VERENIGING DER PAROCHIEWERKEN VAN DE DEKENIJ HOOGSTRATEN, a.s.b.l.,
Me Ludovic De Gryse, avocat à la Cour de cassation,
contre
H. J., et cons.,
Me René Bützler, avocat à la Cour de cassation.
La décision attaquée
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 27 juin 2000 par la cour d'appel d'Anvers.
La procédure devant la Cour
Le conseiller Ernest Waûters a fait rapport.
L'avocat général Guy Dubrulle a conclu.
Les moyens de cassation
.
La décision de la Cour
A. Quant à la recevabilité du pourvoi:
Sur la fin de non-recevoir opposée au pourvoi par les défendeurs et déduite de ce que :
1. la défenderesse a fait élection de domicile, comme il ressort des conclusions déposées en première instance au nom de la demanderesse et des mentions de l'arrêt attaqué; la signification du pourvoi à la défenderesse a été faite, d'une part, par l'envoi recommandé par avion à son adresse ou ancienne adresse aux Etats-Unis d'Amérique et, d'autre part, au procureur du Roi près le tribunal de première instance de Bruxelles; cette signification du pourvoi est non avenue dès lors que la demanderesse connaissait le domicile élu de la défenderesse;
2. le litige est indivisible, de sorte que l'irrecevabilité du pourvoi à l'égard de la défenderesse vaut également à l'égard du défendeur:
Attendu que l'article 40, dernier alinéa, du Code judiciaire, dispose que la signification à l'étranger ou au procureur du Roi est non avenue si la partie à la requête de laquelle elle a été accomplie connaissait le domicile ou la résidence ou le domicile élu en Belgique ou, le cas échéant, à l'étranger du signifié;
Attendu qu'en vertu de l'article 111 du Code civil, il est fait élection de domicile pour l'exécution d'un acte;
Qu'ainsi l'élection de domicile a un caractère spécifique et qu'elle vaut pour tous les effets attachés à l'acte;
Que l'élection de domicile faite dans un acte de procédure accompli en première instance est valable pour toute la procédure de première instance, pour l'exécution du jugement subséquent et pour l'introduction du recours contre ce jugement;
Que l'élection de domicile qui n'est pas réitérée dans une instance ultérieure ne vaut pas pour cette instance ; que l'élection de domicile qui est faite dans une citation ou dans des conclusions déposées en première instance et qui n'est pas réitérée au cours d'une instance ultérieure, ne vaut pas pour cette instance ;
Que, si l'élection de domicile se fait dans une citation ou dans des conclusions déposées en première instance, cette élection de domicile ne vaut pas pour l'introduction du pourvoi en cassation dirigé contre l'arrêt rendu en degré d'appel;
Attendu que la simple indication dans la qualification des parties dans l'arrêt «élisant domicile à l'étude de l'huissier W. D. P.» ne constitue pas la constatation propre des juges d'appel que la défenderesse a fait élection de domicile en degré d'appel et se réfère à une élection de domicile qu'elle a faite en première instance;
Attendu qu'il ressort en outre des pièces auxquelles la Cour peut avoir égard que:
1. la défenderesse a fait élection de domicile à l'étude de l'huissier de justice D. P. à Turnhout dans ses conclusions du 16 septembre 1976 prises devant le premier juge;
2. la défenderesse n'a par la suite pas à nouveau fait élection de domicile ;
3. le pourvoi a été signifié à la défenderesse « résidant à 6171 Leesburg Pike, Falls Church Va. 220444 aux Etats-Unis d'Amérique»;
Que la fin de non-recevoir ne peut être accueillie ;
B. Sur les moyens:
1. Sur le troisième moyen:
Sur la fin de non-recevoir opposée au moyen par les défendeurset déduite de ce que la demanderesse indique comme étant violé l'article 2262 du Code civil dans sa nouvelle version, alors qu'au moment de l'introduction de la demande la version antérieure était encore applicable :
Attendu que le renvoi à une disposition légale fait sans autres indications renvoie à la disposition légale telle qu'elle a été modifiée;
Attendu que le moyen invoque l'article 2262 du Code civil comme étant violé;
Que l'article 2262 du Code civil a été remplacé par l'article 4 de la loi du 10 juin 1998 modifiant certaines dispositions en matière de prescription;
Que l'article 2262 du Code civil actuellement en vigueur ne concerne que les actions réelles et pas les actions personnelles;
Que l'article 5 de la loi précitée a inséré dans le Code civil un article 2262bis qui, concernant les actions personnelles, a un contenu différent de l'ancien article 2262;
Attendu que les défendeurs ont introduit leurs demandes respectivement le 19 avril et le 30 mai 1974, à savoir sous l'empire de l'ancienne version de l'article 2262 du Code civil;
Que la disposition légale indiquée comme étant violée n'est pas applicable au grief allégué dans le moyen;
Que la fin de non-recevoir est fondée;
2. Sur le deuxième moyen:
Quant aux deux branches réunies:
Sur la fin de non-recevoir opposée au moyen par le défendeur et déduite de ce que la demanderesse indique comme étant violé l'article 2262 du Code civil dans sa nouvelle version, alors qu'au moment de l'introduction de la demande la version antérieure était encore applicable :
Attendu qu'il suit de la réponse à la fin de non-recevoir opposée au troisième moyen que la fin de non-recevoir est fondée;
3. Sur le premier moyen:
Attendu que, sans être critiqué à cet égard, l'arrêt interprète le legs qui a pour objet la maison avec jardin sise à Meerle et les bâtiments adjacents, un terrain situé derrière le jardin et la terre de culture Kerkenboschke, comme une substitution;
Attendu que l'arrêt ne décide pas, d'une part, que la nullité de la substitution prohibée laisse intacte la disposition contenant la désignation du légataire général et, d'autre part, que la nullité de la substitution prohibée porte atteinte au legs général;
Que le moyen, en ce qu'il allègue une contradiction dans la motivation, manque en fait;
Attendu que l'article 896 du Code civil dispose en outre que toute disposition par laquelle le donataire, l'héritier institué, ou le légataire, sera chargé de conserver et de rendre à un tiers, sera nulle, même à l'égard du donataire, de l'héritier institué ou du légataire;
Que, lorsque la substitution est confiée au légataire général, la nullité constatée de la substitution ne fait pas échoir les biens qui en font l'objet à celui-ci;
Que, dans cette mesure, le moyen, qui suppose qu'il en est ainsi, manque en droit;
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi;
Condamne les défendeurs aux frais de réplique;
Condamne la demanderesse aux surplus des dépens.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président Ivan Verougstraete, les conseillers Ernest Waûters, Ghislain Londers, Eric Dirx et Eric Stassijns, et prononcé en audience publique du trente mai deux mille trois par le président Ivan Verougstraete, en présence de l'avocat général Guy Dubrulle, avec l'assistance du greffier Philippe Van Geem.
Traduction établie sous le contrôle du conseiller Christian Storck et transcrite avec l'assistance du greffier Marie-Jeanne Massart.
Le greffier, Le conseiller,