L'arret attaque du 4 mars 2009 analyse de fac,on detaillee, en ses points13 à 21, le respect par la defenderesse de son obligation de transparencetout au long de ses relations avec la demanderesse.

Il considere plus particulierement, en ce qui concerne la periodeanterieure au 15 juillet 2005, que « dans le cadre des negociationsentamees pour les annees 2004 et suivantes, la [defenderesse] s'est diteprete à conclure un nouvel accord si les montants forfaitaires etaientportes à 250.000 euros pour les annees 2004 et 2005 (...). La[defenderesse] n'explique pas sur quelles bases tous ces montantsforfaitaires etaient calcules ni les raisons pour lesquelles elle adecide, en definitive, de modifier la methode de calcul pour les annees2004 et suivantes ».

Il ordonne des lors la reouverture des debats pour permettre à ladefenderesse de donner toutes precisions utiles afin de prouver que lesminima garantis imposes pour les annees 2004 à 2008 correspondent à lavaleur economique de la prestation fournie.

Le second arret attaque considere que le mode de calcul de la defenderessepour la periode anterieure à 2005 « peut etre considere comme etabli surdes bases objectives », que « les differences de droits entre 2004 et2005 s'expliquent (...) par l'instauration [d'un] palier en faveur de [lademanderesse] » et que la demanderesse « ne peut se plaindre d'untraitement discriminatoire en sa qualite de nouvel entrant ».

Il conclut que « des lors qu'il a ete reconnu que les tarifs minima de[la defenderesse] avaient ete calcules sur une base objective, son refusd'accorder une autorisation de diffusion si ce tarif n'etait pas acceptene peut etre considere comme depourvu de justification » et que « c'estdonc à tort que [la demanderesse] soutient que [la defenderesse] luirefuserait l'acces au marche de la radiotelevision ».

La cour d'appel a ainsi repondu aux conclusions de la demanderesse quifaisait valoir que c'etait la defenderesse qui, par son refus decontracter avec la demanderesse à des conditions equitables ettransparentes, avait engendre l'absence d'autorisation de communiquer aupublic les oeuvres du repertoire de la defenderesse pour la periodeprecedant le jugement entrepris du 15 juillet 2005.

Le moyen manque en fait.

Sur le troisieme moyen :

Quant à la premiere branche :

Une action en cessation fondee sur l'article 87, S: 1er, de la loi du 30juin 1994 relative au droit d'auteur et aux droits voisins peut etreintroduite contre celui qui commet une faute contractuelle, si cemanquement constitue en soi une atteinte au droit d'auteur ou aux droitsvoisins.

Le moyen qui, en cette branche, repose tout entier sur la considerationqu'une action en cessation fondee sur cet article n'est jamais recevablelorsqu'une convention concernant les droits d'auteur lie leur titulaire etla personne accusee de violer ces droits, manque en droit.

Quant à la deuxieme branche :

Celui qui meconnait les limites de l'autorisation d'exploitation delivreepar le titulaire des droits d'auteur ou des droits voisins commet un actede contrefac,on, independamment de toute faute contractuelle.

Le juge de la cessation peut des lors constater l'existence d'une atteinteaux droits d'auteur ou aux droits voisins et ordonner sa cessation sil'exploitant ne s'acquitte pas des obligations imposees par le titulaireen echange de son consentement.

L'arret attaque du 4 mars 2009 constate que la demanderesse n'a pas payeles minima garantis par le contrat du 1er aout 2005. Il considere que lademanderesse diffusait sans autorisation les oeuvres du catalogue de ladefenderesse puisque le paiement de ces minima garantis constituait unedes conditions essentielles de son autorisation, à tout le moins à titreprovisoire.

Il ne donne pas ainsi du contrat du 1er aout 2005 une interpretationinconciliable avec ses termes et, partant, ne viole pas la foi qui lui estdue.

Il a pu deduire de ces enonciations, sans violer aucune des dispositionslegales visees au moyen, que la demanderesse a porte atteinte aux droitsd'auteur de la defenderesse alors meme que le contrat liant les partiesn'avait pas ete resolu et que la defenderesse n'avait pas invoquel'exception d'inexecution.

Le moyen, en cette branche, ne peut etre accueilli.

Quant à la troisieme branche :

Le juge statuant en cessation en application de l'article 87, S: 1er, dela loi du 30 juin 1994 n'est pas competent pour ordonner la cessation demanquements contractuels non constitutifs d'une atteinte au droit d'auteurou aux droits voisins.

Il peut toutefois examiner le contenu et la portee d'un contrat pourapprecier le caractere autorise ou non de l'acte qualifie de contrefac,on.

Le moyen, qui, en cette branche, soutient le contraire, manque en droit.

Sur le quatrieme moyen :

Par les motifs reproduits au moyen, l'arret attaque du 18 juin 2009 repondaux conclusions de la demanderesse qui invoquait le « defaut dejustification d'un rapport raisonnable entre les redevances appliquees etles couts, en presence de disparites substantielles dans les prix minimaappliques par ailleurs ».

Il n'etait pas tenu de repondre plus amplement à l'argument de lademanderesse relatif à la comparaison qu'elle operait avec les tarifsapplicables aux radios, qui ne constituait pas un moyen distinct.

Le moyen ne peut etre accueilli.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;

Condamne la demanderesse aux depens.

Les depens taxes à la somme de cinq cent trente-trois euros deux centimesenvers la partie demanderesse et à la somme de trois cent quatorze eurosseptante-quatre centimes envers la partie defenderesse.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Paul Mathieu, les conseillers DidierBatsele, Albert Fettweis, Sylviane Velu et Martine Regout, et prononce enaudience publique du sept octobre deux mille dix par le president desection Paul Mathieu, en presence de l'avocat general Andre Henkes, avecl'assistance du greffier Patricia De Wadripont.

+-------------------------------------------+
| P. De Wadripont | M. Regout | S. Velu |
|-----------------+------------+------------|
| A. Fettweis | D. Batsele | P. Mathieu |
+-------------------------------------------+

7 OCTOBRE 2010 C.09.0391.F/1



Références :

Origine de la décision
Date de la décision : 07/10/2010
Date de l'import : 14/10/2011

Numérotation
Numéro d'arrêt : C.09.0391.F
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2010-10-07;c.09.0391.f ?
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