V. J., et cons.,
Me René Bützler, avocat à la Cour de cassation,
contre
IMMO BELLOY, s.p.r.l., et cons.,
Me Ludovic De Gryse, avocat à la Cour de cassation
I. La décision attaquée
Le pourvoi en cassation est dirigé contre le jugement rendu le 11mai 1999 par le tribunal de première instance de Malines, statuant en degré d'appel.
II. La procédure devant la Cour
Le conseiller Ernest Waûters a fait rapport.
L'avocat général Guy Dubrulle a conclu.
III. Les moyens de cassation
Les demandeurs présentent deux moyens libellés dans les termes suivants:
I. Premier moyen
Dispositions légales violées
- articles 13, alinéa1er, et 14, alinéa1er, du livre III, titre VIII, chapitre II, section IIbis, du Code civil, tel qu'il a été remplacé par la loi du 30avril 1951 sur les baux commerciaux, en vue de la protection du fonds de commerce;
- articles 1134, 1197, 1200, 1217, 1222, 1319, 1320 et 1322 du Code civil.
Décisions et motifs critiqués
Par la décision attaquée, les juges d'appel ont déclaré l'appel de la première défenderesse recevable et fondé, en conséquence, déclaré que le bail commercial «a pris fin le 31juillet 1996», ordonné aux demandeurs de déguerpir, donné acte à la première défenderesse de sa réserve relative à l'introduction d'une demande tendant à obtenir une indemnité d'occupation et débouté les demandeurs de leur demande en dommages-intérêts contre la seconde défenderesse, par les motifs suivants:
«La (première défenderesse) (.) fait valoir que la demande de renouvellement du bail commercial adressée le 9février 1995 au bailleur de l'époque (en l'espèce, la seconde défenderesse) ne satisfait pas aux prescriptions et, partant, est nulle.
L'article 14 de la loi sur les baux commerciaux permet aux preneurs d'obtenir le renouvellement du bail à la condition d'observer les procédures requises.
Selon (la première défenderesse), la demande doit émaner de tous les preneurs originaires.
Bien que la doctrine [pour: Herbots, Pauwels, contre: Lahaye (lire: LaHaye) et Vankerckhoven] et la jurisprudence soient partagées sur ce point, cette thèse peut être admise.
Dans son exposé, Pauwels considère à juste titre que:
'Lorsqu'un même bien immeuble est loué à plusieurs preneurs, la demande de renouvellement du bail doit, à peine de nullité, être introduite par chacun d'eux personnellement ou par l'un d'eux par procuration. On ne peut en effet perdre de vue que, cette demande n'est pas un simple acte conservatoire mais constitue une nouvelle offre de bail et qu'en conséquence, toutes les parties au contrat doivent y être intéressées.
Se ralliant à la thèse de DePage, LaHaye et Vankerckhoven défendent une autre opinion: selon eux, le droit au renouvellement est divisible et la demande introduite à cet égard doit être accueillie, même si elle n'émane que d'un seul colocataire (sous la réserve qu'il ne porte pas atteinte aux droits des autres preneurs). Ces auteurs ne font pas la majorité de la jurisprudence qui considère que tous les preneurs doivent être intéressés à la demande de renouvellement.
. à plus forte raison, s'ils sont tenus de manière solidaire ou indivisible.'.
En outre, toute la procédure du renouvellement du bail est prévue en faveur des preneurs; en conséquence, il y a lieu de veiller rigoureusement à ce que les dispositions de l'article 14 de la loi sur les baux commerciaux soient respectées.
En effet, un bailleur tenu d'admettre la demande de renouvellement émanant d'un seul des preneurs originaires pourrait se trouver dans une situation particulièrement préjudiciable: ainsi, le propriétaire pourrait être obligé d'accepter le preneur le moins solvable, telle une société sans actif, ou de refuser la demande de ce preneur et, dans pratiquement tous les cas, de payer une indemnité au preneur évincé.
En l'espèce, il y a également lieu de tenir compte des obligations indivisibles et solidaires auxquelles les trois preneurs se sont contractuellement engagés.
Ainsi, il est manifeste que, si, en principe, le bail n'est pas un contrat intuitu personae et est divisible, ainsi que la jurisprudence et la doctrine précitées le considèrent, en l'espèce, le bail est indivisible par la volonté des parties mêmes.
En l'espèce, il ne peut être fait grief au nouveau propriétaire (la première défenderesse) de ne pas consentir à la demande de renouvellement qui émane de (la deuxième demanderesse) et n'est pas accompagnée de l'engagement solidaire des deux autres preneurs originaires.
En conséquence, il y a lieu de conclure que la demande de renouvellement du bail commercial n'a pas été valablement introduite".
Griefs
1.1. Première branche
Aux termes de l'article 13, alinéa1er, de la loi sur les baux commerciaux, le preneur a le droit d'obtenir, par préférence à toute autre personne, le renouvellement de son bail pour la continuation du même commerce, soit à l'expiration de celui-ci, soit à l'expiration du premier ou à l'expiration du deuxième renouvellement.
Il n'est pas contesté en l'espèce que les demandeurs et monsieur J.V.B. ont cosigné «l'acte de cession du bail commercial" du 27septembre 1993 par lequel ils se sont engagés en tant que colocataires à reprendre le bail commercial portant sur l'immeuble commercial situé à Sinte-Katelijne-Waver, Markt18, signé par les époux L. et D.J.-T. qui, par contrat du 27août 1987, avaient conclu un bail avec monopole de boissons avec le propriétaire du bien loué, soit l'auteur de la seconde défenderesse.
Il n'est pas davantage contesté que les relations contractuelles entre les preneurs, les demandeurs et monsieur J.V.B., d'une part, et la seconde défenderesse, bailleresse, d'autre part, sont régies par la loi sur les baux commerciaux. La vente du bien commercial au cours de la procédure par la seconde défenderesse à la première défenderesse n'a en principe pas influé sur cette situation.
Le droit fondamental au renouvellement du bail appartient non seulement, conjointement aux demandeurs et à monsieur J.V.B. - les demandeurs relevant qu'à la signature du contrat du 27septembre 1993, le premier demandeur et monsieur J.V.B. étaient gérants de la seconde défenderesse et que ce dernier s'est retiré du fonds de commerce peu après la cession - mais aussi, individuellement, à chacun d'entre eux en leur qualité de preneurs. Il n'est pas contesté en l'espèce que la demande de renouvellement émanant de la seconde demanderesse vise la continuation du même commerce, à savoir l'exploitation du café «Sortie».
C'est à tort qu'en l'espèce, les juges d'appel ont décidé qu'en application de l'article 14, alinéa1er, de la loi sur les baux commerciaux, la demande de renouvellement d'un bail commercial concernant un immeuble commercial loué à plusieurs preneurs doit être conjointement introduite par tous les preneurs.
La demande de renouvellement du bail commercial introduite par la seconde défenderesse seulement ne peut être déclarée irrégulière par la considération qu'elle n'émane pas de tous les preneurs originaires - c'est-à-dire de la seconde défenderesse et, en outre, du premier demandeur et de monsieur J.V.B.
Ainsi, les juges d'appel n'ont pas justifié légalement leur décision que «la demande de renouvellement du bail commercial n'a pas été valablement introduite».
Il s'ensuit qu'en décidant à tort qu'en cas de pluralité de preneurs, la demande de renouvellement de bail doit nécessairement émaner de tous les preneurs (violation de l'article 14, alinéa1er, du livre III, titre VIII, chapitreII, section IIbis, du Code civil, tel qu'il a été remplacé par la loi du 30avril 1951 sur les baux commerciaux, en vue de la protection du fonds de commerce), les juges d'appel ont violé le droit fondamental au renouvellement du bail de la seconde demanderesse (violation de l'article 13, alinéa1er, du livre III, titre VIII, chapitreII, section IIbis, du Code civil, tel qu'il a été remplacé par la loi du 30avril 1951 sur les baux commerciaux, en vue de la protection du fonds de commerce).
1.2. Deuxième branche
La circonstance que les preneurs se sont originairement engagés de manière «solidaire et indivisible» ne peut porter atteinte à leur droit individuel de demander ultérieurement le renouvellement du bail en application des articles 13 et 14 de la loi sur les baux commerciaux.
Ni une éventuelle solidarité ni une éventuelle indivisibilité des obligations des preneurs n'impliquent que la demande de renouvellement du bail n'est valable que si elle émane conjointement de tous les preneurs.
En décidant qu'il y a lieu de déduire de la circonstance que, par le contrat du 27septembre 1993, les preneurs se sont engagés de manière solidaire et indivisible que la demande de renouvellement du bail n'est valable que si elle émane conjointement de tous les preneurs, les juges d'appel ont méconnu la portée de la solidarité visée aux articles 1197 et 1200 du Code civil et la portée de l'indivisibilité visée aux articles 1217 et 1222 du Code civil, dès lors que l'éventuelle solidarité et l'éventuelle indivisibilité des obligations incombant aux preneurs en vertu du bail ne peuvent porter atteinte au droit fondamental de chacun d'eux de demander le renouvellement du bail visé aux articles 13 et 14 de la loi sur les baux commerciaux. Il importe peu à cet égard que la solidarité et l'indivisibilité soient de caractère actif, c'est-à-dire qu'elles portent sur des obligations dont les preneurs sont créanciers, telle l'obligation du bailleur de garantir la jouissance paisible, ou de caractère passif, c'est-à-dire qu'elles portent sur des obligations dont les preneurs sont débiteurs, telle l'obligation de payer le loyer.
Le droit de proroger le bail commercial dont le preneur bénéficie en vertu de l'article 13 de la loi sur les baux commerciaux découle directement de la loi et est indépendant de la nature des obligations du bail dont la prorogation est demandée et par lequel les preneurs se sont éventuellement engagés de manière solidaire et indivisible. En outre, la prorogation du bail commercial donne naissance à un nouveau bail et, en conséquence, la nouvelle relation contractuelle entre le preneur et le bailleur n'est plus régie par le bail dont la prorogation a été demandée.
Ainsi, les juges d'appel n'ont pas justifié légalement leur décision que «la demande de renouvellement du bail commercial n'a pas été valablement introduite».
Il s'ensuit qu'en décidant à tort qu'il y a lieu de déduire de la circonstance que, par le contrat du 27septembre 1993, les preneurs se sont engagés de manière solidaire et indivisible que la demande de renouvellement du bail n'est valable que si elle émane conjointement de tous les preneurs (violation des articles 1197, 1200, 1217 et 1222 du Code civil), les juges d'appel ont violé le droit fondamental au renouvellement du bail dont chacun des preneurs bénéficie (violation des articles 13, alinéa1er, et 14, alinéa1er, du livre III, titre VIII, chapitreII, section IIbis, du Code civil, tel qu'il a été remplacé par la loi du 30avril 1951 sur les baux commerciaux, en vue de la protection du fonds de commerce).
1.3. Troisième branche
Après avoir constaté «qu'en l'espèce, (.) il y a également lieu de tenir compte des obligations indivisibles et solidaires auxquelles les trois preneurs se sont contractuellement engagés», les juges d'appel ont décidé «que le bail est indivisible par la volonté des parties mêmes».
Par «l'acte de cession du bail commercial» du 27septembre 1993, les demandeurs et monsieur V.B. ont repris le bail des époux G.-U et ont cosigné le contrat en qualité de «cessionnaires». La seconde défenderesse était également partie à ce contrat, en qualité de bailleresse.
Les demandeurs et monsieur V.B. ont stipulé dans ce contrat qu'ils «s'engageaient tous de manière solidaire et indivisible».
C'est à tort que les juges d'appel ont décidé que «le bail est indivisible par la volonté des parties mêmes» dès lors qu'ils ont ainsi laissé entendre, à tort, qu'il ressort du contrat du 27septembre 1993 que les parties seraient convenues de considérer le bail comme un ensemble indivisible, en ce sens que le renouvellement du bail commercial ne pourrait être demandé que conjointement par les demandeurs et monsieur V.B.
Cette interprétation du contrat du 27septembre 1993 est totalement inconciliable avec ses termes dès lors que ceux-ci font uniquement mention de la solidarité et de l'indivisibilité des obligations des cessionnaires-preneurs et non d'une éventuelle «indivisibilité» du bail même. En outre, le contrat du 27septembre 1993 ne contient aucune disposition qui permettrait de déduire que les parties ont consenti à subordonner le droit au renouvellement du bail à une action conjointe des demandeurs et de monsieur V.B.
Ainsi, le tribunal a attribué au contrat du 27septembre 1993 une stipulation que celui-ci ne contient pas et a, en conséquence, violé la foi due à cet acte.
Il s'ensuit qu'en méconnaissant la foi due à «l'acte de cession du bail commercial» du 27septembre 1993, les juges d'appel n'ont pas justifié légalement leur décision (violation des articles 1319, 1320 et 1322 du Code civil).
1.4. Quatrième branche
Dans la mesure où ils auraient décidé qu'il peut être déduit du contrat du 27septembre 1993 que les parties ont stipulé «l'indivisibilité» du bail et ont consenti à subordonner le droit au renouvellement du bail à une action conjointe des demandeurs et de monsieurV.B., les juges d'appel n'ont pas justifié légalement leur décision.
Une stipulation contraire ne peut déroger à la possibilité pour la seconde demanderesse de demander, sans la participation du premier demandeur et de monsieurV.B., la prolongation du bail en application des articles 13,alinéa1er, et 14,alinéa 1er, de la loi sur les baux commerciaux, dès lors que ces dispositions légales sont impératives. En conséquence, aucune stipulation contraire n'est légale au sens de l'article 1134 du Code civil.
Ainsi, les juges d'appel n'ont pu attribuer des effets juridiques à un contrat conclu entre les parties susceptible de déroger à la disposition impérative de la loi sur les baux commerciaux suivant laquelle le preneur a droit au renouvellement du bail.
Il s'ensuit que, dans la mesure où ils auraient décidé qu'il peut être déduit du contrat du 27septembre 1993 que les parties ont stipulé «l'indivisibilité» du bail et ont consenti à subordonner le droit au renouvellement du bail à une action conjointe des demandeurs et de monsieurV.B., les juges d'appel n'ont pas justifié légalement leur décision (violation des articles 13, alinéa1er, et 14, alinéa1er, du livre III, titre VIII, chapitre II, sections IIbis du Code civil, tel qu'il a été remplacé par la loi du 30avril 1951 sur les baux commerciaux, en vue de la protection du fonds de commerce et 1134 du Code civil).
2. Second moyen
Dispositions légales violées
Article 149 de la Constitution coordonnée le
17février 1994.
Décisions et motifs critiqués
Par la décision attaquée, les juges d'appel ont déclaré l'appel de la première défenderesse recevable et fondé et ont notamment donné acte à la première défenderesse de sa réserve relative à l'introduction d'une demande tendant à obtenir une indemnité d'occupation, par les motifs suivants:
«Dans ses conclusions déposées au greffe le 30novembre 1998, la (première défenderesse) a demandé, d'une part, qu'il lui soit donné acte de sa réserve relative à l'introduction d'une demande tendant à obtenir une indemnité d'occupation à charge des (demandeurs) et, d'autre part, qu'avant de statuer sur cette indemnité, un expert soit désigné en vue d'évaluer la valeur locative du bien.
Si la réserve demandée peut être accordée, la demande relative à la désignation d'un expert est prématurée dès lors que, seule la réserve relative à la demande étant demandée, la demande même n'est pas introduite.
En outre, la demande tendant à la désignation d'un expert n'est pas utile.
En effet, il y a lieu de tenir compte que l'indemnité (loyer) serait payée au cours de la procédure.
Ensuite, il y a lieu de relever que (la première défenderesse) n'a en l'espèce pas fait preuve de diligence.
En effet, après la notification du congé, (la première défenderesse) a eu amplement le temps de faire clairement constater la validité du congé et de demander la remise du bien, sous la réserve de la procédure de renouvellement de bail en cours.
Ces mesures auraient limité le préjudice et (la première défenderesse) a l'obligation de limiter celui-ci.
Il n'est pas judicieux d'abandonner la jouissance paisible du bien aux (demandeurs) pour réclamer ensuite une indemnité pour cette occupation prolongée».
Griefs
Au cours de la procédure, la première défenderesse a introduit une demande reconventionnelle à l'égard des demandeurs en vue, notamment, de demander acte de sa réserve relative à l'introduction d'une demande tendant à obtenir une indemnité d'occupation.
Ainsi, la première défenderesse a effectivement introduit une demande, à savoir une demande reconventionnelle tendant à entendre donner acte d'une réserve. La circonstance suivant laquelle l'indemnité d'occupation n'a pas été immédiatement demandée, qui permet aux juges d'appel de constater que "la demande même n'est pas introduite», est sans influence.
S'ils ont donné acte de la réserve demandée par la première défenderesse, les juges d'appel ont toutefois décidé «qu'(.) il n'est pas judicieux d'abandonner la jouissance paisible du bien aux (demandeurs) pour réclamer ensuite une indemnité pour cette occupation prolongée». Ils se réfèrent à cet égard à l'obligation de limiter le préjudice qui incombe à la première défenderesse et à la circonstance «qu'il y a lieu de tenir compte que l'indemnité (loyer) serait payée au cours de la procédure».
Ainsi, en décidant dans un premier temps qu'il n'est pas «judicieux» de la part de la première défenderesse de demander une indemnité pour l'occupation prolongée du bien par les demandeurs et, en conséquence, qu'elle n'a pas droit à cette indemnité d'occupation, et en donnant ensuite acte de la réserve de la première défenderesse relative à l'éventuelle introduction de cette demande, les juges d'appel ont fondé la décision attaquée sur des motifs contradictoires, à tout le moins, sur des motifs et un dispositif contradictoires.
En accueillant la demande tendant à entendre donner acte d'une réserve relative à une demande déterminée, le juge ne se prononce pas définitivement sur le bien-fondé de cette demande.
Ainsi, la décision attaquée est contradictoire dès lors que, d'une part, elle rejette la demande tendant à obtenir une indemnité d'occupation et, d'autre part, donne acte de la réserve relative à l'éventuelle introduction ultérieure de cette demande.
Des motifs contradictoires, à tout le moins, des motifs et un dispositif contradictoires équivalent à un défaut de motifs, de sorte que les juges d'appel n'ont pas régulièrement motivé leur décision.
Il s'ensuit qu'en fondant leur décision sur des motifs contradictoires, à tout le moins, sur des motifs et un dispositif contradictoires, les juges d'appel n'ont pas régulièrement motivé leur décision (violation de l'article 149 de la Constitution coordonnée le 17février 1994).
IV. La décision de la Cour
Sur le premier moyen:
Quant à la première branche:
Attendu que l'article 14, alinéa1er, de la loi sur les baux commerciaux dispose que le preneur désireux d'exercer le droit au renouvellement doit, à peine de déchéance, le notifier au bailleur par exploit d'huissier de justice ou par lettre recommandée dix-huit mois au plus, quinze mois au moins, avant l'expiration du bail en cours;
Que cet alinéa prévoit ensuite que la notification doit indiquer, à peine de nullité, les conditions auxquelles le preneur lui-même est disposé à conclure le nouveau bail et contenir la mention qu'à défaut de notification par le bailleur, suivant les mêmes voies et dans les trois mois, de son refus motivé de renouvellement, de la stipulation de conditions différentes ou d'offres d'un tiers, le bailleur sera présumé consentir au renouvellement du bail aux conditions proposées;
Attendu que cette disposition, qui est impérative en faveur du bailleur, permet au preneur de proposer des modifications aux conditions du bail et non de modifier les parties à ce bail;
Qu'en conséquence, s'il y a pluralité de preneurs au moment de la demande de renouvellement de bail, celle-ci doit émaner de l'ensemble des preneurs;
Que le moyen, en cette branche, manque en droit;
Quant aux deuxième, troisième et quatrième branches:
Attendu qu'il suit de la réponse à première branche du moyen que le motif vainement critiqué dans cette branche fonde la décision;
Que, fût-il fondé, le moyen, en ces branches, ne saurait entraîner la cassation et est, partant, irrecevable;
Sur le second moyen:
Attendu que, d'une part, le jugement attaqué décide que la première défenderesse aurait pu limiter le préjudice et qu'il n'est pas judicieux d'abandonner la jouissance paisible du bien aux demandeurs pour réclamer ensuite une indemnité pour cette occupation prolongée;
Que ce motif concerne l'occupation du bien dans le passé;
Que, d'autre part, le jugement attaqué ordonne aux demandeurs de déguerpir et donne à la première défenderesse acte de sa réserve relative à l'introduction d'une demande tendant à obtenir une indemnité d'occupation;
Que ces décisions concernent l'occupation future du bien;
Que ces motifs ne sont pas contradictoires;
Que le moyen manque en fait;
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi;
Condamne les demandeurs aux dépens.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le conseiller faisant fonction de président Ernest Waûters, les conseillers Greta Bourgeois, Ghislain Londers, Eric Stassijns et Albert Fettweis, et prononcé en audience publique du onze avril deux mille trois par le conseiller faisant fonction de président Ernest Waûters, en présence de l'avocat général Guy Dubrulle, avec l'assistance du greffier Philippe Van Geem.
Traduction établie sous le contrôle du conseiller Christian Storck et transcrite avec l'assistance du greffier Marie-Jeanne Massart.
Le greffier, Le conseiller,