La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/06/2006 | BELGIQUE | N°C.03.0231.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 01 juin 2006, C.03.0231.N


HANNECARD, s.a., et cons.,
Me Verbist, avocat à la Cour de cassation,
contre
NOVOGRAPH, s.a.,
Me Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation.
La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 21 janvier 2003 par la cour d'appel de Bruxelles.
Le président Ivan Verougstraete a fait rapport.
L'avocat général Dirk Thijs a conclu.
Le moyen de cassation
Le demandeur présente un moyen libellé dans les termes suivants:
Dispositions légales violées
- article 149 de la Constitution;
- articles 1319, 1320 et 132

2 du Code civil;
-articles 774, alinéa 2, 1138, 2°, 1397, 1398 et 1402 du Code judiciaire ;
-princ...

HANNECARD, s.a., et cons.,
Me Verbist, avocat à la Cour de cassation,
contre
NOVOGRAPH, s.a.,
Me Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation.
La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 21 janvier 2003 par la cour d'appel de Bruxelles.
Le président Ivan Verougstraete a fait rapport.
L'avocat général Dirk Thijs a conclu.
Le moyen de cassation
Le demandeur présente un moyen libellé dans les termes suivants:
Dispositions légales violées
- article 149 de la Constitution;
- articles 1319, 1320 et 1322 du Code civil;
-articles 774, alinéa 2, 1138, 2°, 1397, 1398 et 1402 du Code judiciaire ;
-principe général du droit relatif au respect des droits de la défense et principe dispositif.
Décisions et motifs critiqués
Les juges d'appel ont déclaré fondée la demande de sursis à l'exécution du jugement dont appel du 18 juin 2002 du tribunal de commerce de Bruxelles et ont annulé ce jugement ordonnant son exécution provisoire, sur la base des motifs suivants:
14. La défenderesse demande à la cour d'appel de déclarer fondés ses griefs en ce qui concerne le caractère exécutoire ordonné et de décider de la manière suivante:
-de surseoir à l'exécution provisoire du jugement et de condamner les demanderesses à rembourser la somme de 28.461,29 euros majorée des intérêts légaux à compter du 30 août 2002;
-de prendre acte du fait que la défenderesse met la demanderesse en demeure pour tous les dommages qu'elle a subi en exécutant ce jugement, plus spécialement l'appropriation de la clientèle de la défenderesse;
-de manière subsidiaire, de permettre à la défenderesse de procéder au cantonnement de la somme de 28.461,29 euros conformément à l'article 1066, 6° du Code judiciaire et de condamner les demanderesses à rembourser la somme de 28.461,29 euros majorée des intérêts légaux à compter du 30 août 2002.
Elle invoque que le jugement viole les droits de la défense, qu'il a été statué ultra petita et, en outre, que des irrégularités manifestes ont été commises.
Il ressort de la référence subsidiaire à l'article 1066, 6° du Code judiciaire et des moyens qu'elle développe dans ses conclusions qu'elle critique aussi l'exclusion de son droit au cantonnement au cas où il n'y aurait pas de sursis à l'exécution.
15.Les demanderesses concluent au rejet des griefs y afférents.
Au cas où la cour d'appel devrait décider que l'exclusion du cantonnement a été décidée à tort du chef de défaut de motivation, elles demandent que la cour d'appel exclue à nouveau la défenderesse du droit au cantonnement.
16.La disposition de l'article 1402 du Code judiciaire qui interdit au juge d'appel d'interdire l'exécution des jugements ou d'y faire surseoir, doit être interprétée en ce sens qu'elle empêche le juge d'appel de contrôler l'opportunité d'une exécution décidée en première instance mais pas qu'elle soit annulée lorsqu'elle a été décidée de manière irrégulière.
La doctrine admet qu'il existe une telle irrégularité lorsqu'il a été statué ultra petita, lorsqu'une règle ou un principe de procédure est violé ou lorsque la loi interdit l'exécution provisoire (cfr E. Dirix & K. Broeckx, Beslag, APR, 2001, n° 71-71 et 350-352; E. Dirix & K. Broeckx, Overzicht van rechtspraak, Beslagrecht, (1991-1996), T.P.R., 1996, 1411, n° 23).
17.Dans la citation introductive ainsi que dans les conclusions qui ont été prises avant le jugement interlocutoire du 10 janvier 2001 la demanderesse a demandé dans sa requête de déclarer le jugement exécutoire provisoirement et d'exclure la défenderesse du droit au cantonnement.
Cette requête n'était pas étayée.
La défenderesse a conclu au rejet de la demande.
18.En vertu de l'article 1398 du Code judiciaire, le juge peut accorder l'exécution provisoire du jugement, sauf les exceptions prévues par la loi.
La liberté qui est ainsi laissée au juge de décider de l'exécution provisoire ne le dispense néanmoins pas de l'obligation constitutionnelle de motiver sa décision sur ce point.
Il faut notamment qu'il ressorte de la motivation que les circonstances concrètes de l'espèce peuvent justifier l'exécution accordée à la lumière de la gravité de la défense présentée et de l'évaluation circonstanciée des intérêts des parties.
19. Le jugement attaqué ne motive toutefois pas l'exécution provisoire accordée. La décision n'est, dès lors, pas légalement motivée à cet égard.
20. La cour d'appel décide ainsi qu'il y a lieu de suspendre l'exécution provisoire accordée» (arrêt attaqué, pages 7, 8 et9).
Griefs
(.)
Troisième branche
L'article 1397 du Code judiciaire dispose que sauf les exceptions prévues par la loi et sans préjudice de la règle énoncée à l'article 1414, l'opposition formée contre le jugement définitif et l'appel de celui-ci en suspendent l'exécution.
Conformément à l'article 1398 du Code judiciaire, sauf les exceptions prévues par la loi, le juge peut accorder l'exécution provisoire du jugement.
Les juges d'appel ne peuvent en aucun cas, à peine de nullité, interdire l'exécution des jugements ou y faire surseoir. (article 1042 du Code judiciaire).
Dans la mesure où il doit être admis que l'interdiction de surseoir à l'exécution contenue à l'article 1402 du Code judiciaire n'est pas absolue, il y a lieu d'admettre néanmoins que l'exécution ne peut être suspendue que dans des cas exceptionnels. L'exécution ne peut être suspendue que lorsque l'exécution provisoire a été accordée de manière manifestement irrégulière. C'est notamment le cas lorsque l'exécution provisoire est accordée sans qu'elle soit demandée, lorsqu'elle a été demandée dans un cas où elle est interdite par la loi ou lorsqu'elle a été accordée en violation des droits de la défense.
L'article 1402 du Code judiciaire ne permet toutefois pas au juge d'appel de surseoir à l'exécution pour le seul motif que la décision du premier juge accordant l'exécution provisoire n'est pas motivée.
Il s'ensuit qu'en suspendant l'exécution provisoire accordée par le premier juge sur la base de la seule considération que le premier juge ne donne aucune motivation à propos de l'exécution provisoire accordée, les juges d'appel ont violé les articles 1397, 1398 et 1402 du Code judiciaire.
(.)
La décision de la Cour
Quant à la troisième branche
1. En vertu de l'article 1402 du Code judiciaire, les juges d'appel ne peuvent en aucun cas, à peine de nullité, interdire l'exécution des jugements ou y faire surseoir.
Cette disposition tend à empêcher que le juge d'appel remette en question l'opportunité de l'exécution provisoire accordée en première instance.
2.Cette disposition n'empêche pas que le juge d'appel annule l'exécution provisoire accordée par le premier juge lorsqu'elle n'a pas été demandée, lorsqu'elle n'est pas autorisée par la loi ou encore lorsque la décision a été prise en méconnaissance des droits de la défense.
Un défaut de motivation dans la décision du premier juge concernant l'exécution ne permet pas au juge d'appel d'interdire cette exécution provisoire ou d'y surseoir.
3.Les juges d'appel ont constaté que le jugement attaqué «ne contient aucune motivation» à propos de l'octroi de l'exécution provisoire et ont considéré que cette décision doit être annulée du chef de défaut de motivation.
En statuant ainsi, l'arrêt viole l'article 1042 du Code judiciaire.
4.Dans cette mesure, le moyen, en cette branche, est fondé.
Par ces motifs,
La Cour
Casse l'arrêt attaqué;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêt cassé;
Réserve les dépens pour qu'il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond;
Renvoie la cause devant la cour d'appel de Gand.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président Ivan Verougstraete, les conseillers Ghislain Londers, Eric Dirix, Albert Fettweis et Betrijs Deconinck, et prononcé en audience publique du premier juin deux mille six par le président Ivan Verougstraete, en présence de l'avocat général Dirk Thijs, avec l'assistance du greffier Philippe Van Geem.
Traduction établie sous le contrôle du président Verougstraete et transcrite avec l'assistance du greffier Marie-Jeanne Massart.
Le greffier, Le président,


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.03.0231.N
Date de la décision : 01/06/2006
1re chambre (civile et commerciale)

Analyses

APPEL - MATIERE CIVILE (Y COMPRIS LES MATIERES COMMERCIALE ET SOCIALE) - Effets. Compétence du juge - Exécution provisoire - Annulation - Conditions - Défaut de motivation - Applicabilité /

Le fait que le juge d'appel ne peut en aucun cas interdire l'exécution d'un jugement ou y surseoir, n'empêche pas qu'il annule l'exécution provisoire autorisée par le premier juge lorsqu'elle n'a pas été demandée, lorsqu'elle n'est pas autorisée par la loi ou encore lorsque la décision a été prise en méconnaissance des droits de la défense. Un défaut de motivation dans la décision du premier juge concernant l'exécution ne permet pas au juge d'appel d'interdire cette exécution provisoire ou d'y surseoir.


Références :

Voir aussi Cass., 1er juin 2006, RG C.05.0024.N, n° ... et les conclusions du M.P. publiées à leur date dans A.C. (spécialement en ce qui concerne le devoir de motivation).


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2006-06-01;c.03.0231.n ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award