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18/12/2008 | BELGIQUE | N°C.07.0491.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 18 décembre 2008, C.07.0491.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.07.0491.F

1. D'IETEREN, societe anonyme dont le siege social est etabli à Ixelles,rue du Mail, 50,

2. D'IETEREN LEASE, societe anonyme dont le siege social est etabli àIxelles, rue du Mail, 50,

3. D'IETEREN SERVICES, societe anonyme dont le siege social est etabli àIxelles, rue du Mail, 50,

demanderesses en cassation,

representees par Maitre Michel Mahieu, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 523, ou il estfait election de domicile,

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Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.07.0491.F

1. D'IETEREN, societe anonyme dont le siege social est etabli à Ixelles,rue du Mail, 50,

2. D'IETEREN LEASE, societe anonyme dont le siege social est etabli àIxelles, rue du Mail, 50,

3. D'IETEREN SERVICES, societe anonyme dont le siege social est etabli àIxelles, rue du Mail, 50,

demanderesses en cassation,

representees par Maitre Michel Mahieu, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 523, ou il estfait election de domicile,

contre

1. LACROIX Mary, avocat, dont le cabinet est etabli à Huy, place JulesBoland, 5, agissant en qualite de curateur à la faillite de Garage AutoKelly, societe anonyme dont le siege social est situe à Huy, avenue duCondroz, 1,

defenderesse en cassation,

2. DELTA LLOYD BANK, societe anonyme dont le siege social est etabli àSaint-Josse-ten-Noode, avenue de l'Astronomie, 23,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre John Kirkpatrick, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, boulevard de l'Empereur, 3, ou ilest fait election de domicile.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 5 decembre 2006par la cour d'appel de Liege.

Le conseiller Martine Regout a fait rapport.

L'avocat general Thierry Werquin a conclu.

II. Le moyen de cassation

Les demanderesses presentent un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

- articles 9, 11, S: 1er, 12, 13, 15, S: 1er, 19, alinea 1er, 28, alineas1er et 2, et 44, alinea 2, de la loi du 17 juillet 1997 relative auconcordat judiciaire ;

- articles 20, 3DEG, et 20, 4DEG, de la loi hypothecaire du 16 decembre1851 ;

- articles 1er et 2 de la loi du 25 octobre 1919 sur la mise en gage dufonds de commerce, l'escompte et le gage de la facture ainsi quel'agreation et l'expertise des fournitures faites directement à laconsommation ;

- article 149 de la Constitution.

Decisions et motifs critiques

Apres avoir constate comme il suit les faits et les antecedents de lacause :

« Le litige concerne plusieurs creances relatives à des conventionsexecutees pendant la periode de sursis provisoire octroyee à la societeGarage Auto Kelly anterieurement à l'ouverture de sa faillite pardecision du 2 juin 1999. Le jugement entrepris a decide que ces creancesconstituent, en vertu de l'article 44, alinea 2, de la loi du 17 juillet1997 relative au concordat judiciaire, des dettes de la masse de lafaillite de la societe anonyme Garage Auto Kelly, à concurrencerespectivement de 118.835,02 euros, 27.876,06 euros et 14.759,61 euros àtitre provisionnel mais que `ces dettes de masse sont inopposables à (laseconde defenderesse) en sa qualite de creancier gagiste sur fonds decommerce'. Les (demanderesses) sollicitent la reformation du jugemententrepris aux fins d'etre payees par preference à tous les autrescreanciers, y compris les creanciers hypothecaires, gagistes ouprivilegies speciaux, (la troisieme demanderesse) demandant au prealableque le montant de sa creance soit fixe à 16.760,92 euros à titredefinitif »,

et apres avoir admis que les creances des trois demanderesses àconcurrence respectivement de 118.835,02 euros, 27.876,06 euros et14.759,61 euros constituent des dettes de la masse (à titre definitif etnon provisionnel en ce qui concerne la creance de la troisiemedemanderesse),

l'arret dit pour droit, par confirmation de la decision du premier juge,que « ces dettes de masse sont inopposables à (la seconde defenderesse)en sa qualite de creancier gagiste sur fonds de commerce » et condamnesolidairement les trois demanderesses aux depens d'appel.

L'arret fonde cette decision sur les motifs suivants :

« Selon les (demanderesses), il resulterait des travaux parlementaires dela loi du 17 juillet 1997 que le deuxieme alinea de l'article 44 doit etreinterprete en ce sens que les creances qu'il vise sont preferables àcelles de creanciers titulaires d'un privilege special. Elles se fondentpour cela sur le rejet de trois amendements qui visaient à supprimerl'alinea en question parce que, dans l'opinion de leurs promoteurs, letexte propose àura pour effet de creer un gigantesque passifsuperprivilegie, qui primera les droits du personnel, d'une part, et descreanciers hypothecaires, gagistes et privilegies speciaux, d'autre part'.Force est pourtant de constater que les travaux preparatoires ne sont pasexempts de contradictions à cet egard et qu'ils contiennent desaffirmations contraires à la these (des demanderesses) (...). Il est donchasardeux d'en tirer des conclusions peremptoires, de sorte qu'enl'absence de toute disposition conferant au texte definitif la portee queles promoteurs des amendements ont cru y discerner, il n'y a aucune raisonpour que le rejet desdits amendements signifie que le legislateur a vouluque l'article 44, alinea 2, fasse naitre au profit des creanciers qu'ilvise un passif privilegie primant tous les autres creanciers ou quel'existence d'un tel passif soit de l'essence meme du concordat. Ildecoule des termes de l'article 44, alinea 2, qui assimile les actesaccomplis dans des conditions determinees par le debiteur concordataire àdes actes du curateur et se refere à la notion, aux contours juridiquespreexistants, de dette de la masse faillie, que la loi a simplement etenduaux actes du debiteur concordataire les principes traditionnelsapplicables aux dettes nees d'initiatives prises par le curateur apres lafaillite, dont en regle les creanciers ne priment pas les titulaires desuretes reelles ou de privileges speciaux. C'est egalement en vain que les(demanderesses) font valoir que leurs creances seraient opposables augagiste sur fonds de commerce et primeraient sa creance pour avoir etecontractees de fac,on identique en vue de la conservation de l'ensemble dupatrimoine du debiteur concordataire, y compris celui qui est greve d'unprivilege special, des lors qu'elles n'etablissent pas en quoi (la secondedefenderesse) aurait tire profit de conventions dont les creanceslitigieuses sont issues, l'article 44, alinea 2, n'emportant aucunepresomption d'un tel profit (...). A supposer d'ailleurs que ce soit lecas, encore le privilege correspondant ne pourrait-il, dans l'etat actuelde la legislation, s'exercer que sur un bien meuble determine, ce quin'est pas le cas d'un fonds de commerce. C'est de la sorte à bon droitque les premiers juges ont decide que les creances litigieuses neprimaient pas celle de (la seconde defenderesse) ».

Griefs

Il resulte des constatations de l'arret et des pieces auxquelles la Courpeut avoir egard que les demanderesses, notamment la premiere, ontpoursuivi sous la forme de la livraison de vehicules en depot à lasociete Garage Auto Kelly, premiere defenderesse, alors en periodeconcordataire, avec l'accord du commissaire au sursis, l'execution deconventions de concession de vente et de location de vehicules anterieuresà la periode concordataire, que ces vehicules ont ete alienes par lapremiere defenderesse et que les creances des demanderesses, correspondantà la valeur des vehicules alienes, sont demeurees impayees.

Premiere branche

I. L'article 9, S: 1er, alinea 1er, de la loi du 17 juillet 1997 relativeau concordat judiciaire dispose : « Le concordat judiciaire peut etreaccorde au debiteur s'il ne peut temporairement acquitter ses dettes ou sila continuite de son entreprise est menacee par des difficultes pouvantconduire, à plus ou moins bref delai, à une cessation de paiement ».Selon l'article 9, S: 2, de cette loi, « le concordat ne peut etreaccorde que si la situation financiere de l'entreprise peut etre assainieet si son redressement economique semble possible. Les previsions derentabilite doivent demontrer la capacite de redressement financier del'entreprise ».

L'article 11, S: 1er, de la meme loi dispose : « Le debiteur quisollicite le concordat adresse une requete au tribunal de commerce. Iljoint à sa requete : 1DEG un expose des evenements sur lesquels sademande est fondee et dont il ressort qu'il est satisfait aux conditionsde l'article 9 ». L'article 12 de ladite loi dispose : « Le commerc,antne peut etre declare en faillite et, dans le cas d'une societe, celle-cine peut etre dissoute, tant que le tribunal n'a pas statue sur la demandeen concordat introduite ». Selon l'article 13, alinea 2, de la loi,« aucune realisation de biens meubles ou immeubles du debiteur ne peutintervenir suite à l'exercice d'une voie d'execution, jusqu'à ladecision visee à l'article 15 », lequel dispose en son paragraphepremier : « Si les conditions fixees à l'article 9 sont reunies, qu'iln'y a aucune mauvaise foi manifeste et qu'il est possible sur la based'une appreciation provisoire d'assurer totalement ou partiellement lacontinuite de l'entreprise, le tribunal accorde un sursis provisoire pourune periode d'observation qui ne peut etre superieure à six mois. Dans sadecision, le tribunal designe un ou plusieurs commissaires au sursis(...). Le tribunal peut decider que le debiteur ne peut accomplir desactes d'administration ou de disposition sans l'autorisation ducommissaire au sursis. Si le debiteur contrevient à cette prescription,ces operations ne sont pas opposables aux creanciers ». L'article 19,alinea 1er, de la loi dispose : « Le commissaire au sursis est designepar le tribunal et est charge d'assister le debiteur dans sa gestion, sousle controle du tribunal ».

L'article 28, alineas 1er et 2, de la loi dispose : « Le jugementaccordant le sursis provisoire ne met pas fin aux contrats conclus avantcette date. Toute clause d'un contrat, et notamment une clauseresolutoire, suivant laquelle la resolution du contrat a lieu du seul faitde la demande ou de l'octroi d'un concordat, est sans effet. Les clausespenales, visant à couvrir de fac,on forfaitaire les dommages potentielssubis à la suite du non-respect de l'engagement principal, restent sanseffet au cours de la periode d'observation ».

L'article 29, S: 1er, alinea 1er, dispose : « Durant la perioded'application du sursis provisoire, le debiteur elabore un plan deredressement ou de paiement (...). Le cas echeant, le commissaire ausursis designe par le tribunal assiste le debiteur dans l'elaboration duplan ». En vertu de l'article 33, le tribunal decidera si un sursisdefinitif peut etre autorise, sur lequel voteront les creanciers dudebiteur qui a sollicite le concordat, en vertu de l'article 34.

Il ressort de l'ensemble de ces dispositions que le legislateur aconsidere la poursuite de l'activite du debiteur comme un elementessentiel du concordat judiciaire dans le but d'operer le redressement desa situation financiere. La poursuite de l'activite et la continuation descontrats en cours, assortis de l'assistance, l'autorisation ou lacollaboration du commissaire au sursis, fait necessairement naitre dans lechef du debiteur concordataire de nouvelles dettes à l'egard descocontractants dont les prestations permettent cette poursuite del'activite.

II. L'article 20, 4DEG, de la loi hypothecaire du 16 decembre 1851 disposeque les creances privilegiees sur certains meubles sont les frais faitspour la conservation de la chose.

L'article 44 de la loi du 17 juillet 1997 dispose, en son alinea 1er :« Si le debiteur est declare en faillite au cours de la procedure enconcordat, les creanciers concernes par le sursis y sont comptes à raisonde la part qu'ils n'ont pas encore rec,ue et entrent, sans prejudice desdroits prevus à l'alinea suivant, en concours avec les nouveauxcreanciers ». Il dispose, en son alinea 2 : « Les actes accomplis par ledebiteur au cours de la procedure avec la collaboration, l'autorisation oul'assistance du commissaire au sursis sont consideres lors de la faillitecomme des actes du curateur, les dettes contractees pendant le concordatetant comprises comme dettes de la masse faillie ».

L'objectif poursuivi par le legislateur consiste à favoriser la poursuitede l'activite de l'entreprise qui a depose une requete en concordatjudiciaire. L'alinea 2 de la disposition precitee implique en consequenced'ecarter l'application de l'article 20, 4DEG, de la loi hypothecaire àl'egard des creances nees d'actes accomplis par l'entreprise au cours dela periode concordataire avec la collaboration, l'autorisation oul'assistance du commissaire au sursis. Il implique en revanche, à l'egardde ces creances, la qualification de creances de la masse, impliquant enoutre, en raison de la specificite de la procedure concordataire, unepriorite absolue. Cette priorite, consacree pendant la periodeconcordataire, porte en consequence sur la totalite du patrimoine dudebiteur et garantit à ces creances une priorite de paiement en cas deprecipitation du debiteur dans la faillite. Cette priorite estconstitutive d'un privilege specifique. Le caractere absolu et l'etenduede cette priorite resultent de ce que les creances considerees ont eteconsenties dans le but de favoriser le redressement economique du debiteurqui a sollicite un concordat judiciaire et de sauvegarder le patrimoine decelui-ci en faveur de l'ensemble des autres creanciers. La circonstanceque ce but n'est en definitive pas atteint, des lors que la faillite dudebiteur qui a sollicite le concordat est ulterieurement prononcee, n'apas pour effet de rendre cette priorite absolue, constitutive d'unprivilege specifique, en regle inopposable aux creanciers disposant d'unesurete ou d'un privilege special, ou de ne la leur rendre opposable quedans la seule mesure ou les dettes visees à l'article 44, alinea 2, de laloi du 17 juillet 1997 auraient ete contractees pour couvrir des frais deconservation d'un bien particulier du debiteur, en sorte que seull'article 20, 4DEG, de la loi hypothecaire du 16 decembre 1851 trouveraitapplication.

III. En decidant que les creances des demanderesses, qui beneficient duregime de l'article 44, alinea 2, de la loi du 17 juillet 1997, ne primentpas la creance de la seconde defenderesse, garantie par un gage sur lefonds de commerce de la premiere defenderesse, l'arret ne justifie paslegalement sa decision et viole l'article 44, alinea 2, de ladite loi.

En n'ayant pas egard au but du legislateur, qui est de favoriser lapoursuite de l'activite du debiteur qui sollicite le concordat judiciaire,et qui justifie l'existence d'une priorite absolue au profit descreanciers beneficiant du regime de l'article 44, alinea 2, precite et sonopposabilite à tous les autres creanciers, l'arret viole en outre lesarticles 9, S:S: 1er, alinea 1er, et 2, 11, S: 1er, 12, 15, S: 1er, 19,alinea 1er, 28, alineas 1er et 2, 29, S: 1er, alinea 1er, 33 et 34 de laloi du 17 juillet 1997 relative au concordat judiciaire.

En refusant d'admettre que la priorite instituee par l'article 44, alinea2, de ladite loi est un privilege general portant sur l'ensemble dupatrimoine du debiteur concordataire et en faisant ainsi implicitementapplication de l'article 20, 4DEG, de la loi hypothecaire du 16 decembre1851, en vertu duquel les frais faits pour la conservation de la chosesont des creances privilegiees sur certains meubles, l'arret fait uneapplication erronee de cette disposition et, partant, la viole egalement.

Seconde branche (subsidiaire)

I. L'article 1er de la loi du 25 octobre 1919 dispose que le fonds decommerce peut etre donne en gage dans les conditions determinees par cetteloi. L'article 2 de la meme loi dispose que le gage sur fonds de commercecomprend l'ensemble des valeurs qui composent ce fonds, et notamment laclientele et l'organisation commerciale. Il en resulte que lesconventions, telles des conventions de concession de vente, de location oude depot, qui constituent le fondement meme de la creation et du maintiende la clientele et de l'organisation commerciale de l'entrepriseconsideree, assurent la valorisation ou la conservation du fonds decommerce de cette entreprise, ce qui implique que le creancier titulaired'un gage sur ce fonds de commerce en tire necessairement un profit.L'article 20, 4DEG, de la loi hypothecaire du 16 decembre 1851 dispose queles creances privilegiees sur certains meubles sont les frais faits pourla conservation de la chose.

La poursuite, en cours de periode concordataire, par un concedant, del'execution des obligations nees d'une convention anterieure de concessionde vente ou de location, c'est-à-dire la poursuite de la livraison auconcessionnaire des objets vises par cette concession, notamment sous laforme de depots, selon un accord conclu avec le commissaire au sursis,constitue le fondement meme de la poursuite de l'activite duconcessionnaire, objet de son fonds de commerce.

Il en resulte que la creance nee de la disparition des biens ainsi livrespresente necessairement un lien avec l'administration de la masse,consideree au regard de la periode concordataire, au motif que cettelivraison est necessairement constitutive de la valorisation ou de laconservation du fonds de commerce alors en exploitation.

L'article 44, alinea 2, de la loi du 17 juillet 1997, pour autant que debesoin combine avec l'article 20, 4DEG, de la loi hypothecaire, confere enconsequence à la creance du concedant, qui a poursuivi l'execution de laconvention de concession avec l'accord du commissaire au sursis, unepriorite absolue, à tout le moins sur la valeur du fonds de commerce duconcessionnaire, à l'egard de la creance du creancier titulaire d'un gagesur ce fonds de commerce.

Les demanderesses avaient enonce dans leurs conclusions :

« Enfin, quand bien meme on considererait que pour beneficier duprivilege institue par l'article 44, alinea 2, de la loi du 17 juillet1997, la [premiere demanderesse] doit demontrer que la conclusion descontrats de depot a un lien avec l'administration de la masse et constitueun acte volontaire du commissaire au sursis, encore devrait-on convenirque cette preuve est rapportee en l'espece.

Tout d'abord, on observera que, si la [premiere demanderesse] avait refusede placer certains vehicules en depot chez son concessionnaire, celui-cise serait tres vite trouve dans l'impossibilite d'avoir une activitecommerciale normale. Plus aucun client n'aurait franchi la porte de lasociete anonyme Garage Auto Kelly et celle-ci eut ete, tres rapidement,acculee à la faillite. Le lien entre les contrats litigieux etl'administration de la masse n'est donc guere discutable.

Ensuite - et plus essentiellement -, on observera que tous les contrats dedepot ont ete contresignes en connaissance de cause par le commissaire ausursis. Dans un tel contexte, contester le caractere de dettes de la masseaux creances issues des `bons de depot' au motif que le commissaire ausursis ne se serait pas engage comme un curateur depasse l'entendement etaboutit à priver de toute efficacite l'article 44, alinea 2, de la loi du17 juillet 1997 ».

En se bornant à enoncer que les demanderesses n'etablissent pas en quoila seconde defenderesse aurait tire profit des conventions dont lescreances litigieuses sont issues, et en omettant de statuer sur le lienexistant entre les contrats litigieux et l'administration de l'entreprise,impliquant l'exercice de l'activite commerciale normale de l'entrepriseconcessionnaire et constituant la future masse de l'entrepriseulterieurement mise en faillite, l'arret laisse sans reponsel'argumentation circonstanciee exposee dans les conclusions desdemanderesses et viole en consequence l'article 149 de la Constitution.

A tout le moins, en ce qu'il serait interprete comme signifiant que lescirconstances invoquees par les demanderesses, etant le lien necessaireunissant la poursuite du placement des vehicules en depot chez la premieredefenderesse, concessionnaire, et la poursuite de l'activite commercialede celle-ci, objet de l'administration de l'entreprise et donc de lafuture masse, n'impliquent nullement l'existence d'un profit tire par laseconde defenderesse, titulaire d'un privilege deduit d'un gage sur lefonds de commerce considere, et que ces circonstances ne peuvent justifierl'application de la priorite consacree par l'article 44, alinea 2, de laloi du 17 juillet 1997, l'arret viole cette disposition, pour autant quede besoin combinee avec l'article 20, 4DEG, de la loi hypothecaire.

Il viole en outre les articles 1er et 2 de la loi du 25 octobre 1919 endeniant que le fonds de commerce, objet d'un gage, comprend l'ensemble desvaleurs qui le composent, et notamment sa clientele et son organisationcommerciale.

II. L'article 20, 3DEG, de la loi hypothecaire du 16 decembre 1851 disposeque la creance du creancier gagiste est privilegiee sur le gage dont ilest saisi. L'article 1er de la loi du 25 octobre 1919 dispose que le fondsde commerce peut etre donne en gage dans les conditions determinees parcette loi. L'article 2 de la meme loi dispose que le gage comprendl'ensemble des valeurs qui composent le fonds de commerce et notamment laclientele, l'enseigne, l'organisation commerciale, les marques, le droitau bail, le mobilier de magasin et l'outillage, le tout sauf stipulationcontraire, et qu'il peut comprendre les marchandises en stock àconcurrence de cinquante pour cent de leur valeur.

En decidant que la priorite, qualifiee de privilege specifique, invoqueepar les demanderesses sur la base de l'article 44, alinea 2, de la loi du17 juillet 1997, ne pourrait etre reconnue au motif que le privilegecorrespondant ne pourrait, dans l'etat actuel de la legislation, s'exercerque sur un bien meuble determine, et au demeurant sans indiquer la reglelegale ainsi visee, alors que les articles 1er et 2 de la loi du 25octobre 1919 consacrent l'existence d'un privilege sur le fonds decommerce constitue par l'ensemble des valeurs qui le composent, etnotamment sa clientele et son organisation commerciale, cet ensemble etantdistinct d'un bien meuble determine, l'arret viole egalement cesdispositions.

III. La decision de la Cour

Quant à la premiere branche :

Aux termes de l'article 44, alinea 2, de la loi du 17 juillet 1997relative au concordat judiciaire, les actes accomplis par le debiteur aucours de la procedure avec la collaboration, l'autorisation oul'assistance du commissaire au sursis sont consideres lors de la faillitecomme des actes du curateur, les dettes contractees pendant le concordatetant comprises comme dettes de la masse faillie.

Cette disposition a pour but d'encourager les relations commerciales avecle debiteur pendant la periode de sursis provisoire et de sauvegarderainsi la poursuite normale des activites de l'entreprise.

Elle n'a pas pour effet d'accorder aux creanciers ayant contracte avec ledebiteur concordataire pendant cette periode de sursis, avec lacollaboration, l'autorisation ou l'assistance du commissaire au sursis, unprivilege general sur l'ensemble du patrimoine du debiteur qui primeraittoutes les suretes et tous les privileges speciaux des autres creanciers.

Le moyen, qui soutient le contraire, manque en droit.

Quant à la seconde branche :

L'arret, qui ne conteste pas que les creances des demanderessesconstituent des dettes de la masse au sens de l'article 44, alinea 2, dela loi du 17 juillet 1997, n'etait pas tenu de repondre aux conclusionsdes demandeurs reproduites au moyen, qui tendaient à justifier que lesconditions d'application de cette disposition legale etaient reunies.

Pour les motifs enonces en reponse à la premiere branche du moyen, leconcedant, qui a poursuivi l'execution de la convention de concessionpendant le sursis provisoire avec l'accord du commissaire au sursis, nedispose pas sur la valeur du fonds de commerce du concessionnaire faillid'un droit de preference absolu qui primerait les droits du creanciergagiste sur le fonds de commerce.

Les creanciers de la masse faillie ne peuvent pretendre à des droits surles biens greves d'un privilege special, qui sont hors de la masse, ques'ils etablissent que leur creance reprend des frais exposes pour laconservation ou la realisation du bien greve.

Des frais qui n'ont pas ete faits pour la conservation de biens meublesdetermines et identifiables dans le patrimoine du debiteur ne sont pas desfrais exposes pour la conservation de la chose au sens de l'article 20,4DEG, de la loi hypothecaire.

L'arret, qui considere que les demanderesses « n'etablissent pas en quoi[la seconde defenderesse] aurait tire profit de conventions dont lescreances litigieuses sont issues, l'article 44, alinea 2, n'emportantaucune presomption d'un tel profit », et que, « à supposer d'ailleursque ce soit le cas, encore le privilege correspondant ne pourrait-il, dansl'etat actuel de la legislation, s'exercer que sur un bien meubledetermine, ce qui n'est pas le cas d'un fonds de commerce », justifielegalement sa decision que les creances des demanderesses ne priment pascelle de la seconde defenderesse.

Le moyen, en cette branche, ne peut etre accueilli.

Sur les depens :

La seconde defenderesse demande que, dans les depens auxquels lesdemanderesses, qui succombent en leur demande, seront condamnees, soitincluse l'indemnite de procedure prevue à l'article 1022 du Codejudiciaire.

La Cour qui, aux termes de l'article 147, alinea 2, de la Constitution, neconnait pas du fond des affaires, statue sur les demandes en cassation desdecisions rendues en dernier ressort qui lui ont ete deferees pourcontravention à la loi ou pour violation des formes, soit substantielles,soit prescrites à peine de nullite.

L'article 1111 du Code judiciaire regle de maniere complete et autonome lesort des depens de la demande en cassation en tenant compte de lacompetence limitee de la Cour et de l'objet special de cette demande, quiest distincte de la demande sur laquelle statue la decision attaquee.

Ces caracteres propres du recours en cassation excluent que soit inclusedans ces depens l'indemnite de procedure prevue à l'article 1022 du Codejudiciaire, qui est liee à la nature et à l'importance du litige quioppose les parties devant le juge du fond, et dont l'appreciation,dependant de criteres qui tiennent au fond de l'affaire, contraindrait laCour à un examen echappant à son pouvoir.

La demande n'est pas fondee.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;

Condamne les demanderesses aux depens ; dit n'y avoir lieu d'inclure dansceux-ci l'indemnite de procedure prevue à l'article 1022 du Codejudiciaire.

Les depens taxes à la somme de sept cent trente-six euros trois centimesenvers les parties demanderesses et à la somme de trois cent un eurosquatre-vingt-deux centimes envers la seconde partie defenderesse.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Claude Parmentier, les conseillersDidier Batsele, Daniel Plas, Sylviane Velu et Martine Regout, et prononceen audience publique du dix-huit decembre deux mille huit par le presidentde section Claude Parmentier, en presence de l'avocat general ThierryWerquin, avec l'assistance du greffier Marie-Jeanne Massart.

18 DECEMBRE 2008 C.07.0491.F/15


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.07.0491.F
Date de la décision : 18/12/2008

Analyses

JUGEMENTS ET ARRETS


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2008-12-18;c.07.0491.f ?
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