Cour de cassation de Belgique
Arrêt
**101
40201
**401
N° P.07.1112.F
S. A.,
prévenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Christine Gilles, avocat au barreau deBruxelles,
contre
1. B. F.C.,
2. B. F. M.,
3. B.F. G. A.,
4. B. F. G.,
5. B.F.L.,
6. AUTOBELGA, s.p.r.l. dont le siège est établi à Braine-le-Château, rueCastiaux, 27,
7. D.G. P.,
parties civiles,
défendeurs en cassation.
I. la procédure devant la cour
Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 28 juin 2007 par letribunal correctionnel de Nivelles, statuant en degré d'appel.
Le demandeur fait valoir trois moyens dans un mémoire annexé au présentarrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Pierre Cornelis a fait rapport.
L'avocat général Damien Vandermeersch a conclu.
II. la décision de la cour
A. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision de condamnationrendue sur l'action publique :
Sur le premier moyen :
En tant qu'il critique l'appréciation en fait des juges d'appel ou exigepour son examen une vérification d'éléments de fait, pour laquelle la Courest sans pouvoir, le moyen est irrecevable.
La preuve de ce qu'une personne qui conduisait un véhicule dans un lieupublic était en état d'ivresse n'est subordonnée à aucune règle spéciale.Le juge du fond qui connaît de pareille infraction peut déduire l'étatd'ivresse de tous les éléments qui lui sont régulièrement soumis et queles parties ont pu contredire.
En tant qu'il affirme que le tribunal ne pouvait constater l'ivresse dudemandeur qu'en se fondant « sur des éléments relatifs à sa personne (…) à
l'exclusion de tout élément extérieur et indifférent à sa personne », lemoyen manque en droit.
Par une appréciation souveraine, les juges d'appel ont énoncé « que letaux d'alcoolémie, les conditions de survenance de l'accident, soit surune route qualifiée de sèche par les verbalisants et peu ou pas du toutencombrée, ainsi que l'absence de toute autre explication plausible àl'accident, permettent de considérer, avec suffisamment de certitude, nonseulement que le prévenu se trouvait en état d'ivresse au moment de cetaccident mais également que c'est en raison de son état que l'accidents'est produit ».
Ainsi, les juges d'appel ont répondu aux conclusions du demandeursoutenant qu'il ne découlait pas des constatations effectuées par lemédecin ayant procédé à son examen, qu'il n'avait plus le contrôle de sesactes.
En affirmant, pour le surplus, que l'accident a pu trouver sa cause dansune défaillance humaine résultant d'une distraction, d'un malaise ou de lafatigue, le demandeur n'a pas soulevé une exception mais s'est borné àmêler des hypothèses auxquelles les juges d'appel n'étaient pas tenus derépondre.
Le moyen ne peut être accueilli.
Sur le deuxième moyen :
Le demandeur a déposé des conclusions soutenant que, si sa responsabilitéest engagée par le fait qu'il a perdu le contrôle de sa voiture, lesconséquences qui en ont résulté pour ses passagers, blessés à la suite dela collision, ont été aggravées par la présence, sur la trajectoire de savoiture en perdition, de deux véhicules stationnés irrégulièrement.
De l'irrégularité invoquée, le demandeur n'a déduit aucune conséquencequant aux actions civiles exercées contre lui. Il s'est borné à solliciterdes juges d'appel qu'ils tiennent compte de cet élément « dansl'appréciation de la gravité des fautes » qu'il avait commises.
Le moyen critique l'énonciation du jugement suivant laquelle « lestationnement irrégulier des véhicules emboutis ne présente aucun lien decausalité avec la survenance de l'accident et de ses conséquences ».
Le jugement relève, sans être critiqué à cet égard, que le demandeur neconteste pas avoir, par la perte du contrôle de sa voiture et la collisionqui en a résulté, blessé ses passagers et causé à ceux-ci un dommage qui,sans cette faute, ne se serait pas produit.
La condamnation du demandeur du chef d'infraction aux articles 418 et420bis du Code pénal est légalement justifiée par ces considérationspuisque ce délit ne requiert pas que la faute de l'auteur soit l'uniquecause des lésions.
Le motif critiqué par le moyen, relatif à une faute concurrente prêtée parle demandeur à des tiers, est dès lors sans incidence sur la légalité dela déclaration de culpabilité.
Dans cette mesure, dénué d'intérêt, le moyen est irrecevable.
Revenant pour le surplus à critiquer la hauteur de la peine, le moyen, quise heurte à l'appréciation souveraine du juge du fond, est égalementirrecevable.
Sur le troisième moyen :
Le demandeur fait grief au jugement de ne pas répondre à ses conclusionsinvoquant que les passagers à l'arrière de sa voiture avaient aggravé leurpropre dommage en s'abstenant de porter la ceinture de sécurité.
De la faute ainsi prêtée aux victimes, le demandeur n'a déduit aucuneconséquence quant aux actions civiles exercées contre lui.
La décision sur l'action publique est légalement justifiée par les motifsque le jugement consacre à la faute du demandeur puisque, comme ditci-dessus, il n'est pas requis que le défaut de prévoyance ou deprécaution de l'auteur soit l'unique cause des lésions.
Critiquant l'absence de réponse à une défense étrangère aux élémentsconstitutifs de l'infraction, le moyen est irrecevable à défaut d'intérêt.
Le contrôle d'office
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont étéobservées et la décision est conforme à la loi.
B. En tant que le pourvoi est dirigé contre les décisions rendues surles actions civiles exercées contre le demandeur qui statuent sur :
1. le principe de la responsabilité :
Le demandeur ne fait valoir aucun moyen spécial.
2. l'étendue des dommages :
Le jugement alloue des indemnités provisionnelles, désigne des experts,réserve à statuer sur le surplus des demandes et renvoie les suites de lacause au premier juge.
Pareilles décisions ne sont pas définitives au sens de l'article 416,alinéa 1^er, du Code d'instruction criminelle et sont étrangères aux casvisés par le second alinéa de cet article.
Le pourvoi est irrecevable.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Lesdits frais taxés à la somme de septante-deux euros quatre-vingtscentimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, oùsiégeaient Jean de Codt, président de section, Paul Mathieu, BenoîtDejemeppe, Jocelyne Bodson et Pierre Cornelis, conseillers, et prononcé enaudience publique du quatorze mai deux mille huit par Jean de Codt,président de section, en présence de Damien Vandermeersch, avocat général,avec l'assistance de Patricia De Wadripont, greffier adjoint principal.
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| P. De Wadripont | P. Cornelis | J. Bodson |
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| B. Dejemeppe | P. Mathieu | J. de Codt |
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14 MAI 2008 P.07.1112.F/1