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25/09/2008 | BELGIQUE | N°C.07.0207.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 25 septembre 2008, C.07.0207.F


Cour de cassation de Belgique

Arrêt

N° C.07.0207.F

SOCIETE DES TRANSPORTS INTERCOMMUNAUX DE BRUXELLES, dont le siège socialest établi à Bruxelles, avenue de la Toison d'Or, 15,

demanderesse en cassation,

représentée par Maître Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation, dont lecabinet est établi à Bruxelles, rue de Loxum, 25, où il est fait électionde domicile,

contre

B. X.,

défendeur en cassation.

I. La procédure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirigé contre le jugement rendu le16 décembre 2005 p

ar le tribunal de première instance de Bruxelles,statuant en degré d'appel.

Le conseiller Albert Fettweis a fait rapport.

L...

Cour de cassation de Belgique

Arrêt

N° C.07.0207.F

SOCIETE DES TRANSPORTS INTERCOMMUNAUX DE BRUXELLES, dont le siège socialest établi à Bruxelles, avenue de la Toison d'Or, 15,

demanderesse en cassation,

représentée par Maître Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation, dont lecabinet est établi à Bruxelles, rue de Loxum, 25, où il est fait électionde domicile,

contre

B. X.,

défendeur en cassation.

I. La procédure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirigé contre le jugement rendu le16 décembre 2005 par le tribunal de première instance de Bruxelles,statuant en degré d'appel.

Le conseiller Albert Fettweis a fait rapport.

L'avocat général André Henkes a conclu.

II. Le moyen de cassation

Le demandeur présente un moyen libellé dans les termes suivants :

Dispositions légales violées

Articles 1382 et 1383 du Code civil

Décisions et motifs critiqués

Le jugement attaqué condamne la demanderesse à payer au défendeur la sommede 19.472,68 euros (montant devant donner lieu à correction en raisond'une erreur matérielle, puisqu'il s'agit d'une condamnation à 1.972,68euros, soit la somme de 1.944,72 euros et de 27,96 euros), à majorer desintérêts compensatoires au taux légal depuis le 25 mars 2000 jusqu'à cejour et des intérêts judiciaires ensuite, après avoir relevé, dans lecadre de son examen du calcul de la T.V.A. et du montant de celle-cidevant faire partie de l'indemnité à laquelle le défendeur a droitconsécutivement au sinistre total dont a fait l'objet son « véhiculeacheté d'occasion » et pour lequel il n'est pas contesté qu'il « n'a payéla T.V.A. que sur une partie du prix payé pour (ce véhicule) », notammentce qui suit :

« Pour une victime qui n'est pas assujettie à la taxe sur la valeurajoutée et ne peut donc ni déduire pareille taxe ni en obtenir larestitution de l'Etat, conformément au Code de la T.V.A., la sommenécessaire à ladite acquisition comprend cette taxe. La réparationintégrale du préjudice implique que la victime soit replacée dans lasituation qui aurait été la sienne sans la survenance de l'accident.L'utilisation donnée par la victime à l'indemnité est sans incidence surla détermination de celle-ci.

Il importe peu que le véhicule endommagé soit un véhicule usagé acquis parle propriétaire d'occasion ou reçu par donation.

La valeur d'un véhicule avant sinistre est la valeur résiduelle,déterminée au départ du prix à l'état neuf, T.V.A. comprise, duquel estdéduit la vétusté.

Le fait que le véhicule sinistré ait été acheté neuf ou d'occasion et aiteu un ou plusieurs propriétaires est irrelevant. Il n'y a dans cettehypothèse aucun enrichissement.

[Le défendeur], non assujetti à la T.V.A., a donc droit au montantcorrespondant à la valeur avant sinistre majorée d'une T.V.A. de 21 p.c.alors même que le véhicule sinistré avait été acheté d'occasion. Il s'agitde la seule manière de procéder permettant d'assurer la réparationintégrale du dommage.

La demande de paiement d'une indemnité de 1.944, 72 euros telle quesollicitée par (le défendeur) est dès lors fondée ».

Griefs

1. La demanderesse avait invoqué dans ses conclusions entre autres ce quisuit :

« Si la victime a droit à un autre véhicule, elle a aussi droit derécupérer, à due concurrence, la T.V.A. qu'elle avait acquittée lors del'acquisition du véhicule perdu et ce, qu'elle rachète effectivement unautre véhicule, avec une T.V.A. moindre ou sans T.V.A., ou qu'elle n'enrachète pas.

Mais (le défendeur) n'ayant pas acquitté une T.V.A. sur le véhiculesinistré mais seulement une T.V.A. de 21 p.c. sur 15 p.c. du prix de cevéhicule s'enrichirait indûment s'il lui était alloué la T.V.A. qu'ilpostule.

Le principe de la réparation due en application de l'article 1382 du Codecivil est un rétablissement du patrimoine lésé dans son intégrité, par uneréparation en nature si possible, et sinon par équivalent.

Le principe de base, qui n'a jamais été remis en doute par la Cour decassation en la matière est que la victime a droit à la réparationintégrale de son préjudice, mais sans plus, et surtout sans le droit des'enrichir à l'occasion de l'accident.

Or, c'est enrichir la victime que de lui accorder une T.V.A. de 21 p.c.sur la valeur du véhicule sinistré, telle que cette valeur s'établissaitavant le sinistre, si, pour entrer en possession de ce véhicule, elle n'adû appauvrir son patrimoine que de 21 p.c. sur 15 p.c. - margebénéficiaire du vendeur - du prix d'achat.

Le dommage de la personne dépouillée d'une chose équivaut à la valeur deremplacement de cette chose, c'est-à-dire la somme nécessaire pouracquérir une chose semblable.

En l'espèce, la chose semblable est un véhicule d'occasion à l'occasion del'acquisition duquel il ne fut dû qu'une T.V.A. réduite, calculée non surle prix d'achat mais seulement sur la marge bénéficiaire du vendeur ».

2. Il résulte de la jurisprudence constante de la Cour que « toutepersonne dépouillée d'une chose par un acte illicite a droit à lareconstitution de son patrimoine par la restitution de cette chose », que« lorsque la restitution est impossible, la partie lésée a droit à lavaleur de remplacement de la chose, c'est-à-dire à la somme nécessairepour acquérir une chose semblable » et que « pour une victime qui n'estpas assujettie à la T.V.A. et ne peut, dès lors, déduire cette taxe ou larécupérer conformément aux dispositions du Code de la T.V.A., la sommenécessaire à ladite acquisition comprend cette taxe » (Cass., 17 septembre2003, P.03.0348. ; Cass., 9 janvier 1997, C.96.0095.F ; Cass., 8 janvier1997, P.96.0457.F).

La Cour a également rappelé, dans ses arrêts précités, que « la partielésée dispose librement de l'indemnité qui lui est due et que le montantde l'indemnité ne peut varier en fonction de l'usage qu'en fera la partielésée ».

C'est ainsi que « la circonstance que (la partie lésée) a remplacé sonvéhicule d'occasion par une voiture d'occasion pour l'achat de laquelle ilest ou il n'est pas dû de taxe est sans incidence ».

3. Si cette jurisprudence consacre le principe de la libre disposition del'indemnité qui est due à la partie lésée et que le régime de la T.V.A.appliqué au véhicule acquis en remplacement du véhicule sinistré ne peutavoir d'incidence sur le montant de l'indemnité à laquelle la partie léséea droit, elle ne se prononce pas, en revanche, sur l'influence de cettedonnée - le régime appliqué - lors de l'acquisition du véhicule sinistré.

La Cour a estimé, dans son arrêt du 9 janvier 1997 précité, que lorsqu'unvéhicule, qui avait été « acquis à l'état neuf », est détruit dans unaccident et que la partie lésée n'est pas assujettie à la T.V.A.,l'indemnité à laquelle elle a droit comprend la taxe sur la valeurajoutée, « calculée au taux fixé par la loi pour l'achat d'un véhiculeneuf ».

4. En l'espèce, il résulte des constatations du jugement attaqué que le« véhicule » du défendeur a été « acheté d'occasion » et qu'il n'est pascontesté qu'il « n'a payé la T.V.A. que sur une partie du prix payé pourson véhicule d'occasion ».

Le jugement attaqué estime qu'« il importe peu que le véhicule endommagésoit un véhicule usagé acquis par le propriétaire d'occasion ou reçu pardonation », que « le fait que le véhicule sinistré ait été acheté neuf oud'occasion et ait eu un ou plusieurs propriétaires est irrelevant » etqu' « il n'y a dans cette hypothèse aucun enrichissement ».

Il en conclut que « [le défendeur], non assujetti à la T.V.A., a doncdroit au montant correspondant à la valeur avant sinistre majorée d'uneT.V.A. de 21 p.c. alors même que le véhicule sinistré avait été achetéd'occasion » et condamne en conséquence la demanderesse à une « indemnitéde 1.944,72 euros telle que sollicitée par (le défendeur) ».

Ce faisant, le jugement attaqué alloue au défendeur un montant supérieur à« la valeur de remplacement de la chose, c'est-à-dire à la sommenécessaire pour acquérir une chose semblable » en ne tenant pas compte durégime de taxe sur la valeur ajoutée appliqué lors de l'acquisition - parle défendeur - du véhicule ayant fait l'objet du sinistre.

Le jugement attaqué viole en conséquence les dispositions légales viséesau moyen.

III. La décision de la Cour

Toute personne dépouillée d'une chose par un acte illicite a droit à lareconstitution de son patrimoine par la restitution de cette chose.Lorsque la restitution est impossible, la partie lésée a droit à uneindemnité égale à la valeur de remplacement de la chose, c'est-à-dire à lasomme nécessaire pour acquérir une chose semblable.

Lorsque la partie lésée n'est pas assujettie à la taxe sur la valeurajoutée et, dès lors, ne peut déduire cette taxe ni en obtenir larestitution de l'Etat conformément aux dispositions du Code de la taxe surla valeur ajoutée, l'indemnité comprend la taxe sur la valeur ajoutée duesur le prix d'achat d'une chose semblable, en l'espèce une voiture.

Cette taxe est calculée au taux fixé par la loi pour l'achat d'un véhiculeneuf, même lorsque la voiture sinistrée a été acquise d'occasion par lavictime avec une taxe limitée, calculée sur la seule marge bénéficiaire duvendeur.

Le moyen, qui soutient le contraire, manque en droit.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;

Condamne la demanderesse aux dépens.

Les dépens taxés à la somme de quatre cent septante-sept eurosseptante-cinq centimes envers la partie demanderesse.

Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, oùsiégeaient le président Christian Storck, les conseillers Didier Batselé,Albert Fettweis, Sylviane Velu et Philippe Gosseries, et prononcé enaudience publique du vingt-cinq septembre deux mille huit par le présidentChristian Storck, en présence de l'avocat général André Henkes, avecl'assistance du greffier Philippe Van Geem.

25 SEPTEMBRE 2008 C.07.0207.F/7


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.07.0207.F
Date de la décision : 25/09/2008

Analyses

RESPONSABILITE HORS CONTRAT - DOMMAGE - Dommage moral. Eléments. Etendue


Origine de la décision
Date de l'import : 31/08/2018
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2008-09-25;c.07.0207.f ?
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