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26/10/2007 | BELGIQUE | N°C.06.0426.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 26 octobre 2007, C.06.0426.F


Cour de cassation de Belgique

Arrêt

N° C.06.0426.F

COMPAGNIE DES CIMENTS BELGES, société anonyme dont le siège social estétabli à Gaurain-Ramecroix, Grand'Route, 260,

demanderesse en cassation,

représentée par Maître Lucien Simont, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 149, où il est faitélection de domicile,

contre

FONDS WALLON D'AVANCES POUR LA REPARATION DES DOMMAGES PROVOQUES PAR LESPRISES ET POMPAGES D'EAU SOUTERRAINE, organisme d'intérêt public, dont lesiège est établi à Ja

mbes, avenue Prince de Liège, 15,

défendeur en cassation,

représenté par Maître Antoine De Bruyn, avocat à ...

Cour de cassation de Belgique

Arrêt

N° C.06.0426.F

COMPAGNIE DES CIMENTS BELGES, société anonyme dont le siège social estétabli à Gaurain-Ramecroix, Grand'Route, 260,

demanderesse en cassation,

représentée par Maître Lucien Simont, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 149, où il est faitélection de domicile,

contre

FONDS WALLON D'AVANCES POUR LA REPARATION DES DOMMAGES PROVOQUES PAR LESPRISES ET POMPAGES D'EAU SOUTERRAINE, organisme d'intérêt public, dont lesiège est établi à Jambes, avenue Prince de Liège, 15,

défendeur en cassation,

représenté par Maître Antoine De Bruyn, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Vallée, 67, où il estfait élection de domicile

en présence de

W. M.,

partie appelée en déclaration d'arrêt commun.

I. La procédure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 25 juin 2002par la cour d'appel de Mons.

Le conseiller Didier Batselé a fait rapport.

L'avocat général André Henkes a conclu.

II. Le moyen de cassation

Le demandeur présente un moyen libellé dans les termes suivants :

Dispositions légales violées

- articles 9, alinéa 1^er, 568, 577, 602, spécialement 1°, et 643 du Codejudiciaire ;

- articles 2, 3, 4, 8, § 1^er, et 9, spécialement §§ 1^er, et 3, du décretdu Conseil régional wallon du 11 octobre 1985 organisant la réparation desdommages provoqués par des prises et des pompages d'eau souterraine.

Décisions et motifs critiqués

L'arrêt, confirmant en cela le jugement entrepris, décide que le[défendeur] est fondé à se prévaloir de la subrogation légale prévue àl'article 9, § 3, du décret, visé au moyen, du 11 octobre 1985 organisantla réparation des dommages provoqués par des prises et des pompages d'eausouterraine, et qu'à ce titre sa demande est recevable.

L'arrêt fonde cette décision sur les motifs suivants :

« l'appel, régulièrement formé dans le délai légal, est recevable ;

il est dirigé contre le jugement rendu contradictoirement le 15 février2000 par le tribunal de première instance, qui reçoit la demande forméepar [la partie appelée en déclaration d'arrêt commun] et le [défendeur]et, avant dire droit, ordonne une expertise ;

c'est à bon droit, aux termes de judicieux motifs que la cour [d'appel]adopte, que le premier juge déclare la demande recevable ;

cette demande qui tend à la réparation des désordres consécutifs à ladégradation, voire la destruction, de l'immeuble de la [partie appelée endéclaration d'arrêt commun] suite à des effondrements de terrain estdirigé contre la [demanderesse], sur la base de l'article 1382 du Codecivil et, subsidiairement, de l'article 544 du Code civil, pour avoir`surexploité' la nappe phréatique, provoquant des phénomènes karstiques etl'apparition de dommages en surface ;

l'objet de l'appel est, d'une part, de faire dire pour droit que le[défendeur] n'avait pas à intervenir au profit de la [partie appelée endéclaration d'arrêt commun] et qu'il n'est dès lors pas fondé à réclamerle remboursement de son intervention à la [demanderesse] et, d'autre part,de contester l'opportunité de la mesure d'expertise qui fut ordonnée ;

le [défendeur] a consenti à la partie préjudiciée [appelée en déclarationd'arrêt commun] l'avance prévue à l'article 8, § 1^er, du décret du 11octobre 1985 organisant la réparation des dommages provoqués par desprises et des pompages d'eau souterraine ;

en vertu de l'article 9, § 3, dudit décret, il est subrogé aux droits etactions en justice de la personne lésée jusqu'à concurrence de l'avanceliquidée ;

il n'appartient pas à [la demanderesse] de critiquer l'opportunité ou lesmodalités de la décision administrative prise par le [défendeur] en faveurde la [partie appelée en déclaration d'arrêt commun], décision à laquelleelle est étrangère ;

force est de constater que le [défendeur] est fondé à se prévaloir de lasubrogation légale prévue dans la disposition précitée et qu'à ce titre,sa demande est recevable ».

Griefs

Première branche

L'arrêt attaqué décide que le [défendeur] est fondé à se prévaloir de lasubrogation légale prévue à l'article 9, § 3, du décret du 11 octobre 1985organisant la réparation de dommages provoqués par des prises et despompages d'eau souterraine.

Il constate ainsi que le [défendeur] exerce une action subrogatoire fondéesur la disposition précitée.

Or, l'article 2 du décret du 11 octobre 1985 visé au moyen dispose que :

« Le juge de paix est le seul compétent pour connaître en premier ressort,quel que soit le montant de la demande, des actions fondées sur le présentdécret ».

L'article 577 du Code judiciaire prévoit quant à lui que le tribunal depremière instance connaît de l'appel des jugements rendus en premièreinstance par le juge de paix.

L'article 9, alinéa 1^er, du Code judiciaire dispose que la compétenced'attribution est le pouvoir de juridiction déterminé en raison del'objet, de la valeur et, le cas échéant, de l'urgence de la demande ou dela qualité des parties.

En vertu de l'article 602, alinéa 1^er, 1°, de ce code, la cour d'appelconnaît des décisions rendues en premier ressort par le tribunal depremière instance et le tribunal de commerce.

Le juge d'appel doit vérifier, même d'office, sa compétence d'attributionainsi déterminée, l'appel fût-il limité au fondement des demandes dont lepremier juge avait été saisi et cette vérification implique celle de lacompétence du premier juge, celle-ci conditionnant la compétence du juged'appel.

En vertu de l'article 568, alinéa 1^er, du même code, le tribunal depremière instance connaît de toutes les demandes, hormis celles qui sontdirectement dévolues à la cour d'appel et à la Cour de cassation, enmanière telle que ce tribunal ne peut, en règle, soulever d'office unmoyen déduit de son incompétence.

Il est toutefois dérogé à cette règle lorsqu'une demande relève de lacompétence exclusive d'une autre juridiction ; tel est le cas du juge depaix auquel l'article 2 du décret du 11 octobre 1985 visé au moyen confèreune compétence exclusive pour connaître en premier ressort des actionsfondées sur ledit décret.

La cour d'appel était incompétente ratione materiae en raison del'incompétence ratione materiae du tribunal de première instance et dufait qu'elle n'est pas le juge d'appel du juge de paix qui avaitcompétence exclusive pour connaître de la demande.

Lorsque le juge d'appel se déclare incompétent, il renvoie la cause, s'ily a lieu, devant le juge d'appel compétent (article 643 du Codejudiciaire).

A défaut d'avoir constaté d'office l'incompétence ratione materiae de lacour d'appel, et en confirmant la décision du premier juge qui étaitincompétent ratione materiae, l'arrêt attaqué viole les dispositions duCode judiciaire visées au moyen ainsi que l'article 2 du décret du 11octobre 1985 visé au moyen.

Seconde branche

L'article 8, § 1^er, du décret du 11 octobre 1985 visé au moyen prévoitque :

« Il est créé un `Fonds wallon d'avances pour la réparation des dommagesprovoqués par les prises et pompages d'eau souterraine', dénommé ci-après`le Fonds', chargé de consentir, dans les conditions et les limites duprésent décret, des avances dans les cas de dommages visés à l'article1^er ainsi que des avances pour le financement d'études et d'expertisesnécessaires à la constatation et à l'évaluation des dommages ».

L'article 9 du même décret dispose pour sa part que:

« § 1^er. Au cas où une citation en justice est introduite comme prévu àl'article 3, le Fonds peut consentir une avance en équité lorsqu'uneenquête sommaire a établi l'existence d'une relation entre le dommage,l'abaissement de la nappe aquifère souterraine et la prise ou le pompaged'eau.

§ 2. Il ne sera pas réclamé d'intérêts au demandeur débouté de son actionen justice.

§ 3. Le Fonds est subrogé aux droits et aux actions en justice de lapersonne lésée jusqu'à concurrence de l'avance liquidée ».

Il s'ensuit que le [défendeur] ne peut se prévaloir de la subrogationlégale prévue dans la disposition précitée que s'il a consenti une avancesur la base d'une action en justice introduite comme prévu à l'article 3du même décret.

Or, l'article 3 dudit décret dispose que, lorsque la tentative deconciliation, qui doit obligatoirement précéder toute citation introduitesur la base du décret devant le juge de paix, se solde par un désaccorddont il est dressé procès-verbal, « la personne lésée doit, sous peined'irrecevabilité de la demande, introduire la citation devant le juge depaix dans les trois mois qui suivent la délivrance de l'expédition duprocès-verbal constatant le désaccord ».

En l'espèce, il est établi et par ailleurs nullement contesté que [lapartie appelée en déclaration d'arrêt commun] n'a pas introduit, dans lestrois mois qui suivent la délivrance de l'expédition du procès-verbalconstatant le désaccord entre parties, sa demande d'indemnisation devantle juge de paix, lequel a, pour ce motif, déclaré sa demande irrecevablepar jugement du5 octobre 1994.

L'avance consentie par le [défendeur] à [la partie appelée en déclarationd'arrêt commun] n'est dès lors pas une avance consentie sur la base d'uneaction en justice introduite comme prévu à l'article 3 dudit décret, desorte que la condition à laquelle est subordonnée l'action subrogatoire du[défendeur], telle qu'elle est prévue à l'article 9 du même décret, n'estpas remplie.

II suit de là que, en décidant que le [défendeur] est fondé à se prévaloirde la subrogation légale prévue à l'article 9, § 3, du décret du 11octobre 1985, l'arrêt attaqué viole ledit article 9, §§ 1^er et 3, et pourautant que de besoin les articles 8, §§ 1^er, 2, 3 et 4 du même décret.

Partant, il n'a pas pu légalement décider qu'à ce titre, la demande du[défendeur] est recevable.

III. La décision de la Cour

Quant à la première branche :

S'il tient le défendeur pour subrogé à la partie appelée en déclarationd'arrêt commun en vertu de l'article 9, § 3, du décret de la Régionwallonne du 11 octobre 1985 organisant la réparation des dommagesprovoqués par des prises et des pompages d'eau souterraine, l'arrêt neconsidère pas, contrairement à ce que suppose le moyen, que la demande dudéfendeur se fonde sur ce décret mais sur les articles 1382 et,subsidiairement, 544 du Code civil.

Le moyen, en cette branche, manque en fait.

Quant à la seconde branche :

L'article 9, § 1^er, du décret du 11 octobre 1985 dispose que, au cas oùune citation en justice est introduite comme prévu à l'article 3, le Fondswallon d'avances pour la réparation des dommages provoqués par les priseset pompages d'eau souterraine peut consentir à la victime une avance enéquité lorsqu'une enquête sommaire a établi l'existence d'une relationcausale entre le dommage, l'abaissement de la nappe aquifère souterraineet la prise ou le pompage d'eau.

Le Fonds est, aux termes du paragraphe 3 du même article, subrogé auxdroits et actions en justice de la personne lésée jusqu'à concurrence del'avance liquidée.

Il suit de ces dispositions que la subrogation du Fonds n'est subordonnéequ'à la condition que la personne lésée ait introduit la citation prévue àl'article 3 du décret.

L'arrêt qui, tant par ses motifs propres que par ceux du jugemententrepris, qu'il adopte, constate que la citation de la partie appelée endéclaration d'arrêt commun contre la demanderesse a été jugée tardive maisqui considère que cette circonstance ne fait pas obstacle à la subrogationdont se prévaut le défendeur, ne viole aucune des dispositions visées aumoyen, en cette branche.

Le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli.

Le rejet du pourvoi prive d'intérêt la demande en déclaration d'arrêtcommun.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi et la demande en déclaration d'arrêt commun ;

Condamne la demanderesse aux dépens.

Les dépens taxés à la somme de huit cent trente-trois euros quatre-vingtscentimes envers la partie demanderesse et à la somme de cent septante etun euros dix-huit centimes envers la partie défenderesse.

Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, oùsiégeaient le président Christian Storck, les conseillers Didier Batselé,Albert Fettweis, Christine Matray et Philippe Gosseries, et prononcé enaudience publique du vingt-six octobre deux mille sept par le présidentChristian Storck, en présence de l'avocat général André Henkes, avecl'assistance du greffier Marie-Jeanne Massart.

26 OCTOBRE 2007 C.06.0426.F/1



Analyses

EAUX


Références :

Origine de la décision
Date de la décision : 26/10/2007
Date de l'import : 31/08/2018

Numérotation
Numéro d'arrêt : C.06.0426.F
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2007-10-26;c.06.0426.f ?
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