Cour de cassation de Belgique
Arret
NDEG P.09.0486.N
1. R. J.
prevenu,
2. CONSTRIMMO, societe privee à responsabilite limitee,
partie intervenante,
Me Raf Verstraeten, avocat au barreau de Bruxelles,
demandeurs,
contre
INSPECTEUR URBANISTE REGIONAL,
demandeur en retablissement,
defendeur.
I. la procedure devant la Cour
II. Les pourvois sont diriges contre l'arret rendu le 25 fevrier 2009 parla cour d'appel d'Anvers, chambre correctionnelle.
III. Le demandeur ne presente aucun moyen.
IV. Dans un memoire annexe au present arret, la demanderesse presentetrois moyens.
V. Le conseiller Etienne Goethals a fait rapport.
VI. L'avocat general Marc Timperman a conclu.
VII. II. la decision de la Cour
* * Sur le premier moyen :
VIII. IX. Quant à la premiere branche :
X. 1. Le moyen, en cette branche, invoque la violation desarticles 6.1 de la Convention de sauvegarde des droits del'homme et des libertes fondamentales et 14.1 du Pacteinternational relatif aux droits civils et politiques :en se basant sur les elements qu'ils invoquent, les jugesd'appel ne pouvaient pas decider qu'un delai de plus de23 ans entre la premiere constatation et la decision,respectivement avec un ecart de plus de 18 ans entre lasignification de la demande de remise en etat et laditedecision, etait encore susceptible d'etre considere commeraisonnable ; le fait que la demande de remise en etatvisait un objectif legitime, que les auteurs de lademanderesse n'ont pas souhaite faire de declaration lorsde la signification precitee, qu'il a ete tente à deuxreprises d'obtenir une autorisation de regularisation, neconstitue pas des considerations de fait pertinentespermettant de conclure que le delai raisonnable n'est pasdepasse.
2. Il appartient au juge, à la lumiere des circonstances dela cause et eu egard à sa complexite, au comportement duprevenu et à celui des autorites judiciaires, de decideren fait si le delai raisonnable entre l'accusation et lejugement a ete depasse. La Cour se borne à verifier sile juge ne deduit pas des constatations qu'il opere desconsequences qu'elles ne pourraient justifier.
3. La motivation critiquee concerne des elements de fait quine sont pas etrangers aux comportements ou interventionsdes demandeurs et qui peuvent justifier un retard dansl'instruction de la cause penale et un report du prononcede la decision. La question de savoir si ces elements defait justifient effectivement une prolongation du delairaisonnable, ne concerne qu'une appreciation de fait pourlaquelle la Cour est sans competence.
Le moyen, en cette branche, ne peut etre accueilli.
Quant à la seconde branche :
4. Le moyen, en cette branche, invoque la violation desarticles 65 de la loi organique du 29 mars 1962 del'amenagement du territoire et de l'urbanisme, 68 du Decretde la Region flamande relatif à l'amenagement duterritoire, coordonne le 22 octobre 1996, 149 du Decret du18 mai 1999 de la Region flamande portant organisation del'amenagement du territoire : ayant decide à tort que ledelai raisonnable n'avait pas ete depasse, eu egard à cequi a ete expose par le moyen, en sa premiere branche,l'arret a omis, aussi à tort, de prendre en considerationce depassement du delai raisonnable quant à l'eventuelcaractere manifestement deraisonnable de la demande deremise en etat.
5. Le moyen, en cette branche, est totalement deduit du moyen,en sa premiere branche, invoque vainement, que les jugesd'appel ont decide à tort que le delai raisonnable n'a pasete depasse.
Le moyen, en cette branche, est irrecevable.
(...)
Sur l'ensemble du troisieme moyen :
8. Le moyen invoque la violation des articles 65 de la loi organiquedu 29 mars 1962 de l'amenagement du territoire et de l'urbanisme, 68du Decret de la Region flamande relatif à l'amenagement duterritoire, coordonne le 22 octobre 1996, 149 du Decret du 18 mai1999 de la Region flamande portant organisation de l'amenagement duterritoire, 6.1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'hommeet des libertes fondamentales et 14 du Pacte international relatifaux droits civils et politiques : l'arret attaque decide à tortqu'il n'appartient pas au juge penal de statuer sur l'opportunite dela mesure de reparation reclamee tendant à la demolition et de laremplacer par une condamnation au paiement d'une plus-value ; ceciest contraire au caractere intrinsequement penal de la demande dedemolition au sens de l'article 6.1 de la Convention de sauvegardedes droits de l'homme et des libertes fondamentales et de l'article14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,conferant au juge la possibilite d'apprecier cette mesure en tantqu'une sanction intrinsequement penale et de la reformereventuellement sur tous les points, tant en droit qu'en fait. (lemoyen, en la premiere branche) ; s'agissant d'une contestationrelative à l'usage de la propriete et à la restriction de lapropriete, qui concerne notamment le patrimoine du citoyen, cettedecision implique à tout le moins la violation du droit de cedernier à un controle de pleine juridiction par le juge (le moyen,en sa seconde branche).
9. Le moyen, en ces deux branches, part de l'hypothese que lacompetence de l'administration, lors de l'introduction de la demandede remise en etat, n'est pas legalement liee, que l'administrationdispose de differentes options quant à la mesure à imposer, que lejuge penal, en vertu de sa 'pleine juridiction', doit pouvoirmodifier, aussi au niveau de leur opportunite.
10. Depuis l'arret nDEG 14/500 rendu le 19 janvier 2005 par la Courconstitutionnelle, l'article 149, S: 1er, alinea 1er, du Decret du18 mai 1999 de la Region flamande portant organisation del'amenagement du territoire, dispose : « Outre la peine, letribunal peut ordonner de remettre le lieu en son etat initial ou decesser l'utilisation contraire, et/ou d'executer des travaux deconstruction ou d'adaptation et/ou de payer une amende egale à laplus-value acquise par le bien suite à l'infraction. Ceci se faitsur requete de l'inspecteur urbaniste, ou du College des bourgmestreet echevins de la commune sur le territoire de laquelle les travaux,operations ou modifications vises à l'article 146 ont ete executes.Lorsque ces infractions datent d'avant [...], un avis conformeprealable du Conseil superieur de la Politique de Reparation estrequis ».
L'article 149 du Decret du 18 mai 1999 confere à l'administrationla competence de mener une politique de reparation :l'administration decide de requerir ou de ne pas requerir une mesurede remise en etat ; si elle decide de requerir une mesure de remiseen etat, elle dispose de trois eventuelles mesures de remise enetat, toutefois dans les limites et les modalites prevues plusprecisement à l'article 149.
11. L'article 149, S: 1er, alinea 3, du Decret du 18 mai 1999dispose : « Pour les infractions dont le proprietaire peutdemontrer qu'elles ont ete commises avant le 1er mai 2000, le moyende la plus-value peut en principe toujours etre utilise, sauf dansun des cas suivants : lorsque l'infraction constitue une violationgrave et irreparable des prescriptions urbanistiques essentielles enmatiere de destination en vertu du plan d'execution spatial ou duplan d'amenagement ».
Il resulte de cette disposition que face à une telle infraction,l'administration doit requerir la remise en etat du lieu dans sonetat initial et qu'elle ne dispose plus d'une autre option.
12. Les juges d'appel (arret, p. 11, consideration c.3) ont decideque « les travaux executes et les operations (...) [constituent]une infraction grave et irreparable aux prescriptions urbanistiquesessentielles du plan regional de sorte que la demande de remise enetat n'est pas disproportionnee par rapport au but poursuivi parl'amenagement du territoire, à savoir, la preservation d'unezone-tampon ».
Ce motif suffit pour legalement justifier la remise des lieux dansleur etat initial ordonnee par les juges d'appel.
Etant dirige en sa totalite contre un motif surabondant, le moyen nesaurait entrainer la cassation. Il est irrecevable.
Le controle d'office
Les formalites substantielles ou prescrites à peine de nullite ontete observees et la decision est conforme à la loi.
* Par ces motifs,
* * La Cour
* * Rejette les pourvois ;
* Condamne les demandeurs aux frais de leur pourvoi.
Ainsi juge par la Cour de cassation, deuxieme chambre, à Bruxelles,ou siegeaient le president de section Edward Forrier, president, lesconseillers Etienne Goethals, Paul Maffei, Koen Mestdagh et GeertJocque, et prononce en audience publique du cinq janvier deux milledix par le president de section Edward Forrier, en presence del'avocat general Marc Timperman, avec l'assistance du greffierdelegue Veronique Kosynsky.
Traduction etablie sous le controle du conseiller Gustave Steffenset transcrite avec l'assistance du greffier Tatiana Fenaux.
Le greffier, Le conseiller,
5 JANVIER 2010 P.09.0486.N/1