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04/02/2008 | BELGIQUE | N°S.07.0093.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 04 février 2008, S.07.0093.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG S.07.0093.F

M. J.,

demanderesse en cassation,

representee par Maitre Antoine De Bruyn, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue de la Vallee, 67, ou il estfait election de domicile,

contre

PROJETS SOCIO-SENSORIELS LA BASTIDE, association sans but lucratif dont lesiege est etabli à Namur, avenue Vauban, 8,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Cecile Draps, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est etabli à Liege, rue de Chaudfontaine,

11, ou il est faitelection de domicile.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est diri...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG S.07.0093.F

M. J.,

demanderesse en cassation,

representee par Maitre Antoine De Bruyn, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue de la Vallee, 67, ou il estfait election de domicile,

contre

PROJETS SOCIO-SENSORIELS LA BASTIDE, association sans but lucratif dont lesiege est etabli à Namur, avenue Vauban, 8,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Cecile Draps, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est etabli à Liege, rue de Chaudfontaine, 11, ou il est faitelection de domicile.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 8 mars 2007 parla cour du travail de Liege, section de Namur.

Le president Christian Storck a fait rapport.

Le procureur general Jean-Franc,ois Leclercq a conclu.

II. Le moyen de cassation

La demanderesse presente un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

- articles 79, alinea 1er, et 81, S:S: 1er et 2, de la loi du 3 juillet1978 relative aux contrats de travail ;

- articles 1134, alinea 3, et 1382 du Code civil ;

- principe general du droit relatif à l'abus de droit.

Decisions et motifs critiques

L'arret, reformant le jugement du premier juge, dit non fondee l'action dela demanderesse en paiement d'une indemnite pour abus du droit delicenciement en periode d'essai et condamne la demanderesse aux depensd'instance et d'appel, aux motifs suivants :

« En licenciant le travailleur pendant la periode d'essai, l'employeur,sauf exception, ne commet pas d'abus du droit de rupture ;

Lorsqu'une incapacite de travail survient en periode d'essai, l'employeurconserve le droit de licencier en mettant fin à l'essai sans avoir àjustifier les raisons pour lesquelles il prend cette decision ;

[...] En son article 79, la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats detravail donne le droit à l'employeur de rompre le contrat en coursd'essai sans indemnite lorsque l'incapacite a dure plus de sept jours ;

[...] Lorsque, comme en l'espece, l'etat d'incapacite de travail est du àun accident du travail faisant suite à une agression, le fait delicencier le membre du personnel peut apparaitre comme constitutif d'unabus ;

Neanmoins, [la defenderesse] etablit l'absence d'abus par la production dela convocation à comparaitre à l'entretien prealable à la decision demettre fin à l'essai. Cette convocation adressee aux delegationssyndicales de l'entreprise n'a certes pas ete envoyee à [la demanderesse]elle-meme mais celle-ci en a ete avertie puisqu'elle a fait savoir qu'elledemandait le report de l'audition. Il importe donc peu qu'elle ait ete ounon syndiquee car ce qui importe, c'est la preuve de l'anticipation de ladecision de mettre fin à l'essai avant la date de l'agression ;

La decision etait donc sur le point d'etre prise avant meme l'agression.L'entretien a ete reporte à la demande de [la demanderesse] ;

Or, diverses plaintes ont ete emises au sujet du comportement de [lademanderesse], tant par des residents que par les responsables de lacuisine et de l'equipe de nuit. C'est ainsi que le responsable de nuitrapporte que 'sa rigidite etait à un point ou les residents seplaignaient sans arret, et donc, en tant que responsable de laboulangerie, malgre deux entretiens avec [la demanderesse] afin de changerson attitude, de respecter les consignes qui lui ont ete dites, cettederniere n'a malheureusement pas change sa methode de travail, refusant dese conformer aux consignes qui lui etaient donnees' ;

Cette attestation detaillee est credible et confirme le mecontentement de[la defenderesse] qui l'a amenee à convoquer [la demanderesse] en vue del'informer de la decision de mettre fin à l'essai ;

Des lors, la rupture n'est pas due à l'etat d'incapacite de travail etpar voie de consequence à l'agression mais au comportement inadapte de[la demanderesse] ».

Griefs

L'article 79, alinea 1er, de la loi du 3 juillet 1978 relative auxcontrats de travail dispose que, lorsque le contrat prevoit une claused'essai, l'incapacite de travail resultant d'une maladie ou d'un accidentpermet à l'employeur de resilier le contrat sans indemnite si elle a uneduree de plus de sept jours.

L'article 81, S: 1er, prevoit que, sans prejudice de l'application del'article 79, le contrat ne peut, pendant la periode d'essai, etre resilieunilateralement sans motif grave que moyennant un preavis de sept jours,notifie dans les formes prevues à l'article 37, alineas 2 à 4, et que,si un tel preavis est donne dans le courant du premier mois, laresiliation a effet le dernier jour de ce mois au plus tot.

Et l'article 81, S: 2, ajoute que la partie qui resilie le contrat sansmotif grave ou sans respecter le delai de preavis fixe au paragraphe 1erest tenue de payer à l'autre partie une indemnite egale à laremuneration en cours (y compris les avantages acquis en vertu du contrat)correspondant, soit à la duree du delai de preavis, soit à la partie dece delai restant à courir.

Il ressort de ces dispositions :

1DEG que l'article 79, alinea 1er, precite n'est pas applicable enl'espece puisque le licenciement de la demanderesse ne resulte pas, selonles constatations de l'arret, de l'etat d'incapacite de travail ;

2DEG que, hormis le cas d'un motif grave, inexistant en l'occurrence, ladefenderesse ne pouvait des lors licencier la demanderesse qu'enrespectant un preavis ou moyennant une indemnite ;

3DEG que le fait que le licenciement de la demanderesse « n'apparait pascomme constitutif d'un abus » ne dispensait pas la defenderesse derespecter un delai de preavis ou de payer à la demanderesse une indemnitede rupture conformement à ce que prevoit l'article 81, S: 2, precite.

La defenderesse ne pouvait par consequent rompre le contrat de lademanderesse sans preavis ni indemnite, par application de l'article 79,alinea 1er, de la loi du 3 juillet 1978.

En relevant que la defenderesse a ete licenciee pour cause de« comportement inadapte », l'arret ne constate pas l'existence d'unmotif grave qui aurait justifie le licenciement immediat et sans preavisde la demanderesse.

La circonstance que la demanderesse se trouvait, au moment dulicenciement, en etat d'incapacite de travail n'etait pas non plus unmotif justifiant une rupture sur-le-champ du contrat de la demanderesse.Elle etait d'autant moins un motif de licenciement sans preavis quel'arret constate que « l'etat d'incapacite de travail est du à unaccident de travail faisant suite à une agression ».

Le licenciement de la demanderesse sur pied de l'article 79 precite de laloi du 3 juillet 1978 mais justifie, selon les constatations de l'arret,par le comportement pretendument « inadapte » de la demanderesseconstitue un usage abusif du droit reconnu à l'employeur par l'article 79de resilier sans indemnite le contrat d'un employe à l'essai si sonincapacite de travail a une duree de plus de sept jours.

Il s'ensuit que l'arret qui, par les motifs ci-avant reproduits, deboutela demanderesse de son action en paiement d'une indemnite pourlicenciement abusif n'est pas legalement justifie (violation des articles79, alinea 1er, et 81, S:S: 1er et 2, de la loi du 3 juillet 1978 cites entete du moyen, ainsi que du principe general du droit relatif à l'abus dedroit et des articles 1134, alinea 3, et 1382 du Code civil).

III. La decision de la Cour

L'irregularite d'un licenciement resultant de l'inobservation du preavisprescrit par la loi ne suffit pas à rendre ce licenciement abusif.

Le moyen, qui repose sur le soutenement contraire, manque en droit.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;

Condamne la demanderesse aux depens.

Les depens taxes à la somme de cent septante-deux euros nonante-quatrecentimes envers la partie demanderesse et à la somme de cent un eurosnonante centimes envers la partie defenderesse.

Ainsi juge par la Cour de cassation, troisieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president Christian Storck, les conseillers Daniel Plas,Christine Matray, Sylviane Velu et Philippe Gosseries, et prononce enaudience publique du quatre fevrier deux mille huit par le presidentChristian Storck, en presence du procureur general Jean-Franc,oisLeclercq, avec l'assistance du greffier Jacqueline Pigeolet.

4 FEVRIER 2008 S.07.0093.F/3


Synthèse
Numéro d'arrêt : S.07.0093.F
Date de la décision : 04/02/2008

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL - FIN - Licenciement abusif


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2008-02-04;s.07.0093.f ?
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