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21/01/2010 | BELGIQUE | N°C.08.0482.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 21 janvier 2010, C.08.0482.N


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.08.0482.N

D.T. S.,

Me Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation,

contre

1. Q. G.,

2. M. T.

I. La procedure devant la Cour

II. Le pourvoi en cassation est dirige contre le jugement rendu le 23 mai2008 en dernier ressort par le juge de paix de Lokeren.

III. Le conseiller Eric Dirix a fait rapport.

IV. L'avocat general Guy Dubrulle a conclu.

V. II. Les faits

Les faits suivants ressortissent du jugement attaque.

1. Le 25 juillet 2007, la demanderesse a v

endu aux defendeurs unchien dont ils ont pris livraison chez elle le 13 septembre 2007.

2. Le 2 octobre 2007, le chien est mort.

I...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.08.0482.N

D.T. S.,

Me Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation,

contre

1. Q. G.,

2. M. T.

I. La procedure devant la Cour

II. Le pourvoi en cassation est dirige contre le jugement rendu le 23 mai2008 en dernier ressort par le juge de paix de Lokeren.

III. Le conseiller Eric Dirix a fait rapport.

IV. L'avocat general Guy Dubrulle a conclu.

V. II. Les faits

Les faits suivants ressortissent du jugement attaque.

1. Le 25 juillet 2007, la demanderesse a vendu aux defendeurs unchien dont ils ont pris livraison chez elle le 13 septembre 2007.

2. Le 2 octobre 2007, le chien est mort.

III. Le moyen de cassation

VI. La demanderesse presente un moyen libelle dans les termes suivants :

* * Dispositions legales violees

* * article 1649bis, S:S: 1er et 2, 2DEG, du Codecivil, tel qu'il a ete insere par l'article 3 dela loi du 1er septembre 2004 relative à laprotection des consommateurs en cas de vente debiens de consommation ;

* principe dispositif, qualifie egalement deprincipe general du droit relatif à l'autonomiedes parties au proces civil, consacre par lesarticles 807 et 1138, 2DEG, du Code judiciaire ;

* principe general du droit relatif au respect desdroits de la defense.

VII. * Decision et motifs critiques

* Le jugement attaque declare la demande principale desdefendeurs recevable et fondee dans la mesure ou lecontrat de vente du 25 juillet 2007 est declareresolu et ou la demanderesse est condamnee à payeraux defendeurs la somme de 994,84 euros, majoree d'unmontant de 100 euros de dedommagement moral, et desinterets judiciaires au taux d'interet legal àcompter de la citation.

Il fonde cette decision principalement sur les motifssuivants.

« Que (les defendeurs) considerent que, des ledepart, leur petit chien etait atteint d'un vicecache ayant cause finalement la mort de l'animal.

Que, dans ces conditions, ils citent (lademanderesse) en garantie, notamment en remboursementdes frais d'achat, des frais de medecin veterinaire,y compris l'autopsie et les frais administratifs àconcurrence de 994,84 euros, plus un dedommagementmoral à concurrence de 100 euros.

Qu'ils fondent leur demande sur l'article 1604,alinea 1er du Code civil qui dispose que le vendeurest tenu de delivrer à l'acheteur une chose conformeau contrat.

Que l'article 1649quater du Code civil ajoute, enoutre, que le vendeur repond vis-à-vis duconsommateur de tout defaut de conformite qui existelors de la delivrance du bien et qui apparait dans undelai de deux ans à compter de celle-ci.

Que l'article 1649quinquies, S: 2 et S: 3 du Codecivil evoque les dommages-interets dus comme suit :

- conformement à l'article 1649quinquies, S: 3 duCode civil, les dommages-interets peuvent etreobtenus sous forme de resolution du contrat si leconsommateur n'a droit ni à la reparation ni auremplacement du bien ;

- conformement à l'article 1649quinquies, S: 2 duCode civil, le vendeur est egalement tenu derembourser les frais faits par l'acquereur pour lamise des biens livres dans un etat conforme.

* Que la defense de (la demanderesse) est fondeesur trois elements.

* 1. Le caractere non-fonde du chef de justiceprivee

* (...) qu'elle soutient d'abord qu'elle n'a eteavertie que tardivement du probleme qui seposait.

* Que le medecin veterinaire ne l'a contactee quele jour precedant la mort du chiot.

* Qu'elle n'a pas la moindre idee de ce qui s'estpasse depuis la delivrance du chiot.

* Que partant, il n'y a jamais eu d'instructioncontradictoire.

* Que (les defendeurs) n'en disconviennent pasreellement.

* Que cela aggrave la charge de la preuve dans lechef (des defendeurs).

* Qu'il leur appartient, en effet, d'etablirincontestablement qu'au moment de l'acquisition,le chiot etait atteint d'un vice cache ayantfinalement provoque la mort.

* 2. Defaut de preuve de la presence d'un vicecache lors de la vente.

* (...) que (la demanderesse) soutient que (lesdefendeurs) ne parviennent pas à etablir qu'aumoment de la vente, ledit chiot etait atteintd'un vice cache, notamment de GSD.

* Que (la demanderesse) soutient :

* Que, lorsque le medecin veterinaire de lademanderesse a inocule les vaccins necessaires,le chiot etait en bonne sante, sans anomaliescliniques apparentes

* - le chiot etait en train de sautiller lorsqu'onest venu le chercher

* - elle a explique amplement les soins que leschihuahuas necessitent.

* Que (la demanderesse) estime que des races depetits chiens sont toujours plus sensibles àl'hypoglycemie.

* Que ces deficiences apparaissent souvent à lasuite de stress, d'efforts et apres de longsintervalles d'apport alimentaire.

* Que cela constituerait un probleme qui seproduit frequemment apres le transfert de laportee vers le nouveau foyer, auquel il fautaccorder une attention particuliere.

* Qu'elle conteste qu'il s'agirait d'une affectionhereditaire, mais plutot d'une faiblesse nonsoignee de la race.

* Que, toutefois, (les defendeurs) le contestentformellement et deposent à cet effet le rapportdu medecin veterinaire Boskema lequel soutientformellement :

* `GSD de type I est une maladie hereditaireconstituee par le dysfonctionnement d'une enzymede glycogenolyse et de gluconeogenose generantun manque chronique de glucose libre'.

* Que ce dernier explique dans un rapportcomplementaire :

* `En cas de GSD de type I, cette enzyme(glucose-6-fosfatase) ne fonctionne pas. Celaempeche le chien de constituer une reserve pourdegager le glucose quand il le faut. Celaimplique que le chien se trouve dans un etatd'hypoglycemie (manque de glucide). Le chien nepeut se servir du glucose assimile qu'enabsorbant de la nourriture. Tous les organes ettous les systemes necessitent de l'energie. Troppeu d'energie entrave, des lors, le bonfonctionnement. Bref, le corps entier fonctionnemoins bien. Finalement, certains organes ousystemes ne fonctionnent plus du tout et lechien meurt. Ce qui etait le cas du chien enquestion'.

* Que le rapport de l'autopsie contient lesconstatations suivantes :

* `L'animal presentait les modifications cliniqueset morphologiques typiques (muscles, reins,coeur pales et foie engraisse, ulceresd'estomac) des animaux souffrant de « glycogenstorage disease » GSD de type I, appeleegalement « Toy breed Hypoglycemie juvenile »typiques des races Toy. GSD entraine unemauvaise croissance, des attaqueshypoglycemiques, des convulsions epileptiques etune faiblesse generale.

* Pour le surplus, l'animal presentait des lesionssubaigues de colite et de typhlite, pouvantexpliquer les symptomes plus recents dediarrhee. Les periodes d'anorexie qui vont depair peuvent entrainer chez de jeunes animauxatteints de « Toy breed Hypoglycemie juvenile',des attaques hypoglycemiques aigues entrainantla mort »'.

Qu'il ressort incontestablement de ces rapports queledit animal etait atteint d'une affectionhereditaire, qui n'etait peut-etre pas detectable aumoment de la vente mais qui s'est manifestee, à vraidire, relativement vite.

Que cette affection constitue evidemment un vicecache donnant droit à une reparation à la lumierede la loi du 1er septembre 2004 relative à laprotection des consommateurs en cas de vente de biensde consommation.

3. Le caractere non-detectable de l'affectiondans le chef du vendeur.

(...) Que (la demanderesse) remarque enfin qu'on nepouvait probablement pas detecter la maladie aumoment de la vente.

Que cela est correct mais ne (fait) pas obstacle àla responsabilite du vendeur en l'espece.

Qu'en ce sens, la demande (des defendeurs) apparait,des lors, fondee ».

(...)

Griefs

* Dans un proces, le juge est tenu dese baser sur deux principes : leprincipe du droit relatif àl'autonomie des parties au procescivil, appele egalement principedispositif, et le principe du droitrelatif au respect des droits de ladefense.

* Le principe dispositif implique quel'option faite par une partieconcernant les faits sur lesquelselle fonde sa demande, lie le juge.Ce principe est consacre parl'article 1038, 2DEG (lire : 1138,2DEG) du Code judiciaire ainsi quepar l'article 807 du Codejudiciaire.

* Le respect des droits de la defenseest viole lorsqu'un juge fonde sadecision sur des elements noninvoques par les parties, sans leurpermettre d'exposer leurs moyens enla matiere.

* Conformement à l'article 1649bis,S: 1er, du Code civil, lesdispositions concernant la vente auxconsommateurs (livre III, titre VI,chapitre IV, section IV, du Codecivil) sont applicables aux ventesde biens de consommation par unvendeur à un consommateur.

* Aux termes de l'article 1649bis, S:2, 2DEG, du Code civil, il y a lieud'entendre par « vendeur » :« toute personne physique ou moralequi vend des biens de consommationdans le cadre de son activiteprofessionnelle ou commerciale ».

* En l'espece, le juge de paix declareresolue le contrat de vente du 25juillet 2007 et condamne lademanderesse à payer aux defendeursdes dommages-interets qui ont etefixes, majores des interetsjudiciaires au motif que l'affectiondont etait atteint l'animal vendupar la demanderesse aux defendeursselon les rapports transmis,constitue un vice cache sanctionnepar la loi du 1er septembre 2004relative à la protection desconsommateurs en cas de vente debiens de consommation.

* Il ressort toutefois de la citationintroductive d'instance et desconclusions deposees pour lesparties, que la demanderesse s'estdefinie comme une « eleveuseamateur » et que les defendeursn'ont pas conteste cette qualite dela demanderesse. Dans l'introductiondu jugement attaque, la demanderesseest, en outre, presentee comme etant« sans profession ».

* En declarant applicable la loi du1er septembre 2004 relative à laprotection des consommateurs en casde vente de biens de consommation aulitige dont il est saisi, alors queles defendeurs n'ont conteste, nidans la citation introductived'instance, ni dans leursconclusions, que l'elevage de chiensne fait pas partie de l'activiteprofessionnelle de la demanderesse,le juge de paix ignore des lors quele champ d'application de cette loise limite, à l'egard du vendeur, àun vendeur professionnel de biens deconsommation.

* Dans la mesure ou l'admission de lademande des defendeurs est ainsifondee sur une meconnaissance duchamp d'application ratione personaede la loi du 1er septembre 2004relative à la protection desconsommateurs en cas de vente debiens de consommation et, à tout lemoins, de la portee de la notionlegale de « vendeur » au sens decette loi, cette decision n'est, deslors, pas legalement justifiee(violation de l'article 1649bis,S:S: 1er et 2, 2DEG du Code civil).

* Dans la mesure ou le jugementattaque devrait etre interprete ence sens qu'en admettantl'applicabilite de la loi du 1erseptembre 2004 relative à laprotection des consommateurs en casde vente de biens de consommation,le juge de paix considere de maniereimplicite mais certaine que lademanderesse est une eleveuse dechiens professionnelle, il souleve,à tout le moins, un litige etrangerà l'ordre public dont il n'est pasfait etat dans les conclusions desparties, sans permettre, en outre,à la demanderesse de se defendre àcet egard et la decision relative àl'admission de la demande desdefendeurs n'est, des lors, ainsipas legalement justifiee (violationdu principe general du droit relatifà l'autonomie des parties au procescivil et du principe general dudroit relatif au respect des droitsde la defense).

* * La decision de la Cour

1. L'article 1649bis du Code civil,tel qu'il a ete insere par la loi du1er septembre 2004 relative à laprotection des consommateurs en casde vente de biens de consommation,dispose dans son premier paragrapheque les dispositions relatives auxventes à des consommateurs sontapplicables aux ventes de biens deconsommation par un vendeur à unconsommateur.

1. Le paragraphe 2 de cettedisposition definit lanotion de « vendeur »comme toute personnephysique ou morale qui venddes biens de consommationdans le cadre de sonactivite professionnelle oucommerciale.

Le vendeur au sens de la loi esttoute personne physique ou moraledeployant de maniere durable uneactivite economique, à l'exclusionde toute personne qui n'agit pas demaniere professionnelle.

2. Il ressort des piecesauxquelles la Cour peutavoir egard, que lademanderesse se definitcomme une eleveuse amateuret que cette descriptionn'est pas critiquee par lesdefendeurs.

3. Le juge de paix constate quele chien vendu etait atteintd'un vice cache.

Subsequemment, il condamne lademanderesse à payer desdommages-interets « à la lumierede la loi du 1er septembre 2004 »sans verifier si elle est un vendeurau sens de l'article 1649bis du Codecivil.

4. En statuant ainsi, le jugede paix viole l'article1649bis du Code civil.

Le moyen est fonde.

* Par ces motifs,

* * La Cour

* * Casse le jugement attaque ;

* Ordonne que mention du presentarret sera faite en marge dujugement casse ;

* Reserve les depens pour qu'ilsoit statue sur ceux-ci par lejuge du fond ;

* Renvoie la cause devant lajustice de paix du premiercanton de Saint-Nicolas.

Ainsi juge par la Cour de cassation,premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president IvanVerougstraete, les conseillers EricDirix, Albert Fettweis, BeatrijsDeconinck et Geert Jocque, etprononce en audience publique duvingt et un janvier deux mille dixpar le president Ivan Verougstraete,en presence de l'avocat general GuyDubrulle, avec l'assistance dugreffier Johan Pafenols.

Traduction etablie sous le controledu conseiller Christine Matray ettranscrite avec l'assistance dugreffier Marie-Jeanne Massart.

Le greffier, Le conseiller,

21 JANVIER 2010 C.08.0482.N/8


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.08.0482.N
Date de la décision : 21/01/2010

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2010-01-21;c.08.0482.n ?
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