**401Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° C.06.0562.F
SCHLEIPER, société anonyme dont le siège social est établi à Etterbeek,rue de l'Etang, 63,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Philippe Gérard, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 523, où il est faitélection de domicile,
contre
SOCIETE BELGE DES AUTEURS, COMPOSITEURS ET EDITEURS, en abrégé SABAM,société civile à forme de société coopérative à responsabilité limitée,dont le siège social est établi à Bruxelles, rue d'Arlon, 75-77,
défenderesse en cassation,
représentée par Maître Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue des Quatre Bras, 6, où il estfait élection de domicile.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 4 février 2005par la cour d'appel de Bruxelles.
Par ordonnance du 6 juin 2008, le premier président a renvoyé la causedevant la troisième chambre.
Le conseiller Christine Matray a fait rapport.
L'avocat général délégué Philippe de Koster a conclu.
II. Les moyens de cassation
La demanderesse présente deux moyens libellés dans les termes suivants :
Premier moyen
Dispositions légales violées
* articles 1^er, § 1^er (tel que cet article était d'application avantsa modification par la loi du 22 mai 2005), 3, § 1^er, 22, § 1^er, 2°,23, alinéa 1^er, et 26, § 1^er, de la loi du 30 juin 1994 relative audroit d'auteur et aux droits voisins ;
* articles 1134 et 1615 du Code civil ;
* articles 30 et 36 du Traité instituant la Communauté économiqueeuropéenne, signé à Rome le 25 mars 1957, approuvé par la loi du 2décembre 1957 ;
* pour autant que de besoin, articles 28 et 30 du Traité précité, dansla version consolidée à Amsterdam le 2 octobre 1997, approuvée par laloi du10 août 1998, entrée en vigueur le 1^er mai 1999.
Décisions et motifs critiqués
Après avoir relevé que la défenderesse reconnaît « de manière certaine queles posters commercialisés par (la demanderesse) constituaient desreproductions licites des œuvres » et que « le seul fait reproché à (lademanderesse (...) est d'avoir reproduit sans autorisation les oeuvres surdes supports publicitaires aux fins de promouvoir la vente des posters »,l'arrêt, réformant le jugement dont appel, et statuant à nouveau, condamnela demanderesse envers la défenderesse au paiement, au titre des droitsd'auteur éludés sur les dépliants et brochures publicitaires litigieux,des sommes de 1.005,08 euros et 4.741,63 euros augmentées des intérêtsqu'il précise.
L'arrêt justifie sa décision par les motifs suivants :
« 9. Le droit exclusif de reproduction d'oeuvres protégées par le droitd'auteur constitue l'objet spécifique de la propriété en matière de droitd'auteur, ce que (la demanderesse) ne conteste pas.
Il ne peut par ailleurs être contesté que la reproduction dans lapublicité d'une oeuvre protégée est un acte d'exploitation de l'oeuvreprotégée, distinct de l'acte d'exploitation de l'oeuvre consistant en lareproduction de celle-ci sur des posters et de l'acte d'exploitation del'oeuvre consistant en la mise en circulation desdits posters.
En outre, les supports publicitaires, tels les dépliants et cataloguesincriminés, servent à promouvoir la vente par (la demanderesse) de sagamme de produits, de sorte que la reproduction dans ces documents d'uneoeuvre protégée déterminée ne sert pas qu'à promouvoir la vente desposters représentant cette oeuvre.
10. Ainsi que (la défenderesse) le soutient, le droit exclusif dereproduction d'oeuvres protégées par le droit d'auteur, garanti par la loidu30 juin 1994, comprend la reproduction d'oeuvres protégées dans dessupports publicitaires destinés à promouvoir les ventes de copiesautorisées de l'oeuvre.
Le droit d'autoriser ou d'interdire la reproduction d'une oeuvre protégéepar le droit d'auteur n'est pas épuisé par la mise en circulation dereproductions de l'oeuvre par le titulaire du droit ou avec sonconsentement. Ce droit porte sur chaque exemplaire constituant unereproduction de l'oeuvre protégée et la mise en circulation d'un supportne rend pas licite d'autres actes d'exploitation de l'oeuvre protégée,telle la reproduction de l'oeuvre dans la publicité.
Le consentement à la reproduction de tableaux sous forme de postersn'entraîne donc nullement l'épuisement du droit exclusif d'interdire lareproduction de ces oeuvres sur d'autres supports matériels (...).
La loi nationale ne déroge pas à cette règle en ce qui concerne lespublicités réalisées par les revendeurs de copies licites d'une oeuvreplastique.
11. Contrairement à ce que prétend (la demanderesse), le droit pour unrevendeur de vendre des reproductions des oeuvres protégées ne serait pasvidé de sa substance si le revendeur n'était pas en mesure de promouvoirles ventes en diffusant des dépliants et des prospectus contenant desreprésentations des oeuvres protégées.
Les dispositions de la loi ne donnent pas au titulaire du droit d'auteurle droit de s'opposer à d'autres formes de publicité, telle que ladiffusion de dépliants reprenant la liste des oeuvres reproduites sur lessupports matériels autorisés.
(La demanderesse) n'indique pas en quoi la reconnaissance du droit, pourle titulaire du droit d'auteur, d'interdire au revendeur de reproductionsautorisées de l'oeuvre, non toute forme de publicité, mais bien une formespécifique de publicité consistant en la diffusion de supportsreprésentant l'oeuvre protégée, rendrait la commercialisation desreproductions autorisées de l'oeuvre et, par conséquent, l'accès au marchéde ces marchandises, sensiblement plus difficiles et constituerait uneentrave à la libre circulation des marchandises interdite par l'article 30du Traité (devenu, après modification, l'article 28) (...).
Il ne peut (...) être déduit de l'arrêt dans l'affaire Dior/Evora, invoquéà tort par (la demanderesse), qu'une interdiction de publicité pour desreproductions d'oeuvres protégées par le droit d'auteur, telle que celledont se prévaut (la défenderesse), et limitée à une interdiction dereproduire l'oeuvre protégée dans la publicité, ne peut être admiseconformément à l'article 36 du Traité (devenu, après modification,l'article 30) (...).
En revanche, considérer comme licite l'acte d'exploitation d'une oeuvreprotégée qui consiste en sa reproduction par un revendeur de copiesautorisées d'oeuvres protégées écoulées licitement, à des finspublicitaires, priverait le titulaire d'une prérogative essentielle, àsavoir son droit d'exploiter commercialement l'oeuvre (...).
12. Enfin, les comparaisons que fait (la demanderesse) avec des dépliantspublicitaires contenant une image de CD, de livres ou de bandes dessinéesne sont pas pertinentes. De telles images ne constituent pas lareproduction de l'oeuvre protégée par le droit d'auteur.
13. Vu ce qui précède, la question de savoir si (la demanderesse) estvenue aux droits des différents éditeurs des posters qu'elle revend estsans pertinence ».
Griefs
Première branche
A. Aux termes de l'article 1^er, § 1^er, de la loi du 30 juin 1994,l'auteur d'une oeuvre artistique a seul le droit de la reproduire ou d'enautoriser la reproduction, de quelque manière et sous quelque forme que cesoit. Le droit de reproduction comprend celui de distribution,c'est-à-dire de la diffusion d'exemplaires dans le public par vente, offreen vente ou tout autre acte. L'autorisation de reproduction donnée parl'auteur peut être limitée : celui-ci peut n'autoriser la reproduction quedans une mesure qu'il fixe ou la subordonner à des conditions qu'ildétermine.
B. Aux termes de l'article 3, § 1^er, de la loi du 30 juin 1994, lesdroits patrimoniaux de l'auteur et, donc, le droit de reproduction, sontmobiliers, cessibles et transmissibles conformément aux règles du Codecivil et le cessionnaire est tenu d'assurer l'exploitation de l'oeuvreconformément aux usages honnêtes de la profession.
C. Il découle du rapprochement des dispositions de la loi du 30 juin 1994analysées sub A et B que celui à qui le droit de reproduire une oeuvregraphique ou picturale sous la forme de fac-similés ou de posters a étécédé par l'auteur a, en principe, c'est-à-dire sauf restriction imposéepar l'auteur, le droit de vendre, d'offrir en vente et, plus généralement,de commercialiser les exemplaires reproduits de l'oeuvre et, parconséquent, d'accomplir tous les actes susceptibles de promouvoir lacommercialisation desdits exemplaires conformément aux usages honnêtes desa profession.
Il est conforme aux usages honnêtes de la profession d'éditeur de posters,en vue de promouvoir leur commercialisation, de reproduire sur dessupports publicitaires, tels que dépliants, brochures ou catalogues,l'image des oeuvres protégées dont la reproduction a été autorisée sansrestriction.
D. Le cessionnaire du droit de reproduction d'une oeuvre graphique oupicturale qui, comme il est dit sub C, est autorisé à commercialiser lesexemplaires reproduits de l'oeuvre et qui les vend à des détaillantsspécialisés aux fins de revente, transfère à ces derniers, au titred'accessoire de la chose vendue, conformément à l'article 1615 du Codecivil, le droit de faire usage, dans un but de promotion des ventes, del'image licitement reproduite de l'oeuvre protégée.
E. En conséquence, ayant constaté que la demanderesse avait acheté àdifférents éditeurs, en vue de la revente, des posters reproduisant despeintures, que ces éditeurs avaient régulièrement acquis les droits dereproduction des oeuvres et que, partant, les posters commercialisés parla demanderesse « constituaient des reproductions licites des œuvres »,l'arrêt, qui ne relève pas que les droits de reproduction acquis par leséditeurs auraient été de quelque façon que ce soit restreints ou limitéspar les titulaires des droits, ne décide pas légalement :
1°) que « la reproduction dans la publicité d'une oeuvre protégée est unacte d'exploitation de (cette) œuvre, distinct de l'acte d'exploitation del'oeuvre consistant en la reproduction de celle-ci sur des posters et del'acte d'exploitation de l'oeuvre consistant en la mise en circulationdesdits posters », au point que la reproduction de l'oeuvre dans lapublicité selon les usages honnêtes de la profession serait subordonnée àune autorisation distincte de celle portant sur la reproduction del'oeuvre sous la forme de posters et la mise en circulation de ceux-ci ;
2°) qu'il importe peu de savoir « si (la demanderesse) est venue auxdroits des éditeurs des posters qu'elle revend », de sorte que ladéfenderesse invoque à bon droit « une violation par (la demanderesse) dudroit exclusif de reproduction » (violation des articles 1^er, § 1^er, 3,§ 1^er, 26, § 1^er, de la loi du 30 juin 1994, 1134 et 1615 du Codecivil).
Deuxième branche
L'article 22, § 1^er, 2°, de la loi du 30 juin 1994, disposition de droitimpératif (article 23, alinéa 1^er), interdit à l'auteur d'une oeuvrelicitement publiée et à ses ayants droit d'empêcher « la reproduction etla communication au public de l'oeuvre exposée dans un lieu accessible aupublic lorsque le but de la reproduction ou de la communication au publicn'est pas l'oeuvre elle-même ».
Faisant implicitement mais certainement application de cette disposition,l'arrêt considère que, s'agissant de l'offre en vente de « compact discs »ou de livres dont la pochette ou la couverture reproduit l'image d'uneoeuvre protégée, la reproduction de ces objets dans des dépliantspublicitaires est dispensée de l'autorisation de l'auteur car « de tellesimages ne constituent pas la reproduction de l'oeuvre protégée par ledroit d'auteur » mais seulement la reproduction de l'objet offert envente. L'arrêt refuse toutefois d'appliquer ce raisonnement à lareproduction dans des dépliants publicitaires de l'image des objetsofferts en vente par la demanderesse, étant des reproductions (posters)licites d'oeuvres protégées.
L'arrêt établit ainsi une distinction entre objets offerts en ventereproduisant l'image d'une oeuvre protégée, dont la reproduction a étédûment autorisée, qui ne trouve aucun appui dans l'article 22, § 1^er, 2°,de la loi du30 juin 1994 (violation de cette disposition légale et de l'article 23,alinéa 1^er, de la même loi).
Troisième branche
Selon l'article 30 du traité CE (article 28 de la version consolidée), lesrestrictions quantitatives à l'importation, ainsi que toutes mesuresd'effet équivalent, sont interdites entre les Etats membres. L'article 36(article 30 de la version consolidée) prévoit toutefois que lesdispositions de l'article 30 ne font pas obstacle aux interdictions ourestrictions d'importation justifiées par des raisons, notamment, deprotection de la propriété industrielle et commerciale.
Ces dispositions du traité doivent, selon la Cour de justice desCommunautés européennes (arrêt du 4 novembre 1997, affaire Dior/Evora),être interprétées en ce sens que le titulaire d'un droit de marque ou d'undroit d'auteur ne peut s'opposer à ce qu'un revendeur, qui commercialisehabituellement des articles de même nature, mais pas nécessairement demême qualité que les produits protégés, emploie ceux-ci, c'est-à-dire seserve notamment de leur image, conformément aux modes qui sont usuels dansson secteur d'activité, afin d'annoncer au public la commercialisationultérieure de ces produits, à moins qu'il ne soit établi que, compte tenudes circonstances propres à chaque espèce, l'utilisation de ces produits àcette fin porte une atteinte sérieuse à leur renommée.
Lorsque la reproduction en fac-similés ou posters d'une oeuvre picturale aété autorisée par le titulaire du droit d'auteur, l'autorisation accordéecouvre non seulement la vente et la revente des posters reproduisantl'oeuvre mais aussi, en vertu des articles 3, § 1^er, et 26, § 1^er, de laloi du30 juin 1994, la reproduction de ceux-ci dans des dépliants, brochures oucatalogues diffusés par les éditeurs et les revendeurs à des finspublicitaires de promotion des ventes desdites reproductions, conformémentaux usages honnêtes de la profession.
Dès lors, décider, comme l'arrêt, que le droit exclusif de reproductionconsacré par l'article 1^er, § 1^er, de la loi du 30 juin 1994 permet àson titulaire d'interdire au revendeur de reproductions autorisées del'oeuvre « une forme spécifique de publicité consistant en la diffusion desupports représentant l'oeuvre protégée », alors que cette forme depublicité par l'image pour promouvoir la vente des reproductions del'oeuvre est conforme aux usages honnêtes de la profession, revient àconsacrer une entrave à la libre circulation des marchandises qui,lorsque, comme en l'espèce, il n'est pas constaté qu'une atteinte sérieuseserait portée à la renommée des produits par cette forme de publicité, nepeut trouver une justification dans le souci de la protection de lapropriété intellectuelle.
L'arrêt viole partant l'ensemble des dispositions légales visées en têtedu moyen en décidant que l'autorisation donnée par le titulaire du droitd'auteur de reproduire l'oeuvre sous la forme de posters et de mettrelesdits posters en circulation n'implique pas, pour un revendeurd'articles de cette nature, le droit de promouvoir la vente de ces posterspar une publicité « consistant en la diffusion de supports représentantl'oeuvre protégée » et que « c'est donc à bon droit que (la défenderesse)invoque une violation par (la demanderesse) du droit exclusif dereproduction ».
Second moyen (subsidiaire)
Dispositions légales violées
* articles 1382 et 1383 du Code civil ;
* article 149 de la Constitution.
Décisions et motifs critiqués
L'arrêt condamne la demanderesse à payer à la défenderesse les sommes de1.005,08 euros et 4.741,63 euros représentant les droits d'auteur éludés,suivant le tarif de la défenderesse, pour les dépliants et pour lesbrochures, augmentées des intérêts compensatoires au taux légal à dater du1^er janvier 1999 et des intérêts judiciaires à partir du 3 juin 1999, etdit que les intérêts seront capitalisés et porteront à leur tour intérêtau taux légal à dater du 29 novembre 2002.
Ces décisions sont justifiées par les motifs suivants :
« 15. La (défenderesse) calcule le montant des droits d'auteur dus par la(demanderesse) en appliquant le tarif prévu pour les arts visuels en1998/1999 compte tenu d'un tirage non contesté de 25.000 exemplairesmaximum.
Les calculs opérés sont conformes aux données objectives du tarif. La(défenderesse) réclame dès lors à bon droit les montants suivants à la(demanderesse) :
- droits d'auteur pour les dépliants : 1.005,08 euros T.V.A. comprise,
- droits d'auteur pour les brochures : 4.741,63 euros T.V.A. comprise.
16. La (défenderesse) est en droit d'exiger la capitalisation des intérêtsà la date du dépôt de ses premières conclusions d'appel, soit le 29novembre 2002, le dépôt de ces conclusions valant sommation.
En revanche, il ne se justifie pas, pour indemniser les auteurs dont lesdroits ont été éludés, de capitaliser à nouveau les intérêts le 29 avril2003, date du dépôt des conclusions de synthèse ».
Griefs
Dans la mesure où elle a pour objet la condamnation de la demanderesse aupaiement de sommes égales au montant des droits d'auteur éludés, l'actionmue par la défenderesse tend, sur le fondement des articles 1382 et 1383du Code civil, à la réparation d'un préjudice souffert par les auteurs parl'allocation de dommages et intérêts. Conformément à ces articles, laréparation, si elle doit être intégrale, ne peut dépasser le montant dudommage.
L'arrêt admet, d'une part, que « les calculs opérés sont conformes auxdonnées objectives du tarif » et que « (la défenderesse) réclame dès lorsà bon droit les montants suivants à (la demanderesse) : droits d'auteurpour les dépliants : 1.005,08 euros, T.V.A. comprise; droits d'auteur pourles brochures : 4.741,63 euros, T.V.A. comprise », mais ne comporte aucuneindication qui autorise à considérer qu'aux yeux des juges du fond, ledommage réparable consistait en l'espèce dans la perte du montant desdroits éludés.
L'arrêt admet, d'autre part, la capitalisation des intérêts qu'il alloue àla défenderesse mais ne comporte aucune indication permettant deconsidérer que, selon l'appréciation des juges du fond, l'anatocisme est,en l'espèce, justifié pour procurer aux auteurs la réparation intégrale dudommage allégué.
Il s'ensuit que l'arrêt ne permet pas de vérifier que la condamnation dela demanderesse au paiement de sommes égales au montant des droitsd'auteurs éludés, calculés sur la base du tarif de la défenderesse, et lacapitalisation des intérêts accordés sont, en l'espèce, nécessaires pourprocurer aux auteurs, sans dépassement, la réparation intégrale de leurdommage.
III. La décision de la Cour
Sur le premier moyen :
Quant à la première et à la troisième branche :
En vertu de l'article 1^er, § 1^er, alinéa 1^er, de la loi du 30 juin 1994relative au droit d'auteur et aux droits voisins, l'auteur d'une œuvreartistique a seul le droit de la reproduire ou d'en autoriser lareproduction, de quelque manière ou sous quelque forme que ce soit.
L'article 3, § 1^er, de la même loi dispose, à l'alinéa 1^er, que lesdroits patrimoniaux de l'auteur sont mobiliers, cessibles ettransmissibles, en tout ou en partie, conformément aux règles du Codecivil et, à l'alinéa 5, que le cessionnaire est tenu d'assurerl'exploitation de l'œuvre conformément aux usages honnêtes de laprofession.
De cette obligation qui pèse sur le cessionnaire, il ne peut se déduire nique celui-ci, autorisé à reproduire une œuvre picturale sous la forme defac-similés, aurait le droit, sans nouvelle autorisation de l'auteur, dela reproduire aussi sur des supports destinés à donner de la publicité àces fac-similés ni, partant, qu'il pourrait transmettre ce droit auxintermédiaires assurant la commercialisation de ces reproductionsautorisées.
Le moyen qui, en ces branches, repose sur le soutènement contraire, manqueen droit.
Quant à la deuxième branche :
En considérant que les comparaisons faites par « la demanderesse avec desdépliants publicitaires contenant une image de CD, de livres ou de bandesdessinées ne sont pas pertinentes » parce que « de telles images neconstituent pas la reproduction de l'œuvre protégée par le droitd'auteur », l'arrêt n'établit pas une distinction entre les objets offertsen vente reproduisant l'image d'une oeuvre protégée mais décide qu'il y aune distinction à faire entre l'image d'un support d'une oeuvre, supportqui n'est pas protégé par le droit d'auteur, et l'image de l'œuvreprotégée elle-même.
Le moyen, en cette branche, manque en fait.
Sur le second moyen :
Outre les motifs reproduits au moyen, sur la base desquels il fixe lesmontants dus à la défenderesse, l'arrêt énonce encore, pour refuser àcelle-ci une indemnité égale au double des droits éludés, que« l'indemnité doit uniquement servir à réparer le préjudice des auteurs ».
Il ressort de l'ensemble des motifs de l'arrêt que la cour d'appel aentendu réparer le dommage réellement subi, qu'elle a évalué sur la basede son pouvoir d'appréciation.
Le moyen ne peut être accueilli.
Par ces motifs,
La Cour
Rejette le pourvoi ;
Condamne la demanderesse aux dépens.
Les dépens taxés à la somme de quatre cent nonante-cinq euros envers lapartie demanderesse et à la somme de cent vingt-six euros septante-troiscentimes envers la partie défenderesse.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, troisième chambre, à Bruxelles, oùsiégeaient le président Christian Storck, les conseillers Daniel Plas,Christine Matray, Sylviane Velu et Philippe Gosseries et prononcé enaudience publique du treize octobre deux mille huit par le présidentChristian Storck, en présence de l'avocat général Jean-Marie Genicot, avecl'assistance du greffier Jacqueline Pigeolet.
13 OCTOBRE 2008 C.06.0562.F/1