Cour de cassation de Belgique
Arret
NDEG C.08.0427.N
I.N.S., societe anonyme,
Me Pierre van Ommeslaghe, avocat à la Cour de cassation,
contre
B.M.Y., societe anonyme,
Me Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,
en la presence de
AXA BELGIUM, societe anonyme.
I. La procedure devant la Cour
Le pourvoi est dirige contre l'arret rendu le 20 septembre 2007 par lacour d'appel d'Anvers.
Le conseiller Eric Dirix a fait rapport.
L'avocat general Christian Vandewal a conclu.
II. Les moyens de cassation
La demanderesse presente deux moyens libelles dans les termes suivants :
Premier moyen
Dispositions legales violees
- articles 1319, 1320, 1322, 2044 et 2056 du Code civil ;
- principe general du droit relatif au respect des droits de la defense.
Decisions et motifs critiques
L'arret attaque decide que l'action de la demanderesse dirigee contre lespremiere et seconde defenderesses en execution d'une transaction conclueentre elles est non fondee, et ce sur la base de la motivation suivante :
« b) La transaction posterieure au 13 septembre 2001
La demanderesse soutient que la transaction, fut-elle intervenue le 24septembre 2001, doit sortir ses effets.
Il ressort des termes de la transaction concernee que les partiessouhaitaient eviter qu'une decision soit rendue en justice et,contrairement à ce qui a ete soutenu, cela etait possible en informant lacour [d'appel], au cours du delibere, de la transaction intervenue.
Le litige a ete vide par la decision du 13 septembre 2001 en sorte qu'àdefaut d'objet, aucune transaction ne pouvait plus etre conclue à proposde la fin du litige, convenue dans la convention litigieuse.
Il est probablement exact que les parties peuvent encore transiger apresun arret passe en force de chose jugee mais une telle transaction ne peutconcerner qu'une contestation ou un litige relatifs à l'execution de ladecision et non aux droits constates par l'arret.
L'article 2056 du Code civil dispose en outre qu'une transaction sur unproces dejà termine par un jugement passe en force de chose jugee, dontles parties ou l'une d'elles n'avaient point connaissance, est nulle.
L'arret rendu le 13 septembre 2001 constitue une decision passee en forcede chose jugee. La societe anonyme Axa n'etait pas partie au proces etsoutient, sans etre contredite sur ce point, n'avoir pas eu connaissancede cette decision lorsqu'elle a signe la convention le 24 septembre 2001.
Dans la mesure ou l'execution de la transaction est requise, la demandedemeure non fondee ».
Griefs
Premiere branche
L'article 2056, alinea 1er, du Code civil dispose que : «la transactionsur un proces termine par un jugement passe en force de chose jugee, dontles parties ou l'une d'elles n'avaient pas connaissance, est nulle ».
Il s'ensuit que les parties peuvent transiger au sens de l'article 2044 duCode civil sur un proces termine par un jugement ou un arret passe enforce de chose jugee à condition qu'elles en avaient connaissance.
En decidant qu'apres l'arret du 13 septembre 2001, les parties n'ont putransiger sur un proces tranche par cet arret, à defaut d'objet, l'arretattaque viole les articles 2044 et 2056 du Code civil.
(...)
Sixieme branche
L'application de l'article 2056 du Code civil suppose qu'une partie dansun proces termine par une decision passee en force de chose jugee transigesur ce proces sans avoir connaissance de cette decision.
L'arret attaque constate que la seconde defenderesse n'etait pas partie auproces qui a donne lieu à l'arret du 13 septembre 2001 (...).
Il ressort en outre de l'arret attaque (...) que celui-ci a tranchelui-meme le litige entre la seconde defenderesse et la demanderesse,litige qui a toutefois fait l'objet de la transaction.
En considerant neanmoins la transaction comme etant nulle en applicationde l'article 2056 du Code civil des lors que la seconde defenderesse asigne la transaction le 24 septembre 2001 sans avoir eu connaissance del'arret du 13 septembre 2001 (auquel elle n'etait pas partie et qui netermine pas le proces entre la demanderesse et la seconde defenderesse),l'arret attaque applique de maniere erronee l'article 2056 du Code civil(violation de l'article 2056 du Code civil).
(...)
III. La decision de la Cour
Sur le premier moyen :
Quant à la premiere branche :
1. Aux termes de l'article 2056, alinea 1er, du Code civil, la transactionsur un proces termine par un jugement passe en force de chose jugee, dontles parties ou l'une d'elles n'avaient point connaissance, est nulle.
2. L'arret constate que :
- le litige entre la demanderesse et la premiere defenderesse faisaitl'objet d'un proces devant la cour d'appel d'Anvers ;
- apres que la cour d'appel a pris la cause en delibere, la demanderesseet la premiere defenderesse ont conclu une transaction dans le courant dumois de juin 2001, qui ne serait « definitive » qu'au moment ou elleserait aussi signee par la seconde defenderesse ;
- la cour d'appel a statue le 13 septembre 2001 et cet arret est passe enforce de chose jugee ;
- la seconde defenderesse a signe la transaction le 24 septembre 2001 ;
- la seconde defenderesse n'avait pas connaissance de l'arret du 13septembre 2001 lors de cette signature.
3. En considerant sur la base de ces constatations que la transaction estnulle des lors qu'elle est intervenue alors que le proces etait terminepar une decision judiciaire passee en force de chose jugee dont une desparties n'avait pas connaissance, les juges d'appel ont legalementjustifie leur decision.
Le moyen, en cette branche, ne peut etre accueilli.
(...)
Quant à la sixieme branche :
10. L'article 2056, alinea 1er, du Code civil, aux termes duquel latransaction sur un proces termine par un jugement passe en force de chosejugee, dont les parties ou l'une d'elles n'avaient point connaissance, estnulle, ne requiert pas que cette partie ait aussi ete partie au procesayant donne lieu à la decision judiciaire.
Le moyen qui, en cette branche, est fonde sur une autre conceptionjuridique, manque en droit.
(...)
Par ces motifs,
La Cour
Rejette le pourvoi ;
Condamne la demanderesse aux depens.
Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president Ivan Verougstraete, le president de section ErnestWauters, les conseillers Eric Dirix, Eric Stassijns et Beatrijs Deconinck,et prononce en audience publique du quinze mai deux mille neuf par lepresident Ivan Verougstraete, en presence de l'avocat general ChristianVandewal, avec l'assistance du greffier Johan Pafenols.
Traduction etablie sous le controle du conseiller Christine Matray ettranscrite avec l'assistance du greffier Marie-Jeanne Massart.
Le greffier, Le conseiller,
15 MAI 2009 C.08.0427.N/1