La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/06/2023 | BELGIQUE | N°101/2023

Belgique | Belgique, Cour constitutionnel, 22 juin 2023, 101/2023


Cour constitutionnelle
Arrêt n° 101/2023
du 22 juin 2023
Numéro de rôle : 7870
En cause : la question préjudicielle concernant l’article 54 de la loi du 21 novembre 2017
« relative à la vente de voyages à forfait, de prestations de voyage liées et de services de voyage », posée par le président du Tribunal de l’entreprise d’Anvers, division d’Anvers, siégeant comme en référé.
La Cour constitutionnelle,
composée des présidents L. Lavrysen et P. Nihoul, et des juges T. Giet, J. Moerman, M. Pâques, Y. Kherbache, T. Detienne, D. Pieters, S. de

Bethune, E. Bribosia, W. Verrijdt et K. Jadin, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée p...

Cour constitutionnelle
Arrêt n° 101/2023
du 22 juin 2023
Numéro de rôle : 7870
En cause : la question préjudicielle concernant l’article 54 de la loi du 21 novembre 2017
« relative à la vente de voyages à forfait, de prestations de voyage liées et de services de voyage », posée par le président du Tribunal de l’entreprise d’Anvers, division d’Anvers, siégeant comme en référé.
La Cour constitutionnelle,
composée des présidents L. Lavrysen et P. Nihoul, et des juges T. Giet, J. Moerman, M. Pâques, Y. Kherbache, T. Detienne, D. Pieters, S. de Bethune, E. Bribosia, W. Verrijdt et K. Jadin, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée par le président L. Lavrysen,
après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant :
I. Objet de la question préjudicielle et procédure
Par jugement du 28 septembre 2022, dont l’expédition est parvenue au greffe de la Cour le 4 octobre 2022, le président du Tribunal de l’entreprise d’Anvers, division d’Anvers, siégeant comme en référé, a posé la question préjudicielle suivante :
« L’article 54 de la loi du 21 novembre 2017 relative à la vente de voyages à forfait, de prestations de voyage liées et de services de voyage viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec la liberté d’entreprendre, en ce qu’il impose aux détaillants d’être assurés contre leur insolvabilité, alors qu’aucune distinction n’est établie à cet égard en fonction du fait que le détaillant ne conclut pas lui-même de contrats de voyage avec le voyageur (dès lors que le détaillant travaille exclusivement ou non comme agent commercial)
mais qu’il l’apporte seulement en tant que client à un commettant-organisateur de voyages qui est établi dans l’Espace économique européen ? ».
Des mémoires et mémoires en réponse ont été introduits par :
- l’ASBL « Vereniging Vlaamse Reisbureaus », assistée et représentée par Me J. Van Bellinghen, avocat au barreau d’Anvers;
2
- Annick Kempenaers, assistée et représentée par Me P. Van Rompaey, avocat au barreau d’Anvers;
- le Conseil des ministres, assisté et représenté par Me C. Decordier, avocat au barreau de Gand.
Par ordonnance du 26 avril 2023, la Cour, après avoir entendu les juges-rapporteurs W. Verrijdt et T. Detienne, a décidé que l'affaire était en état, qu’aucune audience ne serait tenue, à moins qu’une partie n’ait demandé, dans le délai de sept jours suivant la réception de la notification de cette ordonnance, à être entendue, et qu’en l’absence d’une telle demande, les débats seraient clos le 17 mai 2023 et l’affaire mise en délibéré.
Aucune demande d’audience n’ayant été introduite, l’affaire a été mise en délibéré le 17 mai 2023.
Les dispositions de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle relatives à la procédure et à l’emploi des langues ont été appliquées.
II. Les faits et la procédure antérieure
A. Kempenaers vend des voyages à forfait pour le compte d’un organisateur de voyages néerlandais. Une action en cessation est introduite contre elle devant la juridiction a quo par l’ASBL « Vereniging Vlaamse Reisbureaus », pour pratiques commerciales trompeuses et déloyales. Selon l’ASBL « Vereniging Vlaamse Reisbureaus », A. Kempenaers ne dispose pas d’une assurance contre l’insolvabilité, ainsi que l’imposent l’article 54 de la loi du 21 novembre 2017 « relative à la vente de voyages à forfait, de prestations de voyage liées et de services de voyage » (ci-après : la loi du 21 novembre 2017) et l’article 3 de l’arrêté royal du 29 mai 2018
« relatif à la protection contre l'insolvabilité lors de la vente de voyages à forfait, de prestations de voyage liées et de services de voyage » (ci-après : l’arrêté royal du 29 mai 2018).
La juridiction a quo constate que A. Kempenaers doit être considérée comme un détaillant au sens de la loi du 21 novembre 2017 et qu’elle relève dès lors de l’obligation de garantie prévue à l’article 54 de cette loi. Elle souligne que la loi du 21 novembre 2017 transpose la directive (UE) 2015/2302 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 « relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées, modifiant le règlement (CE) n° 2006/2004 et la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 90/314/CEE du Conseil » (ci-après : la directive (UE) 2015/2302). Le considérant 41 de cette directive permet aux États membres d’imposer, outre aux organisateurs, également aux détaillants de voyages à forfait de prévoir une protection contre l’insolvabilité. Le législateur a fait usage de cette possibilité. La juridiction a quo doute toutefois qu’il soit proportionné que l’obligation de garantie s’applique aussi aux détaillants qui ne concluent pas des contrats de voyages à forfait en leur nom propre et pour leur propre compte. Elle pose dès lors la question préjudicielle reproduite plus haut.
3
III. En droit
-A-
A.1.1. Le Conseil des ministres estime que l’article 54 de la loi du 21 novembre 2017 est compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution. Selon le Conseil des ministres, il importe peu qu’un détaillant prenne ou non des engagements au nom et pour le compte d’un organisateur. Il est en effet toujours possible que le détaillant reçoive des paiements effectués par les voyageurs. L’obligation de garantie en cause vise à garantir le remboursement de ces paiements en cas d’insolvabilité. Tous les détaillants qui reçoivent des paiements effectués par les voyageurs se trouvent par conséquent dans la même situation et sont traités de la même manière, en ce qu’ils sont tous obligés de conclure une assurance contre l’insolvabilité. En revanche, lorsqu’un détaillant ne reçoit aucun paiement de la part des voyageurs, il n’y a aucun risque que son insolvabilité menace l’exécution du voyage à forfait et il ne doit conclure aucune assurance. Par ailleurs, une personne qui conclut des contrats de voyages à forfait en son nom propre et pour son propre compte n’est en réalité pas un détaillant, mais un organisateur.
A.1.2. Le Conseil des ministres observe qu’aux termes du considérant 41 de la directive (UE) 2015/2302, les États membres peuvent étendre l’obligation de garantie aux détaillants. Le législateur a fait usage de cette possibilité. Il appartient aux États membres de préciser davantage la protection contre l’insolvabilité, en tenant compte des aspects mentionnés dans le considérant 40 de la directive précitée. Il en résulte que la protection contre l’insolvabilité doit être efficace, mais il est également requis que l’étendue de la garantie soit proportionnée aux risques pour le voyageur. Lorsque les États membres étendent aux détaillants les obligations en matière de protection contre l’insolvabilité, ils ne peuvent déroger aux exigences qu’impose la directive en ce qui concerne l’étendue et l’efficacité de cette protection.
A.1.3. Le Conseil des ministres ajoute que l’objectif du législateur consiste à offrir aux voyageurs une protection contre l’insolvabilité tant des organisateurs que des détaillants, ainsi qu’il ressort également de l’exposé des motifs de la loi du 21 novembre 2017. Cet objectif est légitime. Contrairement à ce qu’estime la juridiction a quo, le critère de distinction utilisé par le législateur porte non pas sur la question de savoir si le détaillant agit en son nom propre et pour son propre compte, mais sur celle de savoir s’il reçoit des paiements effectués par les voyageurs. Ce critère est objectif et pertinent au regard de l’objectif précité. Lorsque le détaillant intervient exclusivement comme intermédiaire et que le voyageur paie directement à l’organisateur, il n’y a aucun risque pour le voyageur en cas d’insolvabilité du détaillant.
Enfin, selon le Conseil des ministres, la disposition en cause ne produit pas des effets disproportionnés. Le Conseil des ministres estime en particulier qu’un compte tiers n’offre pas une protection équivalente à la garantie contre l’insolvabilité. Un compte tiers ne permet en effet pas de prévoir le rapatriement des voyageurs, ce qui est obligatoire si le transport des personnes est inclus dans le contrat de voyages à forfait, conformément à l’article 17
de la directive (UE) 2015/2302. Un compte tiers ne permet pas non plus de continuer le voyage à forfait. En outre, le solde d’un compte tiers peut également être insuffisant. Par ailleurs, l’article 5 de l’arrêté royal du 29 mai 2018
permet de tenir compte de la taille de l’entreprise, en particulier s’il s’agit d’une microsociété.
A.1.4. En ce que A. Kempenaers soutient que l’article 54 de la loi du 21 novembre 2017 affaiblit la position concurrentielle des détaillants établis en Belgique par rapport à celle des détaillants établis aux Pays-Bas, où
l’obligation de garantie ne s’applique qu’aux organisateurs, le Conseil des ministres souligne qu’un détaillant qui s’établit en Belgique doit respecter la réglementation belge. Ainsi, il est également nécessaire que, lorsqu’un détaillant belge conclut une assurance contre l’insolvabilité auprès d’une entreprise d’assurances étrangère, cette entreprise d’assurances remplisse les conditions imposées par le droit belge.
Le Conseil des ministres estime également qu’il n’y a aucune raison de poser à la Cour de justice de l’Union européenne la question préjudicielle suggérée par A. Kempenaers. La directive (UE) 2015/2302 ne permet en effet pas de déduire qu’un État membre ne pourrait étendre les obligations en matière de protection contre l’insolvabilité aux détaillants que s’il a également fait usage de la possibilité de rendre, outre les organisateurs, les détaillants responsables de l’exécution du voyage à forfait.
A.2.1. L’ASBL « Vereniging Vlaamse Reisbureaus » estime que l’article 54 de la loi du 21 novembre 2017
est compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution. Elle expose que la directive (UE) 2015/2302 autorise l’extension de l’obligation de garantie aux détaillants. Cette extension est pertinente au regard de l’objectif
4
légitime qui consiste à offrir aux voyageurs une protection aussi étendue que possible. Selon l’ASBL « Vereniging Vlaamse Reisbureaus », il convient de déterminer au moyen de faits concrets si, lors de la réservation d’un voyage à forfait, une entreprise agit en tant qu’organisateur ou en tant que détaillant. La relation contractuelle entre le détaillant et l’organisateur, ainsi que la qualité en laquelle le détaillant se présente, importent peu à cet égard. Ainsi qu’il ressort du considérant 22 de la directive (UE) 2015/2302, il est en outre indifférent qu’il agisse du côté de l’offre ou qu’il se présente comme un agent intervenant pour le compte du voyageur. Les détaillants ne jouent donc pas toujours le même rôle lors de la formation d’un contrat de voyages à forfait et, souvent, le voyageur ne sait pas clairement avec qui ni de quelle manière il a conclu son contrat de voyage à forfait. Il serait en outre difficilement réalisable dans la pratique de dispenser de l’obligation de garantie les détaillants qui apportent exclusivement des clients à un organisateur. Selon l’ASBL « Vereniging Vlaamse Reisbureaus », il en résulte également que, contrairement à ce que soutient le Conseil des ministres, l’obligation de garantie est applicable, même lorsque le détaillant ne reçoit aucun paiement de la part des voyageurs.
A.2.2. Par ailleurs, l’ASBL « Vereniging Vlaamse Reisbureaus » estime que l’article 54 de la loi du 21 novembre 2017 ne produit pas d’effets disproportionnés et qu’il ne limite donc pas non plus de manière disproportionnée la liberté d’entreprendre. La prime d’assurance due ne constitue qu’une charge financière limitée et elle est proportionnée au chiffre d’affaires du détaillant concerné. Un compte tiers ne constitue pas une solution de remplacement valable à une assurance contre l’insolvabilité et entraînerait également des charges financières et administratives. En outre, l’article 36 de la loi du 16 février 1994 « régissant le contrat d’organisation de voyages et le contrat d’intermédiaire de voyages » prévoyait déjà une obligation d’assurance similaire.
A.3.1. Selon A. Kempenaers, l’article 54 de la loi du 21 novembre 2017 n’est pas compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec la liberté d’entreprendre. Elle soutient qu’il n’est pas raisonnablement justifié d’imposer à tous les détaillants l’obligation de souscrire une assurance contre l’insolvabilité. Il existe en effet des catégories de détaillants fondamentalement différentes, à savoir, d’une part, les détaillants qui sont partie au contrat de voyage à forfait et qui reçoivent les paiements effectués par les voyageurs et, d’autre part, les détaillants qui ne remplissent pas ces critères et dont la responsabilité est en outre couverte par l’assurance de l’organisateur établi dans un autre État membre. Une double obligation d’assurance déraisonnable, qui limite l’accès au marché belge, est imposée à cette dernière catégorie de détaillants. Concernant les cas où le détaillant recevrait quand même des paiements, l’objectif poursuivi par le législateur, consistant à offrir une protection étendue aux voyageurs, peut également être atteint en utilisant un compte tiers, dont les soldes échappent au concours entre créanciers, par analogie avec l’article 3.37 du Code civil. Par ailleurs, le considérant 41 de la directive (UE) 2015/2302 ne précise pas en quoi peut consister la protection en cas d’insolvabilité des détaillants.
A.3.2. A. Kempenaers observe qu’à la suite de la réglementation néerlandaise relative aux voyages à forfait, les voyageurs qui concluent un contrat de voyages à forfait avec un organisateur néerlandais sont protégés par l’assurance de cet organisateur, indépendamment du fait que le voyage à forfait ait été vendu par un détaillant belge ou par un détaillant néerlandais. En outre, les Pays-Bas ont choisi de ne pas étendre aux détaillants les obligations en matière de protection contre l’insolvabilité. De ce fait, l’article 54 de la loi du 21 novembre 2017
met en péril la position concurrentielle des détaillants belges. En outre, l’article 18 de la directive (UE) 2015/2302
prévoit que la protection contre l’insolvabilité qu’un organisateur fournit conformément aux mesures de l’État membre où il est établi, est reconnue par les États membres comme conforme à leurs mesures nationales de transposition. En vertu de l’article 13 et du considérant 39 de la même directive, les États membres peuvent prévoir que le détaillant est aussi responsable de l’exécution du voyage à forfait. Dans ce cas, les articles 17 et 18 de la directive notamment, qui concernent la protection contre l’insolvabilité, sont applicables mutatis mutandis au détaillant. Il découle toutefois de l’article 33 de la loi du 21 novembre 2017 qu’en Belgique, seul l’organisateur est responsable de l’exécution du voyage à forfait.
Selon A. Kempenaers, il résulte de ce qui précède que l’article 54 de la loi du 21 novembre 2017 est contraire à la directive (EU) 2015/2302. Conformément à cette directive, un État membre ne peut en effet étendre aux détaillants les obligations en matière de protection contre l’insolvabilité que lorsqu’il a également choisi de rendre les détaillants coresponsables de l’exécution du voyage à forfait. Selon A. Kempenaers, la Cour doit dès lors demander à la Cour de justice de l’Union européenne si l’article 54 de la loi du 21 novembre 2017 et l’article 3 de l’arrêté royal du 29 mai 2018 sont contraires à l’article 13 et au considérant 39 de la directive (UE) 2015/2302.
5
-B-
Quant à la disposition en cause et à son contexte
B.1. La question préjudicielle porte sur l’obligation pour les détaillants de voyages à forfait de fournir une garantie qui s’applique dans le cas où ils deviennent insolvables, conformément à l’article 54 de la loi du 21 novembre 2017 « relative à la vente de voyages à forfait, de prestations de voyage liées et de services de voyage » (ci-après : la loi du 21 novembre 2017).
B.2.1. L’article 2, 2°, de la loi du 21 novembre 2017 définit la notion de « voyage à forfait » comme suit :
« la combinaison d’au moins deux types différents de services de voyage aux fins du même voyage ou séjour de vacances, si :
a) ces services sont combinés par un seul professionnel, y compris à la demande du voyageur ou conformément à son choix, avant qu’un contrat unique incluant tous ces services ne soit conclu, ou
b) indépendamment de l’éventuelle conclusion de contrats séparés avec plusieurs prestataires de services de voyage, ces services sont:
b.1) achetés auprès d’un seul point de vente et ont été choisis avant que le voyageur n’accepte de payer, ou
b.2) proposés, vendus ou facturés à un prix tout compris ou à un prix total, ou
b.3) annoncés ou vendus sous la dénomination de ‘ voyage à forfait ’ ou sous une dénomination similaire, ou
b.4) combinés après la conclusion d’un contrat par lequel un professionnel autorise le voyageur à choisir parmi une sélection de différents types de services de voyage, ou
b.5) achetés auprès de professionnels distincts grâce à des procédures de réservation en ligne liées, lorsque le nom du voyageur, les modalités de paiement et l’adresse électronique sont transmis par le professionnel avec lequel le premier contrat est conclu à un ou plusieurs autres professionnels et lorsqu’un contrat avec ce ou ces derniers est conclu au plus tard vingt-
quatre heures après la confirmation de la réservation du premier service de voyage.
[…] ».
6
B.2.2. Par détaillant, il faut entendre « un professionnel autre que l’organisateur qui vend ou offre à la vente des voyages à forfait élaborés par un organisateur » (article 2, 9°, de la loi du 21 novembre 2017).
Un organisateur est « un professionnel qui élabore des voyages à forfait et les vend ou les offre à la vente, directement ou par l`intermédiaire d`un autre professionnel ou encore conjointement avec un autre professionnel, ou un professionnel qui transmet les données du voyageur à un autre professionnel conformément au 2°, b.5) » (article 2, 8°, de la même loi).
B.3.1. Le titre 3 (« Contrats de voyage à forfait ») de la loi du 21 novembre 2017
comprend des dispositions relatives aux obligations d’information et au contenu du contrat de voyage à forfait (chapitre 1er), à la cession et à la modification du contrat de voyage à forfait avant le début du voyage à forfait (chapitre 2), à l’exécution du voyage à forfait (chapitre 3), aux réductions de prix, aux dédommagements et aux droits de recours (chapitre 4) et à la protection contre l’insolvabilité (chapitre 5).
B.3.2. L’article 54, en cause, de la loi du 21 novembre 2017 fait partie de ce dernier chapitre. Cette disposition est libellée ainsi :
« Les organisateurs et les détaillants établis en Belgique fournissent une garantie pour le remboursement de tous les paiements déjà effectués par les voyageurs ou en leur nom dans la mesure où les services concernés ne sont pas exécutés en raison de leur insolvabilité. Si le transport des passagers est inclus dans le contrat de voyage à forfait, les organisateurs et les détaillants fournissent aussi une garantie pour le rapatriement des voyageurs. La continuation du voyage à forfait peut être proposée ».
L’article 56 de la loi du 21 novembre 2017 précise que la garantie « est effective et couvre les coûts raisonnablement prévisibles. Elle couvre également les montants des paiements effectués par les voyageurs ou en leur nom en ce qui concerne les voyages à forfait, compte tenu du laps de temps entre les paiements de l’acompte et du solde, et l’exécution des voyages à forfait, ainsi que les coûts estimés de rapatriement en cas d’insolvabilité de l’organisateur ou du détaillant ».
B.3.3. En vertu de l’article 60 de la loi du 21 novembre 2017, le Roi « détermine la forme et les conditions auxquelles ces garanties doivent répondre ». En exécution de cet article, l’article 3 de l’arrêté royal du 29 mai 2018 « relatif à la protection contre l’insolvabilité lors de
7
la vente de voyages à forfait, de prestations de voyage liées et de services de voyage » (ci-
après : l’arrêté royal du 29 mai 2018) dispose que la garantie visée dans la disposition en cause est fournie « par un contrat d’assurance souscrit auprès d’une entreprise d’assurance autorisée à effectuer de telles opérations ».
B.4.1. La loi du 21 novembre 2017 transpose en droit belge la directive (UE) 2015/2302
du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 « relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées, modifiant le règlement (CE) n° 2006/2004 et la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 90/314/CEE du Conseil » (ci-après : la directive (UE) 2015/2302).
Cette directive « a pour objet de contribuer au bon fonctionnement du marché intérieur et à la réalisation d’un niveau élevé de protection des consommateurs le plus uniforme possible en rapprochant certains aspects des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres concernant les contrats entre voyageurs et professionnels relatifs aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées » (article 1er de la directive (UE) 2015/2302).
B.4.2. La disposition en cause constitue plus précisément la transposition de l’article 17
de la directive (UE) 2015/2302, intitulé « Effectivité et champ d’application de la protection contre l’insolvabilité », qui fait partie du chapitre V (« Protection contre l’insolvabilité ») de la même directive.
En vertu de l’article 17, paragraphe 1, « les États membres veillent à ce que les organisateurs établis sur leur territoire fournissent une garantie pour le remboursement de tous les paiements effectués par les voyageurs ou en leur nom dans la mesure où les services concernés ne sont pas exécutés en raison de l’insolvabilité des organisateurs. Si le transport des passagers est inclus dans le contrat de voyage à forfait, les organisateurs fournissent aussi une garantie pour le rapatriement des voyageurs. La continuation du forfait peut être proposée ».
À ce sujet, les considérants 39, 40 et 41 de la directive (UE) 2015/2302 mentionnent :
8
« (39) Les États membres devraient veiller à ce que les voyageurs achetant un forfait soient totalement protégés contre l’insolvabilité de l’organisateur. Les États membres dans lesquels sont établis les organisateurs devraient veiller à ce que ceux-ci fournissent une garantie, en cas d’insolvabilité de l’organisateur, pour le remboursement de tous les paiements effectués par des voyageurs ou en leur nom et, dans la mesure où un forfait comprend le transport des passagers, pour le rapatriement des voyageurs. Cependant, il devrait être possible de proposer aux voyageurs la continuation du forfait. Tout en conservant leur pouvoir discrétionnaire quant à la manière dont la protection contre l’insolvabilité doit être assurée, les États membres devraient veiller à ce que la protection soit effective. Pour qu’une protection soit effective, il faut qu’elle s’applique dès que, du fait des problèmes de liquidités de l’organisateur, des services de voyage ne sont pas exécutés, ne seront pas exécutés ou ne le seront qu’en partie, ou que des prestataires de services demandent aux voyageurs de payer pour ces services. […]
(40) Pour être effective, la protection contre l’insolvabilité devrait couvrir les montants prévisibles de paiements sur lesquels se répercutent l’insolvabilité de l’organisateur et, s’il y a lieu, les coûts prévisibles de rapatriement. En d’autres termes, la protection devrait être suffisante pour couvrir tous les paiements prévisibles effectués par les voyageurs ou pour leur compte en ce qui concerne les forfaits en haute saison, compte tenu de la période écoulée entre la réception de ces paiements et la fin du voyage ou du séjour de vacances, ainsi que, s’il y a lieu, les coûts prévisibles de rapatriement. Cela signifiera d’une manière générale que la garantie doit couvrir un pourcentage suffisamment élevé du chiffre d’affaires de l’organisateur en matière de forfaits et peut dépendre de facteurs tels que le type de forfaits vendus, y compris le mode de transport, la destination de voyage et toute restriction légale ou des engagements de l’organisateur concernant les montants des prépaiements qu’il peut accepter et leur échelonnement avant le début de l’exécution du forfait. Si la couverture nécessaire peut être calculée sur la base des données commerciales les plus récentes, par exemple le chiffre d’affaires réalisé durant le dernier exercice, les organisateurs devraient être tenus d’adapter la protection contre l’insolvabilité en cas d’augmentation du risque, notamment une augmentation sensible des ventes de forfaits. Toutefois, une protection efficace contre l’insolvabilité ne devrait pas avoir à tenir compte de risques extrêmement ténus, par exemple l’insolvabilité simultanée de plusieurs des principaux organisateurs, lorsqu’une telle couverture aurait une incidence disproportionnée sur le coût de la protection, entravant ainsi son efficacité. En pareil cas, la garantie relative aux remboursements peut être limitée.
(41) Compte tenu des différences dans les droits nationaux et dans la pratique qui s’appliquent aux parties à un contrat de voyage à forfait et à la réception des paiements effectués par les voyageurs ou pour leur compte, les États membres devraient être autorisés à exiger des détaillants qu’ils souscrivent aussi une protection contre l’insolvabilité ».
B.4.3. L’exposé des motifs de la loi du 21 novembre 2017 renvoie en particulier au considérant 41, précité, de la directive (EU) 2015/2302 :
« Les organisateurs doivent veiller à ce que le remboursement de tous les paiements effectués par ou au nom des voyageurs soit garanti. Lorsqu’un voyage à forfait comprend le transport des passagers, la garantie couvre aussi le rapatriement des voyageurs en cas d’insolvabilité des organisateurs. La continuation du forfait peut aussi être proposée aux voyageurs.
9
Le considérant 41 de la directive stipule que les États membres peuvent prescrire que les détaillants prévoient aussi une protection en cas d’insolvabilité pour ce qui concerne les contrats de voyage à forfait. Il est fait usage de cette possibilité dans le présent projet de loi. Par conséquent, le détaillant doit aussi veiller à ce que le voyageur soit protégé de son insolvabilité.
Ceci profite au voyageur qui jouit d’une protection supplémentaire » (Doc. parl., Chambre, 2016-2017, DOC 54-2653/001, p. 55).
Lors de la discussion en commission de la Chambre, le ministre compétent a exposé, à ce sujet :
« Cet élément est important pour la protection des consommateurs. C’est pourquoi le projet de loi va au-delà de ce que propose la directive. L’option qui a été retenue l’a été à la demande de presque toutes les parties concernées, que ce soient les consommateurs ou le secteur des voyages. Les détaillants devront offrir aux voyageurs une protection contre l’insolvabilité. En outre, les organisateurs de voyage et les détaillants qui vendent des services de voyage séparés en tant qu’intermédiaires devront veiller à ce que leur garantie contre l’insolvabilité couvre également ces ventes » (Doc. parl., Chambre, 2017-2018, DOC 54-2653/003, p. 6).
Quant à la question préjudicielle
B.5. Selon la juridiction a quo, l’article 54 de la loi du 21 novembre 2017 n’établit aucune distinction entre, d’une part, les détaillants qui concluent en leur nom propre et pour leur propre compte des contrats de voyage à forfait avec des voyageurs et, d’autre part, les détaillants qui apportent des voyageurs à un organisateur-commettant exclusivement en tant qu’agents commerciaux et qui prennent donc tout au plus des engagements au nom et pour le compte de ce dernier. L’obligation de fournir une garantie qu’impose cette disposition est applicable aux deux catégories de détaillants.
La juridiction a quo demande à la Cour si cette identité de traitement est compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec la liberté d’entreprendre.
B.6.1. La partie défenderesse devant la juridiction a quo fait valoir que la disposition en cause fait également naître une identité de traitement à l’égard des détaillants établis en Belgique, selon qu’ils vendent des voyages à forfait qui sont composés par un organisateur belge ou néerlandais. Elle estime que cette disposition est dès lors incompatible avec l’article 13
de la directive (UE) 2015/2302 et demande à la Cour de poser une question préjudicielle à ce sujet à la Cour de justice l’Union européenne.
10
B.6.2. Les parties devant la Cour ne peuvent modifier ou étendre la portée d’une question préjudicielle. C’est en effet à la seule juridiction a quo qu’il appartient de décider quelles sont les questions préjudicielles qui doivent être posées à la Cour et de déterminer ainsi l’étendue de la saisine.
L’examen de la question ne peut donc être étendu à la comparaison de catégories de détaillants autres que celles qui sont mentionnées en B.5, ni au contrôle de la disposition en cause au regard de l’article 13 de la directive (UE) 2015/2302. Pour le même motif, il n’y a pas lieu de poser à la Cour de justice la question préjudicielle suggérée par la partie défenderesse devant la juridiction a quo.
B.7.1. L’article 17, paragraphe 1, de la directive (UE) 2015/2302 oblige uniquement les États membres à veiller à ce que les organisateurs de voyages à forfait fournissent une garantie qui joue dans le cas où ils deviennent insolvables. Comme il est dit en B.4.2, le considérant 41
de la directive (UE) 2015/2302 dispose toutefois que « les États membres [doivent] être autorisés à exiger des détaillants qu’ils souscrivent aussi une protection contre l’insolvabilité », « compte tenu des différences dans les droits nationaux et dans la pratique qui s’appliquent aux parties à un contrat de voyage à forfait et à la réception des paiements effectués par les voyageurs ou pour leur compte ». Il ressort des travaux préparatoires mentionnés en B.4.3 que le législateur a voulu faire usage de cette possibilité.
B.7.2. Il appartient à la Cour, dans les limites de la latitude qu’une directive laisse aux États membres, de contrôler la transposition de cette dernière au regard des dispositions dont la Cour peut garantir le respect. En effet, la circonstance qu’une directive laisse une certaine latitude aux États membres, comme c’est le cas de la possibilité d’obliger, en plus des organisateurs, les détaillants de voyages à forfait à prévoir une protection en cas d’insolvabilité, ne dispense pas le législateur de l’obligation de respecter les dispositions constitutionnelles.
Néanmoins, lors de ce contrôle, la Cour doit tenir compte des objectifs de la directive concernée et du principe du plein effet du droit de l’Union européenne.
B.8.1. Le principe d’égalité et de non-discrimination n’exclut pas qu’une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu’elle repose sur un critère
11
objectif et qu’elle soit raisonnablement justifiée. Ce principe s’oppose, par ailleurs, à ce que soient traitées de manière identique, sans qu’apparaisse une justification raisonnable, des catégories de personnes se trouvant dans des situations qui, au regard de la mesure critiquée, sont essentiellement différentes.
L’existence d’une telle justification doit s’apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d’égalité et de non-
discrimination est violé lorsqu’il est établi qu’il n’existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.
B.8.2. La liberté d’entreprendre, visée par l’article II.3 du Code de droit économique, doit s’exercer « dans le respect des traités internationaux en vigueur en Belgique, du cadre normatif général de l’union économique et de l’unité monétaire tel qu’établi par ou en vertu des traités internationaux et de la loi » (article II.4 du même Code). La liberté d’entreprendre doit par conséquent être lue en combinaison avec les dispositions de droit de l’Union européenne applicables, ainsi qu’avec l’article 6, § 1er, VI, alinéa 3, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, au regard duquel la Cour peut effectuer directement un contrôle, s’agissant d’une règle répartitrice de compétences. Enfin, la liberté d’entreprendre est également garantie par l’article 16 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.
Par conséquent, la Cour est compétente pour contrôler la disposition en cause au regard des articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec la liberté d’entreprendre.
B.8.3. La liberté d’entreprendre ne peut être conçue comme une liberté absolue. Elle ne fait pas obstacle à ce que le législateur compétent règle l’activité économique des personnes et des entreprises. Celui-ci n’interviendrait de manière déraisonnable que s’il limitait la liberté d’entreprendre sans aucune nécessité ou si cette limitation était disproportionnée au but poursuivi.
B.9. Il ressort des travaux préparatoires mentionnés en B.4.3 que l’extension de l’obligation de fournir une garantie en cas d’insolvabilité vise à renforcer l’effectivité de la protection offerte aux voyageurs. Cet objectif est légitime.
12
B.10.1. Au regard de cet objectif, il est pertinent de soumettre tous les détaillants établis en Belgique à une obligation de garantie, indépendamment de la question de savoir s’ils concluent des contrats de voyage à forfait en leur nom propre et pour leur propre compte ou s’ils travaillent uniquement comme agents commerciaux et prennent donc des engagements avec le voyageur tout au plus au nom et pour le compte de l’organisateur-commettant.
B.10.2. L’insolvabilité et l’interruption corrélative des activités du détaillant qui apporte uniquement en tant qu’agent commercial des voyageurs à un organisateur peuvent en effet également comporter des risques pour le voyageur. Il n’est pas exclu qu’un tel détaillant reçoive lui aussi des paiements du voyageur et que ce ne soit qu’à l’expiration d’un certain laps de temps qu’il reverse, partiellement ou non, les paiements reçus à l’organisateur ou à un autre prestataire de services de voyages. En outre, les obligations relatives à l’élaboration et à l’exécution du voyage à forfait que la loi du 21 novembre 2017 impose aux détaillants sont applicables indépendamment de la nature de la relation contractuelle avec le voyageur.
Ainsi, le voyageur peut exiger du détaillant le remboursement des frais, redevances et autres coûts supplémentaires dont il n’a pas été informé au préalable (article 9 de la loi du 21 novembre 2017, voy. aussi Doc. parl., Chambre, 2016-2017, DOC 54-2653/001, p. 32). Par ailleurs, le voyageur peut toujours adresser des messages, demandes ou plaintes relatifs à l’exécution du voyage à forfait au détaillant, qui doit transmettre ces messages, demandes ou plaintes à l’organisateur sans retard excessif (article 41 de la loi du 21 novembre 2017). Le détaillant peut dès lors rester la principale personne de contact pour le voyageur, même s’il n’est pas partie au contrat de voyage à forfait. Lorsque l’organisateur est établi en dehors de l’Espace économique européen, il est en outre possible que certaines obligations relatives à l’exécution du voyage à forfait et en matière de réduction de prix et de dédommagement soient applicables aux détaillants (articles 33 et 47 de la loi du 21 novembre 2017).
B.10.3. De manière plus générale, le secteur des voyages à forfait, comme l’observe également l’ASBL « Vereniging Vlaamse Reisbureaus », est caractérisé par une grande diversité de procédures et de canaux de réservations, impliquant souvent plusieurs parties en des qualités diverses. En particulier, « l’internet est devenu, à côté des canaux de distribution traditionnels, un outil de plus en plus important pour l’offre et la vente de services de voyage »
13
(Doc. parl., Chambre, 2016-2017, DOC 54-2653/001, p. 4). Eu égard à la confusion que cette situation peut engendrer chez le voyageur, le législateur peut en principe, dans les limites de la latitude que lui laisse la directive (UE) 2015/2302, opter pour une approche uniforme en matière de protection en cas d’insolvabilité. Une telle approche contribue non seulement à une protection étendue du voyageur, mais aussi à la sécurité juridique et à la prévisibilité de la réglementation.
B.11.1. La disposition en cause ne produit enfin pas d’effets disproportionnés. Il n’apparaît pas que l’obligation, en tant que telle, de fournir une garantie en ce qui concerne les matières énumérées dans cette disposition rende impossible ou excessivement difficile l’exercice des activités du détaillant.
B.11.2. Pour le surplus, il appartient au Roi, conformément à l’article 60 de la loi du 21 novembre 2017, de déterminer la forme et les conditions auxquelles cette garantie doit répondre. Comme il est dit en B.3.3, le Roi a, en exécution de cette disposition, pris l’arrêté royal du 29 mai 2018, dont l’article 3 dispose que la garantie est fournie « par un contrat d’assurance souscrit auprès d’une entreprise d’assurance autorisée à effectuer de telles opérations ».
La Cour n’est pas compétente pour se prononcer sur la manière dont le Roi a exercé les habilitations qui Lui ont été conférées par le législateur. Lorsqu’un législateur délègue, il faut supposer, sauf indication contraire, qu’il entend exclusivement habiliter le délégué à faire de son pouvoir un usage conforme à la Constitution. C’est au juge compétent qu’il appartient de vérifier si le choix effectué dans l’arrêté royal du 29 mai 2018 de concrétiser la garantie sous la forme d’un contrat d’assurance, ainsi que les conditions d’assurance fixées par cet arrêté, limitent ou non de manière disproportionnée la liberté d’entreprendre.
Au demeurant, rien ne semble empêcher de prendre en considération, lors de la détermination de la prime d’assurance, les risques financiers réels susceptibles d’être causés par l’insolvabilité du détaillant concerné, compte tenu de son chiffre d’affaires et de son rôle concret dans l’élaboration et dans l’exécution des voyages à forfait qu’il vend. Par ailleurs, l’article 5 de l’arrêté royal du 29 mai 2018 autorise l’assureur à dispenser de certaines
14
conditions d’assurance les sociétés dont le nombre de travailleurs, le chiffre d’affaires annuel et/ou le bilan total sont limités, ce qu’on appelle les « microsociétés ».
B.12. La circonstance que le législateur, comme le présume la juridiction a quo, aurait pu également opter pour un régime de comptes tiers, par analogie à l’article 3.37 du Code civil, au lieu d’une obligation de garantie ne conduit pas à une autre conclusion. Il appartient en principe au législateur de choisir la réglementation qu’il juge la plus efficace pour protéger le voyageur contre l’insolvabilité du détaillant. Comme il est dit en B.10.3, une approche uniforme en matière de protection en cas d’insolvabilité, dans laquelle la même obligation de garantie s’applique tant aux organisateurs qu’aux détaillants de voyages à forfait, contribue en outre à la sécurité juridique et à la prévisibilité de la réglementation.
B.13. L’article 54 de la loi du 21 novembre 2017 est compatible avec les articles 10 et 11
de la Constitution, lus en combinaison avec la liberté d’entreprendre.
15
Par ces motifs,
la Cour,
dit pour droit :
L’article 54 de la loi du 21 novembre 2017 « relative à la vente de voyages à forfait, de prestations de voyage liées et de services de voyage » ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec la liberté d’entreprendre.
Ainsi rendu en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l’article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 22 juin 2023.
Le greffier, Le président,
F. Meersschaut L. Lavrysen


Synthèse
Numéro d'arrêt : 101/2023
Date de la décision : 22/06/2023
Type d'affaire : Droit constitutionnel

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2023
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.constitutionnel;arret;2023-06-22;101.2023 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award