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24/11/2009 | BELGIQUE | N°P.09.1080.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 24 novembre 2009, P.09.1080.N


Cour de cassation de Belgique

Arret

* NDEG P.09.1080.N

I

LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL DE GAND,

* * contre

H. S.,

Me Betty Hoste, avocat au barreau de Courtrai et Me Luc Arnou, avocat aubarreau de Bruges,

II

1. ETAT BELGE, (Finances),

2. ETAT BELGE, (Finances),

Me Francis Werbrouck, avocat au barreau de Courtrai,

contre

H. S.,

Me Betty Hoste, avocat au barreau de Courtri et Me Luc Arnou, avocat aubarreau de Bruges.

I. la procedure devant la Cour

IV. Les pourvois sont diri

ges contre l'arret rendu le 2 juin 2009 par lacour d'appel de Gand, chambre des mises en accusation.

V. Dans une requete, le demandeur I prese...

Cour de cassation de Belgique

Arret

* NDEG P.09.1080.N

I

LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL DE GAND,

* * contre

H. S.,

Me Betty Hoste, avocat au barreau de Courtrai et Me Luc Arnou, avocat aubarreau de Bruges,

II

1. ETAT BELGE, (Finances),

2. ETAT BELGE, (Finances),

Me Francis Werbrouck, avocat au barreau de Courtrai,

contre

H. S.,

Me Betty Hoste, avocat au barreau de Courtri et Me Luc Arnou, avocat aubarreau de Bruges.

I. la procedure devant la Cour

IV. Les pourvois sont diriges contre l'arret rendu le 2 juin 2009 par lacour d'appel de Gand, chambre des mises en accusation.

V. Dans une requete, le demandeur I presente trois moyens.

VI. Les demandeurs II ne presentent pas de moyen.

VII. Le president de section Luc Huybrechts a fait rapport.

VIII. L'avocat general Marc Timperman a conclu.

II. la procedure anterieure

IX. Le defendeur a ete inculpe par le juge d'instruction de Courtrai duchef de :

X. - A. faux en ecritures et usage de faux,

XI. - B. abus de confiance,

XII. - C. blanchiment,

XIII. - D. contrefac,on de poinc,ons et usage.

Tous les faits auraient ete commis avant 2001, sauf l'usage de faux.

Par ordonnance du 13 fevrier 2009, la chambre du conseil du tribunal depremiere instance de Courtrai a conclu à l'extinction de l'actionpublique en raison du depassement du delai raisonnable.

Le procureur du Roi a interjete appel le 19 fevrier 2009 et les partiesciviles le 2 mars 2009.

L'arret attaque considere :

« Depassement du delai raisonnable.

Les juridictions d'instruction sont competentes pour examiner le delairaisonnable, delai qui commence à courir à compter du moment ou uninculpe est serieusement implique dans l'instruction de faits qui luisont mis à charge.

En l'espece, il resulte de l'instruction par la cour, chambre des misesen accusation, que l'inculpe savait, à tout le moins depuis les diversesperquisitions menees fin 1996, notamment chez lui et en sa presence,qu'une instruction à sa charge etait ouverte en ce qui concerne lesfaits mis à sa charge. Le delai raisonnable a commence à courir àpartir de ce moment vu que l'inculpe a alors ete amene à se defendre.

Des le debut du dossier fin 1996 jusqu'à fin 2000, l'instruction a suiviun cours normal et diligent. De 2001 à 2004, le dossier n'a nullementevolue, independamment de la volonte du juge d'instruction et du moindreagissement de l'inculpe. S'en est suivi incontestablement un retardanormal injustifiable qui, actuellement, en cette annee 2009, force àconstater le depassement manifeste du delai raisonnable. Ce depassementest de nature à violer irrevocablement les droits de defense del'inculpe.

La possibilite pour l'inculpe de debattre equitablement et loyalement deselements tant à charge qu'à decharge a ete totalement annihilee. Celaconcerne non seulement l'instruction relative aux faits qui font l'objetdes infractions à la loi penale belge mais a fortiori relatives auxfaits denonces. La duree anormalement longue pour fournir une traduction'convenable' voire intelligible de la denonciation et des pieces annexes- ce qui n'a ete effectue qu'à l'occasion de l'examen devant la chambredu conseil - a pour consequence que l'inculpe n'a pas (eu) la possibilited'assurer sa defense de maniere adequate quant aux preventions resultantde la denonciation, ni de se defendre en droit et de recueillir deselements à decharge (il s'agit en effet de faits connexes commis enSlovaquie au cours de la periode allant du 1er janvier 1993 au 31decembre 2000 inclus, le dernier fait remontant eventuellement à plus de9 ans dejà). Ce raisonnement peut egalement etre largement tenu pour lesfaits commis en Belgique.

Le depassement du delai raisonnable n'entraine pas l'extinction del'action publique, comme le decide l'ordonnance entreprise mais ne permetneanmoins pas sa poursuite.

Ce qui precede n'est ni refute ni attenue par l'argumentation contrairedeveloppee dans les requisitions ecrites du procureur general annexees àl'arret et qui ne sont pas de nature à inciter la cour, chambre desmises en accusation, à modifier la decision entreprise ».

L'arret attaque declare alors que l'action publique n'est plus recevable,ordonne qu'il y soit mis fin immediatement et se declare sans competenceau civil.

III. la decision de la Cour

XIV. Sur le moyen souleve d'office :

Dispositions legales violees

- l'article 21ter de la loi du 17 juillet 1878 contenant le Titrepreliminaire du Code de procedure penale ;

- les articles 128, alinea 1er, 129, alinea 1er, et 130 du Coded'instruction criminelle.

1. Conformement à l'article 130 du Code d'instruction criminelle, si ledelit est reconnu de nature à etre puni par des peinescorrectionnelles, à l'exception du cas prevu à l'article 129, alinea1er, la juridiction d'instruction appelee à regler la procedure doitrenvoyer l'inculpe devant le tribunal correctionnel.

Conformement à cette derniere disposition legale, la juridictiond'instruction qui considere que le fait mis à charge de l'inculpe neconstitue qu'une infraction ou un des delits vises à l'article 138 dumeme code, est tenue de renvoyer ce dernier au tribunal de police.

Conformement à l'article 128, alinea 1er, si la chambre du conseil estd'avis que le fait ne presente ni crime, ni delit, ni contravention,elle declare qu'il n'y a pas lieu à poursuivre.

Ces dispositions legales permettent à la juridiction d'instructiond'apprecier souverainement s'il existe des charges ou si ces chargesjustifient ou non le renvoi de l'inculpe à la juridiction de jugementou le non-lieu.

2. Aucune disposition conventionnelle ou legale ne prevoit que ledepassement du delai raisonnable prevu par l'article 6.1 de laConvention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertesfondamentales entraine l'irrecevabilite ou l'extinction de l'actionpublique. Le juge determine la reparation en droit adequate.

L'article 6.1 n'exclut pas que le droit interne determine lesconsequences possibles du depassement du delai raisonnable, sous reserveque ces consequences legales puissent effectivement impliquer lareparation en droit pour le prevenu. Il appartient au juge de determinerla consequence legalement prevue adequate à la cause.

3. Dans l'ordre juridique interne belge, l'article 21ter de la loi du 17juillet 1878 contenant le Titre preliminaire du Code de procedure penaleregle les eventuelles consequences du depassement du delai raisonnable.Ledit article de loi prevoit qu'en cas de depassement du delairaisonnable, le juge prononce la condamnation par simple declaration deculpabilite ou une peine inferieure à la peine minimale ; dans le casde la condamnation par simple declaration de culpabilite, la personneconcernee est condamnee aux frais et, s'il y a lieu, aux restitutions ;enfin, la confiscation speciale est egalement prononcee.

4. En principe, l'article 21ter de la loi du 17 avril 1878 implique quela juridiction de jugement, et non la juridiction d'instruction,determine celle des possibles consequences legales qu'il y a lieu dedonner au depassement du delai raisonnable. De plus, conformement àl'article 4 de la loi du 17 avril 1878, seule la juridiction de jugementest competente pour se prononcer sur l'action civile fondee sur laprevention.

5. La juridiction d'instruction qui se prononce sur le reglement de laprocedure peut egalement statuer sur le depassement du delairaisonnable.

Elle ne peut prononcer le non-lieu à l'egard de l'inculpe que dans lamesure ou elle decide que le depassement du delai raisonnable agravement et irremediablement porte atteinte à l'administration de lapreuve et aux droits de defense de l'inculpe, rendant impossible unproces penal equitable et l'appreciation de l'action civile.

Ainsi, conformement à l'article 13 de la Convention de sauvegarde desdroits de l'homme et des libertes fondamentales, un recours effectif estoctroye à l'inculpe devant la juridiction de jugement et,eventuellement, sous la reserve susmentionnee, la juridictiond'instruction pour faire constater la meconnaissance de son droit àetre juge dans un delai raisonnable.

6. Cependant, la juridiction d'instruction n'a pas la competence deprononcer l'extinction de l'action publique purement et simplement enraison du depassement du delai raisonnable, sans plus faire cas del'action civile.

Lorsque la juridiction d'instruction decide que le depassement du delairaisonnable a gravement et irremediablement porte atteinte àl'administration de la preuve et aux droits de defense de l'inculpe,rendant impossible un proces penal equitable et l'appreciation del'action civile, et prononce le non-lieu, elle doit preciser contrequels elements de preuve et pour quelles raisons l'inculpe ne pourraitplus assurer pleinement sa defense. Cette motivation doit permettre àla Cour de controler si la chambre des mises en accusation a pulegalement se prononcer ainsi qu'elle l'a fait.

7. L'arret attaque ne peut legalement se prononcer sur la possibilite dudefendeur à debattre loyalement des elements tant à charge qu'àdecharge, sans preciser les elements de preuve qu'il vise ni pourquoi ilaurait ete totalement impossible d'assurer la defense et, parconsequent, ne peut legalement declarer que l'action publique n'est plusrecevable, en ordonner la fin immediate et se declarer sans competenceau civil.

Sur les moyens du demandeur :

8. Il n'y a pas lieu de repondre aux moyens du demandeur qui nesauraient donner lieu à une cassation plus etendue, ni davantage deposer, à cet egard, une question à la Cour constitutionnelle.

Par ces motifs,

* * La Cour

* * Casse l'arret attaque sur le pourvoi du demandeur I ;

* Rejette le pourvoi des demandeurs II ;

* Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretcasse ;

* Laisse les frais à charge de l'Etat ;

* Renvoie la cause à la cour d'appel de Gand, chambre des mises enaccusation, autrement composee.

Ainsi juge par la Cour de cassation, deuxieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Edward Forrier, le president desection Luc Huybrechts et les conseillers Paul Maffei, Luc Vanhoogenbemt et Geert Jocque, et prononce en audience publique duvingt-quatre novembre deux mille neuf par le president de section EdwardForrier, en presence de l'avocat general Patrick Duinslaeger, avecl'assistance du greffier delegue Conny Van de Mergel.

Traduction etablie sous le controle du conseiller Benoit Dejemeppe ettranscrite avec l'assistance du greffier Tatiana Fenaux.

Le greffier, Le conseiller,

24 NOVEMBRE 2009 P.09.1080.N/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.09.1080.N
Date de la décision : 24/11/2009

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2009-11-24;p.09.1080.n ?
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