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29/05/2008 | BELGIQUE | N°C.07.0260.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 29 mai 2008, C.07.0260.N


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEGC.07.0260.N

DE VRIESE RAF, societe anonyme,

Me Jean-Marie Nelissen Grade, avocat à la Cour de cassation,

contre

REGION FLAMANDE,

Me Lucien Simont, avocat à la Cour de cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 13 novembre2006 par la cour d'appel de Bruxelles.

Le conseiller Beatrijs Deconinck a fait rapport.

L'avocat general delegue Andre Van Ingelgem a conclu.

II. Le moyen de cassation

La demanderesse pres

ente un moyen dans sa requete.

Dispositions legales violees

- article 1149 du Code civil ;

- articles 47, alinea 2, et 48, S...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEGC.07.0260.N

DE VRIESE RAF, societe anonyme,

Me Jean-Marie Nelissen Grade, avocat à la Cour de cassation,

contre

REGION FLAMANDE,

Me Lucien Simont, avocat à la Cour de cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 13 novembre2006 par la cour d'appel de Bruxelles.

Le conseiller Beatrijs Deconinck a fait rapport.

L'avocat general delegue Andre Van Ingelgem a conclu.

II. Le moyen de cassation

La demanderesse presente un moyen dans sa requete.

Dispositions legales violees

- article 1149 du Code civil ;

- articles 47, alinea 2, et 48, S: 4, de l'arrete ministeriel du 10 aout1977 etablissant le cahier general des charges des marches publics detravaux, de fournitures et de services, remplaces par l'article 20, S: 2,alinea 2, et S: 6, et l'article 48, S: 3, 1DEG, de l'annexe « Cahiergeneral des charges des marches publics de travaux, de fournitures et deservices et des concessions de travaux publics » à l'arrete royal du 26septembre 1996 etablissant les regles generales d'execution des marchespublics et des concessions de travaux publics.

Decisions et motifs critiques

Dans l'arret attaque, les juges d'appel ont declare l'appel de ladefenderesse partiellement fonde, ont annule partiellement le jugemententrepris et ont des lors declare non fondee la demande de la demanderessetendant au paiement de dommages et interets du chef de rupture de contrat,ainsi que la demande de capitalisation des interets qui en fait partie.

Ils ont fonde cette decision notamment sur les considerations suivantes :

« 14. Le litige entre les parties concerne essentiellementl'interpretation differente des articles 47 et 48 de l'arrete ministerieldu 10 aout 1977 applicables en l'espece et les consequences juridiques quien decoulent.

15. L'article 47 de l'arrete ministeriel du 10 aout 1977 etait libellecomme suit :

`Tous les manquements aux clauses du contrat, y compris la non-observationdes ordres de l'administration, sont constates par un proces-verbal dontune copie est transmise immediatement, par pli recommande, àl'entrepreneur.

L'entrepreneur est tenu de s'executer immediatement. Il peut faire valoirses moyens de defense par lettre recommandee adressee à l'administrationdans les quinze jours calendrier suivant le jour determine par la datepostale de la transmission. Son silence est considere, apres ce delai,comme une reconnaissance des faits'.

16. L'article 48, S: 4, de l'arrete ministeriel du 10 aout 1977 etaitlibelle comme suit :

`Mesures d'office :

Si à l'expiration du delai indique à l'article 47 ci-avant pour fairevaloir ses moyens de defense, l'entrepreneur est reste inactif,l'administration est autorisee à recourir à l'une des mesures ci-apres :

1DEG la resiliation du marche ;

2DEG l'execution des travaux en regie ;

3DEG la conclusion d'un ou de plusieurs marches pour compte avec un ouplusieurs tiers.

La decision de l'administration de passer aux mesures d'office estnotifiee à l'adjudicataire defaillant par lettre recommandee à la posteou par lettre remise contre recepisse à l'adjudicatrice (...)'.

17. En l'espece, le proces-verbal du 30 avril 1999 a constate que `lestravaux n'ont pas encore commence', ce proces-verbal a ete envoye parlettre recommandee à l'entrepreneur le 3 mai 1999 et le 17 mai 1999,l'entrepreneur a fait valoir ses moyens de defense de la manieresuivante :

`(...) En annexe nous vous faisons parvenir un aperc,u du deroulement dudossier en question. Sur cette base nous tenons à observer quel'administration LIN est à la fois juge et partie non seulement en ce quiconcerne l'approbation des etudes mais aussi pour la determination de lacategorie des voiries en classe I ou II.

Nous ne pouvons marquer notre accord sur le contenu du proces-verbalprecite eu egard au fait que nous avons subi un dommage de plus de 5 pourcent en raison de l'augmentation des prix du marche mondial en combinaisonavec une nouvelle revision.

Nous vous demandons, des lors, d'etablir un acte complementaire pour ledommage subi et ce pour execution'.

18. L'administration a ecrit à l'entrepreneur par lettre recommandee du 2juillet 1999 : `Suite à ma lettre du 25 juin 1999, je vous informe quemon departement procede à l'application de mesures d'office comme prevupar l'article 48, S: 3, du cahier general des charges des marches publicsde travaux, de fournitures et de services. Des lors, il vous est interditd'acceder au chantier à partir de ce jour. En outre, les travaux serontà nouveau adjuges et les frais supplementaires ainsi occasionnes serontà votre charge'.

19. Le point de vue defendu par l'entrepreneur revient à dire quel'administration ne peut prendre des mesures d'office au sens de l'article48 de l'arrete ministeriel du 10 aout 1977 si l'entrepreneur a fait valoirses moyens de defense dans le delai prevu par l'article 47 de ce memearrete ministeriel. Il motive ce point de vue en citant le texte desarticles de loi precites et l'arret de la Cour de cassation du 20 mai1994, considerant que : ` Lorsqu'apres avoir rec,u le proces-verbalconstatant ses manquements, l'entrepreneur fait valoir ses moyens dedefense en temps utile, la reconnaissance de sa responsabilite parl'entrepreneur cesse d'etre presumee et le droit qui en decoule pourl'administration de recourir d'office aux mesures indiquees à l'article48, alinea 4, prend fin'.

20. Le point de vue defendu par l'administration revient à dire quel'administration peut prendre d'office des mesures au sens de l'article 48de l'arrete ministeriel du 10 aout 1977 meme si l'entrepreneur a faitvaloir ses moyens de defense dans le delai, s'il apparait qu'apres cedelai l'entrepreneur est reste inactif et si ses moyens de defense sontnon fondes. L'administration motive ce point de vue en se referant aussiau texte des articles de loi precites et au commentaire doctrinal auquel adonne lieu l'arret precite de la Cour de cassation.

21. La regle de droit libellee à l'article 47 de l'arrete ministeriel du10 aout 1977 visait à regler la preuve de la constatation del'inexecution du marche public par l'entrepreneur : tous les manquementsaux clauses du contrat notamment la non-observation des ordres del'administration devaient etre constates par un proces-verbal. En outre,cette regle de droit visait à proteger l'entrepreneur en formalisant lamise en demeure (proces-verbal, envoi par lettre recommandee) et en luioffrant la possibilite de faire valoir des moyens de defense dans uncertain delai et sous une forme determinee (dans les quinze jours decalendrier et par lettre recommandee). Les manquements et les moyens dedefense s'y rapportant sont ainsi constates afin d'etre appreciesulterieurement.

22. Cette formalisation de la constatation de l'inexecution et des moyensde defense s'y rapportant, ne signifiait toutefois pas quel'administration n'avait le droit de recourir à des mesures d'office ausens de l'article 48 de l'arrete ministeriel du 10 aout 1977 que sil'entrepreneur n'avait pas fait valoir ses moyens de defense à proposd'un manquement constate par l'administration dans le delai vise àl'article 47 de l'arrete ministeriel du 10 aout 1977. Ces mesures d'officeetaient toujours possibles, aussi dans l'hypothese precitee, etant entenduque la decision de recourir à ces mesures etait subordonnee à uncontrole judiciaire dans le cadre de l'administration de la preuveorganisee par la loi. Autrement dit, le droit puise par l'administrationdans l'article 48 de l'arrete ministeriel du 10 aout 1977 pouvait etrecontrole par le juge en comparant le contenu du proces-verbal aux moyensde defense presentes en temps utile. L'article 47 de l'arrete ministerieldu 10 aout 1977 n'a pas exclu ce controle judiciaire, mais a uniquementrendu plus difficile la defense de l'entrepreneur dans la mesure ou iln'avait pas presente ses moyens de defense en temps utile. Dans ce cas, eneffet, l'article 47 de l'arrete ministeriel du 10 aout 1977 a prevu unereconnaissance par l'entrepreneur des faits constates.

23. Ce controle judiciaire ne devait pas preceder les mesures prisesd'office. La regle de droit commun que contient l'article 1184 du Codecivil et qui, en principe, telle qu'elle est libellee dans le dernieralinea de cet article, prescrit une intervention judiciaire prealable àla resolution, ne s'applique pas aux marches publics. La legislation surles marches publics releve du droit public ou administratif d'ou il suitqu'un controle judiciaire prealable des mesures prises d'office autoriseespar la loi est incompatible avec la force obligatoire de l'acteadministratif (le denomme `privilege du prealable', à savoir lapresomption de la conformite au droit de la decision unilaterale del'administration), etant entendu que le controle judiciaire est possibleulterieurement.

24. Il ressort des faits de la cause que le fait de ne pas commencer lestravaux, nonobstant les ordres de l'administration, etait exclusivement duà l'entrepreneur et que ses moyens de defense diriges contre cetteconstatation faite par proces-verbal etaient non fondes.

25. L'entrepreneur ne conteste pas que l'administration lui a donnel'ordre de commencer les travaux le 14 decembre 1998. Il ressort du cachetà date de l'entrepreneur que la notification de l'administration du 23novembre 1998 lui est parvenue le 25 novembre 1998. Les observations quel'entrepreneur a fait valoir en ce qui concerne le point de depart ne sontplus pertinentes parce qu'il n'est pas davantage conteste que finalementle debut des travaux a ete fixe de commun accord au 1er mars 1999. Celaressort de l'entretien non conteste entre l'entrepreneur et lefonctionnaire responsable, de la lettre de l'entrepreneur du 10 decembre1998 dans laquelle il demande confirmation du commencement des travaux enmars 1999 et de la signification de l'ordre de service du 12 janvier 1999ayant pour objet la remise du debut des travaux au 1er mars 1999. C'est àtort que l'entrepreneur soutiendra par la suite que son acceptation dupoint de depart etait conditionnelle et etait subordonnee notamment à unerevision en mars 1999 et pas en mars 1997. L'entrepreneur a certes faitetat de cette demande dans sa lettre adressee à l'administration le 10decembre 1998, mais l'administration a rejete cette demande par lettre du12 janvier 1999, et l'entrepreneur n'a plus formule cette demande dans sarequete subsequente de report du debut des travaux, contenue dans salettre adressee à l'administration le 1er avril 1999. Cette dernieredemande de l'entrepreneur de report du debut des travaux jusqu'en aout1999 a en effet uniquement ete motivee par le fait que les travaux nepouvaient etre entames parce que la commune de Kaprijke avait projeteelle-meme de faire des travaux sur une voie de deviation prevue pourl'execution des travaux. Ce motif a d'ailleurs ete rejete parl'administration dans sa lettre du 16 avril 1999 et le motif de ce rejet -suivant le cahier special des charges aucune deviation n'est autorisee -n'a pas ete conteste par la suite par l'entrepreneur. Ce defaut de motifsjustifiant le fait que les travaux ne soient pas entames en mars 1999 estencore renforce par la constatation, à partir de la mi-avril 1999, quel'entrepreneur ne disposait pas d'un plan de signalisation et pasdavantage d'un plan concret d'execution des travaux. Cela ressort desrapports du 13 avril 1999 (envoyes à l'entrepreneur le 28 avril 1999 etrec,u par lui le 3 mai 1999, comme il ressort du cachet de la poste) et du22 avril 1999 (envoye à l'entrepreneur le 29 avril 1999 et rec,u par luile 30 avril 1999, comme il ressort aussi du cachet dateur). Dans cecontexte, le proces-verbal du 30 avril 1999 (qui a ete envoye par lettrerecommandee à l'entrepreneur le 3 mai 1999 et qu'il a rec,u le 5 mai1999) doit etre considere comme constatant que les travaux n'ont pasencore ete entames, comme precise par la constatation ecrite du 7 mai 1999que le delai d'execution prevu de 30 jours ouvrables, calcule à partir du1er mars 1999, compte tenu des journees d'intemperies, etait expire. Dansses moyens de defense du 17 mai 1999 l'entrepreneur a invoque deux moyenset a lie une condition au second moyen. Son premier moyen concernait sonaffirmation que `l'administration LIN etait juge et partie non seulementen ce qui concerne l'approbation des etudes mais aussi en ce qui concernela determination des categories de voiries de la classe I ou II'. Il s'estrefere à l'approbation et l'enregistrement des melanges d'asphalte requispar le cahier des charges. Son affirmation est sans pertinence : en tantque soumissionnaire de l'adjudication il s'etait engage, suivant le cahierdes charges, à utiliser des melanges d'asphalte bien determines,approuves et enregistres pour la couche superieure et la coucheinferieure ; il ressort des faits qu' il a propose des melanges necorrespondant pas aux exigences du cahier des charges et qu'il n'a pas nonplus conteste cela des lors que, lorsque ces melanges n'ont pas eteapprouves, il a fait lui-meme le necessaire pour faire effectuer denouveaux essais et obtenir de nouvelles attestations, sans invoquer uneseule fois que la distinction en categories lui portait prejudice. Sonsecond moyen est formule de la maniere suivante : `Nous ne pouvonsaccepter le contenu du proces-verbal en question des lors que nous avonssubi plus de 5 pour cent de dommage en raison de l'augmentation des prixdu marche mondial en combinaison avec une nouvelle revision'. Il s'estainsi refere à son moyen de revision dejà formule mais jamais repris. Cemoyen est aussi non fonde. Comme l'administration a repondu à juste titreil n'existait aucun motif de droit pour contraindre à revision. En outre,il ressort des faits que le report de la date de debut des travaux etaituniquement due à l'entrepreneur qui, à compter de l'ordre de debuter lestravaux le 23 novembre 1998, a insiste pour qu'ils soient reportes ou quia empeche que les travaux soient effectivement entames des lors qu'il n'yavait pas de melanges approuves et enregistres. La condition attachee àce second moyen (`Nous vous demandons ainsi d'etablir un actecomplementaire pour le dommage subi et ce pour execution') a ete rejeteeà juste titre par l'administration. La decision de prendre des mesuresd'office etait justifiee dans ces circonstances d'autant plus quel'administration n' a recouru à ces mesures d'office qu'apres la mise endemeure de l'entrepreneur d'entamer immediatement les travaux dans lesquinze jours calendrier (lettre recommandee du 25 mai 1999) et apres quece delai soit expire (lettre recommandee du 2 juillet 1999).L'interdiction de chantier notifiee par l'administration à l'entrepreneurpar la lettre recommandee du 2 juillet 1999 ne constituait pas uneresiliation unilaterale et illicite du contrat. La demande del'entrepreneur tendant à obtenir des dommages et interets du chef deresiliation unilaterale du contrat est non fondee. La demande decapitalisation des interets qui y est liee est aussi non fondee. L'appelest fonde sur ce point ». (...)

Griefs

1. En vertu de l'article 1149 du Code civil, en cas d'inexecution d'uneobligation contractuelle, le debiteur doit assumer totalement la perte ducreancier ou le gain dont il a ete prive, sauf application des articles1150 et 1151 du Code civil.

Si l'article 47, alinea 1er, de l'arrete ministeriel du 10 aout 1977etablissant le cahier general des charges des marches publics de travaux,de fournitures et de services impose la constatation de l'inexecution dumarche par l'entrepreneur dans un proces-verbal, le second alinea de cetarticle etait libelle comme suit : « L'entrepreneur est tenu des'executer immediatement. Il peut faire valoir ses moyens de defense parlettre recommandee adressee à l'administration dans les quinze jours decalendrier suivant le jour determine par la date postale de latransmission. Son silence est considere, apres ce delai, comme unereconnaissance des faits constates ».

L'article 48, S: 4, de l'arrete ministeriel du 10 aout 1977 disposait que« si à l'expiration du delai indique à l'article 47 ci-avant pour fairevaloir ses moyens de defense, l'entrepreneur est reste inactif,l'administration est autorisee à recourir à des mesures d'office ».

2. Les juges d'appel se sont fondes, en l'espece, sur l'hypothese, que leproces-verbal du 30 avril 1999 a constate que « les travaux n'ont pasencore debutes », que ce proces-verbal a ete envoye le 3 mai 1999 à lademanderesse et que la demanderesse a fait valoir ses moyens de defensepar lettre recommandee du 17 mai 1999, la defenderesse ayant communiquepar la suite par lettre recommandee du 2 juillet 1999 qu'elle recourait àdes mesures d'office (...).

Ils ont considere ensuite que la formalisation par l'article 47 del'arrete ministeriel du 10 aout 1977 de la constatation de l'inexecutionet des moyens de defense ne signifiait pas que l'administration ne pouvaitrecourir à des mesures d'office au sens de l'article 48 de l'arreteministeriel du 10 aout 1977 que si l'entrepreneur n'avait pas fait valoirses moyens de defense concernant l'inexecution constatee parl'administration dans le delai prevu par l'article 47 de l'arreteministeriel du 10 aout 1977. Ces mesures d'office etaient par contretoujours possibles selon les juges d'appel etant entendu que la decisiond'y recourir etait soumis à un controle judiciaire qui ne devait paspreceder dans le temps le fait de recourir à ces mesures d'office (...).

Ils ont ensuite considere que le fait de ne pas entamer les travaux,nonobstant les ordres donnes par la defenderesse, etait exclusivement duà la demanderesse et que ses moyens de defense diriges contre cetteconstatation dans le proces-verbal etaient non fondes (...).

Les juges d'appel n'ont pas pu legalement decider sur la base de ce quiprecede que la demande de la demanderesse tendant à obtenir des dommageset interets du chef de la resiliation unilaterale et illicite du contratpar la defenderesse, ainsi que la demande de capitalisation des interetsqui y est liee, sont non fondees.

Premiere branche

Il ressort en effet de l'article 47, alinea 2, de l'arrete ministeriel du10 aout 1977 qu'il n'est question « d'inactivite » de l'entrepreneur ausens de l'article 48, S: 4, du meme arrete ministeriel que si celui-ci n'apas repare les manquements qui lui sont reproches et qu'il n'a pas faitvaloir ses moyens de defense dans le delai indique.

Les articles 47, alinea 2 et 48, S: 4 de l'arrete ministeriel du 10 aout1977 doivent des lors etre interpretes en ce sens qu'un entrepreneur quidemeure en defaut de reparer les manquements qui lui sont reproches maisqui formule ses moyens de defens en temps utile, ne peut etre considerecomme restant `inactif', de sorte que le droit de l'administration derecourir à des mesures d'office est eteint.

En considerant, en l'espece, qu'il etait toujours possible de recourir àdes mesures d'office aussi dans l'hypothese dans laquelle la demanderesseavait fait valoir ses moyens de defense dans le delai indique à l'article47, alinea 2, de l'arrete ministeriel du 10 aout 1977, etant entendu quela decision à ce propos etait subordonnee à un controle judiciaireposterieur dans le cadre de l'administration de la preuve organisee par laloi (...) les juges d'appel ont interprete erronement les articles 47,alinea 2, et 48, S: 4, de l'arrete ministeriel du 10 aout 1977 et lesconsequences y afferentes.

Ils ont ainsi, en effet, soumis la decheance du droit de l'administrationde recourir à des mesures d'office, qui resulte du fait quel'entrepreneur a fait valoir ses moyens de defense dans le delai legal, àune condition qui ne figure pas dans ces dispositions legales, à savoirque le juge constate a posteriori que les moyens de defense del'entrepreneur sont fondes.

Dans la mesure ou les juges d'appel ont rejete les demandes de lademanderesse tendant à obtenir des dommages et interets du chef de laresiliation unilaterale et illicite du contrat par la defenderesse et lacapitalisation des interets, sur la base de cette consideration et apresla constatation que les moyens de defense invoques par la demanderesse àl'encontre de la constatation du defaut de commencement des travaux par leproces-verbal du 30 avril 1999 etaient non fondes, leur decision n'est paslegalement justifiee (violation des articles 47, alinea 2, et 48, S: 4, del'arrete ministeriel du 10 aout 1977 etablissant le cahier general descharges des marches publics de travaux, de fournitures et de services).

(...)

III. La decision de la Cour

Sur le premier moyen :

Quant à la premiere branche :

1. En ce qui concerne les infractions aux dispositions du contratconstatees par l'administration conformement à l'article 47, alinea 1er,de l'arrete ministeriel du 10 aout 1977 etablissant le cahier general descharges des marches publics de travaux, de fournitures et de services,l'entrepreneur est tenu de reparer immediatement ses manquements en vertude l'article 47, alinea 2, de l'arrete ministeriel du 10 aout 1977. Ilpeut faire valoir ses moyens de defense par lettre recommandee adressee àl'administration dans les quinze jours calendrier suivant le jourdetermine par la date postale de la transmission. Son silence estconsidere, apres ce delai, comme une reconnaissance des faits constates.

Lorsqu'apres avoir rec,u le proces-verbal constatant ses manquements,l'entrepreneur fait valoir ses moyens de defense en temps utile, lareconnaissance de responsabilite de l'entrepreneur cesse d'etre presumeeet le droit de l'administration de recourir aux mesures d'office indiqueesà l'article 48, S: 4, prend fin, etant entendu que la decheance desmesures prises d'office reste subordonnee à l'appreciation au fond desmoyens de defense precites.

2. Le moyen qui soutient, en cette branche, que le droit del'administration de recourir à des mesures d'office prend toujours finlorsque des moyens de defense sont formules en temps utile, meme si par lasuite ces moyens de defense sont consideres non fondes par le juge, manqueen droit.

(...)

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;

Condamne la demanderesse aux depens.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Robert Boes, les conseillers EricDirix, Eric Stassijns, Beatrijs Deconinck et Alain Smetryns, et prononceen audience publique du vingt-neuf mai deux mille huit par le president desection Robert Boes, en presence de l'avocat general delegue Andre VanIngelgem, avec l'assistance du greffier adjoint Johan Pafenols.

Traduction etablie sous le controle du conseiller Albert Fettweis ettranscrite avec l'assistance du greffier Marie-Jeanne Massart.

Le greffier, Le conseiller,

29 MAI 2008 C.07.0260.N/11


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.07.0260.N
Date de la décision : 29/05/2008

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2008-05-29;c.07.0260.n ?
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