Cour de cassation de Belgique
Arret
NDEGC.04.0071.N
MEDTRONIC BELGIUM, societe anonyme,
Me Paul Wouters, avocat à la Cour de cassation,
contre
ETAT BELGE (Finances),
Me Ignace Claeys Bouuaert, avocat à la Cour de cassation.
I. La procedure devant la Cour
Le pourvoi est dirige contre l'arret rendu le 7 fevrier 2003 par la courd'appel de Bruxelles.
Le president Ivan Verougstraete a fait rapport.
L'avocat general Dirk Thijs a conclu.
II. Les moyens de cassation
La demanderesse presente deux moyens libelles dans les termes suivants.
Premier moyen
Dispositions legales violees
- articles 10, 11 et 172 de la Constitution coordonnee ;
- article 26, S: 2, de la loi speciale du 6 janvier 1989 sur la Courd'arbitrage ;
- article 37, specialement S: 1er, du Code de la taxe sur la valeurajoutee ;
- article 12.3, a), alinea 3, de la directive 77/388/CEE du Conseil, du17 mai 1977, en matiere d'harmonisation des legislations des Etats membresrelatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Systeme commun de taxe surla valeur ajoutee: assiette uniforme, remplace par l'article 1er de ladirective 92/77/CEE du Conseil du 19 octobre 1992 completant le systemecommun de taxe sur la valeur ajoutee et modifiant la directive 77/388/CEEet l'annexe H à la directive 92/77/CEE du Conseil du 19 octobre 1992completant le systeme commun de taxe sur la valeur ajoutee et modifiant ladirective 77/388/CEE ;
- articles 10 (ex article 5) et 12 (ex article 6) de la version consolideedu Traite du 25 mars 1957 instituant la Communaute Economique Europeenne,fait à Rome, approuve par la loi du 2 decembre 1957, modifie par letraite de Nice, approuve par la loi du 7 juin 2002 ;
- principes communautaires du droit communautaire en matiere deproportionnalite et d'egalite, consacres notamment par les articles 10 (exarticle 5) et 12 (ex article 6) precites de la version consolidee duTraite du 25 mars 1957 instituant la Communaute Economique Europeenne,fait à Rome, approuve par la loi du 2 decembre 1957, modifie par leTraite de Nice, approuve par la loi du 7 juin 2002.
Decisions et motifs critiques
L'arret attaque declare l'appel du defendeur recevable et en grande partiefonde, met à neant le jugement entrepris, sauf en tant qu'il dit pourdroit que les amendes reclamees par le defendeur ne sont pas dues par lademanderesse, et, statuant à nouveau, declare les demandes initiales dela demanderesse recevables mais non fondees sauf dans la mesure oul'annulation totale des deux amendes est reclamee, par les motifssuivants :
« a) en ce qui concerne le tarif applicable
Pour qu'en matiere de taxe sur la valeur ajoutee, un appareil puisse etreconsidere en vertu de la rubrique XXIII point 2 du tableau A de l'arreteroyal nDEG 20 en matiere de taxe sur la valeur ajoutee comme «un autreappareil à tenir à la main, à porter sur la personne ou à implanterdans l'organisme, afin de compenser une deficience ou une infirmite», cetappareil doit etre, des lors, porte par le patient de maniere interne (parimplantation) ou de maniere externe, ce qui implique que l'interessedispose de l'autonomie pour se deplacer et donc pour transporterl'appareil d'un endroit à un autre.
Il ressort des descriptions du Dr V. D. O. et de la brochure d'informationque l'oxygenateur ne repond pas à ces conditions ; cet appareil qui a laforme d'un petit pot est en effet relie à un circuit chirurgical completet constitue une partie necessaire de toute une infrastructure d'unhopital , celle-ci etant utilisee, selon les declarations du Dr V. D. O.,`pour differents patients et etant correctement (...) soumise au taux dela taxe sur la valeur ajoutee N' (à savoir le taux normal de 19,5 ou 20,5pct).
Les patients qui portent des tuyaux de raccord à l'oxygenateur au coursd'operations à coeur ouvert ou en cas de dommages graves aux poumonsresultant de causes chimiques, physiques ou organiques, ne sont pas despatients ambulatoires : ils ne sont pas autonomes et ne peuvent pas sedeplacer.
La demanderesse tente en vain de comparer l'oxygenateur « aux accessoiresindividuels faisant partie d'un rein artificiel y compris les troussesutilisees' dont il est question à la rubrique XXIII.
Aux termes du texte d'interpretation stricte du point 2 de la rubriqueXXIII , les autres appareils ne peuvent etre compares aux accessoiresindividuels faisant partie d'un rein artificiel.
Ce point 2 est en effet redige comme suit :
- les appareils d'orthopedie ;
- les appareils pour fractures ;
- les appareils de prothese dentaire etc ;
- les appareils pour faciliter l'audition ;
- les autres appareils à tenir à la main, à porter sur la personne ouà implanter dans l'organisme afin de compenser une deficience ou uneinfirmite ;
- le materiel individuel porte par des personnes qui souffrentd'incontinence ;
- les accessoires individuels faisant partie d'un rein artificiel.
Ce texte n'est, des lors, pas redige de maniere à permettre d'appliquerpar analogie ce qui est prevu pour les accessoires d'un rein artificiel àd'autres accessoires, comme le soutient la demanderesse.
C'est de maniere surabondante que la cour constate d'ailleurs quel'oxygenateur decrit ci-dessus n'est pas comparable à un accessoireindividuel faisant partie d'un rein artificiel, ne fut-ce que parce quedans ce dernier cas les interesses sont des patients ambulatoires.
Le taux normal correspond au regime des droits de douanes ; lademanderesse utilise le taux portant le code 9018/sous-code 9050 pour lesoxygenateurs ce qui correspond au taux normal de la taxe sur la valeurajoutee (et non le code 9021 qui correspond au taux reduit de la taxe surla valeur ajoutee).
La demanderesse devait donc appliquer le taux normal de 19,5 pct ou de20,5 pct aux oxygenateurs.
b) en ce qui concerne la pretendue violation du principe d'egalite et lademande de poser une question prejudicielle à la Cour d'arbitrage parceque les oxygenateurs sont soumis au taux normal alors que « lesaccessoires individuels faisant partie d'un rein artificiel, y compris lestrousses utilisees », sont soumis au taux reduit.
Ce point a dejà rec,u une reponse sous a) in fine : les deux sortesd'appareils ne sont pas comparables parce que les oxygenateurs neconcernent pas des patients ambulatoires ce qui est toutefois le cas pourles reins artificiels.
Il n'y a, des lors, pas de discrimination ni de violation du principed'egalite ni lieu de poser une question prejudicielle des lors que lescategories ne sont pas comparables ».
Griefs
Suivant la rubrique XXIII, point 2, tableau A de l'annexe à l'arreteroyal nDEG 20 du 20 juillet 1970 fixant le taux de la taxe sur la valeurajoutee et determinant la repartition des biens et des services selon cestaux, tel qu'il etait applicable avant son remplacement par l'arrete royaldu 25 mars 1998, pris en execution de l'article 37 du Code de la taxe surla valeur ajoutee, le taux reduit de 6 pct est applicable aux appareilsd'orthopedie (y compris les ceintures medico-chirurgicales) ; aux articleset appareils pour fractures (attelles, gouttieres et similaires) ; auxarticles et appareils de prothese dentaire, oculaire ou autre ; auxappareils pour faciliter l'audition aux sourds et aux autres appareils àtenir à la main, à porter sur la personne ou à implanter dansl'organisme, afin de compenser une deficience ou une infirmite ; auxappareils individuels et leurs accessoires pour les personnes souffrantd'incontinence ; aux accessoires individuels faisant partie d'un reinartificiel, y compris les trousses utilisees ».
L'article 37, S: 1er, du Code de la taxe sur la valeur ajoutee dispose quele Roi fixe les taux et arrete la repartition des biens et des servicesentre ces taux tenant compte de la reglementation edictee en la matierepar les Communautes europeennes.
L'application du taux reduit de la taxe sur la valeur ajoutee s'effectueen execution de la directive 92/77/CEE du Conseil, du 19 octobre 1992,completant le systeme commun de taxe sur la valeur ajoutee et modifiant ladirective 77/388/CEE.
En vertu de l'article 12, alinea 3, a), de la directive precitee, lesEtats membres peuvent appliquer, outre un taux normal, un ou deux tauxreduits qui s'appliquent aux categories de biens et de services visees àl'annexe H.
Suivant l'annexe H de cette directive du 19 octobre 1992, la liste deslivraisons de biens et des prestations de services pouvant faire l'objetde taux reduits comprend une categorie 4 comportant « les equipementsmedicaux, le materiel auxiliaire et les autres appareils normalementdestines à soulager ou traiter des handicaps, à l'usage personnel etexclusif des handicapes, y compris la reparation de ces biens, ainsi queles sieges d'enfant pour voitures automobiles ».
La demanderesse a souleve à la page 18 de ses conclusions de syntheseregulierement prises, deposees au greffe de la cour d'appel de Bruxellesle 29 septembre 2000 : « 52.L'oxygenation et la dialyse renale sont desactes techniquement et fonctionnellement tout à fait comparables. 53. Encas de dialyse renale, le sang est purifie grace à l'utilisation d'unrein artificiel qui reprend les fonctions du rein naturel qui est l'organequi elimine les elements impurs du sang. Un rein artificiel doit etrecompris comme une pompe prelevant le sang du corps et le reinjectant aprespurification par un systeme de filtrage. Apres avoir ete nettoyee, cettepompe est reutilisee par d'autres patients. Un paquet individuel qui estnomme la trousse est compose de filtres, de petits tuyaux et d'aiguilles,qui sont tous remplaces apres la dialyse. 54. La livraison du reinartificiel est soumise au taux normal de la taxe sur la valeur ajoutee.Les accessoires individuels ( la trousse) comportant les filtres et tousles autres accessoires individuels, beneficient toutefois d'un taux de 6pct. Le demanderesse a agi de maniere identique pour `l'oxygenateur et lesaccessoires individuels ». L'appareil qui peut etre utilise par plusieurspatients comme la `pompe centrifuge' qui peut etre comparee au reinartificiel lors de la dialyse renale, a ete livre par la demanderesse en yappliquant le taux normal de la taxe sur la valeur ajoutee. Le taux de 6pct a ete applique à l'equipement medical à usage unique, soit`l'oxygenateur et les accessoires individuels' qui peut etre compare à latrousse en cas de dialyse renale ».
Premiere branche
En application de l'article 10 (ex article 5) de la version consolidee duTraite CEE, les Etats membres prennent toutes mesures generales ouparticulieres propres à assurer l'execution des obligations decoulant dupresent traite. En vertu de cette meme disposition les Etats membresfacilitent à la communaute europeenne l'accomplissement de sa mission etils s'abstiennent de toutes mesures susceptibles de mettre en peril larealisation des buts du Traite CEE. Ces obligations valent pour toutes lesinstances de pouvoir des Etats membres et donc, dans le cadre de leurscompetences, pas uniquement pour les instances legislatives mais aussipour les instances judiciaires. Ces instances nationales doiventdevelopper l'application du droit national et l'appliquer à la lumiere dudroit communautaire dont font parties les principes communautaires enmatiere de proportionnalite et d'egalite, consacres notamment par lesarticles 10 (ex article 5) et 12 (ex article 6) du Traite CEE.
Cela a pour consequence que si la Belgique fait usage de la possibilitequi lui est offerte par l'article 12, alinea 3, a) de la directiveprecitee d'appliquer le taux reduit de 6 pct aux biens et services enoncesà la categorie 4 de l'annexe H à ladite directive, cette categorie 4doit, en principe, etre reprise dans son integralite dans la mesure ou lesprincipes communautaires en matiere de proportionnalite et d'egaliteobligent la Belgique à le faire.
Il est contraire aux principes communautaires precites, specialement enmatiere d'egalite, d'exclure de maniere arbitraire et sans justificationraisonnable par rapport à la distinction faite par la Belgique des bienscomme les « oxygenateurs et accessoires individuels » qui relevent de ladescription « equipements medicaux, materiel auxiliaire et les autresappareils (...) », prevus par la categorie 4 de l'annexe H, del'application du taux reduit de6 pct, alors que d'autres biens de cette nature y sont soumis.
Il s'ensuit que l'arret attaque exclut illegalement les « oxygenateurs etaccessoires individuels » du benefice d'un taux reduit de 6 pct à lataxe sur la valeur ajoutee alors que ces biens qui repondent à ladescription « d'equipements medicaux, materiel auxiliaire et autresappareils (...) » prevus par la categorie 4 de l'annexe H ajoutee à ladirective 77/388/CEE du Conseil du 17 mai 1997 par la directive 92/77/CEEdu Conseil du 19 octobre 1992, ne peuvent etre exclus arbitrairement etsans justification raisonnable par la Belgique de cette categorie 4 del'annexe H (violation des articles 10 (ex article 5), 12 (ex article 6) dela version consolidee du Traite CEE du 27 mars 1957, des principescommunautaires en matiere de proportionnalite et d'egalite et de l'article12, alinea 3, a) de la directive 77/388/CEE).
Seconde branche
Le principe d'egalite et l'interdiction de discrimination contenus auxarticles 10, 11 et 172 de la Constitution coordonnee, n'excluent pas qu'oninstaure une difference de traitement selon certains categories pourautant que le critere de distinction soit justifie de maniere objective etraisonnable. L'existence d'une telle justification doit etre appreciee entenant compte du but et des consequences de la mesure contestee et de lanature des principes applicables en l'espece. Le principe d'egalite estviole lorsqu'il est etabli qu'il n'existe pas de lien raisonnable deproportionnalite entre les moyens utilises et le but vise.
« L'oxygenateur et les accessoires individuels » constituent unequipement medical decrit de la maniere suivante par l'expert prive de lademanderesse, cette description etant reprise dans l'arret attaque :« Les oxygenateurs et leurs accessoires steriles sont des biens medicauxà usage unique qui sont utilises pour un patient individuel au coursd'une periode determinee pendant laquelle les poumons du patient ne sontpas en etat d'assurer une respiration normale. Ces produits sont utilisesdans le cadre d'operations à coeur ouvert et en cas de dommages gravesaux poumons resultant de causes chimiques, physiques ou organiques. Lacirculation sanguine proprement dite est ainsi aidee par une pompe externequi, faisant partie de l'infrastructure de l'hopital, est utilisee pardifferents patients et est soumise correctement (...) au taux N de la taxesur la valeur ajoutee (à savoir le taux normal de 19,5 ou 20,5 pct).L'oxygenateur utilise de maniere individuelle, les tuyaux de raccord quiservent de vaisseaux sanguins de remplacement et les systemes de drainagefont, par contre, partie du set de cardiotomie qui est relie au patientindividuel et qui est `implante' temporairement dans le corps du patienten tant qu'appareil servant à compenser une deficience ou uneinfirmite ».
Il ressort de la comparaison de cette description avec celle donnee par lademanderesse à propos des accessoires individuels faisant partie d'unrein artificiel, qu'il n'existe pas de difference essentielle entre lesdeux equipements medicaux dans la mesure ou, dans le premier cas, ilenrichit le sang du patient avec de l'oxygene au moyen d'un appareil fixeet, dans le second cas, il purifie le sang du patient au moyen d'unappareil fixe. Au cours du traitement avec ces appareils fixes respectifsle patient concerne y est relie par des accessoires individuels et il nepeut se deplacer. Le fait de savoir si apres le traitement le patient estun malade ambulatoire, et donc qu'il peut soit quitter l'hopital soitqu'il reste alite, est sans pertinence dans la mesure ou le taux de 6 pctapplique aux accessoires individuels en cas de dialyse renale effectueesur un patient alite qui n'est pas ambulatoire, est applicable sansdistinction.
Il s'ensuit que l'arret attaque ne justifie pas legalement sa decisiond'exclure les « oxygenateurs et les accessoires individuels » dubenefice d'un taux reduit de 6 pct, par le motif qu'il n'y a nidiscrimination ni violation du principe d'egalite, et qu'il n'y a pas lieude poser une question prejudicielle puisque les biens litigieux ne sontpas comparables, des lors que le fait que l'usage d'oxygenateurs neconcerne pas des patients ambulatoires ce qui est bien le cas pour lesreins artificiels, est sans pertinence et que les juges d'appel n'ont pudeduire de cette seule constatation que les deux accessoires individuelsn'etaient pas comparables alors qu'ils le sont dans la mesure ou dans lesdeux cas le patient ne peut se deplacer au cours du traitement avecl'appareil fixe, violant ainsi la notion d'interdiction de discriminationet la notion d'egalite (violation des articles 10, 11 et 172 de laConstitution coordonnee) et refusant à tort de poser une questionprejudicielle à la Cour d'arbitrage (violation de l'article 26, S: 1 dela loi speciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage) et l'article 37du Code de la taxe sur la valeur ajoutee meconnait le principe d'egaliteet l'interdiction de discrimination en n'appliquant pas sans justificationraisonnable un taux reduit de 6 pct aux « oxygenateurs et accessoiresindividuels » (violation de l'article 37, specialement S: 1er, du Code dela taxe sur la valeur ajoutee, de l'article 12, alinea 3, a) de ladirective 77/388/CEE du conseil du 17 mai 1977 et des articles 10, 11 et172 de la Constitution coordonnee).
Second moyen
Dispositions legales violees
- article 1138, 3DEG du Code judiciaire ;
- article 149 de la Constitution.
Decisions et motifs critiques
L'arret attaque dit pour droit que la demanderesse devait appliquer letaux normal de 19,5 ou de 20,5 pct aux oxygenateurs, declare l'appel dudefendeur recevable et en grande partie fonde, met à neant le jugemententrepris, sauf en tant qu'il dit pour droit que les amendes reclamees parle defendeur ne sont pas dues par la demanderesse, et, statuant ànouveau, declare les demandes initiales de la demanderesse recevables maisnon fondees, sauf dans la mesure ou l'annulation totale des deux amendesest reclamee.
Griefs
La demanderesse a invoque aux pages 28 - 29 de ses conclusions de syntheseregulierement deposees qu'elle a formule une reserve quant aux sommesutilisees par le defendeur pour fonder le calcul de ses demandes. Plusspecialement, la demanderesse a repete « qu'elle a aussi accorde desristournes à concurrence de 2 pct sur lesquelles elle n'est donc pasredevable de la taxe sur la valeur ajoutee », que « cela (...) n'est pasconteste et (...) est confirme par le defendeur dans une nouvellecontrainte decernee par lui pour une periode ulterieure » de sorte que« la demande introduite par le defendeur doit, des lors, etre reduite de2 pct » ;
En ce qui concerne le calcul de la taxe sur la valeur ajoutee, l'arretattaque declare la demande de la demanderesse non fondee, sans rienenoncer sur l'assiette de la taxe sur la valeur ajoutee.
Il s'ensuit que l'arret attaque n'a pas repondu aux conclusions preciteesde la demanderesse (violation de l'article 149 de la Constitutioncoordonnee) à tout le moins a neglige de statuer sur un chef de lademande de la demanderesse (violation de l'article 1138, 3DEG, du Codejudiciaire).
III. La decision de la Cour
Sur le premier moyen :
Quant à la premiere branche :
1. L'article 12, alinea 3, a) de la Directive 77/388/CEE du Conseil du 17mai 1977 en matiere d'harmonisation des legislations des Etats membresrelatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Systeme commun de taxe surla valeur ajoutee: assiette uniforme, remplace par l'article 1er de ladirective 92/77/CEE du Conseil du 19 octobre 1992 completant le systemecommun de taxe sur la valeur ajoutee et modifiant la directive 77/388/CEE,permet aux Etats membres d'appliquer des taux reduits notamment sur lesbiens et les services visees à l'annexe H à la directive 92/77/CEE duConseil du 19 octobre 1992, parmi lesquels ceux qui sont enonces par lacategorie 4 soit « les equipements medicaux, le materiel auxiliaire etles autres appareils, normalement destines à soulager ou traiter deshandicaps, à l'usage personnel et exclusif des handicapes, y compris lareparation de ces biens, ainsi que les sieges d'enfant pour voituresautomobiles ».
En execution de cette directive, l'article 37, S: 1er, alinea 1er, du Codede la taxe sur la valeur ajoutee dispose que le Roi, par arrete delibereen Conseil des Ministres, fixe les taux et arrete la repartition des bienset des services entre ces taux en tenant compte de la reglementationedictee en la matiere par les Communautes europeennes.
En execution de cet article, la rubrique XXIII, point 2, du tableau A, del'annexe à l'arrete royal nDEG 20 du 20 juillet 1970 fixant le taux de lataxe sur la valeur ajoutee et determinant la repartition des biens et desservices selon ces taux, tel qu'il etait applicable avant son remplacementpar l'arrete royal du25 mars 1998 dispose que le taux reduit de 6 pct est applicable « auxappareils d'orthopedie (y compris les ceintures medico-chirurgicales) ;les articles ou appareils pour fractures (attelles, gouttieres etsimilaires) ; les articles et appareils de prothese dentaire, oculaire ouautres ; les appareils pour faciliter l'audition aux sourds et les autresappareils à tenir à la main, à porter sur la personne ou à implanterdans l'organisme afin de compenser une deficience ou une infirmite ; lesappareils individuels et leurs accessoires, pour les personnes souffrantd'incontinence ; les accessoires individuels faisant partie d'un reinartificiel, y compris les trousses utilisees ».
2. Il ressort des dispositions precitees qu'en principe le taux normal estapplicable à tous les appareils et qu'il appartient à l'Etat belged'accorder certaines exceptions.
L'Etat belge enonce parmi ces exceptions « les accessoires individuelsfaisant partie d'un rein artificiel, y compris les trousses utilisees »mais non l'oxygenateur.
3. Le moyen, en cette branche, critique le fait que les juges d'appeln'ont pas rendu le taux reduit de la taxe sur la valeur ajoutee applicableà l'oxygenateur. Il invoque à ce propos qu'un appareil similaire utilisepour les reins peut beneficier du taux reduit et que cette reglementationest contraire aux principes du droit europeen dont le moyen invoque laviolation.
Le moyen, en cette branche, ne critique pas l'interpretation par les jugesd'appel de la rubrique XXIII, point 2, du tableau A de l'annexe àl'arrete royal nDEG 20.
4. Le legislateur belge est competent, en vertu de l'article 12 de ladirective citee ci-dessus sous le nDEG 1, d'accorder des derogations autaux normal de la taxe sur la valeur ajoutee pour certaines categories deproduits enonces par la directive.
Il a le droit, lorsqu'une categorie etendue de produits est mentionnee quipeuvent etre exclus, de ne faire beneficier qu'une partie de ces produitsde cette categorie de cette derogation au taux normal.
5. Le legislateur qui n'applique que de maniere limitee la possibilite defixer un taux reduit pour une categorie de biens ou de services, favoriseainsi l'uniformite souhaitee des taux. Des qu'il accorde un taux reduit,il est toutefois oblige, eu egard à la neutralite fiscale requise par laCour de justice notamment dans son arret du 29 mars 2001, C-404/99, de nepas traiter les memes operations de maniere differente.
6. Les juges d'appel ont considere sur la base d'une analyse de fait quel'oxygenateur ne peut etre compare aux accessoires individuels faisantpartie d'un rein artificiel et qu'il doit, des lors, etre soumis au tauxnormal.
7. Ils ont, ainsi, justifie legalement leur decision.
Le moyen, en cette branche, ne peut etre accueilli.
Quant à la seconde branche :
8. Contrairement à ce qu'invoque le moyen, en cette branche, les jugesd'appel n'ont pas uniquement fonde la decision d'exclure les oxygenateurset les accessoires individuels du taux reduit des lors que ces biens nesont pas comparables, sur la constatation que l'usage d'oxygenateurs neconcerne pas les patients ambulatoires, ce qui est bien dans le cas pourles reins artificiels, mais aussi sur le motif que le point 2 de larubrique XXIII, du tableau A de l'annexe à l'arrete royal nDEG 20 du 20juillet 1970 est « un texte qui ne peut faire l'objet que d'uneinterpretation stricte »., qui « n'est pas redige de maniere àpermettre d'appliquer par analogie ce qui est prevu pour les accessoiresd'un rein artificiel à d'autres accessoires »..
9. Le moyen, en cette branche, est fonde sur une lecture incomplete del'arret et, des lors, manque en fait.
10. Des lors que le moyen, en cette branche, est fonde sur une suppositionerronee, il n'y a pas lieu de poser une question prejudicielle à la Courconstitutionnelle.
Sur le second moyen :
11. La demanderesse a invoque dans ses conclusions de synthese qu'elleavait accorde des remises à concurrence de 2 pct. et qu'elle n'etait doncredevable d'aucune taxe sur la valeur ajoutee sur celles-ci, que celan'etait pas conteste et que la demande introduite par la defenderessedevait donc en tout cas etre reduite de 2 pct.
12. L'arret ne repond pas à ce moyen de defense.
Le moyen est fonde.
Par ces motifs,
La Cour
Casse l'arret attaque en tant qu'il declare non fondees les demandesinitiales de la demanderesse à propos du calcul de la taxe sur la valeurajoutee, sans tenir compte des ristournes qu'elle a accordees ;
Rejette le pourvoi pour le surplus ;
Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretpartiellement casse ;
Condamne la demanderesse à la moitie des depens ;
Reserve le surplus des depens pour qu'il soit statue sur celui-ci par lejuge du fond ;
Renvoie la cause, ainsi limitee, devant la cour d'appel d'Anvers.
Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president Ivan Verougstraete, le president de section EdwardForrier, les conseillers Luc Huybrechts, Paul Maffei et Eric Dirix, etprononce en audience publique du quatorze fevrier deux mille huit par lepresident Ivan Verougstraete, en presence de l'avocat general Dirk Thijs,avec l'assistance du greffier adjoint Johan Pafenols.
Traduction etablie sous le controle du president de section ClaudeParmentier et transcrite avec l'assistance du greffier Marie-JeanneMassart.
Le greffier, Le president de section,
14 FEVRIER 2008 C.04.0071.N/15