Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° C.06.0675.F
ETHIAS, association d'assurances mutuelles dont le siège est établi àLiège, rue des Croisiers, 24,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Cécile Draps, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est établi à Liège, rue de Chaudfontaine, 11, où il est faitélection de domicile,
contre
1. M. C.,
2. ALLIANCE NATIONALE DES MUTUALITES CHRETIENNES, dont le siège estétabli à Schaerbeek, chaussée de Haecht, 579,
défenderesses en cassation,
en présence de
P. J.,
partie appelée en déclaration d'arrêt commun.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 10 mai 2006 parla cour d'appel de Liège.
Par ordonnance du 4 avril 2008, le premier président a renvoyé la causedevant la troisième chambre.
Le conseiller Philippe Gosseries a fait rapport.
L'avocat général Jean-Marie Genicot a conclu.
II. Le moyen de cassation
La demanderesse présente un moyen libellé dans les termes suivants :
Dispositions légales violées
* articles 1382 et 1383 du Code civil ;
* article 76quater, spécialement § 2, de la loi du 9 août 1963instituant et organisant un régime d'assurance obligatoire contre lamaladie et l'invalidité (anciennement article 70, § 2, de cette loi),tel qu'il a été modifié par l'arrêté royal n° 19 du 4 décembre 1978modifiant et complétant l'article 70 de la loi du 9 août 1963instituant et organisant un régime d'assurance obligatoire contre lamaladie et l'invalidité, avant son abrogation par l'arrêté royal du 14juillet 1994 portant coordination de la loi relative à l'assuranceobligatoire soins de santé et indemnités ;
* article 136, § 2, de la loi relative à l'assurance obligatoire soinsde santé et indemnités, coordonnée par l'arrêté royal du 14 juillet1994 ;
* article 149 de la Constitution.
Décisions et motifs critiqués
L'arrêt attaqué condamne in solidum la demanderesse et la partie appeléeen déclaration d'arrêt commun à payer à la première défenderesse notammentla somme de 1.345,77 euros du chef de frais et débours, somme comprenantnotamment les frais médicaux et de kinésithérapie fixés à titre définitifà 1.534,03 euros dont, vu le partage de responsabilité, la premièredéfenderesse obtient la moitié, soit 767,02 euros, la somme de 3.750 eurosdu chef du préjudice professionnel et scolaire à augmenter des intérêtscompensatoires au taux de cinq pour cent depuis le 9 décembre 2003, lasomme de 3.493,15 euros du chef du préjudice permanent matériel passé àaugmenter des intérêts compensatoires au taux légal depuis le 7 décembre1999, la somme de 8.475,99 euros du chef du préjudice permanent matérielfutur dû à l'incapacité de sept pour cent, et à payer à la secondedéfenderesse la somme de 13.297,45 euros en principal à titreprovisionnel, à augmenter des intérêts au taux légal depuis la date desdécaissements, par tous ses motifs considérés ici comme intégralementreproduits et plus particulièrement, sous l'intitulé « Réclamation de [laseconde défenderesse] », aux motifs que
« Les montants réclamés ne sont pas en soi contestés :
13.297,45 euros en principal
7.349,80 euros d'intérêts
- 7.347,56 euros payés le 12 avril 1999
total : 13.299,69 euros à titre provisionnel.
[La seconde défenderesse] bénéficie d'une subrogation préférentielle.
Cette subrogation s'étend à toutes les sommes dues par le tiersresponsable en réparation du dommage couvert par la loi sur l'assuranceobligatoire soins de santé et indemnités, étant tenu compte du partage deresponsabilité, ce tiers ne pouvant être tenu à rembourser plus que lesmontants dus selon le droit commun.
En l'espèce, s'il n'y avait pas la subrogation préférentielle, [lademanderesse et la partie appelée en déclaration d'arrêt commun] devraientverser à [la seconde défenderesse] la moitié de 13.297,45 euros enprincipal, soit 6.648,73 euros, [et à la première défenderesse] la moitiédes frais médicaux et de kinésithérapie, soit 767,02 euros, la moitié deson préjudice matériel temporaire professionnel et scolaire, soit 3.750euros, la moitié de son préjudice matériel permanent passé dû àl'incapacité de travail, soit 3.493,15 euros.
Comme [la seconde défenderesse] bénéficie d'une subrogationpréférentielle, elle a droit à son surplus, soit 6.648,73 euros, en sorteque ce montant doit être déduit des montants dus à [la premièredéfenderesse] repris ci-dessus, à qui il reste dû 1.361,44 euros pour sondommage matériel permanent passé ».
Griefs
Première branche
Dans ses conclusions d'appel de synthèse annulant et remplaçant lesprécédentes, la demanderesse soutenait, quant aux frais et débours de lapremière défenderesse, que la seconde défenderesse, « qui prétendjustifier de remboursements de frais médicaux en faveur de [la premièredéfenderesse] à concurrence de 13.297,45 euros [...], est subrogée deplein droit au bénéficiaire ; que cette subrogation vaut à concurrence dumontant des prestations octroyées sur la totalité des sommes qui sont duesen vertu du droit commun ; que cette subrogation s'exerce de manièrepréférentielle, de sorte que tout ce qui est dû par le tiers responsableet qui couvre le même dommage revient par priorité à la mutuelle ; qu'ilconviendrait dès lors de vérifier si la victime peut prétendre àl'indemnisation des frais médicaux ; que la [demanderesse] s'expliquerasur cette question au point C, `Réclamation de (la secondedéfenderesse)' ».
Sous l'intitulé « Réclamation de [la seconde défenderesse] », lademanderesse rappelait que la subrogation de l'organisme assureurs'exerçait de manière préférentielle sur tout ce qui était dû par le tiersresponsable et qui couvrait le même dommage ; que la seconde défenderessejustifiait de décaissements à concurrence de 13.297,45 euros tandis que lapremière défenderesse justifiait de frais médicaux non couverts parl'organisme assureur à concurrence de 1.534,03 euros ; « que l'assiette dela subrogation s'élève dès lors à 13.297,45 euros plus 1.534,03 euros,soit 14.831,48 euros ; qu'en vertu du droit commun, la victime doitsupporter 50 pour cent de son dommage ; qu'il en résulte que lesréclamations de la mutuelle sont fondées à concurrence de 14.831,48 eurosx 50 pour cent, soit 7.415,74 euros ; que ce montant sera majoré desintérêts au taux légal depuis la date moyenne des décaissements entre le23 octobre 1990 et le 29 octobre 1998, soit le 25 octobre 1994, dont àdéduire une provision de 7.347,56 euros à majorer des intérêts au tauxlégal à dater du paiement, soit le 12 avril 1999 ; que le montant alloué àla mutuelle étant inférieur au montant décaissé par [elle], aucun montantne sera alloué à [la première défenderesse] du chef de frais médicaux enapplication des principes développés ci-dessus ».
Quant à la seconde défenderesse, elle concluait
« Que c'est avec raison que le jugement dont appel a fait droit àl'intégralité de [sa] demande [...], dès lors que, sur la base de laréclamation de [la première défenderesse] telle qu'elle est reprise en sesconclusions, le calcul dont question s'établit comme suit :
a) Réclamation de [la seconde défenderesse] en principal : 13.297,45euros ;
b) Réclamation de [la première défenderesse] au titre de frais médicauxnon remboursés : 2.051,40 euros ;
c) Préjudice matériel temporaire de [la première défenderesse] : 7.500,00euros ;
d) Préjudice matériel permanent de [la première défenderesse] : 4.709,75euros ;
e) Préjudice matériel futur de [la première défenderesse] : réservé ;
Total, sous la réserve énoncée : 27.558,60 euros ;
Qu'il s'en déduit que le montant maximum de l'intervention de [lademanderesse], en raison du partage de responsabilité, représente 50 pourcent du total ci-dessus, soit 13.779,30 euros ;
[...] Que le résultat atteint est donc supérieur au montant de laréclamation de la [seconde défenderesse], laquelle doit donc bien êtredéclarée fondée dans sa totalité ».
La subrogation accordée à l'organisme assureur par l'article 70, § 2, dela loi du 9 août 1963, devenu 76quater, § 2, puis par l'article 136, § 2,de la loi coordonnée le 14 juillet 1994 ne s'exerce que sur les sommesqui, en vertu du droit commun, réparent le même dommage que celui ayantjustifié l'intervention de l'organisme assureur.
Si la subrogation de l'organisme assureur est, depuis l'arrêté royal n° 19du 4 décembre 1978, préférentielle, c'est en ce sens que, même si laresponsabilité du tiers n'est que partielle, il peut, dans les limites deses décaissements, exercer son recours sur la totalité des sommes dont leresponsable de l'accident ou son assureur sont redevables pour le mêmedommage. Cette règle n'a pas pour conséquence que l'organisme assureurpuisse exercer son recours subrogatoire sur d'autres dommages dans laréparation desquels il n'est pas intervenu.
Corrélativement, dans le chef de la victime, c'est uniquement le cumul desréparations pour le même dommage que les articles 76quater, § 2, alinéa1^er, de la loi du 9 août 1963 puis 136, § 2, alinéa 1^er, de la loicoordonnée du14 juillet 1994 interdisent. En vertu des articles 1382 et 1383 du Codecivil, celle-ci peut, dans les limites du partage de responsabilité,prétendre à la réparation intégrale des dommages dans la réparationdesquels l'organisme assureur n'est pas intervenu.
Le dommage de la victime consistant en des soins de santé est distinct dudommage de la victime dû à l'atteinte à sa capacité sur le marché dutravail.
Il s'en déduit que, pour fixer le quantum du recours subrogatoire accordéà l'organisme assureur en raison de ses décaissements pour des soins desanté, le juge peut uniquement prendre en considération le montant dudommage évalué en droit commun découlant de ce que soit l'organismeassureur soit la victime ont supporté des décaissements en soins de santéen raison de l'accident.
Quant à la victime, elle ne peut se voir opposer l'interdiction de cumulet l'existence d'un recours subrogatoire de l'organisme assureur pour despostes du dommage différents de celui pour lequel elle a obtenu réparationen vertu de la législation sur l'assurance contre la maladie etl'invalidité.
L'arrêt attaqué ne constate pas que la seconde défenderesse auraiteffectué des décaissements pour d'autres postes que des soins de santé, end'autres termes qu'elle aurait payé des indemnités d'incapacité detravail.
Il évalue en droit commun le préjudice pour les frais médicaux et dekinésithérapie à un total de 14.831,57 euros (dont 13.297,54 eurosdécaissés par la seconde défenderesse et 1.534,03 euros décaissés par lapremière défenderesse), soit, compte tenu du partage de responsabilité, àla somme de 7.415,79 euros.
Pour évaluer le quantum de l'action subrogatoire, l'arrêt additionne cemontant de 7.415,79 euros à la moitié du préjudice matériel temporaireprofessionnel et scolaire subi par la première défenderesse, soit 3.750euros, et à la moitié de son préjudice matériel permanent passé dû àl'incapacité de travail, soit 3.493,15 euros. Le total (soit 14.658,94euros) excédant les décaissements de la seconde défenderesse, il décidequ'il revient à celle-ci la somme en principal de 13.297,45 euros et qu'ilsubsiste pour la première défenderesse un solde sur le poste « préjudicematériel permanent passé » de 1.361,44 euros (en réalité 1.361,49 euros).
Il viole partant tant les dispositions de la législation sur l'assurancesoins de santé et indemnités, qui déterminent l'étendue du recourssubrogatoire de l'organisme assureur et, corrélativement, n'interdisent àla victime le cumul de réparation que pour le même dommage (articles76quater, spécialement§ 2, de la loi du 9 août 1963 et 136, § 2, de la loi coordonnée le 14juillet 1994), que les articles 1382 et 1383 du Code civil, qui accordentà la victime le droit, compte tenu du partage de responsabilité, à laréparation intégrale de son dommage lorsque l'organisme assureur n'est passubrogé dans lesdits droits (violation de toutes les dispositions viséesau moyen, sauf l'article 149 de la Constitution).
Deuxième branche
En vertu des articles 1382 et 1383 du Code civil, le tiers responsable etson assureur de la responsabilité civile ne peuvent être condamnés, autotal, à indemniser plus que le dommage de la victime compte tenu dupartage de responsabilité. L'intervention de l'organisme assureur et lasubrogation préférentielle qui en découlent ne peuvent ainsi les amener àpayer plus que le montant qui aurait été dû en droit commun en l'absenced'intervention de l'organisme assureur.
Pour le tiers responsable et son assureur de la responsabilité civile, ilest indifférent que le juge du fond doive déterminer le quantum du recourssubrogatoire de cet organisme assureur en comparant, poste par poste, sesdécaissements et la valeur du cas en droit commun ou qu'il doiveglobaliser tous les postes pour lesquels une intervention concurrente del'assurance soins de santé et indemnités et du droit commun est possible.En effet, le juge ne peut, en toute hypothèse, accorder à l'organismeassureur que ce qu'il n'accorde pas à la victime. En d'autres termes, ilne peut évaluer l'assiette du recours subrogatoire de l'organisme assureuren y incluant des montants qu'il condamne également le tiers responsableet son assureur à payer à la victime.
L'arrêt condamne la demanderesse et la partie appelée en déclarationd'arrêt commun à payer à la fois à la première défenderesse la moitié detout son préjudice pour les soins de santé (767,02 euros), le préjudicetemporaire professionnel et scolaire (3.750 euros) et le préjudicematériel passé dû à l'incapacité permanente (3.493,15 euros) et à laseconde défenderesse la totalité de ses décaissements, soit la somme de13.297,45 euros en principal. Pour ce faire, il additionne la moitié desdécaissements de l'organisme assureur, le dommage de la victime en soinsde santé, le préjudice temporaire professionnel et scolaire et lepréjudice matériel permanent passé. Le total (soit 14.658,94 euros)excédant les décaissements de l'organisme assureur, il décide que lapremière défenderesse a droit à 1.361,44 euros pour son préjudice matérielpermanent passé, c'est-à-dire pour le solde de tous les postes pourlesquels il vérifie les droits respectifs de l'organisme assureur et de lavictime.
L'arrêt méconnaît, partant, tant la portée des dispositions de lalégislation sur l'assurance contre la maladie et l'invalidité réglantl'interdiction de cumul et le recours subrogatoire de l'organisme assureur(violation des articles 70, devenu 76quater, § 2, de la loi du 9 août 1963puis 136, § 2, de la loi coordonnée du 14 juillet 1994) que les articles1382 et 1383 du Code civil.
Troisième branche
L'arrêt constate, dans ses motifs, que si la subrogation de la secondedéfenderesse n'était pas préférentielle, la demanderesse et la partieappelée en déclaration d'arrêt commun devraient verser à celle-ci la sommede 6.648,73 euros et à la première défenderesse la moitié des fraismédicaux et de kinésithérapie, soit 767,02 euros, la moitié de sonpréjudice matériel temporaire professionnel et scolaire, soit 3.750 euros,et la moitié de son préjudice matériel permanent passé dû à une incapacitéde travail, soit 3.493,15 euros. Il déduit du caractère préférentiel de lasubrogation que la seconde défenderesse « a droit à son surplus, soit6.648,73 euros, en sorte que ce montant doit être déduit des montants dusà [la première défenderesse] repris ci-dessus, en sorte qu'il lui reste dûpour son dommage matériel permanent passé 1.361,44 euros ». Il admet ainsidans ses motifs que, pour respecter le caractère préférentiel de lasubrogation de la seconde défenderesse, il ne peut condamner lademanderesse et la partie appelée en déclaration d'arrêt commun à payer àla première défenderesse les sommes de 767,02 euros pour frais médicaux etde kinésithérapie et de 3.750 euros pour le préjudice matériel temporaire,professionnel et scolaire, et que le montant qui reste dû à celle-ci pourson dommage matériel permanent passé doit être réduit de 3.493,15 euros à1.361,44 euros. Il décide ainsi que, pour les postes sur lesquels ilexamine les droits respectifs de la victime et de l'organisme assureur, lemontant du dommage en droit commun est de 14.658,89 euros, compte tenu dupartage de responsabilité.
En condamnant néanmoins dans son dispositif in solidum la demanderesse etla partie appelée en déclaration d'arrêt commun à payer à la premièredéfenderesse les sommes de 767,02 euros à titre de frais médicaux et dekinésithérapie, 3.750 euros pour le préjudice matériel temporaireprofessionnel et scolaire, et 3.493,15 euros pour le préjudice matériel dûà l'incapacité permanente passée, et à la seconde défenderesse la somme enprincipal de 13.297,45 euros (soit un total de 21.307,62 euros), l'arrêtest entaché d'une contradiction entre les motifs et le dispositif, ensorte qu'il n'est pas régulièrement motivé (violation de l'article 149 dela Constitution).
III. La décision de la Cour
Quant à la première branche :
En vertu de l'article 76quater, § 2, alinéa 1^er, de la loi du 9 août 1963instituant et organisant un régime d'assurance obligatoire contre lamaladie et l'invalidité comme de l'article 136, § 2, alinéa 1^er, de laloi coordonnée du 14 juillet 1994 relative à l'assurance obligatoire soinsde santé et indemnités, les prestations prévues par ces lois sont refuséeslorsque le dommage résultant d'une maladie, de lésions, de troublesfonctionnels ou du décès est effectivement réparé en vertu d'une autrelégislation belge, d'une législation étrangère ou du droit commun.
Aux termes de l'alinéa 4 du même paragraphe de ces deux dispositions,l'organisme assureur est subrogé de plein droit au bénéficiaire ; cettesubrogation vaut, jusqu'à concurrence du montant des prestationsoctroyées, pour la totalité des sommes qui sont dues en vertu d'unelégislation belge, d'une législation étrangère ou du droit commun et quiréparent partiellement ou totalement le dommage visé à l'alinéa 1^er.
Il suit de ces dispositions que l'organisme assureur, qui a fourni à lavictime d'un dommage résultant d'une maladie, de lésions, de troublesfonctionnels ou du décès l'une des prestations prévues par l'assuranceobligatoire, est subrogé à la victime, jusqu'à concurrence du montant decette prestation, sur la totalité des sommes dues, compte tenu du partageéventuel de responsabilité, par le tiers responsable ou par son assureuren réparation de ce dommage, sans qu'il soit requis que les sommesauxquelles s'étend la subrogation réparent le même élément du dommage quecelui auquel correspond la prestation octroyée, pourvu que l'élément dudommage que ces sommes réparent soit de nature à justifier l'octroi d'uneprestation de l'assurance obligatoire.
L'application de cette règle, qui n'a pas pour effet d'étendrel'interdiction du cumul des réparations pour le même dommage prévue auxarticles 76quater, § 2, alinéa 1^er, et 136, § 2, alinéa 1^er, précités,assure à la victime, dans les limites d'un éventuel partage deresponsabilité, la réparation intégrale de son dommage en prévenant lapossibilité qu'elle puisse obtenir, pour l'ensemble de son dommage, uneréparation excédant celui-ci.
L'arrêt constate que la seconde défenderesse a payé en faveur de lavictime, première défenderesse, des soins de santé s'élevant à 13.297,45euros, soit une somme inférieure au total des sommes dues par le tiersresponsable et par son assureur, compte tenu du partage de responsabilitéretenu, en réparation des éléments du dommage de nature à justifierl'octroi d'une prestation de l'assurance obligatoire, étant 7.415,75euros, 3.750 euros et 3.493,15 euros à titre d'indemnisation,respectivement, des frais médicaux et de kinésithérapie, du « préjudicematériel professionnel et scolaire » et du « préjudice matériel passé dû àl'incapacité de travail ».
En déclarant que le recours subrogatoire de la seconde défenderesses'étend, jusqu'à concurrence du montant qu'elle a payé, aux sommes dues àla victime en réparation desdits éléments de son dommage, l'arrêt fait uneexacte application des dispositions légales dont le moyen, en cettebranche, invoque la violation.
Le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli.
Quant à la deuxième branche :
La subrogation de l'organisme assureur aux droits de la victime à laquelleil a octroyé des prestations prévues par l'assurance obligatoire contre lamaladie et l'invalidité ne peut avoir pour effet d'imposer au tiersresponsable et à son assureur une charge supérieure à la réparation dudommage due en vertu des articles 1382 et 1383 du Code civil.
En condamnant la demanderesse à payer à la première défenderesse dessommes qu'il inclut par ailleurs dans l'assiette du recours subrogatoirede la seconde défenderesse, l'arrêt viole toutes les dispositions légalesvisées au moyen, en cette branche.
Le moyen, en cette branche, est fondé.
Quant aux autres griefs :
Il n'y a pas lieu d'examiner la troisième branche du moyen, qui ne sauraitentraîner une cassation plus étendue.
Sur la demande en déclaration d'arrêt commun :
La demanderesse a intérêt à ce que l'arrêt soit déclaré commun à la partieappelée à la cause devant la Cour à cette fin.
Par ces motifs,
La Cour
Casse l'arrêt attaqué en tant qu'il condamne la demanderesse à payer auxdéfenderesses les montants qu'il précise et en tant qu'il statue sur lesdépens ;
Déclare le présent arrêt commun à J. P. ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêtpartiellement cassé ;
Réserve les dépens pour qu'il soit statué sur ceux-ci par le juge dufond ;
Renvoie la cause, ainsi limitée, devant la cour d'appel de Bruxelles.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, troisième chambre, à Bruxelles, oùsiégeaient le président Christian Storck, les conseillers Daniel Plas,Sylviane Velu, Philippe Gosseries et Martine Regout, et prononcé enaudience publique du vingt et un avril deux mille huit par le présidentChristian Storck, en présence de l'avocat général Jean-Marie Genicot, avecl'assistance du greffier Jacqueline Pigeolet.
21 AVRIL 2008 C.06.0675.F/1