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24/01/2008 | BELGIQUE | N°C.07.0372.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 24 janvier 2008, C.07.0372.N


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.07.0372.N

D. R.,

Me Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation,

contre

1. O. M.,

2. D. R.,

Me Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 26 mars 2007par la cour d'appel d'Anvers.

Le conseiller Eric Dirix a fait rapport.

L'avocat general delegue Andre Van Ingelgem a conclu.

II. Le moyen de cassation

Le demandeur presente un moyen libelle dans les termes suivants :



Dispositions legales violees

Articles 2274, 2275 et 2276bis, S: 2, du Code civil.

Decisions et motifs critiques

L'arret declare ...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.07.0372.N

D. R.,

Me Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation,

contre

1. O. M.,

2. D. R.,

Me Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 26 mars 2007par la cour d'appel d'Anvers.

Le conseiller Eric Dirix a fait rapport.

L'avocat general delegue Andre Van Ingelgem a conclu.

II. Le moyen de cassation

Le demandeur presente un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

Articles 2274, 2275 et 2276bis, S: 2, du Code civil.

Decisions et motifs critiques

L'arret declare prescrite la demande du demandeur tendant à entendrecondamner les parties defenderesses au paiement de ses frais et honorairessur la base des considerations suivantes :

« Au fond

1. La prescription

1.1. Le jugement dont appel declare la demande (du demandeur) prescrite enapplication de l'article 2276bis, S: 2, du Code civil, par les motifssuivants:

- le delai de prescription a pris cours le 10 fevrier 1997 pour prendrefin le 10 fevrier 2002 au plus tard;

- (les defendeurs) n'ont pas reconnu que (le demandeur) avait droit à unsolde en sus des provisions dejà payees, s'elevant à 4.584,99 euros(184.958 BEF) ; la prescription n'a pas ete suspendue par la duree desnegociations ;

- la prescription prevue à l'article 2276bis, S: 2, du Code civil n'estpas fondee sur une presomption de paiement qui aurait pour effet que, s'ilexistait encore une preuve ecrite de la dette, le delai de prescriptionserait, non le court delai de cinq ans, mais le delai de prescription dedroit commun de dix ans (prescription extinctive).

1.2. (Le demandeur) fait valoir que la prescription visee à l'article2276bis, S: 2, du Code civil releve des prescriptions dites courtes,regies par les articles 2274 et 2275 du Code civil et que cetteprescription peut etre interrompue par une reconnaissance de dette quifait courir un nouveau delai de prescription de dix ans.

(Le defendeur) se rallie à la motivation du premier juge et soutient quela prescription quinquennale n'est pas fondee sur une presomption depaiement, mais constitue une prescription extinctive.

1.3.1. En vertu de l'article 2276bis, S: 2, du Code civil, l'action desavocats en paiement de leurs frais et honoraires se prescrit dans le delaide cinq ans apres l'achevement de leur mission.

S'agissant de la nature de cette prescription, les parties sont partageesentre, d'une part, la these d'une courte prescription, basee sur unepresomption de paiement et, d'autre part, celle d'une prescriptionextinctive laissant subsister la dette mais eteignant l'action en paiementde cette dette. La prescription extinctive ne permettrait plus deverifier si le paiement a ete effectue ou non.

1.3.2 Selon (le demandeur), l'objectif explicite etait de substituer lanouvelle disposition de l'article 2276bis, S: 2, du Code civil à l'ancienarticle 2273 du Code civil, qui reglait l'action en paiement deshonoraires et frais des avoues. Le legislateur a entendu soumettre cetteaction, qui a le meme objet que l'action des avoues, à la memeprescription, la mission de ces derniers ayant ete reprise en grandepartie par les avocats apres l'entree en vigueur du Code judiciaire.

L'ancien article 2273 du Code civil relevait effectivement du regime descourtes prescriptions.

Les courtes prescriptions sont fondees sur une presomption de paiement. Cette presomption est renversee des qu'un ecrit constate l'existence de ladette, que ce soit sa naissance ou son extinction. L'existence d'un ecritprive le regime des courtes prescriptions de son sens. La simpleexistence d'un ecrit soumet la prescription à la regle generale: laprescription decennale visee à l'article 2262bis, S: 1er, alinea 1er, duCode civil.

Ce regime des courtes prescriptions est inconciliable avec la prescriptionquinquennale de l'action en paiement des frais et honoraires de l'avocat.

En general, cette creance fait l'objet d'un ecrit soit lors de lanaissance, soit lors de l'extinction de la dette. Meme si au commencementde son mandat, l'avocat ne convient pas toujours par ecrit avec son clientdes honoraires à payer et si au cours de sa mission, il ne demande pasregulierement par ecrit le paiement de provisions, il etablit en principeun etat de frais et honoraires à la fin de son intervention en precisantles prestations accomplies et les frais supportes. Dans le regime descourtes prescriptions, un tel ecrit met fin de plein droit à laprescription quinquennale, à laquelle la prescription decennale visee àl'article 2262bis, S: 1er, alinea 1er, du Code civil se substitue. Aussi,considerer que la prescription quinquennale releve du regime des courtesprescriptions revient-il à priver la prescription quinquennale de sonsens, etant donne qu'en regle, la prescription decennale lui estsubstituee.

Les considerations suivantes justifient egalement la these de laprescription extinctive.

L'ancien article 2273 du Code civil organise la prescription deshonoraires des avoues, mais non celle des honoraires des avocats. Al'epoque, l'action en paiement des honoraires des avocats etait soumise àla prescription extinctive trentenaire et n'etait pas fondee sur unepresomption de paiement. Cette presomption de paiement etait reservee auxactions des notaires (cinq ans), des avoues (deux ans) et des huissiers dejustice (un an).

L'article 2276bis n'apparait pas dans le Code civil à un endroit reserveaux courtes prescriptions (articles 2272 à 2274 du Code civil).

S'il etablissait une courte prescription, l'article 2276bis du Code civil,romprait l'equilibre des differents interets en cause : l'interet del'avocat d'etre paye et l'interet du client d'invoquer la responsabilitede son conseil au cas ou les deux actions prendraient cours à la memedate, à savoir la fin de la mission de l'avocat. La prescriptiondecennale pourrait etre substituee à la prescription quinquennale del'action en paiement des honoraires alors que l'action en responsabilitese prescrirait apres cinq ans. (Le demandeur), qui conteste toute faute,allegue que s'il etait appele en responsabilite par (les defendeurs), laprescription quinquennale serait acquise en ce qui concerne saresponsabilite pour les pretendues fautes.

Il resulte de ce qui precede que la prescription quinquennale de l'actionen paiement des frais et honoraires de l'avocat est une prescriptionextinctive ».

L'arret considere ensuite que la mission du demandeur a pris fin le10 fevrier 1997 et que le delai quinquennal n'a ete ni interrompu nisuspendu.

Griefs

Il ressort des travaux preparatoires relatifs à l'article 2276bis, S: 2,du Code civil qu'à l'origine, l'objectif poursuivi etait de reprendrecette disposition dans le Code civil par l'insertion d'un article 2270bis,mais qu'il y a ete renonce pour des motifs purement formels. Nonobstantson classement dans le Code civil, l'article 2276bis, S: 2, est soumis auregime particulier des prescriptions dites courtes et la prescriptionprevue par cet article doit etre consideree comme une prescriptionliberatoire et non comme une prescription extinctive, non seulement parceque le legislateur n'a pas remarque le probleme lorsqu'il a modifie laloi, mais surtout parce que son objectif explicite etait de substituer lanouvelle disposition à l'ancien article 2273 du Code civil qui reglait laprescription de l'action en paiement des frais et honoraires des avoues. Il est incontestable que l'ancien article 2273 du Code civil relevait duchamp d'application des courtes prescriptions. Il ressort des travauxpreparatoires que l'objectif du legislateur etait incontestablement desoumettre l'action en paiement des frais et honoraires des avocats à lameme prescription que celle à laquelle l'action des avoues ayant le memeobjet etait soumise, la mission de ces derniers ayant ete reprise engrande partie par les avocats apres l'entree en vigueur du Codejudiciaire. Il decoule de ce qui precede que la prescription prevue àl'article 2276bis, S: 2, du Code civil releve des prescriptions ditescourtes qui sont fondees sur une presomption de paiement et soumises à l'application des articles 2274 et 2275 du Code civil.

Pour ces motifs, le demandeur a soutenu dans ses conclusions d'appel cequi suit :

« (...), il est clair que si la presomption de paiement etait renversee(meme sans reconnaissance de dette explicite), le delai de prescriptionabrege ne serait plus d'application ».

D'autre part, les defendeurs ont reconnu ne pas avoir paye les frais ethonoraires demandes. En decidant que la prescription quinquennale del'action en paiement des frais et honoraires de l'avocat est uneprescription liberatoire dont le delai peut uniquement etre interrompu envertu des articles 2244 et 2248 ou suspendu en vertu de l'article 2251 duCode civil et en declarant la demande du demandeur prescrite sur cettebase sans verifier si la presomption de paiement n'etait pas renversee,l'arret viole les dispositions visees au moyen.

III. La decision de la cour

1. En vertu de l'article 2276bis, S: 2, du Code civil, l'action desavocats en paiement de leurs frais et honoraires se prescrit dans le delaide cinq ans apres l'achevement de leur mission.

2. La creance portant sur le paiement des frais et honoraires des avocatsse fonde sur la relation de confiance avec le client qui a en general unecertaine duree.

La nature de cette creance, qui est, en regle, constatee par ecrit etn'est pas payee immediatement, fait obstacle à ce que la prescriptionquinquennale soit consideree comme une prescription particuliere à courtdelai, fondee sur une presomption de paiement et, ainsi, liberatoire.

Par ailleurs, il ressort des travaux preparatoires de la loi du 8 aout1985 relative à la prescription en matiere de responsabiliteprofessionnelle de l'avocat et de conservation des archives que lelegislateur a cherche à realiser, avec l'article 2276bis du Code civil,un equilibre entre les delais quinquennaux prevus, d'une part, auparagraphe 1er en matiere de responsabilite professionnelle de l'avocat etde conservation des pieces et, d'autre part, au paragraphe 2 en matiere decreance portant sur le paiement des frais et honoraires des avocats.

3. Le moyen qui fait valoir que la prescription quinquennale visee àl'article 2276bis du Code civil doit etre consideree comme uneprescription particuliere à court delai, fondee sur une presomption depaiement et, ainsi, liberatoire, de sorte qu'au cas ou la presomption depaiement est renversee, le delai de prescription de droit communs'applique, manque en droit.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;

Condamne le demandeur aux depens.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le premier president Ghislain Londers, le president de sectionErnest Wauters, les conseillers Eric Dirix, Albert Fettweis et AlainSmetryns, et prononce en audience publique du vingt-quatre janvier deuxmille huit par le premier president Ghislain Londers, en presence del'avocat general delegue Andre Van Ingelgem, avec l'assistance du greffieradjoint Johan Pafenols.

Traduction etablie sous le controle du conseiller Christine Matray ettranscrite avec l'assistance du greffier Marie-Jeanne Massart.

Le greffier, Le conseiller,

24 JANVIER 2008 C.07.0372.N/7


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.07.0372.N
Date de la décision : 24/01/2008

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2008-01-24;c.07.0372.n ?
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