La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/04/2010 | BELGIQUE | N°C.09.0278.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 12 avril 2010, C.09.0278.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.09.0278.F

S. E.,

demandeur en cassation,

represente par Maitre Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Liege, rue de Chaudfontaine, 11,ou il est fait election de domicile,

contre

B. E.,

defenderesse en cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 6 mai 2008 parla cour d'appel de Liege.

Par ordonnance du 2 mars 2010, le premier president a renvoye la causedevant la troisieme c

hambre.

Le conseiller Martine Regout a fait rapport.

L'avocat general Jean-Marie Genicot a conclu.

II. Le moyen ...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.09.0278.F

S. E.,

demandeur en cassation,

represente par Maitre Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Liege, rue de Chaudfontaine, 11,ou il est fait election de domicile,

contre

B. E.,

defenderesse en cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 6 mai 2008 parla cour d'appel de Liege.

Par ordonnance du 2 mars 2010, le premier president a renvoye la causedevant la troisieme chambre.

Le conseiller Martine Regout a fait rapport.

L'avocat general Jean-Marie Genicot a conclu.

II. Le moyen de cassation

Le demandeur presente un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

- articles 2, 4, 42, S: 2, et 44 de la loi du 27 avril 2007 reformant ledivorce ;

- articles 2, 229, apres son remplacement par l'article 2 de la loi du 27avril 2007 precitee, et 231 du Code civil, ce dernier avant son abrogationpar l'article 4, 1DEG, de la meme loi.

Decisions et motifs critiques

L'arret decide que, l'action reconventionnelle du demandeur ayant eteformee apres le 1er septembre 2007, il y a lieu de lui appliquer la loi du27 avril 2007 reformant le divorce et que, celle-ci ayant supprime dudebat judiciaire la notion de faute, cette action reconventionnelle etl'appel de la defenderesse contre le jugement du 24 septembre 2007, quiavait fait droit à ladite action, en ce qu'il statue sur cette actionsont devenus sans objet, par tous ses motifs consideres ici commeintegralement reproduits et plus particulierement, sur l'application de laloi du 27 avril 2007 reformant le divorce, par les motifs que :

« (La defenderesse) fait valoir que l'appel ayant ete diligente apres le1er septembre 2007, date d'entree en vigueur de la loi du 27 avril 2007reformant le divorce, il y a lieu de faire application de cette nouvelleloi.

(Le demandeur), quant à lui, estime qu'il y a lieu d'appliquer lesanciennes causes de divorce et il soutient qu'à defaut de ce faire, il yaurait une violation du principe de l'egalite.

Il revient à la cour [d'appel] de trancher cette question de droittransitoire.

L'article 42, S: 2, de la loi du 27 avril 2007 reformant le divorcedispose que les anciens articles 229, 231 et 232 du Code civil restentapplicables aux procedures de divorce ou de separation de corpsintroduites avant l'entree en vigueur de la presente loi pour lesquellesun jugement definitif n'a pas ete prononce.

Il appartient, des lors, à la cour [d'appel] de chercher le sens destermes `jugement definitif' aux fins de determiner le droit applicable àla presente cause.

Issu d'un amendement du Senat, l'article 42, qui deroge à l'applicationimmediate de la loi nouvelle, est justifie de la maniere suivante :

`Le premier alinea (qui regle le sort des proces en cours) permet auxjuges de trancher les litiges en cours en vertu du droit ancien, sansdevoir rouvrir les debats si la loi entre en vigueur pendant le delibere.En revanche, en degre d'appel, on appliquera immediatement le nouveaudroit, meme si le jugement a ete rendu sur la base des anciens textes'(...).

Cette justification - toujours à la lecture des travaux preparatoires -semble toutefois etre en decalage par rapport à la portee reelle qu'ilconvient de donner à la disposition de l'article 42, S: 2.

En effet, le collaborateur du ministre, apres le retour du projet venantdu Senat, indique à la Chambre `que l'amendement apporte par le Senat àla disposition transitoire à l'examen a pour seul objectif d'eviter qu'audegre de juridiction devant lequel on se trouve, il faille recommencer lesdebats'.

Le collaborateur explique plus avant l'objectif vise en precisant :`Beaucoup de divorces etant en cours, on a voulu eviter un afflux dedemandes de reouverture des debats ou de remise de l'affaire au moment del'entree en vigueur de la loi à l'examen. C'est pourquoi il a ete decided'appliquer la loi ancienne jusqu'au prononce du jugement si les debatssont en cours. En revanche, en cas de procedure d'appel, si la requeted'appel est deposee avant le 1er septembre 2007, la cour d'appel devrajuger sur la base de la loi ancienne tandis que, si la requete d'appel estdeposee apres le 1er septembre 2007, la cour d'appel devra appliquer laloi nouvelle'(...).

Il s'ensuit que les anciennes causes de divorce demeurent applicables pourles procedures en cours, soit en premiere instance, soit en appel, pourlesquelles un jugement definitif au sens de l'article 19 du Codejudiciaire n'est pas encore intervenu au 1er septembre 2007 (la notion dejugement contenue dans l'article 19 recouvre tant le jugement proprementdit que l'arret [...]).

En somme, il n'apparait pas qu'il faille traiter differemment une causependante en premiere instance et celle qui est pendante en appel (...).

Des lors, il convient de faire application de la loi nouvelle pour lesappels formes apres le 1er septembre 2007, quod est in casu (...).

L'application immediate de la loi nouvelle, apres l'entree en vigueur decelle-ci, n'est, au demeurant, qu'une consequence directe des regles dedroit transitoire qui regissent, sur la base de criteres objectifs etabstraits, toutes modifications legislatives »,

et que

« En definitive et dans le cas d'espece, force est de constater que laloi nouvelle, en ce qui concerne le prononce du divorce, supprime du debatjudiciaire la notion de faute.

Le divorce ayant ete prononce entre les parties sur l'action principale etetant passe en force de chose jugee, force est de constater que celles-cisont dejà divorcees et que, par voie de consequence, l'appel devient sansobjet, de sorte que l'action reconventionnelle formee par (le demandeur)en termes de conclusions d'appel est egalement sans objet ».

Griefs

La loi du 27 avril 2007 reformant le divorce, qui abroge les causes dedivorce pour faute et notamment (article 4) le divorce pour injure graveprevu à l'article 231 du Code civil et leur substitue la cause unique dedivorce sans faute prevue à l'article 229 nouveau du Code civil, dispose,en son article 42,S: 2, alinea 1er, que l'ancien article 231 reste applicable aux proceduresen divorce introduites avant l'entree en vigueur de cette loi, soit,conformement à l'article 44 de la meme loi, aux causes introduites avantle 1er septembre 2007, pour lesquelles un jugement definitif n'a pas eteprononce. Cette disposition transitoire deroge expressement à la regle,consacree par l'article 2 du Code civil, de l'application immediate de laloi nouvelle aux demandes pendantes devant les tribunaux.

Au sens de cet article 42, S: 2, on entend par jugement definitif ladecision judiciaire qui statue irrevocablement sur la demande en divorce.Il s'en deduit que, quelle que soit la date à laquelle l'appel a eteforme, la loi ancienne reste applicable à la demande en divorceintroduite avant le1er septembre 2007, qu'il s'agisse d'une demande principale ou d'unedemande reconventionnelle.

L'article 231 du Code civil restait des lors applicable à l'actionreconventionnelle en divorce pour injure grave introduite par le demandeurpar des conclusions deposees à l'audience du 18 juin 2007, soit avantl'entree en vigueur de la loi nouvelle, et l'article 229 nouveau du Codecivil, qui supprime du debat judiciaire la notion de faute, n'etait pasapplicable à cette action.

En refusant de statuer sur l'appel de la defenderesse dirige contre lejugement ayant accueilli, sur la base de l'article 231 du Code civil,l'action reconventionnelle du demandeur et, partant, sur le bien-fonde decette action reconventionnelle, l'arret viole toutes les dispositionslegales visees au moyen.

III. La decision de la Cour

En regle, conformement à l'article 2 du Code civil, une loi nouvelles'applique immediatement, non seulement aux situations qui naissent àpartir de son entree en vigueur, mais aussi aux effets futurs dessituations nees sous le regime de la loi ancienne qui se produisent ou seprolongent sous l'empire de la loi nouvelle, pour autant que cetteapplication ne porte pas atteinte à des droits dejà irrevocablementetablis.

En vertu de cette regle, une loi qui abroge une cause de divorce est, enl'absence d'une disposition derogatoire expresse, applicable des sonentree en vigueur à toute demande en divorce pendante devant les cours ettribunaux.

La loi du 27 avril 2007 reformant le divorce, qui abroge les causes dedivorce prevues aux articles 229, 231 et 232 du Code civil, dispose, enson article 42, S: 2, alinea 1er, que ces anciens articles restentapplicables aux procedures de divorce ou de separation de corpsintroduites avant l'entree en vigueur de cette loi pour lesquelles unjugement definitif n'a pas ete prononce.

Cette disposition transitoire, qui traduit l'intention du legislateur dederoger, s'agissant des procedures en cours, à l'application immediate dela loi du 27 avril 2007, entend par jugement definitif la decisionjudiciaire qui statue irrevocablement sur la demande en divorce ou enseparation de corps et par procedure en divorce toute la procedure endivorce et non la seule demande originaire.

Il s'ensuit que les anciens articles 229, 231 et 232 du Code civil restentapplicables, d'une part, à l'appel dirige contre un jugement prononc,antle divorce des parties sur la base de l'une de ces dispositions, quelleque soit la date à laquelle l'appel a ete forme, d'autre part, à lademande reconventionnelle qui se greffe sur une demande originaire endivorce introduite avant le1er septembre 2007, date d'entree en vigueur de la loi du 27 avril 2007.

L'arret constate que la defenderesse a lance citation en divorce le 4decembre 2006, que le premier juge a accueilli cette demande ainsi que lademande reconventionnelle en divorce formulee par le demandeur sur la basede l'article 231 ancien du Code civil et que la defenderesse a interjeteappel contre le jugement entrepris en ce qu'il a fait droit à la demandereconventionnelle du demandeur.

En decidant, pour conclure à l'absence d'objet de l'appel de ladefenderesse et de la demande reconventionnelle du demandeur, qu'ilconvient de leur appliquer les dispositions nouvelles du Code civilrelatives aux causes de divorce introduites par la loi du 27 avril 2007,l'arret viole l'article 42, S: 2, de cette loi.

Le moyen est fonde.

Par ces motifs,

La Cour

Casse l'arret attaque, sauf en tant qu'il rec,oit l'appel ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretpartiellement casse ;

Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le juge dufond ;

Renvoie la cause, ainsi limitee, devant la cour d'appel de Mons.

Ainsi juge par la Cour de cassation, troisieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president Christian Storck, les conseillers ChristineMatray, Sylviane Velu, Martine Regout et Mireille Delange, et prononce enaudience publique du douze avril deux mille dix par le president ChristianStorck, en presence de l'avocat general Jean-Marie Genicot, avecl'assistance du greffier Tatiana Fenaux.

+---------------------------------------+
| T. Fenaux | M. Delange | M. Regout |
|-----------+-------------+-------------|
| S. Velu | Chr. Matray | Chr. Storck |
+---------------------------------------+

12 AVRIL 2010 C.09.0278.F/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.09.0278.F
Date de la décision : 12/04/2010

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2010-04-12;c.09.0278.f ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award