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16/01/2025 | BELGIQUE | N°7/2025

Belgique | Belgique, Cour constitutionnel, 16 janvier 2025, 7/2025


Cour constitutionnelle
Arrêt n° 7/2025
du 16 janvier 2025
Numéro du rôle : 8216
En cause : la question préjudicielle relative aux articles 55quinquies du Code des droits de succession, inséré par l’article 3 du décret de la Région wallonne du 13 décembre 2017
« portant diverses modifications fiscales », et 60ter du Code des droits de succession, tel qu’il a été remplacé par l’article 4 du décret de la Région wallonne du 13 décembre 2017 précité, posée par le Tribunal de première instance du Hainaut, division de Mons.
La Cour constitutionnelle

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composée des présidents Pierre Nihoul et Luc Lavrysen, et des juges Thierry Giet, Joséphin...

Cour constitutionnelle
Arrêt n° 7/2025
du 16 janvier 2025
Numéro du rôle : 8216
En cause : la question préjudicielle relative aux articles 55quinquies du Code des droits de succession, inséré par l’article 3 du décret de la Région wallonne du 13 décembre 2017
« portant diverses modifications fiscales », et 60ter du Code des droits de succession, tel qu’il a été remplacé par l’article 4 du décret de la Région wallonne du 13 décembre 2017 précité, posée par le Tribunal de première instance du Hainaut, division de Mons.
La Cour constitutionnelle,
composée des présidents Pierre Nihoul et Luc Lavrysen, et des juges Thierry Giet, Joséphine Moerman, Michel Pâques, Yasmine Kherbache, Danny Pieters, Sabine de Bethune, Emmanuelle Bribosia, Willem Verrijdt, Kattrin Jadin et Magali Plovie, assistée du greffier Nicolas Dupont, présidée par le président Pierre Nihoul,
après en avoir délibéré, rend l’arrêt suivant :
I. Objet de la question préjudicielle et procédure
Par jugement du 24 avril 2024, dont l’expédition est parvenue au greffe de la Cour le 15 mai 2024, le Tribunal de première instance du Hainaut, division de Mons, a posé la question préjudicielle suivante :
« Lorsque des droits de succession sont liquidés, les articles 55quinquies et/ou 60ter du Code des droits de succession (Région wallonne) tels qu’applicables en 2021, violent-ils les articles 10 et 11 de la Constitution, tels qu’interprétés en ce qu’ils excluent du bénéfice des mesures favorables à la transmission successorale de l’immeuble familial instaurées par ces articles le cohabitant légal (visé à l’article 55quinquies C.Succ. (R.w.)) et/ou les héritiers (visés à l’article 60ter C.Succ. (R.w.)) du défunt dont la résidence principale n’était pas établie dans ledit immeuble depuis au moins cinq ans à la date de son décès ? ».
F.B., C.M. et L.M., assistées et représentées par Me Ludovic Tricart, avocat au barreau de Mons, ont introduit un mémoire.
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Par ordonnance du 23 octobre 2024, la Cour, après avoir entendu les juges-rapporteurs Magali Plovie et Willem Verrijdt, a décidé que l’affaire était en état, qu’aucune audience ne serait tenue, à moins qu’une partie n’ait demandé, dans le délai de sept jours suivant la réception de la notification de cette ordonnance, à être entendue, et qu’en l’absence d’une telle demande, les débats seraient clos à l’expiration de ce délai et l’affaire serait mise en délibéré.
Aucune demande d’audience n’ayant été introduite, l’affaire a été mise en délibéré.
Les dispositions de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle relatives à la procédure et à l’emploi des langues ont été appliquées.
II. Les faits et la procédure antérieure
E.M. et F.B., cohabitants légaux, sont propriétaires de deux habitations situées aux numéros 31 et 33 de la même rue. Ils ont vécu durant 26 ans au numéro 31, mais décident, le 21 août 2020, de se domicilier avec leur fille cadette au numéro 33, alors que leur fille aînée demeure domiciliée au numéro 31.
Le 3 avril 2021, E.M. décède. Il laisse comme héritières légales sa cohabitante légale, F.B., ainsi que ses deux filles, C.M. et L.M. Dans le cadre de la succession d’E.M., F.B. sollicite l’exemption des droits de succession pour sa part nette dans l’habitation qui servait de résidence principale au défunt et à son cohabitant légal depuis cinq ans au moins à la date du décès, prévue à l’article 55quinquies du Code des droits de succession, tel qu’il est applicable en Région wallonne. C.M. et L.M. sollicitent quant à elles le taux réduit prévu à l’article 60ter du même Code pour leur part en pleine propriété de l’immeuble où le défunt a eu sa résidence principale.
Le 16 septembre 2021, l’administration fiscale liquide les droits de succession sans accorder ni l’exemption ni le bénéfice du taux réduit, au motif qu’au moment de son décès, le défunt n’avait sa résidence principale depuis cinq ans au moins ni au numéro 31, ni au numéro 33.
Le 10 mars 2022, les trois héritières, après que leur recours introduit devant l’administration fiscale a été rejeté par décision du 19 novembre 2021, saisissent le Tribunal de première instance du Hainaut, division de Mons, d’une demande visant à annuler la décision du 19 novembre 2021 et à accorder l’exemption et les taux réduits réclamés. Dans le cadre de ce litige, elles soutiennent que les articles 55quinquies et 60ter du Code des droits de succession font naître trois différences de traitement injustifiées. Après avoir écarté les deux premières différences de traitement alléguées, le Tribunal pose à la Cour la question préjudicielle reproduite plus haut.
III. En droit
-A-
A.1. Les parties demanderesses devant la juridiction a quo font valoir que les articles 55quinquies et 60ter du Code des droits de succession (Région wallonne) violent les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce qu’ils traitent différemment, sans justification raisonnable, d’une part, le cohabitant légal (article 55quinquies) ou les héritiers (article 60ter) d’un défunt qui avait sa résidence principale dans l’immeuble familial depuis au moins cinq ans à la date de son décès, qui peuvent bénéficier des exemptions et réductions de taux prévues par ces dispositions, et, d’autre part, le cohabitant légal ou les héritiers d’un défunt qui n’avait pas sa résidence principale
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dans l’immeuble familial depuis au moins cinq ans à la date de son décès, qui ne peuvent pas bénéficier desdites exemptions et réductions de taux.
A.2. Les parties demanderesses devant la juridiction a quo font valoir qu’il n’existe aucune justification objective permettant de comprendre les raisons pour lesquelles le défunt doit avoir eu sa résidence principale pendant au moins cinq ans avant son décès dans l’immeuble familial pour que ses héritiers puissent bénéficier des avantages prévus par les dispositions en cause.
Les parties demanderesses devant la juridiction a quo allèguent que le fait de ne pas accorder le bénéfice des mesures fiscales favorables prévues par les dispositions en cause repose sur un critère (la question de savoir si le défunt avait sa résidence principale dans l’habitation depuis au moins cinq ans au moment de son décès) qui n’est pas pertinent eu égard à l’objectif du législateur décrétal, qui est de favoriser la reprise de l’immeuble familial et d’éviter son dépérissement.
A.3. Les parties demanderesses devant la juridiction a quo font également valoir qu’en raison de cette exigence de résidence de cinq ans au moment du décès, les articles 55quinquies et 60ter du Code des droits de succession traitent également de manière distincte le cohabitant légal qui cohabitait avec le défunt au moment de son décès et le cohabitant légal du défunt dont la cohabitation a pris fin avant le décès, soit par séparation de fait soit par un cas de force majeure familial, médical, professionnel ou social, en ce que le second n’est pas soumis à l’exigence de résidence de cinq ans.
-B-
Quant aux dispositions en cause et à leur contexte
B.1.1. La question préjudicielle porte sur la possibilité, pour le conjoint ou le cohabitant légal d’un défunt, de bénéficier d’une exemption de droits de succession sur la part nette dans l’habitation qui leur servait de résidence principale, ainsi que sur la possibilité, pour les héritiers en ligne directe du défunt, de bénéficier d’un taux préférentiel pour leur part nette dans la même habitation.
B.1.2. L’article 55quinquies du Code des droits de succession, tel qu’il est applicable en Région wallonne, dispose :
« § 1er. Est exempte des droits de succession et de mutation par décès, la part nette du conjoint ou du cohabitant légal ayant droit dans l’habitation qui servait de résidence principale au défunt et à son conjoint ou cohabitant légal, depuis au moins cinq ans à la date de son décès.
Pour l’application de l’alinéa 1er, la preuve du fait que le défunt et le conjoint ou cohabitant légal avaient leur résidence principale dans l’immeuble considéré résulte, sauf preuve contraire, d’un extrait du registre de la population ou du registre des étrangers.
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Est également prise en considération comme résidence principale, la dernière résidence principale des conjoints ou cohabitants légaux si leur cohabitation a pris fin, soit par la séparation de fait des conjoints ou cohabitants légaux, soit par un cas de force majeure ou raison impérieuse de nature familiale, médicale, professionnelle ou sociale.
§ 2. Par part nette visée au paragraphe 1er, alinéa 1er, l’on entend la valeur de la part recueillie par le conjoint survivant ou le cohabitant légal survivant dans la résidence principale, déduction faite des dettes.
La quote-part du conjoint survivant ou du cohabitant légal survivant dans les dettes de la succession spécialement contractées pour acquérir ou conserver cette résidence principale est imputée par priorité sur leur part dans ledit bien.
La quote-part du conjoint survivant ou du cohabitant légal dans les autres dettes et frais funéraires est déduite par priorité de la valeur des éléments d’actifs visés à l’article 60bis, ensuite, de la valeur des autres biens de la succession, et enfin de la valeur restante de sa part recueillie dans la résidence principale.
§ 3. Lorsque, suivant les données du registre de la population ou du registre des étrangers, les conditions établies au paragraphe 1er, alinéa 1er, sont remplies, le receveur accorde d’office cette exemption. Toutefois, lorsque dans les cas prévus au paragraphe 1er, alinéa 3, le défunt, ou son conjoint ou cohabitant légal n’a pas pu conserver sa résidence principale dans l’immeuble ou que la cohabitation a pris fin pour cause de force majeure ou raison impérieuse de nature familiale, médicale, professionnelle ou sociale, l’application de l’exemption est expressément demandée dans la déclaration de succession et, le cas échéant, la force majeure ou raison impérieuse prouvée ».
L’article 60ter du Code des droits de succession, tel qu’il est applicable en Région wallonne, dispose :
« § 1er. Lorsque la succession du défunt comprend au moins une part en pleine propriété dans l’immeuble où le défunt a eu sa résidence principale depuis cinq ans au moins à la date de son décès et que cet immeuble, destiné en tout ou en partie à l’habitation et situé en Région wallonne, est recueilli par un héritier, un légataire ou un donataire en ligne directe, le droit de succession applicable à la valeur nette de sa part dans cette habitation, abstraction faite, le cas échéant, de la valeur de la partie professionnelle dudit immeuble soumise au taux réduit de l’article 60bis, est fixé d’après le tarif indiqué dans le tableau ci-après.
Celui-ci mentionne :
sous la lettre a : le pourcentage applicable à la tranche correspondante;
sous la lettre b : le montant total de l’impôt sur les tranches précédentes.
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Tableau relatif au tarif préférentiel pour les parts nettes dans les habitations Tranche de part nette Héritier, donataire, légataire en ligne directe De à … inclus a b EUR EUR Pour cent EUR
0,01 25.000,00 1 -
25.000,01 50.000,00 2 250,00
50.000,01 160.000,00 5 750,00
160.000,01 175.000,00 5 6.250,00
175.000,01 250.000,00 12 7.000,00
250.000,01 500.000,00 24 16.000,00
Au-delà de 500.000,00 30 76.000,00
§ 2. Pour l’application du paragraphe 1er, la preuve du fait que le défunt avait sa résidence principale dans l’immeuble considéré résulte, sauf preuve du contraire, d’un extrait du registre de la population ou du registre des étrangers.
Le bénéfice du tarif réduit est maintenu même lorsque le défunt n’a pas pu conserver sa résidence principale dans l’immeuble considéré pour cause de force majeure ou de raison impérieuse de nature familiale, médicale, professionnelle ou sociale.
§ 3. Par valeur nette, l’on entend la valeur de la part dans l’habitation visée au paragraphe 1er, diminuée du solde des dettes et des frais funéraires après imputation sur les biens visés par l’article 60bis, comme prévu à l’article 60bis, § 2, à l’exclusion de celles se rapportant spécialement à d’autres biens.
§ 4. Dans le cas où, suivant les données du registre de la population ou du registre des étrangers, les conditions visées, par le présent article sont remplies, le receveur accorde d’office ce tarif réduit. Toutefois, lorsque dans le cas prévu au paragraphe 2, alinéa 2, le défunt n’a pas pu conserver sa résidence principale dans l’immeuble considéré pour cause de force majeure ou raison impérieuse de nature familiale, médicale, professionnelle ou sociale, l’application du tarif réduit est expressément demandée dans la déclaration de succession et la force majeure ou raison impérieuse, est prouvée ».
B.2. La première disposition exempte des droits de succession et de mutation la part nette recueillie par le conjoint ou par le cohabitant légal dans l’habitation qui servait de résidence principale au défunt et au conjoint ou cohabitant légal depuis au moins cinq ans à la date du décès. La seconde disposition soumet la part nette dans l’immeuble où le défunt a eu sa résidence principale depuis cinq ans au moins à la date de son décès à un taux réduit si cet
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immeuble, destiné en tout ou en partie à l’habitation et situé en Région wallonne, est recueilli par un héritier, un légataire ou un donataire en ligne directe.
B.3. Il ressort des travaux préparatoires des dispositions en cause que l’article 55quinquies du Code des droits de succession vise à permettre au conjoint ou au cohabitant légal du défunt « dans une certaine mesure [d’]assurer le maintien de cette résidence principale » (Doc. parl., Parlement wallon, 2017-2018, n° 972/1, p. 3) et que l’article 60ter du même Code a pour objectif « d’encourager la donation et la succession de l’habitation familiale par un taux favorable » (Doc. parl., Parlement wallon, 2005-2006, n° 279/1, p. 2).
B.4.1. La condition prévue par les dispositions en cause selon laquelle le défunt et son conjoint ou cohabitant légal, dans le cas de la première disposition, ou le défunt seulement, dans le cas de la seconde, doivent avoir eu leur résidence principale dans l’habitation depuis cinq ans au moins à la date du décès est inspirée par la législation applicable en Région de Bruxelles-
Capitale (Doc. parl., Parlement wallon, 2005-2006, n° 279/1, pp. 6-7 et 11; 2017-2018, n° 972/1, p. 3).
En Région de Bruxelles-Capitale, cette condition était prévue par l’article 60ter du Code des droits de succession, dans sa version applicable en Région de Bruxelles-Capitale, tel qu’il a été inséré par l’article 11 de l’ordonnance de la Région de Bruxelles-Capitale du 20 décembre 2002 « modifiant le Code des droits de succession » et avant sa modification par l’ordonnance de la Région de Bruxelles-Capitale du 6 juillet 2023 « modifiant le Code des droits de succession et le Code des droits d’enregistrement, d’hypothèque et de greffe en vue d’adapter le droit fiscal bruxellois aux nouvelles structures familiales et de faciliter les transmissions entre générations » (ci-après : l’ordonnance du 6 juillet 2023). L’exposé des motifs de l’article 11 de l’ordonnance du 20 décembre 2002 précitée précisait :
« Le délai de cinq ans est posé afin d’éviter qu’en fin de vie, l’on déménagerait vers la Région Bruxelles-Capitale uniquement pour des raisons fiscales. La règle de localisation mentionnée ci-dessus prévoit, en effet, également un délai afin d’empêcher le shopping fiscal »
(Doc. parl., Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale, 2002-2003, A-360/1, p. 9).
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B.4.2. Le législateur ordonnanciel a depuis adopté l’ordonnance du 6 juillet 2023, dont l’article 10 supprime la condition de résidence d’au moins cinq ans à la date du décès. À cet égard, l’exposé des motifs indique :
« [La] crainte d’un déménagement en fin de vie n’a aujourd’hui plus lieu d’être, dans la mesure où tant la Région wallonne que la Région flamande connaissent des régimes préférentiels similaires. Le déménagement en Région de Bruxelles-Capitale n’est donc plus motivé par la seule application de l’article 60ter. D’ailleurs, dès lors que l’impôt est localisé en Région de Bruxelles-Capitale, ce n’est pas seulement le tarif réduit qui est appliqué : toute la succession est imposée et génère des recettes au profit de la Région » (Doc. parl., Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, 2022-2023, A-709/1, p. 14).
Quant au fond
B.5. Par la question préjudicielle, la juridiction a quo souhaite savoir si les articles 55quinquies et 60ter du Code des droits de succession, tels qu’ils sont applicables en Région wallonne, sont compatibles avec les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce qu’ils excluent du bénéfice respectivement de l’exemption et de la réduction de taux des droits de succession et de mutation sur l’acquisition de l’immeuble familial le conjoint ou le cohabitant légal (article 55quinquies) ou les héritiers en ligne directe (article 60ter) du défunt dont la résidence principale n’était pas située dans cet immeuble depuis au moins cinq ans à la date du décès, alors que ces mêmes catégories de personnes bénéficient de cet avantage si, au moment du décès, la condition de résidence d’au moins cinq ans est remplie.
B.6.1. Le principe d’égalité et de non-discrimination n’exclut pas qu’une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu’elle repose sur un critère objectif et qu’elle soit raisonnablement justifiée.
L’existence d’une telle justification doit s’apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d’égalité et de non-discrimination est violé lorsqu’il est établi qu’il n’existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.
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B.6.2. Lorsqu’il détermine sa politique en matière fiscale, le législateur décrétal dispose d’un pouvoir d’appréciation étendu. La Cour ne peut censurer les choix politiques du législateur décrétal et les motifs qui les fondent que s’ils reposent sur une erreur manifeste ou ne sont pas raisonnablement justifiés. Par ailleurs, une loi fiscale doit nécessairement appréhender la diversité des situations en catégories qui ne correspondent à la réalité que d’une manière simplificatrice et approximative.
B.7. La différence de traitement repose sur un critère objectif, à savoir le fait que l’habitation, à la date du décès, servait depuis au moins cinq ans ou non de résidence principale au défunt, ou au défunt et à son conjoint ou cohabitant légal.
B.8. Il ressort de ce qui est dit en B.4.1 que cette condition de résidence d’au moins cinq ans à la date du décès tend à empêcher le shopping fiscal et à éviter qu’en fin de vie, des personnes déménagent vers la Région wallonne uniquement pour des raisons fiscales. Cet objectif est légitime.
Le législateur décrétal peut en outre subordonner la reconnaissance d’un avantage fiscal à une condition de durée minimale de résidence.
B.9. La condition de résidence en cause ne produit pas des effets disproportionnés, puisque le législateur décrétal a prévu plusieurs exceptions. En vertu de l’article 55quinquies, § 1er, alinéa 3, du Code des droits de succession, tel qu’il est applicable en Région wallonne, est également prise en considération comme résidence principale, la dernière résidence principale des conjoints ou cohabitants légaux si leur cohabitation a pris fin, soit par la séparation de fait des conjoints ou cohabitants légaux, soit par un cas de force majeure ou raison impérieuse de nature médicale, familiale, professionnelle ou sociale. De plus, en vertu de l’article 60ter, § 2, alinéa 2, du même Code, le taux réduit est maintenu même lorsque le défunt n’a pas pu conserver sa résidence principale dans l’habitation concernée pour cause de force majeure ou de raison impérieuse de nature médicale, familiale, professionnelle ou sociale.
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B.10. Les dispositions en cause sont dès lors compatibles avec les articles 10 et 11 de la Constitution.
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Par ces motifs,
la Cour
dit pour droit :
Les articles 55quinquies et 60ter du Code des droits de succession, dans sa version applicable en Région wallonne, ne violent pas les articles 10 et 11 de la Constitution.
Ainsi rendu en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l’article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 16 janvier 2025.
Le greffier, Le président,
Nicolas Dupont Pierre Nihoul


Synthèse
Numéro d'arrêt : 7/2025
Date de la décision : 16/01/2025
Type d'affaire : Droit constitutionnel

Origine de la décision
Date de l'import : 29/01/2025
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.constitutionnel;arret;2025-01-16;7.2025 ?

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