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28/04/2008 | BELGIQUE | N°S.07.0079.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 28 avril 2008, S.07.0079.N


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG S.07.0079.N

KBC ASSURANCES, societe anonyme,

demanderesse,

Me Willy van Eeckhoutte, avocat à la Cour de cassation,

contre

D. S. P.,

defendeur,

Me Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 9 novembre 2006par la cour du travail de Gand.

Le conseiller Alain Smetryns a fait rapport.

L'avocat general Ria Mortier a conclu.

II. Le moyen de cassation

La demande

resse presente un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

Articles 7, en particulier alinea 1er, et 9 de la...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG S.07.0079.N

KBC ASSURANCES, societe anonyme,

demanderesse,

Me Willy van Eeckhoutte, avocat à la Cour de cassation,

contre

D. S. P.,

defendeur,

Me Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 9 novembre 2006par la cour du travail de Gand.

Le conseiller Alain Smetryns a fait rapport.

L'avocat general Ria Mortier a conclu.

II. Le moyen de cassation

La demanderesse presente un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

Articles 7, en particulier alinea 1er, et 9 de la loi du 10 avril 1971 surles accidents du travail.

Decisions et motifs critiques

Statuant sur la demande d'indemnite formee par le defendeur sur la base dela loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail pour les lesionsqu'il a encourues le 18 fevrier 2004, la cour du travail declare non fondel'appel interjete par la demanderesse. La cour du travail confirme lejugement rendu par le tribunal du travail le 16 janvier 2006, par lesmotifs suivants :

« 3.4. (...) Faisant application de cette jurisprudence aux faits du 18fevrier 2004, il convient de constater qu'il n'est pas conteste que (ledefendeur) a travaille pendant 5 heures comme ferrailleur dans uneattitude assez inconfortable (cf. declaration de l'employeur - piece 11/6du dossier (de la demanderesse)), c'est-à-dire dans un espace restreintavec des chaussures de securite en position accroupie et sur la pointe despieds, ce qui a cause les lesions decrites par le medecin traitant (dudefendeur), le Dr. B. : infection au pied et cloques sur le tibia, ayantprovoque `phlegmon et oedeme et functio laesa jambe droite - phlebite ettendinite' (piece 11/2 du dossier (de la demanderesse)).

Ces circonstances penibles dans lesquelles le travail devait etre effectueconstituent l'evenement soudain selon l'àncienne' jurisprudence dejàcitee (Cass., 11 janvier 1982, Bull. et Pas., 1982, I, 584), maisegalement selon la jurisprudence `recente' (Cass. 16 juin 1997, S.R.K.1998, 420; Cass., 20 janvier 1997, Bull. et Pas., 1997, I, 94), des lorsque (le defendeur) apporte la preuve de l'evenement soudain, puisqu'ildesigne un element localisable dans le temps et l'espace dans l'executiondu travail comme cause de ses lesions, à savoir le montage, pendant 5heures, de `tyzers' dans une position inconfortable, c'est-à-direaccroupi, sur la pointe des pieds, dans un espace restreint avec deschaussures de securite inadaptees (voir aussi C. travail Anvers, sectionHasselt, 20 mars 1991, Limb. Rechtsl.,1992, 182; C. travail, Mons, 1erdecembre 1989, J.T.T. 1991, 58).

A l'instar du premier juge, la cour du travail admet cet element commeevenement soudain dans l'execution des taches journalieres.

3.5. Lorsque (la demanderesse) invoque la nature evolutive progressive deslesions (du defendeur), elle vise peut-etre, d'une part, les affectionsresultant d'une irritation chronique (voir le dossier II/3, dossier (de lademanderesse) et, d'autre part, les symptomes inflammatoires tels quephlebite et tendinite.

Si ces lesions sont la consequence de l'evenement soudain admis sub 3.4.,leur nature n'empeche pas qu'elles resultent d'un accident du travail. Ladesignation d'un medecin-expert peut permettre de fournir la preuvecontraire du lien causal entre l'activite exercee par (le defendeur) etles lesions à examiner.

En tant que la cause des lesions que (le defendeur) presentait le 19fevrier 2004 (...) est entierement etrangere au pretendu evenement soudaindu 18 fevrier 2004, et donc que ces lesions n'ont pas ete (notamment)causees par l'evenement soudain indique (...), les presomptions retenuesaux articles 7 et 8 de la loi sur les accidents du travail ne sont pasvalablement renversees ».

Griefs

L'article 7, alinea 1er, de la loi du 10 avril 1971 sur les accidents dutravail dispose que pour l'application de ladite loi, est considere commeaccident du travail tout accident qui survient à un travailleur dans lecours et par le fait de l'execution du contrat de louage de travail et quiproduit une lesion.

L'article 9 de la meme loi dispose que lorsque la victime ou ses ayantsdroit etablissent, outre l'existence d'une lesion, celle d'un evenementsoudain, la lesion est presumee, jusqu'à preuve du contraire, trouver sonorigine dans un accident.

Il resulte des lors des articles 7, alinea 1er, et 9 de la loi du 10 avril1971 sur les accidents du travail que quiconque pretend etre la victimed'un accident du travail doit prouver (entre autres) l'existence d'unevenement soudain.

1. 1. Premiere branche

Dans des conclusions regulierement deposees au greffe de la cour dutravail, la demanderesse a fait valoir que : « Ces 5 longues heuresexcluent à elles seules l'existence en l'espece d'un evenement soudain»(p. 7, alinea 2 des « conclusions de synthese d'appel », deposees augreffe le 12 juillet 2006).

En effet, l'un des elements constitutifs d'un evenement soudain est sabrievete. Un evenement d'une duree de cinq heures ne peut plus etrequalifie de soudain. Admettre qu'un evenement d'une duree de cinq heuresest constitutif de l'existence d'un accident du travail priverait decontenu la notion de « soudainete ».

La cour du travail constate que l'evenement soudain que le defendeur faitvaloir a dure cinq heures (p. 3, sous 3.2., alinea 2, et 3.3., alinea 1er,et p. 6, en haut de la page, de l'arret).

Conclusion

La cour du travail ne decide pas legalement qu'un evenement soudain afrappe le defendeur au motif qu'il a monte des `tyzers' pendant cinqheures dans une position inconfortable, c'est-à-dire dans un espacerestreint avec des chaussures de securite en position accroupie et sur lapointe des pieds (violation des articles 7 et 9 de la loi du 10 avril 1971sur les accidents du travail).

1.2. Seconde branche

Dans des conclusions regulierement deposees au greffe de la cour dutravail, la demanderesse a fait valoir que : « Un evenement ne peut etrequalifie de soudain si sa duree ne se limite pas à un bref laps de temps(...) et/ou si les lesions apparaissent de maniere evolutive (...).Lorsque, simultanement, la duree de l'evenement ne se limite pas à unbref laps de temps et les lesions apparaissent de maniere evolutive(...)., il ne saurait, a fortiori, etre question d'un evenementsoudain ».

(p. 6, dernier alinea des « conclusions de synthese d'appel », deposeesau greffe le 12 juillet 2006)

Pour apprecier l'existence d'un evenement soudain, l'on peut tenir comptetant de la duree dudit evenement que de la nature des lesions. Si, commeen l'espece, non seulement l'evenement a dure cinq heures, mais leslesions ont egalement evolue pendant ces cinq heures, l'existence d'unevenement soudain est, a fortiori, exclue.

La cour du travail constate que, d'apres un certificat du dr. Buytaert du19 fevrier 2004, le defendeur a contracte « un phlegmon et un oedeme etfunctio laesa jambe droite » et « ce à la suite d'une infection au piedet de cloques à la jambe, en raison d'un frottement anormalement longdans des chaussures de securite, en position accroupie et sur la pointedes pieds. Phlebite et tendinite » (p. 3, sous 3.2, alinea 2, et p. 5, enbas de la page, de l'arret). Selon les constatations de la cour dutravail, ces affections sont, d'une part, la consequence d'une irritationchronique et, d'autre part, des symptomes inflammatoires, comme laphlebite et la tendinite (p.6, au bas de la page 3.5, alinea 1er, del'arret).

Conclusion

La cour du travail ne decide pas legalement qu'un evenement soudain afrappe le defendeur au motif qu'en montant des tyzers pendant cinq heuresdans une position inconfortable, il a encouru des affections resultantd'une irritation chronique et des symptomes inflammatoires (violation desarticles 7 et 9 de la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail).

III. La decision de la Cour

Appreciation

Quant à la premiere branche :

1. En vertu de l'article 7, alinea 1er, de la loi du 10 avril 1971 sur lesaccidents du travail, pour l'application de ladite loi, est considerecomme accident du travail tout accident qui survient à un travailleurdans le cours et par le fait de l'execution du contrat de louage detravail et qui produit une lesion.

En vertu de l'article 9 de la meme loi, lorsque la victime ou ses ayantsdroit etablissent, outre l'existence d'une lesion, celle d'un evenementsoudain, la lesion est presumee, jusqu'à preuve du contraire, trouver sonorigine dans un accident.

2. L'evenement soudain doit etre un fait determinable dans le temps d'uneduree relativement breve. Il appartient au juge de decider si la dureed'un evenement excede la limite de ce qui peut etre considere comme unevenement soudain.

Une position inconfortable prolongee causant des lesions par surchargepeut, le cas echeant, etre consideree comme un evenement soudain.

3. Les juges d'appel ont pu considerer que le defendeur « demontre unevenement soudain, des lors qu'il designe comme cause de ses lesions unelement localisable dans le temps et l'espace dans l'execution du travail,à savoir le montage, 5 heures durant, de tyzers dans une positioninconfortable, c'est-à-dire dans un espace restreint avec des chaussuresde securite en position accroupie et sur la pointe des pieds ».

4. Le moyen qui, en cette branche, soutient que les juges d'appel n'ont pulegalement decider qu'un evenement soudain a frappe le defendeur, etantdonne que l'evenement a dure environ cinq heures et ne pouvait des lorsetre momentane, ne peut etre accueilli.

Quant à la seconde branche :

5. Par lesion au sens des articles 7 et 9 de la loi du 10 avril 1971, ilfaut en principe entendre tout ennui de sante.

Le juge peut tenir compte de la nature des ennuis de sante lorsqu'ilapprecie la question de savoir si ceux-ci ont pu etre causes par unevenement soudain. La seule circonstance que les ennuis de sante sontapparus de maniere evolutive au cours d'un evenement non instantane,n'interdit toutefois pas au juge de considerer cet evenement comme unevenement soudain au sens de l'article 9 de la loi du 10 avril 1971 surles accidents du travail.

6. Le moyen qui, en cette branche, soutient que les juges d'appel,constatant que le defendeur, en raison du fait qu'il a effectue sontravail cinq heures durant dans une position inconfortable, a presente deslesions qui sont apparues d'une maniere evolutive, n'ont pas pu deciderlegalement qu'un evenement soudain a frappe le defendeur, ne peut etreaccueilli.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi

Condamne la demanderesse aux depens.

(...)

Ainsi juge par la Cour de cassation, troisieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Robert Boes, president, les conseillersEric Stassijns, Beatrijs Deconinck, Alain Smetryns et Koen Mestdagh, etprononce en audience publique du vingt-huit avril deux mille huit par lepresident de section Robert Boes, en presence de l'avocat general RiaMortier, avec l'assistance du greffier Philippe Van Geem.

Traduction etablie sous le controle du conseiller Martine Regout ettranscrite avec l'assistance du greffier Jacqueline Pigeolet.

Le greffier, Le conseiller,

28 AVRIL 2008 S.07.0079.N/8



Références :

Origine de la décision
Date de la décision : 28/04/2008
Date de l'import : 14/10/2011

Numérotation
Numéro d'arrêt : S.07.0079.N
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2008-04-28;s.07.0079.n ?
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