Cour de cassation de Belgique
Arret
NDEG F.07.0098.N
Etat belge, (Finances),
Me Antoine De Bruyn, avocat à la Cour de cassation,
contre
PRESSE LABO SERVICE, societe privee à responsabilite limitee,
Me Paul Wouters, avocat à la Cour de cassation.
I. La procedure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu sur renvoi le 3mai 2007 par la cour d'appel de Bruxelles, suite à l'arret de la Cour decassation du 8 novembre 2002.
Le president Ivan Verougstraete a fait rapport.
L'avocat general Dirk Thijs a conclu.
II. Les faits
Il ressort de l'arret attaque que :
1. Les 4 juin 1993, 14 decembre 1993 et 14 novembre 1994, des cassettesvideo ont ete importees à Anvers et dedouanees comme provenant de Macao.
2. Sur la base du rapport de mission et du document de travail du 21 juin1994 de la Commission europeenne, il est etabli que les cassettes videoimportees de Macao par la defenderesse ne satisfont pas aux criteresd'origine et que l'assemblage de ces cassettes a ete transfere de la Chineà Macao en vue d'eluder les droits antidumping sur les cassettes video« chinoises ».
3. Suivant le decompte des autorites de Macao, les cassettes videoremplissaient la condition pour ressortir au regime des preferencesgenerales. Selon elles, la valeur de tous les materiaux utilises quin'etaient pas originaires de Macao ne depassaient pas 40 pour cent du prix« depart usine » du produit.
4. Sur la base des renseignements fournis par l'exportateur, ces autoritesont certifie l'origine des produits.
5. Les autorites douanieres belges ont, de prime abord, accepte lesdeclarations et certificats d'origine et ce n'est que plus tard qu'ellesont emis une contrainte en vue du recouvrement des droits à l'importationet des droits antidumping.
III. Le moyen de cassation
Le demandeur presente un moyen libelle dans les termes suivants :
Dispositions legales violees
- article 220, specialement 220.2.b, du reglement (CE) nDEG 2913/92 duConseil du 12 octobre 1992 etablissant le code des douanes communautaire(ci-apres dit « code des douanes communautaire»), tant dans la versionanterieure que posterieure à la modification par le reglement (CE)nDEG 2700/2000 du Parlement europeen et du Conseil du 16 novembre 2000 ;
- article 5, paragraphe 2, du reglement (CE) nDEG 1697/79 du Conseil du 24juillet 1979 concernant le recouvrement « a posteriori » des droits àl'importation ou des droits à l'exportation qui n'ont pas ete exiges duredevable pour des marchandises declarees pour un regime douaniercomportant l'obligation de payer de tels droits (ci-apres dit « reglement(CE)nDEG 1697/79 ») ;
- article 94 du reglement (CE) nDEG 2454/93 de la Commission du 2 juillet1993, fixant certaines dispositions du reglement (CE) nDEG 2931/92 duConseil etablissant le code des douanes communautaire ;
- article 2 du reglement (CE) nDEG 2144/87 du Conseil du 13 juillet 1987relatif à la dette douaniere (ci-apres dit « reglement (CE) nDEG2144/87 ») ;
- articles 1, 2 et 3 du reglement (CE) nDEG 3091/91 du 21 octobre 1991instituant un droit antidumping definitif sur les importations de bandesvideo et cassettes originaires de la Republique populaire de Chine etportant perception definitive du droit provisoire (ci-apres dit« reglement (CE)nDEG 3091/91 ») ;
- articles 15ter, 15quater et 19 du reglement (CE) nDEG 1468/81 du Conseildu 19 mai 1981 relatif à l'assistance mutuelle entre les autoritesadministratives des Etats membres et à la collaboration entre celles-ciet la Commission en vue d'assurer la bonne application des reglementationsdouaniere ou agricole (ci-apres dit « reglement (CE) nDEG 1468/81 ») ;
- principe general du droit relatif au droit à la securite juridique etle principe de confiance.
Decisions et motifs critiques
L'arret attaque considere que les autorites douanieres de Macao ont commisune erreur active lors de la delivrance des certificats d'origine, creantainsi la base sur laquelle reposait la confiance legitime de ladefenderesse que les cassettes video importees etaient originaires deMacao.
« Sur la base d'un rapport de mission non date et d'un document detravail du 21 juin 1994 de la Commission europeenne, Direction generaleXXI, Douane et Impots indirects, Origine des marchandises, la cour d'appelconsidere qu'il est etabli que les cassettes video litigieuses importeesde Macao ne satisfont pas au critere d'origine et que l'assemblage de cescassettes video a ete transfere de la Chine à Macao en vue d'eluder lesdroits antidumping sur les cassettes video `chinoises'. Comme exposeci-dessus, l'arret du 10 janvier 2000 est definitif sur ce point.
Les rapport de mission et document de travail precites decrivent lesconstatations relatives aux inspections portant sur des pretentionsfrauduleuses au tarif preferentiel et des droits antidumping eludes dansdes affaires relatives à l'importation, dans la Communaute, de cassettesvideo dont il a ete pretendu qu'elles ne provenaient pas de la Chine et deMacao.
Le rapport de mission et le document de travail demontrent que lors de ladelivrance des formulaires A, les 22 avril 2003, 12 novembre 1993 et 3octobre 1994, les autorites de Macao avaient ou auraient du avoirconnaissance de ces investigations et du fait que les cassettes videoproduites et exportees par la Far East Magnetic Tape Factory Ltd. à Macaon'entraient eventuellement pas en ligne de compte pour le regime despreferences generales.
Les inspections de la Commission europeenne à Macao etaient, en effet,effectuees en presence de fonctionnaires dirigeants des autorites de Macao(...).
En outre, les autorites de Macao redigeaient des rapports circonstanciesen janvier 1992, probablement suite à l'inquietude grandissante de laCommunaute europeenne quant à la nature reelle de l'operation à Macao(...).
L'inspection de la Commission europeenne à Macao dans les locaux de laMacao Magnetic Ltd. et Far East Magnetic Tape Factory Ltd. a eu lieu le 25mars 1992 (...).
Apres analyse des resultats de ces inspections, il a ete porte à laconnaissance des autorites de Macao que les cassettes video produites parla Far East Magnetic Tape Factory Ltd. pour lesquelles le regime despreferences generales avait ete accorde par les autorites de Macao,n'avaient pas ete considerees comme entrant en ligne de compte pour cespreferences, des lors que la valeur de tous les materiaux utilises quin'etaient pas d'origine depassaient, suivant l'estimation, 40 pour cent duprix `depart usine' ou du produit (...).
Le 23 juillet 1993, les services de la Commission ont rec,u une reponsedes autorites de Macao tentant de justifier l'octroi du regime despreferences generales aux marchandises concernees au regard de la regledes 40 pour cent au moyen de calculs de couts relatifs à la production etaux composants des cassettes video importees (...).
Les autorites de Macao avaient donc bien connaissance des inspections etde leurs resultats. Elles ne pouvaient, des lors, pas simplement se fieraux renseignements fournis par l'exportateur, mais devaient, au contraire,verifier ces renseignements. C'est, des lors, une erreur active qu'ontcommise les autorites de Macao en delivrant, en ces circonstances, desformulaires A.
L'exportateur a fourni des renseignements en etant convaincu que lesautorites de Macao avaient de facto connaissance de tous les elementspertinents, les inspections ayant eu lieu dans ses locaux, en presence desfonctionnaires dirigeants de ces autorites. En ne s'opposant pas à cesrenseignements et en delivrant les certificats d'origine, les autorites deMacao ont elles-memes cree la base sur laquelle reposait la confiancelegitime de l'exportateur.
Le demandeur ne prouve pas la mauvaise foi de l'exportateur, dont iln'est, en effet, pas demontre qu'il avait connaissance des resultats desinspections effectuees dans ses locaux.
La defenderesse a droit au non recouvrement a posteriori des droits àl'importation et des droits antidumping litigieux ».
L'arret attaque considere que le demandeur a egalement commis une erreuractive lors de l'acceptation des certificats d'importation et descertificats d'origine, suscitant aussi la confiance legitime de ladefenderesse que les cassettes video importees entraient en ligne decompte pour le tarif douanier preferentiel reduit en raison de leurorigine de Macao :
« La cour d'appel d'Anvers n'examine pas l'erreur active du demandeurinvoquee par la defenderesse.
Une erreur active est egalement demontree dans le chef du demandeur.
Il ressort, en effet, du rapport d'enquete belge du 28 fevrier 1995 que ledemandeur a ete averti le 21 juin 1991 qu'il a ete constate, dans le cadrede l'inspection relative aux droits antidumping eludes lors del'importation dans le marche commun de cassettes video originaires deHongkong et de la Chine, pays pour lesquels des droits antidumping ont eteinstaures, que la firme Acme Cassette Manufacturing Ltd. de Hongkongproposait à ses clients europeens des cassettes video disposant decertificats Form A emis par Macao. Les Etats membres ont ete priesd'identifier les importations en provenance de Macao, d'effectuer descontroles a posteriori et de renseigner les services de la division DG XXI- anti-fraude de la Commission (...).
En outre, le rapport d'enquete mentionne que le 17 janvier 1992, il a etecommunique au demandeur qu'il s'agissait de cassettes video exportees deMacao par la Far East Magnetic Tape Factory Ltd. et facturees par AcmeCassette Manufacturing Ltd.
En acceptant, en pareilles circonstances, les declarations àl'importation et les certificats d'origine sans emettre de reserve sur lavalidite des certificats d'origine de Macao et sans exiger del'importateur de fournir une garantie en vue d'assurer le paiement de ladette douaniere, le demandeur a, lui aussi, commis une erreur active et asuscite une confiance legitime dans le chef de la defenderesse que lescassettes video importees etaient originaires de Macao et entraient, deslors, en ligne de compte pour le tarif douanier preferentiel reduit.
En revenant retroactivement, plusieurs mois apres l'importation, sur sonpoint de vue, le demandeur a viole le principe de confiance et de securitejuridique ».
L'appel interjete par le demandeur contre le jugement du 19 septembre 1997(dans l'arret il est question par erreur du 13 septembre 1997 ) dutribunal de premiere instance d'Anvers, annulant la contrainte du 3octobre 1995 et decidant que les droits à l'importation, droitsantidumping, interets de retard et frais reclames en vertu de cettecontrainte ne sont pas dus, a ensuite ete declare non fonde.
Griefs
1. Aux termes de l'article 5, paragraphe 2, du reglement (CE)nDEG 1697/79 precite, « les autorites competentes peuvent ne pas procederau recouvrement a posteriori du montant des droits à l'importation ou desdroits à l'exportation qui n'ont pas ete perc,us par suite d'une erreurdes autorites competentes elles-memes qui ne pouvaient raisonnablementetre decelee par le redevable, ce dernier ayant pour sa part agi de bonnefoi et observe toutes les dispositions prevues par la reglementation envigueur en ce qui concerne sa declaration en douane. »
Cette meme regle, applicable aux importations depuis le 1er janvier 1994,est reprise à l'article 220.2.b, du code des douanes communautaire quidispose qu' « hormis les cas (...) il n'est pas procede à une prise encompte a posteriori, lorsque : b) le montant des droits legalement dusn'avait pas ete pris en compte par suite d'une erreur des autoritesdouanieres elles-memes, qui ne pouvait raisonnablement etre decelee par leredevable, ce dernier ayant pour sa part agi de bonne foi et observetoutes les dispositions prevues par la reglementation en vigueur en ce quiconcerne la declaration en douane. »
Le reglement (CE) nDEG 2700/2000 du Parlement europeen et du Conseil du 16novembre 2000 a complete, à partir du 19 decembre 2000, l'article200.2.b, du code des douanes communautaire par les alineas suivants qui,en raison de leur caractere interpretatif, s'appliquent aussi à une dettedouaniere ayant pris naissance et dont le recouvrement a ete entreprisavant l'entree en vigueur dudit reglement nDEG 2700/2000 (C.J.C.E.,C-293/04, 9 mars 2006, « Beemsterboer », nDEG 23 et 48) :
« Lorsque le statut preferentiel d'une marchandise est etabli sur la based'un systeme de cooperation administrative impliquant les autorites d'unpays tiers, la delivrance d'un certificat par ces autorites, s'il serevele incorrect, constitue une erreur qui n'etait pas raisonnablementdecelable au sens du premier alinea (alinea 2) ; Toutefois, la delivranced'un certificat incorrect ne constitue pas une erreur lorsque lecertificat a ete etabli sur la base d'une presentation incorrecte desfaits par l'exportateur, sauf si, notamment, il est evident que lesautorites de delivrance du certificat savaient ou auraient du savoir queles marchandises ne remplissaient pas les conditions requises pourbeneficier du traitement preferentiel (alinea 3). »
C'est à l'importateur qui invoque une exception figurant au troisiemealinea, in fine, de l'article 220, paragraphe 2, sous b), du code desdouanes communautaire, qu'il incombe de supporter la charge de la preuvequ'il etait evident que les autorites de delivrance dudit certificatsavaient ou auraient du savoir que les marchandises ne remplissaient pasles conditions requises pour beneficier du traitement preferentiel(C.J.C.E., C-293/04, 9 mars 2006, « Beemsterboer », nDEG 45).
2. La confiance legitime du redevable en l'exactitude du certificatd'origine delivre n'est digne de la protection conferee par cettedisposition que si ce sont les autorites competentes elles-memes qui ontcree la base sur laquelle reposait cette confiance legitime du redevable.Ainsi, seules les erreurs imputables à un comportement actif desautorites competentes ouvrent droit au non-recouvrement a posteriori desdroits de douane (Tribunal de premiere instance, T-23-03, 6 fevrier 2007,« CAS », nDEG 304).
Le seul fait que les autorites competentes d'un territoire determine aientdeclare dans les certificats que les marchandises provenaient de leurterritoire ne suffit ainsi pas pour qu'il y ait une « erreur » desautorites competentes au sens precite (conclusions de l'avocat generalThijs avant Cass., 8 novembre 2002, nDEG 593, note 5).
En revanche, il est question d'une erreur due à un comportement actif desautorites competentes lorsque l'exportateur a declare que les marchandisessont originaires d'un territoire determine en se fiant au fait que lesautorites competentes de ce territoire connaissaient toutes les donneesfactuelles necessaires à l'application de la reglementation douaniere encause, et lorsque, nonobstant cette connaissance ces autorites n'ontsouleve aucune objection en ce qui concerne les enonciations figurant dansles declarations de l'exportateur, basant donc sur une interpretationerronee des regles d'origine leur certification de l'origine desmarchandises (C.J.C.E., C-153/94 etC-204/94, 14 mai 1996, « Faroe Seafood Co. Ltd. », nDEG 95).
Toute differente est la situation dans laquelle l'exportateur a fait desdeclarations inexactes aux autorites competentes - que ce soit de bonne oude mauvaise foi - auquel cas l'exportateur ne peut se fier au fait que lesautorites competentes du territoire connaissaient toutes les donneesfactuelles necessaires à l'application de la reglementation douaniere encause (conclusions de l'avocat general Thijs avant Cass., 8 novembre 2002,nDEG 593, note 5).
Dans cette hypothese, l'erreur incombe à l'exportateur ou à un tiers,mais pas aux autorites competentes qui ont ete induites en erreur par lapresentation inexacte des faits par l'exportateur, dont ils ne doivent pascontroler ou apprecier la validite. Dans ce contexte, l'importateur nepeut fonder une confiance legitime quant à la validite de certificatsd'origine du fait de leur certification et acceptation initiale par lesautorites douanieres d'un Etat membre (C.J.C.E., C-153-94 et C-204/94, 14mai 1996, « Faroe Seafood Co. Ltd. », nDEG 93 ; C.J.C.E., C-293/04, 9mars 2006, « Beemsterboer », nDEG 33) et devra ainsi supporter lui-memele risque emanant d'un document commercial qui se revele faux lors d'uncontrole ulterieur.
3.1 L'arret attaque constate que les autorites de Macao se sont« simplement » fondees sur les renseignements fournis par l'exportateur,alors qu'elles auraient du controler ces renseignements dans la mesure ou,via le rapport de mission et le document de travail, elles avaient ouauraient du avoir connaissance du fait que les cassettes video en questionn'entraient « eventuellement » pas en ligne de compte pour le regime despreferences generales.
L'arret attaque admet, des lors, necessairement que les renseignementsfournis par l'exportateur aux autorites de Macao etaient incorrects, desorte que les autorites competentes ne connaissaient pas, en fait, toutesles donnees factuelles necessaires à l'application de la reglementationdouaniere en cause.
Dans ces circonstances, la delivrance à la defenderesse des certificatsd'origine ne peut pas etre consideree comme une erreur active desautorites competentes de Macao et la defenderesse ne pouvait pasraisonnablement se fier au fait que les autorites competentes duterritoire connaissaient toutes les donnees factuelles necessaires àl'application de la reglementation en cause.
Comme la presentation inexacte des faits par l'exportateur etait, deslors, à la base de l'erreur et de la tromperie des autorites competentesde Macao, ces autorites douanieres n'ont pas cree elles-memes la base surlaquelle reposait la confiance legitime de la defenderesse.
3.2 La constatation de l'arret que les autorites douanieres de Macaoavaient ou auraient du avoir connaissance du fait que les cassettes videoen question n'entraient « eventuellement » pas en ligne de compte pourle systeme des preferences generales et avaient à ce sujet omis d'exercerun controle effectif ou de s'opposer aux declarations de l'exportateurpermet, il est vrai, de reprocher aux autorites douanieres de Macao uneattitude passive sur ce point, mais ne suffit pas pour retenir une erreurau sens des articles 5, paragraphe 2, du reglement (CE) nDEG 1697/79 et220.b, du code des douanes communautaire, imputable à un comportementactif des autorites competentes de Macao.
La delivrance d'un certificat d'origine inexact ne peut, en effet, pasetre qualifie d'erreur « active » lorsque le certificat est fonde surune representation inexacte des faits par l'exportateur et que lesautorites competentes ne savaient ou ne devaient pas savoir avec certitudeque les marchandises n'entraient pas en ligne de compte pour le traitementpreferentiel.
L'arret attaque suggere seulement que les autorites de Macao avaient ouauraient du avoir connaissance du fait que les cassettes video exporteesne satisfaisaient « eventuellement » pas aux criteres d'origine, sansque la defenderesse ait demontre, ou que l'arret attaque ait constatequ'elles savaient ou auraient du savoir que ces cassettes n'entraient« effectivement » pas en ligne de compte pour le tarif preferentiel.
Au contraire, l'arret attaque constate que suivant le propre decompte desautorites de Macao, les cassettes video satisfaisaient bien aux criteresd'origine, specialement à la regle que la valeur de tous les materiauxutilises qui n'etaient pas d'origine ne peut depasser 40 pour cent du prix`depart usine' du produit.
4. Il ne peut davantage etre legalement deduit du fait que le demandeuravait ete mis au courant de la pratique d'un exportateur determine dededouaner des cassettes video chinoises comme provenant de Macao sansqu'il soit satisfait aux criteres d'origine ni du fait qu'il avait etedemande au demandeur de controler les importations de Macao, d'effectuerdes controles a posteriori et de renseigner les services de la division DGXXI - anti-fraude de la Commission europeenne, qu'une erreur active avaitete commise par le demandeur en ayant accepte, en pareilles circonstances,les declarations à l'importation et les certificats d'origine sansemettre de reserve sur leur validite et sans avoir exige de l'importateurde fournir une garantie en vue d'assurer le paiement de la dettedouaniere.
Il decoule de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union europeenneque le redevable ne peut fonder une confiance legitime quant à lavalidite d'un certificat d'origine du fait de son acceptation initiale parles autorites douanieres d' un Etat membre, etant donne que le role de cesservices dans le cadre de la premiere acceptation des declarations ne faitnullement obstacle à l' exercice de controles ulterieurs (C.J.C.E.,C-153/94 et C-204/94, 14 mai 1996, « Faroe Seafood Co. Ltd. », nDEG 93 ;C.J.C.E., C-293/04, 9 mars 2006, « Beemsterboer », nDEG 32 et 33).
La finalite du controle a posteriori, prevu par l'article 94 du code desdouanes communautaire, est de verifier l'exactitude de l'origine indiqueedans le certificat delivre auparavant (C.J.C.E., C-293/04, 9 mars 2006,« Beemsterboer », nDEG 32 et 33), de sorte que le demandeur pouvait,apres l'acceptation initiale des certificats, revoir, avec effetretroactif, sa position, sans violer ainsi les principes de confiance etde securite juridique et qu'il n'etait nullement tenu d'emettre unereserve ou d'exiger la fourniture d'une garantie.
Il ressort, en outre, des pieces du dossier qu'à la suite d'un controle aposteriori commande par le demandeur, les autorites de Macao avaientconfirme l'authenticite des certificats d'origine delivres et que lescassettes video etaient reellement originaires de Macao.
Tout comme les autorites de Macao, le demandeur avait, des lors, eteinduit en erreur par les declarations inexactes de l'exportateur, alorsque la defenderesse n'a pas demontre, et l'arret attaque n'a pas constate,que le demandeur savait ou aurait manifestement du savoir que lesmarchandises n'entraient pas en ligne de compte pour le traitementpreferentiel.
Le simple fait que le demandeur avait ete mis au courant d'une enqueterelative à des droits antidumping eludes sur l'importation de cassettesvideo chinoises ayant des certificats d'origine de Macao, exportees par laFar East Magnetic Tape Factory, Ltd., n'implique pas en soi que ledemandeur savait ou aurait manifestement du savoir que les cassettes videoimportees n'entraient pas en ligne de compte pour le traitementpreferentiel, notamment en raison du controle effectue a posteriori aupresdes autorites douanieres de Macao qui avaient confirme l'origine.
En tout cas, le demandeur ne pouvait proceder au recouvrement a posteriorides droits dus qu'apres la decision definitive du 10 aout 1994 du ComiteOrigines de la Commission europeenne (...) decidant de ne pas attribuerl'origine de Macao aux cassettes video en question. C'est la Commissioneuropeenne qui determine le moment auquel elle communique aux Etatsmembres les resultats de l'enquete, lesquels ressortissent au secretprofessionnel (voir les articles 15ter, 15quater et 19 du reglement (CE)nDEG 1468/81), de sorte que le demandeur ne pouvait pas ou n'aurait pas dusavoir plus tot que les cassettes video n'entraient pas en ligne de comptepour le tarif douanier preferentiel reduit.
5. Il s'ensuit que l'arret attaque n'a pas pu legalement decider que tantles autorites douanieres de Macao que le demandeur ont commis une erreuractive au sens des articles 5, paragraphe 2, du reglement (CE) nDEG1697/79 et 220.2.b, du code des douanes communautaire, ni que les deuxautorites douanieres ont suscite dans le chef de la defenderesse unelegitime confiance que les cassettes video importees entraient en ligne decompte pour le tarif douanier preferentiel reduit, de sorte que ladefenderesse pouvait pretendre au non-recouvrement des droits àl'importation et des droits antidumping litigieux (violation des articles220, specialement 220.2.b, du code des douanes communautaire, 94 du codedes douanes communautaire, 5, paragraphe 2, du reglement (CE) nDEG1697/79, 1, 2 et 3 du reglement (CE) nDEG 3091/91, 2 du reglement (CE)nDEG 2144/87, 15ter, 15quater et 19 du reglement (CE)nDEG 1468/81, du principe general du droit relatif au droit à la securitejuridique et du principe de confiance).
IV. La decision de la Cour
1. L'article 5, paragraphe 2, du reglement 1697/79 du Conseil du 24juillet 1979 concernant le recouvrement « a posteriori » des droits àl'importation ou des droits à l'exportation qui n'ont pas ete exiges duredevable pour des marchandises declarees pour un regime douaniercomportant l'obligation de payer de tels droits dispose : « Les autoritescompetentes peuvent ne pas proceder au recouvrement a posteriori dumontant des droits à l'importation ou des droits à l'exportation quin'ont pas ete perc,us par suite d'une erreur des autorites competenteselles-memes qui ne pouvait raisonnablement etre decelee par le redevable,ce dernier ayant pour sa part agi de bonne foi et observe toutes lesdispositions prevues par la reglementation en vigueur en ce qui concernesa declaration en douane.
Cette meme regle, applicable à une partie des importations, est repriseà l'article 220.2, b), alinea 1er, du reglement 2913/92 etablissant lecode des douanes communautaire, ci-apres dit code des douanescommunautaire, qui dispose : « Hormis les cas (...) il n'est pas procedeà une prise en compte a posteriori, lorsque : (...) b) le montant desdroits legalement dus n'avait pas ete pris en compte par suite d'uneerreur des autorites douanieres elles-memes, qui ne pouvaitraisonnablement etre decelee par le redevable, ce dernier ayant pour sapart agi de bonne foi et observe toutes les dispositions prevues par lareglementation en vigueur en ce qui concerne la declaration en douane ».
2. La Cour de justice de l'Union europeenne rappelle dans l'arret rendu le18 octobre 2007, Agrover, C-173/06, que ces dispositions permettent auxautorites douanieres de ne pas proceder au recouvrement a posteriori dumontant des droits à l'importation ou des droits à l'exportation sitrois conditions cumulatives sont remplies :
- il faut que les droits n'aient pas ete perc,us à la suite d'une erreurdes autorites competentes ;
- il faut que l'erreur de ces autorites soit d'une nature telle qu'elle nepouvait raisonnablement etre decelee par un redevable de bonne foi,nonobstant son experience professionnelle et la diligence qu'il adeployee ;
- il faut que le redevable ait observe toutes les dispositions prevues parla reglementation en vigueur en ce qui concerne la declaration en douane.
3. En ce qui concerne la premiere condition, les autorites competentespeuvent etre les autorites de delivrance des certificats à l'exportation.
4. Suivant la Cour de justice de l'Union europeenne, dans son arret du 14mai 1996, Faroe Seafood, affaires jointes C-153/94 et C-204/94, il estquestion d'une « erreur des autorites competentes » au sens de l'article5, paragraphe 2, du reglement 1697/79, lorsque l'exportateur a declare queles marchandises sont originaires d'un territoire determine en se fiant àce que les autorites competentes de ce territoire connaissaient, en fait,toutes les donnees factuelles necessaires à l'application de lareglementation douaniere en cause et lorsque, nonobstant cetteconnaissance, ces autorites n'ont souleve aucune objection quant auxenonciations figurant dans les declarations de l'exportateur, basant doncsur une interpretation erronee des regles d'origine leur certification del'origine des marchandises.
5. Le reglement 2700/2000 du 16 novembre 2000, modifiant le reglement(CEE) nDEG 2913/92, a ajoute des alineas 2 et 3 à l'article 220, 2, b),du code des douanes communautaire, dans le but de definir notamment lanotion d' « erreur des autorites douanieres » pour le cas particulierdes regimes preferentiels.
L'article 220.2, b), alineas 2 et 3, du code des douanes communautaire,dispose que lorsque le statut preferentiel d'une marchandise est etablisur la base d'un systeme de cooperation administrative impliquant lesautorites d'un pays tiers, la delivrance d'un certificat par cesautorites, s'il se revele incorrect, constitue une erreur qui n'etait pasraisonnablement decelable au sens du premier alinea de l'article 220.2,b). Toutefois, la delivrance d'un certificat incorrect ne constitue pasune erreur lorsque le certificat a ete etabli sur la base d'unepresentation incorrecte des faits par l'exportateur, sauf si, notamment,il est evident que les autorites de delivrance du certificat savaient ouauraient du savoir que les marchandises ne remplissaient pas lesconditions requises pour beneficier du traitement preferentiel.
6. La Cour de justice de l'Union europeenne considere dans l'arret du 9mars 2006, Beemsterboer, C-293/04, que l'article 220.2, b), du code desdouanes communautaire, dans sa version decoulant du reglement 2700/2000,revet un caractere essentiellement interpretatif et s'applique à unedette douaniere ayant pris naissance et dont le recouvrement a posterioria ete entrepris avant l'entree en vigueur de ce reglement.
C'est à celui qui invoque une exception de l'article 220.2, b, alinea 3,in fine, du code des douanes communautaire, qu'il incombe, suivant l'arretBeemsterboer, de prouver qu'il est evident que les autorites de delivrancedu certificat savaient ou auraient du savoir que les marchandises neremplissaient pas les conditions requises pour beneficier du traitementpreferentiel. Suivant l'arret, en tout etat de cause, il est constant quela Communaute europeenne ne saurait supporter les consequencesprejudiciables des agissements incorrects des fournisseurs desimportateurs.
7. La Cour de justice de l'Union europeenne rappelle, dans l'arretAgrover, que l'article 220.2, b, du code des douanes communautaire, a pourobjectif de proteger la confiance legitime du redevable quant aubien-fonde de l'ensemble des elements intervenant dans la decision derecouvrer les droits de douane ou non. La confiance legitime du redevablen'est digne de la protection prevue à cet article que si ce sont lesautorites competentes « elles-memes » qui ont cree la base sur laquellereposait cette confiance. Ainsi, seules les erreurs imputables à uncomportement actif des autorites competentes donnent droit aunon-recouvrement a posteriori des droits de douane.
Cette condition ne peut pas etre consideree comme etant remplie et aucundroit au non-recouvrement a posteriori ne prend, des lors, naissance,lorsque les autorites competentes ont ete induites en erreur quant àl'origine des marchandises par des declarations incorrectes dont elles nedevaient pas controler ou apprecier la validite.
Le fait qu'un exportateur presente une declaration incorrecte auxautorites competentes n'exclut, il est vrai, pas necessairement que lesautorites ont commis une erreur active, mais cette condition ne peut pasetre consideree comme etant remplie et il ne nait, des lors, pas de droitau non-recouvrement, lorsque les autorites competentes ne savaient ni nedevaient manifestement savoir que les donnees fournies par l'exportateuretaient incorrectes.
8. L'arret attaque constate que l'exportateur a fourni des renseignementsen etant convaincu que les autorites de Macao avaient de factoconnaissance de tous les elements pertinents, les inspections ayant eulieu dans ses locaux en la presence des fonctionnaires dirigeants de cesautorites. Selon les juges d'appel, le demandeur ne prouve pas la mauvaisefoi de l'exportateur, dont il ne serait, en effet, pas demontre qu'ilavait connaissance des resultats des inspections effectuees dans seslocaux.
En outre, les juges d'appel ont constate qu'apres analyse des resultats deces inspections du 25 mars 1992, il a ete porte à la connaissance desautorites de Macao que les cassettes video produites par la Far EastMagnetic Tape Factory à Macao, pour lesquelles le regime des preferencesgenerales avait ete accorde par les autorites de Macao, n'etaient pasconsiderees comme entrant en ligne de compte pour ces preferences.
Les juges d'appel ont conclu que les autorites de Macao avaient bienconnaissance des inspections et de leurs resultats et qu'en ne s'opposantpas aux renseignements fournis par l'exportateur et en delivrant lescertificats d'origine, elles ont elles-memes cree la base sur laquellereposait la confiance legitime de l'exportateur.
9. Les juges d'appel ont pu legalement deduire de ces elements que lesautorites de Macao avaient commis une erreur active donnant droit aunon-recouvrement a posteriori des droits à l'importation et des droitsantidumping.
Dans cette mesure, le moyen ne peut etre accueilli.
10. Pour le surplus, le moyen reproche à l'arret d'avoir admis une erreuractive dans le chef du demandeur.
11. Dirige contre des considerations surabondantes de l'arret, le moyen nesaurait entrainer la cassation.
Dans cette mesure, le moyen est irrecevable.
Par ces motifs,
La Cour
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux depens.
Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president Ivan Verougstraete, le president de section LucHuybrechts, les conseillers Eric Stassijns, Alain Smetryns et GeertJocque, et prononce en audience publique du douze novembre deux mille neufpar le president Ivan Verougstraete, en presence de l'avocat general DirkThijs, avec l'assistance du greffier Johan Pafenols.
Traduction etablie sous le controle du president de section Paul Mathieuet transcrite avec l'assistance du greffier Marie-Jeanne Massart.
Le greffier, Le president de section,
12 NOVEMBRE 2009 F.07.0098.N/4