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15/02/2008 | BELGIQUE | N°C.07.0243.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 15 février 2008, C.07.0243.F


Cour de cassation de Belgique

Arrêt

N° C.07.0243.F

B. R. J.,

demandeur en cassation,

admis au bénéfice de l'assistance judiciaire par ordonnance du premierprésident du 16 mai 2007 (pro Deo n° G.07.0081.F),

représenté par Maître Lucien Simont, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 149, où il est faitélection de domicile,

contre

1. ASSOCIATION HOSPITALIERE DE BRUXELLES - CENTRE HOSPITALIERUNIVERSITAIRE BRUGMANN, association de droit public dont le siège estétabli à Bruxelles, p

lace Van Gehuchten, 4,

2. D. D., en qualité de directeur du Centre Hospitalier UniversitaireBrugmann, domicilié...

Cour de cassation de Belgique

Arrêt

N° C.07.0243.F

B. R. J.,

demandeur en cassation,

admis au bénéfice de l'assistance judiciaire par ordonnance du premierprésident du 16 mai 2007 (pro Deo n° G.07.0081.F),

représenté par Maître Lucien Simont, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 149, où il est faitélection de domicile,

contre

1. ASSOCIATION HOSPITALIERE DE BRUXELLES - CENTRE HOSPITALIERUNIVERSITAIRE BRUGMANN, association de droit public dont le siège estétabli à Bruxelles, place Van Gehuchten, 4,

2. D. D., en qualité de directeur du Centre Hospitalier UniversitaireBrugmann, domicilié à Etterbeek, avenue d'Auderghem, 255,

défendeurs en cassation,

représentés par Maître Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue des Quatre Bras, 6, où il estfait élection de domicile.

I. La procédure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirigé contre le jugement rendu le 23 avril2007 par le tribunal de première instance de Bruxelles, statuant en degréd'appel.

Le conseiller Daniel Plas a fait rapport.

L'avocat général délégué Philippe de Koster a conclu.

II. Le moyen de cassation

Le demandeur présente un moyen libellé dans les termes suivants :

Dispositions légales violées

- articles 1^er, 8, § 1^er, et 13, spécialement alinéas 2 et 5, de la loidu 26 juin 1990 relative à la protection de la personne des maladesmentaux ;

- article 149 de la Constitution.

Décisions et motifs critiqués

Le jugement attaqué déclare non fondé l'appel que le demandeur avait formécontre le jugement par lequel le juge de paix du cinquième canton deBruxelles avait, le 8 mars 2007, ordonné le maintien de la mise enobservation du demandeur, pour une durée de deux ans, dans le servicepsychiatrique du Centre hospitalier universitaire Brugmann, confirme cejugement et condamne le demandeur aux dépens d'appel.

Le jugement attaqué fonde sa décision sur ce que :

« 1. L'article 2 de la loi du 26 juin 1990 relative à la protection de lapersonne des malades mentaux stipule que :

`Les mesures de protection ne peuvent être prises, à défaut de tout autretraitement approprié, à l'égard d'un malade mental, que si son état lerequiert, soit qu'il mette gravement en péril sa santé et sa sécurité,soit qu'il constitue une menace grave pour la vie ou l'intégrité d'autrui'.

La loi requiert ainsi qu'il y ait maladie mentale et menace ou périlgrave.

2. Comme le relève, à juste titre, le juge de paix du cinquième canton deBruxelles, tous les médecins ayant examiné [le demandeur] concluent àl'existence d'une maladie mentale.

Le docteur Segers, psychiatre, consulté par [le demandeur] depuisplusieurs années, s'il déclare que son patient ne représente pas un dangerni pour lui-même, ni pour autrui, souligne toutefois que [le demandeur]souffre de difficultés psychiatriques importantes qui l'empêchent de menerune vie autonome et active.

Le rapport établi par le docteur Vercruysse, annexé à la demande initialede mise en observation, et dont les éléments sont repris dans le rapportdu docteur Corten, mettait en exergue un certain nombre de symptômes telsque :

- hallucinations

- délire

- refus de soins

- risque de passage à l'acte hétéro-agressif.

Le docteur Corten considère, dans son rapport du 22 février 2007, que cesdifférents éléments sont toujours présents alors que l'hospitalisation [dudemandeur] au sein du C.H.U. Brugmann dure depuis trois semaines.

3. Quant à la gravité de son état, [le demandeur] a reconnu, tant dans sarequête d'appel qu'à l'audience du 16 avril 2007, qu'il souffrerégulièrement d'anorexie et de perturbations de ses défenses immunitaires.

Il déclare qu'il s'alimente actuellement, c'est-à-dire depuis son séjourau C.H.U. Brugmann, normalement.

Chez sa mère, il craint, comme le mentionne le docteur Segers, êtreempoisonné par les aliments qu'elle lui donne.

Le tribunal constate donc que [le demandeur] met gravement en péril sasanté en ne s'alimentant pas à suffisance lorsqu'il n 'est pas encadré pardes professionnels.

4. Par ailleurs, tant le docteur Vercruysse que le docteur Corten mettenten évidence un risque de passage à l'acte hétéro-agressif.

Si le docteur Segers estime que son patient ne représente pas un danger,il considère toutefois qu'une hospitalisation pourrait servir à dégagerune solution acceptée tant par [le demandeur] que par sa mère puisqu'ilexiste des difficultés aiguës entre [le demandeur] et sa mère.

Ces très importantes difficultés combinées avec un risque de passage àl'acte hétéro-agressif, permettent au tribunal de conclure, également, àl'existence d'une menace grave pour l'intégrité d'autrui.

5. Le tribunal s'estimant informé à suffisance, il n'y a pas lieu à ladésignation d'un expert.

6. Aucun autre traitement approprié n'est envisageable actuellementpuisque [le demandeur] n'a aucune conscience morbide et refuse untraitement médicamenteux.

Les seules consultations extérieures chez le docteur Segers ne peuventsuffire pour effacer les causes de la gravité de la situation, à savoirl'anorexie [du demandeur] et les risques d'hétéro-agressivité.

7. En conséquence, le tribunal confirme le jugement dont appel en ce qu'ilordonne le maintien de la mesure de protection ».

Griefs

Le jugement attaqué confirme le jugement entrepris par lequel le juge depaix du cinquième canton de Bruxelles avait, le 8 mars 2007, ordonné lemaintien de la mise en observation du demandeur pour une durée de deuxans, dans le service psychiatrique [de la défenderesse].

Sauf les mesures de protection prévues par la loi du 26 juin 1990, lediagnostic et le traitement des troubles psychiatriques ne peuvent donnerlieu à aucune restriction de la liberté individuelle (article 1^er de laloi du 26 juin 1990).

Les conditions auxquelles les articles 8 et 13 de la loi du 26 juin 1990subordonnent le maintien de l'hospitalisation du malade mental sont doncde rigueur.

L'article 13, alinéa 5, de la loi du 26 juin 1990 dispose que «lorsque lemalade a produit l'avis écrit d'un médecin de son choix, et que cet avisdiverge de celui du médecin-chef de service, le juge entend les médecinscontradictoirement en présence de l'avocat du malade ».

L'article 8, § 1^er, alinéa 2, de la loi du 26 juin 1990, applicable enl'espèce en vertu de l'article 13, alinéa 2, de cette loi, dispose que lejuge doit avoir entendu toutes les parties à l'audience.

Le jugement attaqué constate que « le docteur Segers, psychiatre, consultépar [le demandeur] depuis plusieurs années ... déclare que son patient nereprésente pas un danger ni pour lui-même ni pour autrui ».

Un avis écrit en ce sens du docteur Segers en date du 6 mars 2007 a étéproduit par le demandeur.

Le demandeur se prévalait de cet avis dans sa requête d'appel du 15 mars2007 qui en reproduit les termes.

Si le jugement attaqué constate que le demandeur et son conseil ont étéentendus en chambre du conseil le 16 avril 2007, il ne résulte toutefoispas de ces constatations que le docteur Segers aurait été entendu par letribunal, en présence de l'avocat du demandeur et ce contradictoirementavec les autres médecins sur les avis contraires desquels le jugementattaqué fonde sa décision.

Ce jugement ne constate pas davantage que les défendeurs auraient étéentendus à l'audience ainsi que [l'impose] l'article 8, § 1^er, alinéa 2,de la loi du 26 juin 1990.

L'accomplissement de ces formalités substantielles n'ayant été constaté nipar le jugement attaqué ni par le jugement entrepris qu'il confirme, ellessont censées avoir été omises et, par suite, le jugement attaqué nejustifie pas légalement sa décision de confirmer le jugement entrepris du8 mars 2007 ordonnant le maintien, pour une durée de deux ans, de la miseen observation du demandeur, et ce au regard tant de l'auditioncontradictoire des médecins (violation des articles 1^er et 13,spécialement alinéa 5, de la loi du 26 juin 1990 visés au moyen) que del'audition par le juge de toutes les parties et donc aussi des défendeurs(violation des articles 1^er, 8, § 1^er, alinéa 2, et 13, alinéa 2, de laloi du 26 juin 1990 visés au moyen).

A tout le moins, le jugement attaqué, à défaut de constatation del'accomplissement desdites formalités, ne permet pas à la Cour decontrôler la légalité de sa décision et, par suite, n'est pasrégulièrement motivé (violation de l'article 149 de la Constitution).

III. La décision de la Cour

Sur la fin de non-recevoir opposée au pourvoi par les défendeurs en tantqu'il est formé contre eux :

Le pourvoi en cassation formé contre un défendeur qui n'est pas partie àla décision attaquée est irrecevable.

Lorsque le juge statue sur le maintien de l'hospitalisation d'un malade enapplication de la loi du 26 juin 1990 relative à la protection de lapersonne des malades mentaux, ni l'établissement dans lequel le malade esthospitalisé ni le directeur de cet établissement qui a transmis au juge depaix le rapport circonstancié attestant la nécessité de ce maintienconformément à l'article 13, alinéa 1^er, de la loi, ne sont parties à lacause.

Le seul fait que le jugement attaqué mentionne l'identité du défendeur etla qualité d'« intimé » ne confère pas davantage à cette personne laqualité de partie à la cause.

La fin de non-recevoir est fondée.

Sur le moyen :

L'appel de la décision du juge de paix qui maintient l'hospitalisation dumalade mental est régi par l'article 30, §§ 2 à 6, de la loi du 26 juin1990.

Cet article ne reprend pas les règles énoncées aux articles 8, § 1^er,alinéa 2, et 13, alinéas 2 et 5, de la même loi, qui sont d'applicationdevant le juge de paix.

Dans la mesure où il soutient que les conditions auxquelles ces deuxderniers articles subordonnent le maintien de l'hospitalisation du maladesont applicables en degré d'appel, le moyen manque en droit.

Dans la mesure où il ne précise pas en quoi le jugement attaqué violeraitl'article 1^er de ladite loi, le moyen est irrecevable.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;

Vu l'article 34, alinéa 3, de la loi du 26 juin 1990, laisse les dépens àcharge de l'Etat.

Les dépens taxés à la somme de cinq cent soixante-six euros vingt-troiscentimes en débet envers la partie demanderesse et à la somme de cent deuxeuros quatre-vingt-quatre centimes envers la partie défenderesse.

Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, oùsiégeaient le président de section Claude Parmentier, les conseillersDidier Batselé, Albert Fettweis, Daniel Plas et Martine Regout, etprononcé en audience publique du quinze février deux mille huit par leprésident de section Claude Parmentier, en présence de l'avocat généraldélégué Philippe de Koster, avec l'assistance du greffier Marie-JeanneMassart.

15 FEVRIER 2008 C.07.0243.F/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.07.0243.F
Date de la décision : 15/02/2008

Analyses

MALADE MENTAL


Origine de la décision
Date de l'import : 31/08/2018
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2008-02-15;c.07.0243.f ?
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