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16/02/2009 | BELGIQUE | N°S.08.0071.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 16 février 2009, S.08.0071.N


Cour de cassation de Belgique

Arret

N S.08.0071.N

OFFICE NATIONAL DE SECURITE SOCIALE,

Me Antoine De Bruyn, avocat à la Cour de cassation,

* * contre

H. G.

I. La procedure devant la Cour

III. Le pourvoi en cassation est dirige contre les arrets rendus les16 novembre 2006 et 23 fevrier 2007 par la cour du travail d'Anvers.

IV. Le conseiller Alain Smetryns a fait rapport.

V. L'avocat general Ria Mortier a conclu.

II. Le moyen de cassation

* Le demandeur presente un moyen dans sa requete.

* Dispositions l

egales violees

- articles 1er, 2, S: 1er, et 6 de la loi du 3 avril 1995 portant desmesures visant à promouvoir l'emploi, l'a...

Cour de cassation de Belgique

Arret

N S.08.0071.N

OFFICE NATIONAL DE SECURITE SOCIALE,

Me Antoine De Bruyn, avocat à la Cour de cassation,

* * contre

H. G.

I. La procedure devant la Cour

III. Le pourvoi en cassation est dirige contre les arrets rendus les16 novembre 2006 et 23 fevrier 2007 par la cour du travail d'Anvers.

IV. Le conseiller Alain Smetryns a fait rapport.

V. L'avocat general Ria Mortier a conclu.

II. Le moyen de cassation

* Le demandeur presente un moyen dans sa requete.

* Dispositions legales violees

- articles 1er, 2, S: 1er, et 6 de la loi du 3 avril 1995 portant desmesures visant à promouvoir l'emploi, l'article 2, S: 1er, dans laversion applicable avant sa modification par la loi du 13 fevrier 1998,l'article 6, tel qu'il a ete modifie par la loi du 13 fevrier 1998 ;

- articles 1er, S: 1er, alinea 1er, 14, S: 1er, et 22 de la loi du 27 juin1969 revisant l'arrete-loi du 28 decembre 1944 concernant la securitesociale des travailleurs, l'article 22, dans la version applicable avantsa modification par la loi du 27 decembre 2004.

* * Decisions et motifs critiques

L'arret definitif rendu le 23 fevrier 2007 annule le jugement du premierjuge et deboute le demandeur de sa demande originaire par lesconsiderations reproduites dans l'arret interlocutoire.

Apres avoir constate que l'occupation de A. V., C. D. et C. M. impliquaitune croissance nette de l'effectif du personnel de la defenderesse,l'arret interlocutoire a decide que cette croissance nette ne resultaitpas d'un transfert de personnel au sens de l'article 6 de la loi du3 avril 1995 portant des mesures visant à promouvoir l'emploi :

« Aucun ecrit reglant formellement le transfert des trois membres dupersonnel entre E. S. et G. H n'est produit.

La preuve du consentement de ces deux personnes à un transfert depersonnel n'est pas davantage produite.

La question est de savoir s'il y a lieu de prouver ce consentement.

La cour (du travail) considere que cette preuve doit etre apportee. Letransfert au sens de la loi du 3 avril 1995 portant des mesures visant àpromouvoir l'emploi est un contrat entre deux personnes au moins : lecedant et le cessionnaire. La loi utilise, outre le terme de 'transfert',les termes de 'employeur cedant'. L'acte de 'transferer' est un actevolontaire. Le cedant doit vouloir transferer les membres de sonpersonnel.

Cette volonte de transferer le personnel doit toutefois rencontrer unevolonte de reprendre le personnel. Ainsi, le cessionnaire doit egalementvouloir reprendre le personnel. En consequence, le 'transfert' est uncontrat synallagmatique et l'accord de volonte entre le cedant et lecessionnaire doit etre etabli.

S'il avait entendu viser le simple passage du personnel du cedant aucessionnaire à l'occasion de la cession du fonds de commerce, lelegislateur aurait utilise le terme de 'reprise' et non de 'transfert'. Lareprise est un fait : à l'occasion de la cession du fonds de commerce lepersonnel est-il ou non passe au nouvel exploitant ? Le transfert impliqueau contraire l'existence d'une volonte de transferer le personnel tantdans le chef du cedant que du cessionnaire

L'article 6 de la loi du 3 avril 1995 portant des mesures visant àpromouvoir l'emploi n'est applicable que si l'existence d'une volontereciproque de transferer le personnel est etablie.

En effet, seule cette hypothese permet d'etablir que le volume global detravail n'a pas augmente.

En l'espece, G. H. aurait pu choisir d'exploiter son epicerie fine avecl'aide d'autres travailleurs « exterieurs », tels des chomeurs auxquelselle aurait propose un emploi.

Quel aurait ete le sort des membres du personnel de E. S. dans cettehypothese ? Si ces travailleurs avaient trouve un autre emploi, il n'yaurait eu aucun doute quant à la croissance nette dans le chef de G. H.et la sanction prevue à l'article 6 de la loi du 3 avril 1995 portant desmesures visant à promouvoir l'emploi ne lui aurait pas ete applicable.

Cette sanction doit-elle lui etre infligee parce qu'elle a decided'occuper à nouveau les membres du personnel de E. S. ? Sur le planjuridique, il n'existe en l'espece aucune distinction entre ces membres dupersonnel et le personnel « exterieur ».

L'article 6 precite n'est applicable que s'il est etabli que E. S. etG. H. ont convenu de transferer le personnel.

(Le demandeur) n'apporte pas la preuve d'un tel accord et celui-ci ne peutdavantage etre deduit, de fac,on indirecte mais certaine, des elements dudossier.

(Le demandeur) disposait cependant de plusieurs moyens de preuve. Ilaurait pu faire interroger les deux parties concernees par ses servicesd'inspection quant à la portee reelle de la reprise du fonds de commerce.Il aurait pu de meme faire interroger les membres du personnel.

Ainsi, le 'transfert' de personnel au sens de l'article 6 de la loi du3 avril 1995 portant des mesures visant à promouvoir l'emploi n'est pasetabli, de sorte que la sanction prevue à cet article n'est pasapplicable en l'espece à G. H. » (...).

* Griefs

1. Aux termes de l'article 2, S: 1er, du Titre I de la loi du 3 avril 1995portant des mesures visant à promouvoir l'emploi, les employeurs qui, enexecution d'un accord conclu conformement aux dispositions de laconvention collective de travail nDEG 60, conclue le 20 decembre 1994 ausein du Conseil national du travail, font etat d'une croissance nette dunombre de travailleurs et en outre d'un volume de travail au moinsequivalent et ce, par comparaison avec le trimestre correspondant de 1994,ont droit, pour chaque nouveau travailleur engage apres le 31 decembre1994, à une reduction par trimestre des cotisations patronales desecurite sociale.

2. Conformement à l'article 6 de la loi precitee, l'employeur est tenu derembourser tout ou partie des avantages perc,us indument, s'il estconstate que des accords conclus en application du titre precite ne sontpas respectes ou s'il est constate que la croissance nette du nombre detravailleurs est la consequence de l'absorption ou de la fusion de un ouplusieurs employeurs ou du transfert de personnel qui a donne lieu dans lechef de l'employeur cedant à une diminution du volume de travail encomparaison avec le trimestre precedant le transfert.

3. Dans le contexte de l'article 6 precite, le terme de 'transfert' visetant le transfert de personnel voulu reciproquement par le cedant et lecessionnaire que le transfert de personnel resultant du simple fait parlequel un employeur reprend unilateralement le personnel d'un autreemployeur, sans s'etre prealablement concerte ou avoir prealablementconclu un accord à cet egard avec lui.

Ainsi, il y a lieu d'entendre par le « transfert de personnel » vise àl'article 6 de la loi precitee, non seulement le transfert de personnelregle par contrat mais aussi le transfert de personnel pour lequel iln'existe aucun contrat (ecrit ou oral) entre le cedant et le cessionnaire.

Dans la mesure ou la condition d'un transfert regle par contrat n'est pasexpressement requise par la loi, toute reprise de fait ou transfert depersonnel entre employeurs doit etre considere comme un « transfert depersonnel » au sens de l'article 6 de la loi du 3 avril 1995 portant desmesures visant à promouvoir l'emploi.

Contrairement à ce que les juges d'appel ont decide, pour l'applicationde l'article 6 de la loi precitee, la « reprise » de personnel, d'unepart, et le « transfert de personnel », d'autre part, n'ont pas deportee distincte.

4. L'esprit du Titre I de la loi du 3 avril 1995, qui vise à promouvoirl'emploi, requiert egalement que la sanction prevue à l'article 6 de laloi soit appliquee lorsque la reprise de personnel qui resulte d'un simplefait n'a pas augmente le volume global de travail, comme c'est le cas enl'espece.

Des lors qu'il n'est pas conteste que la defenderesse a engage les membresdu personnel occupes anterieurement par E. S., il y a eu en l'espece un« transfert de personnel » au sens de l'article 6 de la loi precitee.

5. Il s'ensuit que l'arret attaque n'a pu decider legalement, sans violerl'article 6 de la loi du 3 avril 1995 portant des mesures visant àpromouvoir l'emploi, que le « transfert de personnel » n'est pas etablià defaut de preuve d'un contrat ou d'un accord de volonte entre les deuxemployeurs quant au transfert du personnel (violation des articles 1er, 2,S: 1er, 6 de la loi du 3 avril 1995 portant des mesures visant àpromouvoir l'emploi, 1er, S: 1er, alinea 1er, 14, S: 1er, et 22 de la loidu 27 juin 1969 revisant l'arrete-loi du 28 decembre 1944 concernant lasecurite sociale des travailleurs).

III. La decision de la Cour

1. Aux termes de l'article 2, S: 1er, alinea 1er, de la loi du 3 avril1995 portant des mesures visant à promouvoir l'emploi, les employeursqui, en execution d'un accord conclu conformement aux dispositions de laconvention collective de travail nDEG 60, conclue le 20 decembre 1994 ausein du Conseil national du travail, font etat d'une croissance nette dunombre de travailleurs et en outre d'un volume de travail au moinsequivalent et ce, par comparaison avec le trimestre correspondant de 1994,ont droit, pour chaque nouveau travailleur engage apres le 31 decembre1994, à une reduction des cotisations patronales de securite sociale de« 37.500 francs » par trimestre.

2. En vertu de l'article 6, alinea 1er, de la loi precitee, tel qu'il aete modifie par la loi du 13 fevrier 1998 entree en vigueur le 1er janvier1995, l'employeur est tenu de rembourser tout ou partie des avantagesperc,us indument s'il est constate que la croissance nette du nombre detravailleurs est la consequence du transfert de personnel qui a donne lieudans le chef de l'employeur cedant à une diminution du volume de travailen comparaison avec le trimestre precedant le transfert.

Il suit des travaux preparatoires que cette disposition tend notamment àeviter qu'un simple changement d'employeur non assorti d'une reellecreation d'emplois ne donne droit au benefice de la mesure visee àl'article 2, S: 1er, de la loi du 3 avril 1995 portant des mesures visantà promouvoir l'emploi.

Des lors, il y a egalement lieu d'entendre par « transfert depersonnel » au sens de cette disposition, toute reprise de fait depersonnel entre employeurs.

3. Les juges d'appel constatent que la defenderesse a repris le fonds decommerce de E. S. et qu'elle a garde trois travailleuses occupeesanterieurement par E. S.

Ils decident ensuite que le transfert de personnel au sens de l'article 6de la loi du 3 avril 1995 portant des mesures visant à promouvoirl'emploi n'est pas etabli, de sorte que la sanction prevue à cet articlen'est pas applicable à la defenderesse, à defaut de preuve d'un accordde volonte entre la defenderesse et E. S. pour transferer le personnel.

Ainsi, les juges d'appel violent la notion de « transfert de personnel »visee à l'article 6, alinea 1er, de la loi du 3 avril 1995 portant desmesures visant à promouvoir l'emploi.

Le moyen est fonde.

* Par ces motifs,

* * La Cour

* * Casse les arrets attaques, sauf en tant que l'arret du 16 novembre2006 declare l'appel recevable ;

* Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretpartiellement casse du 16 novembre 2006 et de l'arret casse du23 fevrier 2007 ;

* Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le juge dufond ;

* Renvoie la cause, ainsi limitee, devant la cour du travail deBruxelles.

Ainsi juge par la Cour de cassation, troisieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Robert Boes, president, le president desection Ernest Wauters, les conseillers Eric Stassijns, Alain Smetryns etKoen Mestdagh, et prononce en audience publique du seize fevrier deuxmille neuf par le president de section Robert Boes, en presence del'avocat general Ria Mortier, avec l'assistance du greffier JohanPafenols.

Traduction etablie sous le controle du conseiller Martine Regout ettranscrite avec l'assistance du greffier Jacqueline Pigeolet.

Le greffier, Le conseiller,

16 FEVRIER 2009 S.08.0071.N/4



Références :

Origine de la décision
Date de la décision : 16/02/2009
Date de l'import : 14/10/2011

Numérotation
Numéro d'arrêt : S.08.0071.N
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2009-02-16;s.08.0071.n ?
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