Cour de cassation de Belgique
Arrêt
**101
300
**401
N° P.08.0801.F
I. C. D.,
ayant pour conseil Maître Guillaume Sneessens, avocat au barreau de Namur,
II. K. C.,
ayant pour conseils Maîtres Sandrine Thirion, avocat au barreau de Namur,et Muriel Bialek, avocat au barreau de Bruxelles,
III. M. A.,
inculpés,
défendeurs en cassation.
I. la procédure devant la cour
Les pourvois sont dirigés contre l'arrêt rendu le 7 avril2008, sous le numéro C 562, par la cour d'appel de Liège, chambre desmises en accusation.
Le premier demandeur invoque un moyen dans un mémoire. Ledeuxième demandeur en invoque trois, également dans un mémoire. Cesmémoires sont annexés au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le président de section Jean de Codt a faitrapport.
L'avocat général Raymond Loop a conclu.
II. la décision de la cour
A. Sur le pourvoi de D. C. :
Procédant au règlement de la procédure, la chambre du conseil a, parordonnance du 8 février 2008, notamment renvoyé le demandeur du chef de laprévention C.IX, mais a omis de statuer sur les réquisitions du ministèrepublic tendant au renvoi dudit demandeur du chef d'appartenance à uneorganisation criminelle (prévention D) et à une association de malfaiteurs(prévention E).
Seul le demandeur a interjeté appel de cette décision, tout enlimitant celui-ci à l'omission précitée.
Avant que la cour d'appel ait statué sur cet appel, leprocureur du Roi a saisi la chambre du conseil d'un « réquisitoire eninterprétation et rectification d'erreur matérielle ».
Par ordonnance du 29 février 2008, la chambre du conseil a, ence qui concerne le demandeur, complété sa première ordonnance et dit n'yavoir lieu à renvoi du chef des préventions D et E.
Le ministère public et le demandeur ont interjeté appel decette décision.
La chambre des mises en accusation a annulé les deuxordonnances et renvoyé le demandeur devant le tribunal correctionnel duchef des trois préventions C.IX, D et E.
Sur le moyen :
Quant à la première branche :
L'article 799 du Code judiciaire, qui subordonne larectification d'une décision à la condition qu'elle ne soit pas frappéed'un recours pendant, n'est pas applicable à l'ordonnance subséquente parlaquelle, réparant une omission de statuer entachant sa première décision,la chambre du conseil épuise sa juridiction quant au règlement de laprocédure. Pareille omission, en effet, ne constitue pas une erreurmatérielle au sens de l'article 794 dudit code.
En tant qu'elle statue sur les préventions D et E concernantle demandeur, l'ordonnance du 29 février 2008 ne rectifie pas une erreurmatérielle, mais complète, sur les réquisitions du procureur du Roi,l'ordonnance du 8 février 2008. Elle est donc ampliative et nonrectificative.
La chambre du conseil pouvait donc rendre une telle ordonnanceavant que la chambre des mises en accusation ait statué sur l'appel formécontre l'ordonnance du 8 février 2008.
Le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli.
Quant aux deuxième et troisième branches :
Comme dit ci-dessus, en tant qu'elle statue sur lespréventions D et E concernant le demandeur, l'ordonnance du 29 février2008 est ampliative et non rectificative. Elle ne fait donc pas partie dela première ordonnance. Dès lors, l'appel formé par le ministère publiccontre cette seconde ordonnance est régulier et a valablement saisi lachambre des mises en accusation.
Ayant annulé l'ordonnance du 29 février, les juges d'appeldevaient statuer sur la demande de renvoi du demandeur du chef despréventions D et E.
Le moyen, en ces branches, ne peut être accueilli.
Quant à la quatrième branche :
En tant qu'il invoque la violation de l'article 149 de laConstitution, qui n'est pas applicable aux juridictions d'instructionstatuant sur le règlement de la procédure, le moyen manque en droit.
Il résulte des articles 128, 129, 130, 229 et 231 du Coded'instruction criminelle que le législateur s'en est remis à la consciencedes membres des juridictions d'instruction concernant l'appréciation ducaractère suffisant ou insuffisant des charges réunies par l'instruction,pour justifier soit le renvoi de l'inculpé à la juridiction de jugement,soit une décision de non-lieu.
Dès lors, lorsque les conclusions contestent ou allèguent l'existence enfait de charges suffisantes, la juridiction d'instruction y répond par laconstatation souveraine que pareilles charges existent ou n'existentpas.
Pour le surplus, contrairement à ce que le moyen soutient,l'arrêt ne motive pas le renvoi du demandeur du chef des préventions D etE par la seule considération qu'il existe des charges suffisantes. Eneffet, par adoption des motifs du réquisitoire du procureur général, ilénonce que des charges suffisantes de culpabilité résultent « à la fois dugrand nombre de faits commis, du regroupement de personnes de même origineet qui n'ont pas d'attache stable avec le Royaume, du fait que les auteursdes faits de vols ont recours à des filières spécialisées en fonction dela nature du butin, de ce qui peut être considéré comme des actes derepérage ou actes dénoncés par certains comme étant des règlements decompte ».
Par ces motifs, les juges d'appel ont répondu aux conclusionsdu demandeur qui contestait son appartenance à une organisation criminelleet à une association de malfaiteurs et ont régulièrement motivé leurdécision de dire qu'il existe des charges suffisantes concernant lesditespréventions.
A cet égard, le moyen, en cette branche, ne peut êtreaccueilli.
Le contrôle d'office
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullitéont été observées et la décision est conforme à la loi.
B. Sur le pourvoi de C. K. :
Sur le premier moyen :
De la circonstance qu'en vertu de l'article 135, § 4, du Coded'instruction criminelle, le délai d'appel contre l'ordonnance de renvoiest réduit à vingt-quatre heures lorsqu'un des inculpés est détenu, il nese déduit pas que la chambre des mises en accusation doive, en ce cas,statuer dans le délai de quinze jours prescrit par l'article 30, § 3, dela loi du 20 juillet 1990.
Le moyen manque en droit.
Sur le deuxième moyen :
Invoquant la violation de l'article 23, 4°, de la loi relativeà la détention préventive qui n'est pas applicable à la chambre des misesen accusation statuant sur l'appel contre l'ordonnance de renvoi, le moyenmanque en droit.
Sur le troisième moyen :
En tant qu'il critique les décisions relatives au maintien endétention préventive du demandeur, qui sont étrangères à l'arrêt attaqué,le moyen est irrecevable.
L'ordonnance rendue le 29 février 2008 ne rectifie ni nemodifie celle du 8 février 2008 à l'égard du demandeur. En tant qu'ilsoutient le contraire, le moyen manque en fait.
Pour le surplus, le moyen soutient que la chambre des mises enaccusation devait statuer dans un délai de quinze jours sur l'appelinterjeté par le procureur du Roi contre l'ordonnance de renvoi du 8février. Pour les motifs figurant dans la réponse au premier moyen, lemoyen manque en droit.
Le contrôle d'office
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullitéont été observées et la décision est conforme à la loi.
C. Sur le pourvoi d'A. M. :
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont étéobservées et la décision est conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette les pourvois ;
Condamne chacun des demandeurs aux frais de son pourvoi.
Lesdits frais taxés en totalité à la somme de cent nonante-huit eurostrente-six centimes dont I) sur le pourvoi de D. C. : soixante-six eurosdouze centimes dus, II) sur le pourvoi de C. K. : soixante-six euros douzecentimes dus et III) sur le pourvoi d'A. M. : soixante-six euros douzecentimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, oùsiégeaient Jean de Codt, président de section, président, Frédéric Close,président de section, Benoît Dejemeppe, Jocelyne Bodson et PierreCornelis, conseillers, et prononcé en audience publique du vingt-cinq juindeux mille huit par Jean de Codt, président de section, en présence deRaymond Loop, avocat général, avec l'assistance de Fabienne Gobert,greffier.
25 JUIN 2008 P.08.0801.F/1