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27/04/2023 | BELGIQUE | N°70/2023

Belgique | Belgique, Cour constitutionnel, 27 avril 2023, 70/2023


Cour constitutionnelle
Arrêt n° 70/2023
du 27 avril 2023
Numéro du rôle : 7764
En cause : la question préjudicielle relative à l’article 43, § 4, alinéas 1er et 2, des lois sur l’emploi des langues en matière administrative, coordonnées le 18 juillet 1966, posée par le Conseil d’État.
La Cour constitutionnelle,
composée des présidents P. Nihoul et L. Lavrysen, et des juges T. Giet, J. Moerman, M. Pâques, Y. Kherbache, T. Detienne, D. Pieters, S. de Bethune, E. Bribosia, W. Verrijdt et K. Jadin, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée par le

président P. Nihoul,
après en avoir délibéré, rend l’arrêt suivant :
I. Objet de la qu...

Cour constitutionnelle
Arrêt n° 70/2023
du 27 avril 2023
Numéro du rôle : 7764
En cause : la question préjudicielle relative à l’article 43, § 4, alinéas 1er et 2, des lois sur l’emploi des langues en matière administrative, coordonnées le 18 juillet 1966, posée par le Conseil d’État.
La Cour constitutionnelle,
composée des présidents P. Nihoul et L. Lavrysen, et des juges T. Giet, J. Moerman, M. Pâques, Y. Kherbache, T. Detienne, D. Pieters, S. de Bethune, E. Bribosia, W. Verrijdt et K. Jadin, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée par le président P. Nihoul,
après en avoir délibéré, rend l’arrêt suivant :
I. Objet de la question préjudicielle et procédure
Par arrêt n° 253.027 du 18 février 2022, dont l’expédition est parvenue au greffe de la Cour le 28 février 2022, le Conseil d’État a posé la question préjudicielle suivante :
« L’article 43, § 4, alinéas 1er et 2, des lois sur l’emploi des langues en matière administrative, coordonnées le 18 juillet 1966, viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution, lus seuls ou en combinaison avec l’article 45 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et avec les articles 25 et 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, en ce que le régime linguistique de l’examen d’admission détermine le rôle linguistique auquel les fonctionnaires et agents sont affectés et que, si un tel examen est imposé, les fonctionnaires et agents qui, en principe, le subissent en français ou en néerlandais suivant que le diplôme exigé, le certificat d’études requis ou la déclaration du directeur d’école atteste qu’ils ont fait leurs études dans l’une ou l’autre de ces langues, peuvent prouver par un examen préalable qu’ils connaissent l’autre langue aussi bien que la langue véhiculaire de leurs études et présenter l’examen d’admission dans cette langue, alors que, si aucun examen d’admission n’est prévu, leur affectation est déterminée par la langue qui d’après le diplôme exigé, le certificat d’études requis ou la déclaration du directeur d’école, a été la langue véhiculaire des études faites, sans avoir la possibilité de solliciter une affectation correspondant à l’autre langue susvisée ? ».
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Des mémoires et mémoires en réponse ont été introduits par :
- Frank Bels, assisté et représenté par Me P. Malumgré, avocat au barreau du Limbourg;
- la Chambre des représentants, assistée et représentée par Me B. Lombaert, Me S. Adriaenssen et Me J. Simba, avocats au barreau de Bruxelles;
- le Conseil des ministres, assisté et représenté par Me N. Bonbled, avocat au barreau de Bruxelles.
Par ordonnance du 1er mars 2023, la Cour, après avoir entendu les juges-rapporteurs K. Jadin et J. Moerman, a décidé que l'affaire était en état, qu’aucune audience ne serait tenue, à moins qu’une partie n’ait demandé, dans le délai de sept jours suivant la réception de la notification de cette ordonnance, à être entendue, et qu’en l’absence d’une telle demande, les débats seraient clos le 15 mars 2023 et l’affaire mise en délibéré.
Aucune demande d’audience n’ayant été introduite, l’affaire a été mise en délibéré le 15 mars 2023.
Les dispositions de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle relatives à la procédure et à l’emploi des langues ont été appliquées.
II. Les faits et la procédure antérieure
Le 4 mars 2020, le Moniteur belge publie un appel aux candidats relatif à la nomination d’un nouveau médiateur fédéral francophone. Le 9 avril 2020, le secrétaire général de la Chambre des représentants (ci-après :
la Chambre) accuse réception de la candidature de Frank Bels.
Le 22 avril 2020, la conférence des présidents de la Chambre (ci-après : la conférence des présidents) décide de proposer à l’ensemble des députés de déclarer cette candidature irrecevable. Elle observe que, compte tenu de l’article 2 de la loi du 22 mars 1995 « instaurant des médiateurs fédéraux » (ci-après : la loi du 22 mars 1995), les médiateurs fédéraux sont soumis aux lois sur l’emploi des langues en matière administrative, coordonnées le 18 juillet 1966 (ci-après : la loi du 18 juillet 1966). La conférence des présidents considère que le médiateur fédéral francophone est un fonctionnaire inscrit sur le « rôle français » au sens de l’article 43, § 2, de la loi du 18 juillet 1966. Constatant que la procédure de recrutement de ce médiateur ne contient pas d’« examen d’admission » au sens de l’article 43, § 4, de cette loi, la conférence des présidents observe qu’en application des articles 43, § 4, alinéa 2, et 55 de la même loi, c’est la langue du diplôme du candidat qui détermine le rôle linguistique sur lequel ce fonctionnaire sera inscrit. Elle en déduit qu’une candidature au poste de médiateur fédéral francophone n’est recevable que si le diplôme requis par l’article 3, alinéa 2, 3°, de la loi du 22 mars 1995 est rédigé en français. Elle observe que les deux diplômes dont Frank Bels se prévaut sont rédigés en néerlandais. Le 23 avril 2020, la Chambre, réunie en séance plénière, suit la proposition de la conférence des présidents et décide dès lors que la candidature précitée de Frank Bels est irrecevable.
Le 13 mai 2020, Frank Bels introduit au Conseil d’État un recours tendant à l’annulation de cette décision de la Chambre. Le Conseil d’État considère, lui aussi, qu’il y a lieu d’appliquer l’article 43, § 4, de la loi du 18 juillet 1966 à la procédure de recrutement des médiateurs fédéraux. Il estime dès lors qu’une candidature introduite à la suite de l’appel, précité, du 4 mars 2020 ne peut être recevable que si le diplôme requis par l’article 3 de la loi du
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22 mars 1995 qui est produit à l’appui de cette candidature est rédigé en français, puisque la procédure de recrutement ne contient pas d’« examen d’admission » au sens de l’article 43, § 4, de la loi du 18 juillet 1966.
Après avoir constaté que les deux diplômes dont Frank Bels se prévaut sont rédigés en néerlandais, il décide, sur la suggestion de ce dernier, de poser à la Cour la question préjudicielle reproduite ci-dessus.
III. En droit
-A-
Quant à la reformulation de la question préjudicielle
A.1.1. Frank Bels demande à la Cour de reformuler la question préjudicielle pour mieux faire ressortir l’origine et la portée de la différence de traitement entre les deux catégories de personnes identifiées par cette question et pour éviter un malentendu.
A.1.2. La Chambre et le Conseil des ministres estiment qu’il n’y a pas lieu de reformuler la question préjudicielle posée par le Conseil d’État.
La Chambre expose que cette question ne crée aucun malentendu et que la reformulation proposée par Frank Bels n’est pas adéquate parce qu’elle repose sur un postulat incompatible avec les termes de la disposition en cause.
Le Conseil des ministres remarque, quant à lui, que la reformulation proposée par Frank Bels ne contribue nullement à une meilleure présentation du problème et exprime, en outre, un préjugé quant à la réponse à donner à la question préjudicielle, dès lors que la question reformulée postule l’existence d’une discrimination.
Quant à la pertinence et à l’utilité de la question préjudicielle
A.2.1. La Chambre soutient que la question préjudicielle manque de pertinence au regard non seulement de l’objectif de la disposition en cause, mais aussi de la situation de Frank Bels dans le litige pendant au Conseil d’État.
La Chambre observe que l’objectif premier des règles relatives aux cadres linguistiques qui sont énoncées à l’article 43 de la loi du 18 juillet 1966 n’est pas d’accorder des droits aux candidats à un emploi dans la fonction publique. La Chambre souligne que ces règles visent avant tout à ce que l’administration soit organisée de manière à ce qu’elle puisse respecter les règles énoncées aux articles 39 à 42 de la loi du 18 juillet 1966, au bénéfice des administrés des deux principales communautés linguistiques de l’État.
La Chambre précise que l’objectif des critères de rattachement d’un fonctionnaire à l’un des deux rôles linguistiques instaurés par la loi du 18 juillet 1966 est de garantir à tout administré que son dossier sera traité dans un délai raisonnable par un fonctionnaire qui s'exprime suffisamment bien dans la même langue. La Chambre soutient que la Cour doit raisonner comme elle l’a fait dans l’arrêt n° 182/2005 du 7 décembre 2005
(ECLI:BE:GHCC:2005:ARR.182) à propos des règles relatives à l’emploi des langues en matière judiciaire.
A.2.2. Frank Bels rétorque que la question préjudicielle est d’autant plus pertinente que, lorsque le candidat à un emploi doit passer un examen d’admission au sens de l’article 43, § 4, de la loi du 18 juillet 1966, il peut prouver ses connaissances linguistiques par un examen préalable tandis que, lorsqu’aucun examen d’admission n’est prévu, le candidat ne peut accéder à l’emploi convoité faute de pouvoir prouver sa connaissance linguistique par un examen préalable.
Frank Bels ajoute qu’il ressort à suffisance des motifs de la décision de renvoi du Conseil d’État que la question préjudicielle est pertinente.
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A.3.1. La Chambre remarque ensuite qu’aux termes de l’article 45, paragraphe 4, du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne les règles relatives à la libre circulation des travailleurs qu’énonce l’article 45 de ce Traité ne sont pas applicables aux « emplois dans l’administration publique ». Elle en déduit que ces règles ne valent pas pour les emplois au sein des services centraux de l’administration qui sont réglés par l’article 43, § 4, de la loi du 18 juillet 1966, et certainement pas pour la fonction de médiateur fédéral, qui a pour objet la sauvegarde des intérêts généraux de l’État.
La Chambre observe aussi que, dans l’affaire qui est à l’origine de la question préjudicielle, Frank Bels ne peut pas en tout état de cause revendiquer le respect de la libre circulation des travailleurs consacrée par l’article 45
du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, puisque cette disposition n’est pas applicable aux situations purement internes, telles que celle d’une personne qui, dans son État d’origine, dont elle possède la nationalité, se porte candidate à un emploi en se prévalant de diplômes obtenus dans cet État, sans avoir au préalable exercé une activité professionnelle dans un autre État de l’Union européenne.
A.3.2. Le Conseil des ministres soutient que la question préjudicielle est inutile en ce qu’elle invite la Cour à se prononcer sur le respect de l’article 45 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, parce que les règles relatives à la libre circulation des travailleurs que cette disposition internationale énonce ne sont manifestement pas applicables à l’affaire pendante devant le Conseil d’État.
Le Conseil des ministres relève que la situation de Frank Bels est purement interne à la Belgique. Il observe aussi que cette disposition est, en tout état de cause, inapplicable aux « emplois dans l’administration publique », tels que la fonction de médiateur fédéral.
A.3.3. Frank Bels rétorque que, pour vérifier la constitutionnalité de la disposition en cause, la Cour doit tenir compte de l’article 45 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, dès lors qu’à l’instar de la section du contentieux administratif du Conseil d’État, elle a déjà pris en considération dans le passé la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne relative aux connaissances linguistiques imposées comme conditions d’accès à un emploi public.
-B-
B.1. Le litige qui est à l’origine de la question préjudicielle posée par le Conseil d’État concerne la procédure de recrutement d’un médiateur fédéral.
B.2.1. L’article 1er, alinéa 1er, de la loi du 22 mars 1995 « instaurant des médiateurs fédéraux » (ci-après : la loi du 22 mars 1995) institue « deux médiateurs fédéraux, l’un francophone, l’autre néerlandophone ».
B.2.2. Une personne ne peut être nommée médiateur que si elle prouve qu’elle dispose « d’une connaissance suffisante des autres langues nationales, selon les modalités fixées par la Chambre des représentants » (article 3, alinéa 2, 4°, de la loi du 22 mars 1995).
Ces « autres langues nationales » sont la langue de l’autre médiateur, ainsi que l’allemand.
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B.2.3. Dans les limites de leurs attributions, les médiateurs ne reçoivent d’instruction d’aucune autorité (article 7, alinéa 1er, de la loi du 22 mars 1995).
Sans préjudice des délégations qu’ils s’accordent par décision collégiale, les médiateurs nomment, révoquent et dirigent les membres du personnel qui les assistent dans l’exercice de leurs fonctions (article 19, alinéa 1er, de la même loi).
La fonction de médiateur fédéral est donc une fonction de direction.
B.3.1. L’article 2 de la loi du 22 mars 1995 dispose :
« Les médiateurs et le personnel qui les assiste sont soumis aux dispositions des lois sur l’emploi des langues en matière administrative, coordonnées le 18 juillet 1966. Ils sont considérés comme des services dont l’activité s’étend à tout le pays ».
B.3.2. Lors des travaux préparatoires de cette disposition, il a été précisé que celle-ci a pour effet que « les rapports avec les particuliers se déroulent dans la langue dont le particulier a fait usage » (Doc. parl., Chambre, 1993-1994, n° 1436/1, p. 5) et que les médiateurs devront répondre au réclamant dans celle des trois langues nationales dont celui-ci a fait usage dans sa réclamation (Ann., Chambre, 1994-1995, 18 janvier 1995, n° 21, p. 690). Cette règle est énoncée à l’article 41, § 1er, des lois sur l’emploi des langues en matière administrative, coordonnées le 18 juillet 1966 (ci-après : la loi du 18 juillet 1966).
Lors des mêmes travaux préparatoires, il a aussi été précisé que l’article 2 de la loi du 22 mars 1995 a aussi pour effet « que les rapports avec les autorités administratives sont régis par le régime prévu à l’article 39 des lois sur l’emploi des langues en matière administrative »
et que « [le] régime des services intérieurs (article 39, § 1er) est d’application aux rapports entre le médiateur et une autorité administrative qui forme elle-même un service central » (ibid., p. 5).
À aucun moment lors des travaux préparatoires de l’article 2 de la loi du 22 mars 1995, il n’a été fait mention, directement ou indirectement, d’autres dispositions de la loi du 18 juillet 1966.
B.4. La question préjudicielle porte sur l’article 43 de la loi du 18 juillet 1966.
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Cette disposition fait partie du chapitre V de cette loi, qui est intitulé « Emploi des langues dans les services dont l’activité s’étend à tout le pays », et qui regroupe actuellement les articles 38 à 47 de cette loi.
Ce chapitre distingue entre autres les « services centraux » (section I) et les « services d’exécution » (section II). Toutes les dispositions du chapitre V de la loi du 18 juillet 1966 ne peuvent donc pas s’appliquer à chaque « service dont l’activité s’étend à tout le pays ».
B.5. L’article 43 de la loi du 18 juillet 1966, qui est l’une des dispositions de la section I
du chapitre V dispose, depuis sa modification par l’article 2 de la loi du 4 avril 2006 « portant modification de l’article 43 des lois sur l’emploi des langues en matière administrative, coordonnées le 18 juillet 1966 » :
« § 1er. Chaque fois que la nature des affaires et le nombre d’agents le justifient, les administrations des services centraux sont groupées en directions ou divisions, bureaux et sections français et néerlandais.
§ 2. Les fonctionnaires titulaires d’une fonction de management ou d’une fonction d’encadrement ou revêtus d’un grade de rang 13 ou supérieur ou d’un grade équivalent ou des classes A3, A4 ou A5, à l’exception de ceux qui sont intégrés dans la classe A3 au départ d’un grade du rang 10, sont répartis entre trois cadres : un cadre français, un cadre néerlandais et un cadre bilingue.
Les autres agents sont répartis entre deux cadres : un cadre français et un cadre néerlandais.
Tous les fonctionnaires et agents sont inscrits sur un rôle linguistique : le rôle français ou le rôle néerlandais.
§ 3. Le Roi détermine pour chaque service central, pour une durée maximale de six ans, renouvelable s’il n’y a pas de modification, le pourcentage des emplois à attribuer au cadre français et au cadre néerlandais, en tenant compte, à tous les degrés de la hiérarchie, de l’importance que représentent respectivement pour chaque service la région de langue française et la région de langue néerlandaise. Toutefois, pour les fonctions de management et pour les fonctions d’encadrement ainsi que pour les grades de rang 13 et supérieurs et les grades équivalents et les classes A3, A4 et A5, sous réserve de l’application du § 2, alinéa 1er, les emplois sont répartis entre les deux cadres en pourcentage égal, à tous les degrés de la hiérarchie.
Le cadre bilingue comporte 20 % des emplois des grades de rang 13 et supérieurs et des grades équivalents et des classes A3, A4 et A5, sous réserve de l’application du § 2, alinéa 1er.
Ces emplois sont répartis de manière égale, à tous les degrés de la hiérarchie, entre les deux rôles linguistiques.
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Pour être admis au cadre bilingue, les fonctionnaires doivent fournir, devant un jury constitué par le secrétaire permanent au recrutement, la preuve qu’ils connaissent suffisamment la seconde langue. Sont dispensés de cet examen les fonctionnaires dont le diplôme établit que leur seconde langue a été la langue véhiculaire des études qu’ils ont faites.
En vue de l’application des règles qui précèdent, le Roi détermine les divers grades ou classes ou fonctions de management ou fonctions d’encadrement constituant un même degré de la hiérarchie.
Les propositions de répartition des emplois entre les divers cadres linguistiques sont soumises à l’avis préalable de la Commission permanente de contrôle linguistique.
Après consultation de la même Commission, le Roi peut, par un arrêté motivé et délibéré en Conseil des Ministres, déroger à la règle de répartition visée à l’alinéa 1er, seconde phrase, en faveur des services centraux dont les attributions ou les activités intéressent de façon inégale la région de langue française et la région de langue néerlandaise.
Par dérogation aux alinéas précédents, le remplacement prévu à l’article 5 de la loi du 10 avril 1995 relative à la redistribution du travail dans le secteur public, est effectué dans la même proportion linguistique que celle qui est applicable aux membres du personnel du service central revêtus du même grade ou de la même classe.
§ 4. S’il est imposé, les fonctionnaires et agents subissent leur examen d’admission en français ou en néerlandais suivant que le diplôme exigé, le certificat d’études requis ou la déclaration du directeur d’école atteste qu’ils ont fait leurs études dans l’une ou l’autre de ces langues. Ils peuvent prouver par un examen préalable qu’ils connaissent l’autre langue aussi bien que la langue véhiculaire de leurs études et présenter l’examen d’admission dans cette langue.
Le régime linguistique de l’examen d’admission détermine le rôle linguistique auquel les fonctionnaires et agents sont affectés. À défaut de semblable examen, l’affectation est déterminée par la langue qui d’après le diplôme exigé, le certificat d’études requis ou la déclaration du directeur d’école, a été la langue véhiculaire des études faites.
Les candidats qui, à l’étranger, ont fait leurs études dans une langue autre que le français ou le néerlandais et qui se prévalent d’une équivalence de diplômes ou de certificats d’études reconnue par la loi, subissent l’examen d’admission en français ou en néerlandais au choix. Si la nomination n’est pas précédée d’un examen d’admission, la connaissance de la langue du rôle, auquel l’intéressé désire être affecté, est établie par un examen préalable.
Les candidats qui ont fait leurs études dans la région de langue allemande peuvent présenter leur examen d’admission en allemand à condition de subir en outre un examen portant sur la connaissance du français ou du néerlandais, selon qu’ils désirent être affectés au rôle français ou au rôle néerlandais.
Le passage d’un rôle à l’autre est interdit, sauf en cas d’erreur manifeste lors de l’affectation.
Les examens de promotion ont lieu dans la langue du rôle auquel les récipiendaires sont affectés.
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§ 5. Les promotions ont lieu par cadre. Les fonctionnaires qui ont fourni la preuve de leur bilinguisme suivant les modalités indiquées plus haut, peuvent participer aux promotions tant dans le cadre bilingue que dans le cadre qui correspond au rôle sur lequel ils sont inscrits.
L’application de cette règle ne peut cependant porter atteinte à l’équilibre arrêté pour le cadre bilingue.
§ 6. Quand le chef d’une administration est unilingue, il est placé à ses côtés, en vue de maintien de l’unité de jurisprudence, un adjoint bilingue. L’adjoint ne peut appartenir au même rôle que le chef. Il est revêtu au préalable du même grade ou du grade immédiatement inférieur ou de la même classe immédiatement inférieure.
Si le chef de l’administration est titulaire d’une fonction de management, l’adjoint bilingue conserve son grade ou sa classe et reçoit une allocation fixée par le Roi par arrêté délibéré en Conseil des Ministres.
La désignation de l’adjoint bilingue prend fin en même temps que le mandat attribué au chef unilingue de l’administration auprès duquel il est placé.
[…] ».
B.6.1. L’article 43, § 4, de la loi du 18 juillet 1966 détermine la langue dans laquelle les candidats aux emplois de fonctionnaires et agents qui sont visés aux paragraphes précédents de cette disposition doivent présenter l’examen d’admission, quand un tel examen est prévu pour le recrutement de ces fonctionnaires et agents.
La même disposition détermine aussi, parmi les deux rôles linguistiques instaurés par l’article 43, § 2, alinéa 3, de la même loi, celui auquel sont affectés les candidats qui ont entre-
temps été nommés aux emplois précités.
B.6.2. Il ressort de l’article 43, § 2, de la loi du 18 juillet 1966 que les fonctionnaires qui occupent un emploi de direction dans les services auxquels s’applique l’article 43 de cette loi doivent être répartis entre un « cadre français », un « cadre néerlandais » et un « cadre bilingue », tandis que les autres fonctionnaires de ces services sont répartis entre deux cadres seulement : un « cadre français » et un « cadre néerlandais ».
C’était déjà le cas au moment de l’entrée en vigueur de la loi du 22 mars 1995. L’article 43, § 2, de la loi du 18 juillet 1966, disposait alors :
« Les fonctionnaires d’un grade égal ou supérieur à celui de directeur sont répartis entre trois cadres : un cadre français, un cadre néerlandais et un cadre bilingue.
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Les autres agents sont répartis entre deux cadres : un cadre français et un cadre néerlandais.
Tous les fonctionnaires et agents sont inscrits sur un rôle linguistique : le rôle français ou le rôle néerlandais ».
B.6.3. Il ressort de l’article 43, § 3, alinéa 3, et de l’article 43, § 4, alinéas 1er, 3 et 4, de la loi du 18 juillet 1966 que ce n’est que dans certains cas que les fonctionnaires et agents qui sont soumis à ces dispositions doivent faire la preuve de la connaissance de plus d’une langue nationale.
B.7.1. Il ressort de l’article 1er, alinéa 1er, de la loi du 22 mars 1995, cité en B.2.1, que les médiateurs fédéraux ne sont pas répartis entre un cadre français, un cadre néerlandais et un cadre bilingue, comme le sont les titulaires d’une fonction de direction visés à l’article 43 de la loi du 18 juillet 1966.
B.7.2. Il ressort aussi de l’article 3, alinéa 2, 4°, de la loi du 22 mars 1995, cité en B.2.2, qu’un médiateur fédéral doit toujours prouver qu’il a une connaissance suffisante des trois langues nationales, alors que les personnes qui sont titulaires d’une fonction de direction visée à l’article 43 de la loi du 18 juillet 1966 ne sont jamais tenues de disposer de connaissances linguistiques aussi étendues.
B.7.3. En outre, le cadre du personnel qui assiste les médiateurs fédéraux, que la Chambre des représentants a arrêté le 19 novembre 1998 en application de l’article 19, alinéa 2, de la loi du 22 mars 1995 (Ann., Chambre, 1998-1999, 19 novembre 1998, n° 282, p. 10197), ne contient qu’un seul cadre linguistique pour l’ensemble de ce personnel, qui est un cadre bilingue (Doc. parl., Chambre, 1997-1998, n° 1607/1, pp. 6 et 8), étant donné que « tous les membres du personnel sont bilingues » (ibid., p. 3). La Chambre des représentants confirme ainsi, implicitement mais certainement, que l’article 2 de la loi du 22 mars 1995 ne suffit pas à rendre applicable aux services des médiateurs fédéraux l’article 43 de la loi du 18 juillet 1966, puisque, comme il est dit en B.6.2, cette dernière disposition prescrit une répartition des fonctionnaires entre au minimum deux cadres linguistiques et réserve la création d’un cadre bilingue à certaines fonctions seulement.
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B.8. Il ressort de ce qui précède que l’article 43 de la loi du 18 juillet 1966 n’est pas applicable aux services des médiateurs fédéraux, de sorte que l’article 43, § 4, de cette loi n’est pas applicable à la procédure de recrutement de ces médiateurs.
B.9. La réponse à la question préjudicielle n’est donc manifestement pas utile à la solution du litige.
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Par ces motifs,
la Cour
dit pour droit :
La question préjudicielle n’appelle pas de réponse.
Ainsi rendu en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l’article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 27 avril 2023.
Le greffier, Le président,
F. Meersschaut P. Nihoul


Synthèse
Numéro d'arrêt : 70/2023
Date de la décision : 27/04/2023
Type d'affaire : Droit constitutionnel

Analyses

La question préjudicielle n'appelle pas de réponse

COUR CONSTITUTIONNELLE - DROIT PUBLIC ET ADMINISTRATIF - COUR CONSTITUTIONNELLE - la question préjudicielle relative à l'article 43, § 4, alinéas 1er et 2, des lois sur l'emploi des langues en matière administrative, coordonnées le 18 juillet 1966, posée par le Conseil d'État. Emploi des langues en matière administrative - Procédure de recrutement d'un médiateur fédéral - Répartition linguistique


Origine de la décision
Date de l'import : 30/05/2023
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.constitutionnel;arret;2023-04-27;70.2023 ?

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