OFFICE NATIONAL DE L'EMPLOI, établissement public dont le siège est établi à Bruxelles, boulevard de l'Empereur, 7,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Lucien Simont, avocat à la Cour de cassation,
contre
F. H. P., aussi dénommé dans les actes de la procédure et notamment dans l'arrêt attaqué F. H.
défendeur en cassation.
La décision attaquée
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 25 mai 2001 par la cour du travail de Liège.
La procédure devant la Cour
Le président de section Claude Parmentier a fait rapport.
Le premier avocat général Jean-François Leclercq a conclu.
Le moyen de cassation
Le demandeur présente un moyen libellé dans les termes suivants:
Dispositions légales violées
-articles 110, § 1er, alinéa 1er, 2°, c), et 114, spécialement § 3, de l'arrêté royal du 25 novembre 1991 portant réglementation du chômage;
-articles 61, alinéa 2, 1°, et 62, alinéa 3, de l'arrêté ministériel du 26 novembre 1991 portant les modalités d'application de la réglementation du chômage (ledit article 62 tel qu'il a été modifié par l'arrêté ministériel du 15 juillet 1993).
Décisions et motifs critiqués
Le défendeur ayant bénéficié depuis le 28 octobre 1993 d'allocations de chômage au taux accordé aux travailleurs ayant charge de famille sur la base de ses déclarations annuelles relatives à la composition de son ménage selon lesquelles il vivait uniquement avec sa mère bénéficiant d'une pension belge de 20.000 francs par mois, sans indiquer qu'elle bénéficiait aussi d'une pension espagnole et sans non plus faire mention du fait qu'il cohabitait avec sa grand-mère, laquelle bénéficie d'un revenu garanti aux personnes âgées ainsi que d'une allocation de complément de revenu garanti, et le directeur du bureau de chômage ayant, par décision notifiée le 16 mai 1997, exclu le défendeur du bénéfice des allocations au taux attribué aux travailleurs ayant charge de famille, décidé de l'admettre au bénéfice des allocations au taux attribué aux travailleurs cohabitants, de l'exclure, à titre de sanction, du bénéfice des allocations pendant 20 semaines et de récupérer les allocations perçues indûment, en limitant cependant cette récupération à la période prenant cours le 1er avril 1994, l'arrêt attaqué met cette décision à néant, se fondant sur les motifs suivants: «il découle d'une première lecture du texte (de l'article 62, alinéa 3, de l'arrêté ministériel du 26 novembre 1991 portant les modalités d'application de la réglementation du chômage) que, lorsque le chômeur a pris la charge d'un ascendant non handicapé, il a droit au taux chef de ménage pour autant que l'ensemble des pensions de l'ascendant ne dépasse pas le plafond de 10.171 francs par mois (montant à indexer). Il a, de même, droit au taux chef de ménage s'il a pris en charge un ascendant handicapé dont l'ensemble des pensions et/ou allocations ne dépasse pas 17.161 francs. Cette différence de plafond selon que l'ascendant est ou n'est pas handicapé confirme que c'est la prise en charge qui est chiffrée, la charge d'un handicapé étant en principe plus lourde que celle d'une personne valide. Dès lors que le texte de l'article 62 considère que l'ascendant est à charge du chômeur lorsque ses revenus de remplacement sont inférieurs à un plafond qui varie selon que cet ascendant est ou n'est pas handicapé, il convient de considérer que le ministre a voulu chiffrer une charge en telle sorte que, lorsque le chômeur assume la charge de deux ascendants en ligne directe dont l'un est handicapé, il convient de tenir compte de l'addition des revenus de remplacement de ces deux ascendants et d'apprécier si celle-ci est ou non inférieure à l'addition des plafonds déterminant la charge de chacun. Dès lors que, durant toute la période considérée, l'addition des revenus de remplacement des deux ascendants n'a pas dépassé l'addition des plafonds de charge propres à chacun, il y a lieu d'annuler la décision dont recours en toutes ses dispositions».
Griefs
L'article 110, § 1er, alinéa 1er, 2°, c), de l'arrêté royal du 25 novembre 1991 portant réglementation du chômage dispose que, par travailleur ayant charge de famille, il faut entendre notamment le travailleur qui cohabite, non avec un conjoint, mais exclusivement avec un ou plusieurs parents ou alliés jusqu'au troisième degré inclus qui ne disposent ni de revenus professionnels ni de revenus de remplacement. Aux termes de l'article 62, alinéa 3, de l'arrêté ministériel du 26 novembre 1991 précité, pour l'application de cette disposition de l'arrêté royal du 25 novembre 1991, ne sont pas considérés comme revenus de remplacement les pensions et avantages auxquels le parent ou allié ascendant en ligne directe dont le chômeur a pris la charge peut prétendre «lorsque le montant brut total, le cas échéant cumulé, ne dépasse pas 10.171 francs par mois», ce montant étant porté à 17.161 francs par mois pour certains handicapés.
Il ressort de cet alinéa 3 de l'article 62 qu'il convient pour son application de cumuler les revenus et avantages de tous les ascendants, s'il y en a plusieurs, et de vérifier si le total ainsi obtenu demeure inférieur au plafond indiqué, mais qu'un seul plafond est établi et qu'il ne peut être question d'en prévoir un pour chaque ascendant.
En décidant le contraire, l'arrêt viole les dispositions légales visées au moyen et spécialement l'article 62, alinéa 3, de l'arrêté ministériel du 26 novembre 1991, précité.
La décision de la Cour
Attendu qu'en vertu de l'article 110, § 1er, alinéa 1er, 2°, c), de l'arrêté royal du 25 novembre 1991 portant réglementation du chômage, il faut entendre par travailleur ayant charge de famille, le travailleur qui cohabite, non avec un conjoint, mais exclusivement avec un ou plusieurs parents ou alliés jusqu'au troisième degré inclus qui ne disposent ni de revenus professionnels ni de revenus de remplacement;
Que l'article 61, alinéa 2, 1°, de l'arrêté ministériel du 26 novembre 1991 portant les modalités d'application de la réglementation du chômage précise que sont considérés comme revenus de remplacement, s'ils dépassent un certain montant, les pensions de vieillesse, de retraite, d'ancienneté ou de survie et les autres avantages en tenant lieu au sens de l'article 65, § 3, de l'arrêté royal précité;
Que, toutefois, l'article 62, alinéa 3, de cet arrêté ministériel dispose que les pensions et avantages dont bénéficient les parents ou alliés ascendants en ligne directe, pris en charge par le chômeur, ne sont pas considérés comme revenus de remplacement lorsque leur montant brut total, le cas échéant cumulé, ne dépasse pas 10.171 francs par mois, ce montant étant porté à 17.161 francs par mois lorsque le chômeur a pris la charge d'un parent ou allié en ligne directe dont il a établi le manque d'autonomie ou la réduction de l'autonomie, comme il est précisé dans l'article;
Attendu qu'il ressort de ces dispositions que le chômeur qui a pris en charge des parents ou alliés ascendants en ligne directe est considéré comme un travailleur ayant charge de famille au sens de l'article 110, § 1er, alinéa 1er, 2°, c), de l'arrêté royal du 25 novembre 1991 lorsque les montants bruts cumulés des pensions et avantages dont bénéficie l'ensemble de ces personnes à charge ne dépassent pas l'un des deux plafonds prévus selon leur degré d'autonomie par l'article 62, alinéa 3, de l'arrêté ministériel du 26 novembre 1991;
Attendu que l'arrêt annule la décision du demandeur qui avait refusé de reconnaître le défendeur comme un travailleur ayant charge de famille, par le motif que la somme des revenus de remplacement des deux ascendants dont il a pris la charge ne dépasse pas la somme des plafonds applicables;
Qu'il viole ainsi les dispositions légales visées au moyen;
Que le moyen est fondé;
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Casse l'arrêt attaqué ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêt cassé;
Vu l'article 1017, alinéa 2, du Code judiciaire, condamne le demandeur aux dépens;
Renvoie la cause devant la cour du travail de Mons.
Les dépens taxés à la somme de quatre cent six euros soixante-sept centimes envers la partie demanderesse.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, troisième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Claude Parmentier, les conseillers Christian Storck, Didier Batselé, Daniel Plas et Christine Matray, et prononcé en audience publique du vingt-quatre février deux mille trois par le président de section Claude Parmentier, en présence du premier avocat général Jean-François Leclercq, avec l'assistance du greffier adjoint Christine Danhiez.