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27/04/2023 | BELGIQUE | N°68/2023

Belgique | Belgique, Cour constitutionnel, 27 avril 2023, 68/2023


Cour constitutionnelle
Arrêt n° 68/2023
du 27 avril 2023
Numéros du rôle : 7668, 7669, 7671, 7672, 7676, 7677, 7678, 7681, 7682, 7687, 7691, 7692, 7694, 7739 et 7743
En cause : les recours en annulation 1) du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 « relatif au COVID Safe Ticket », introduits par Jo Smolders, par Luc Lamine, par Valérie Leroi, par Robbe Tack, par Rosita Hesbeens, par Sofie Vanleenhove, par Walter Digneffe, par Bart Van Humbeeck, par Yves Soers, par Nico Devos, par Frédéric Van der Stock, par Johan Steynen, par Hilde Steynen, par la fondat

ion privée « Ministry of Privacy » et Matthias Dobbelaere-Welvaert et ...

Cour constitutionnelle
Arrêt n° 68/2023
du 27 avril 2023
Numéros du rôle : 7668, 7669, 7671, 7672, 7676, 7677, 7678, 7681, 7682, 7687, 7691, 7692, 7694, 7739 et 7743
En cause : les recours en annulation 1) du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 « relatif au COVID Safe Ticket », introduits par Jo Smolders, par Luc Lamine, par Valérie Leroi, par Robbe Tack, par Rosita Hesbeens, par Sofie Vanleenhove, par Walter Digneffe, par Bart Van Humbeeck, par Yves Soers, par Nico Devos, par Frédéric Van der Stock, par Johan Steynen, par Hilde Steynen, par la fondation privée « Ministry of Privacy » et Matthias Dobbelaere-Welvaert et par Luc Lamine et autres, 2) du décret de la Région wallonne du 15 juillet 2021, du décret de la Communauté germanophone du 19 juillet 2021, du décret de la Communauté française du 19 juillet 2021, du décret de la Communauté flamande du 19 juillet 2021, de l’ordonnance de la Commission communautaire commune du 22 juillet 2021 et du décret de la Commission communautaire française du 22 juillet 2021 « portant assentiment à l'accord de coopération du 14 juillet 2021
entre l’Etat fédéral, la Communauté flamande, la Communauté française, la Communauté germanophone, la Commission communautaire commune, la Région wallonne et la Commission communautaire française concernant le traitement des données liées au Certificat COVID numérique de l'UE et au COVID Safe Ticket, le PLF et le traitement des données à caractère personnel des travailleurs salariés et des travailleurs indépendants vivant ou résidant à l'étranger qui effectuent des activités en Belgique », - de la loi du 20 juillet 2021 « portant assentiment à l'accord de coopération entre l'Etat fédéral, la Communauté flamande, la Communauté française, la Communauté germanophone, la Commission communautaire commune, la Région wallonne et la Commission communautaire française concernant le traitement des données liées au certificat COVID
numérique de l'UE et au COVID Safe Ticket, le PLF et le traitement des données à caractère personnel des travailleurs salariés et des travailleurs indépendants vivant ou résidant à l'étranger qui effectuent des activités en Belgique », introduits par la fondation privée « Ministry of Privacy » et Matthias Dobbelaere-Welvaert, 3) de l’ordonnance de la Commission communautaire commune du 30 septembre 2021, du décret de la Région wallonne du 30 septembre 2021, du décret de la Communauté germanophone du 30 septembre 2021, du décret de la Communauté française du 30 septembre 2021, du décret de la Commission communautaire française du 30 septembre 2021, du décret de la Communauté flamande du 1er octobre 2021 et de la loi du 1er octobre 2021 « portant assentiment à l’accord de coopération du 27 septembre 2021 visant à la modification de l’accord de coopération du 14 juillet 2021 entre l’État fédéral, la Communauté flamande, la Communauté française, la Communauté germanophone, la Commission communautaire
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commune, la Région wallonne et la Commission communautaire française concernant le traitement des données liées au certificat COVID numérique de l’UE et au COVID Safe Ticket, le PLF et le traitement des données à caractère personnel des travailleurs salariés et des travailleurs indépendants vivant ou résidant à l’étranger qui effectuent des activités en Belgique », - du décret de la Région wallonne du 28 octobre 2021, du décret de la Communauté française du 28 octobre 2021, du décret de la Commission communautaire française du 29 octobre 2021, de l’ordonnance de la Commission communautaire commune du 29 octobre 2021, du décret de la Communauté germanophone du 29 octobre 2021, du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 et de la loi du 29 octobre 2021 « portant assentiment à l’accord de coopération [législatif] du 28 octobre 2021 visant à la modification d'accord de coopération du 14 juillet 2021 entre l’Etat fédéral, la Communauté flamande, la Communauté française, la Communauté germanophone, la Commission communautaire commune, la Région wallonne et la Commission communautaire française concernant le traitement des données liées au certificat COVID numérique de l’UE et au COVID Safe Ticket, le PLF et le traitement des données à caractère personnel des travailleurs salariés et des travailleurs indépendants vivant ou résidant à l’étranger qui effectuent des activités en Belgique », introduits par la fondation privée « Ministry of Privacy » et Matthias Dobbelaere-Welvaert et par Luc Lamine et autres, 4) de l’ordonnance de la Commission communautaire commune du 14 octobre 2021
« relative à l’extension du COVID Safe Ticket en cas de nécessité découlant d’une situation épidémiologique particulière », - du décret de la Région wallonne du 21 octobre 2021 « relatif à l’usage du COVID Safe Ticket et à l’obligation du port du masque », - du décret de la Région wallonne du 24 novembre 2021 « modifiant les articles 2, 5 et 8
du décret du 21 octobre 2021 relatif à l’usage du COVID Safe Ticket et à l’obligation du port du masque et y insérant un article 10/1 », - de l’ordonnance de la Commission communautaire commune du 14 janvier 2022
« prolongeant le champ d’application temporel de l’ordonnance du 14 octobre 2021 relative à l’extension du COVID Safe Ticket en cas de nécessité découlant d’une situation épidémiologique particulière », introduit par la fondation privée « Ministry of Privacy » et Matthias Dobbelaere-Welvaert.
La Cour constitutionnelle,
composée des présidents L. Lavrysen et P. Nihoul, et des juges T. Giet, J. Moerman, M. Pâques, Y. Kherbache, T. Detienne, D. Pieters, S. de Bethune, E. Bribosia, W. Verrijdt et K. Jadin, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée par le président L. Lavrysen,
après en avoir délibéré, rend l’arrêt suivant :
I. Objet des recours et procédure
a. Par treize requêtes adressées à la Cour par lettres recommandées à la poste les 9, 10, 17
et 30 novembre 2021 et 6 et 7 décembre 2021 et parvenues au greffe les 12, 18 et 22 novembre 2021 et 1er, 7 et 8 décembre 2021, des recours en annulation du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 « relatif au COVID Safe Ticket » (publié au Moniteur belge du
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29 octobre 2021, deuxième édition) ont été introduits respectivement par Jo Smolders, par Luc Lamine, par Valérie Leroi, par Robbe Tack, par Rosita Hesbeens, par Sofie Vanleenhove, par Walter Digneffe, par Bart Van Humbeeck, par Yves Soers, par Nico Devos, par Frédéric Van der Stock, par Johan Steynen et par Hilde Steynen.
b. Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 24 janvier 2022 et parvenue au greffe le 25 janvier 2022, la fondation privée « Ministry of Privacy » et Matthias Dobbelaere-Welvaert, assistés et représentés par Me J. De Groote, avocat au barreau de Termonde, et par Me N. Somers, avocat au barreau d’Anvers, ont introduit un recours en annulation :
1) du décret de la Région wallonne du 15 juillet 2021, du décret de la Communauté germanophone du 19 juillet 2021, du décret de la Communauté française du 19 juillet 2021, du décret de la Communauté flamande du 19 juillet 2021, de l’ordonnance de la Commission communautaire commune du 22 juillet 2021 et du décret de la Commission communautaire française du 22 juillet 2021 « portant assentiment à l’accord de coopération du 14 juillet 2021
entre l’Etat fédéral, la Communauté flamande, la Communauté française, la Communauté germanophone, la Commission communautaire commune, la Région wallonne et la Commission communautaire française concernant le traitement des données liées au Certificat COVID numérique de l'UE et au COVID Safe Ticket, le PLF et le traitement des données à caractère personnel des travailleurs salariés et des travailleurs indépendants vivant ou résidant à l’étranger qui effectuent des activités en Belgique » (publiés au Moniteur belge du 23 juillet 2021, troisième édition),
2) de la loi du 20 juillet 2021 « portant assentiment à l’accord de coopération entre l’Etat fédéral, la Communauté flamande, la Communauté française, la Communauté germanophone, la Commission communautaire commune, la Région wallonne et la Commission communautaire française concernant le traitement des données liées au certificat COVID
numérique de l’UE et au COVID Safe Ticket, le PLF et le traitement des données à caractère personnel des travailleurs salariés et des travailleurs indépendants vivant ou résidant à l’étranger qui effectuent des activités en Belgique » (publiée au Moniteur belge du 23 juillet 2021, troisième édition),
3) de l’ordonnance de la Commission communautaire commune du 30 septembre 2021, du décret de la Région wallonne du 30 septembre 2021, du décret de la Communauté germanophone du 30 septembre 2021, du décret de la Communauté française du 30 septembre 2021, du décret de la Communauté flamande du 1er octobre 2021 et de la loi du 1er octobre 2021 « portant assentiment à l’accord de coopération du 27 septembre 2021 visant à la modification de l’accord de coopération du 14 juillet 2021 entre l’État fédéral, la Communauté flamande, la Communauté française, la Communauté germanophone, la Commission communautaire commune, la Région wallonne et la Commission communautaire française concernant le traitement des données liées au certificat COVID numérique de l’UE et au COVID Safe Ticket, le PLF et le traitement des données à caractère personnel des travailleurs salariés et des travailleurs indépendants vivant ou résidant à l’étranger qui effectuent des activités en Belgique » (publiés au Moniteur belge du 1er octobre 2021, deuxième édition),
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4) de l’ordonnance de la Commission communautaire commune du 14 octobre 2021
« relative à l’extension du COVID Safe Ticket en cas de nécessité découlant d’une situation épidémiologique particulière » (publiée au Moniteur belge du 14 octobre 2021),
5) du décret de la Région wallonne du 21 octobre 2021 « relatif à l’usage du COVID Safe Ticket et à l’obligation du port du masque » (publié au Moniteur belge du 29 octobre 2021),
6) du décret de la Région wallonne du 28 octobre 2021, du décret de la Communauté française du 28 octobre 2021, de l’ordonnance de la Commission communautaire commune du 29 octobre 2021, du décret de la Communauté germanophone du 29 octobre 2021, du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 et de la loi du 29 octobre 2021 « portant assentiment à l'accord de coopération [législatif] du 28 octobre 2021 visant à la modification d’accord de coopération du 14 juillet 2021 entre l’Etat fédéral, la Communauté flamande, la Communauté française, la Communauté germanophone, la Commission communautaire commune, la Région wallonne et la Commission communautaire française concernant le traitement des données liées au certificat COVID numérique de l’UE et au COVID Safe Ticket, le PLF et le traitement des données à caractère personnel des travailleurs salariés et des travailleurs indépendants vivant ou résidant à l’étranger qui effectuent des activités en Belgique » (publiés au Moniteur belge du 29 octobre 2021, deuxième édition),
7) du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 « relatif au COVID Safe Ticket » (publié au Moniteur belge du 29 octobre 2021, deuxième édition),
8) du décret de la Région wallonne du 24 novembre 2021 « modifiant les articles 2, 5 et 8
du décret du 21 octobre 2021 relatif à l’usage du COVID Safe Ticket et à l’obligation du port du masque et y insérant un article 10/1 » (publié au Moniteur belge du 30 novembre 2021),
9) de l’ordonnance de la Commission communautaire commune du 14 janvier 2022
« prolongeant le champ d’application temporel de l’ordonnance du 14 octobre 2021 relative à l’extension du COVID Safe Ticket en cas de nécessité découlant d'une situation épidémiologique particulière » (publié au Moniteur belge du 14 janvier 2022, deuxième édition).
c. Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 27 janvier 2022 et parvenue au greffe le 28 janvier 2022, Luc Lamine, Marguerite Weemaes et Michel Lamine ont introduit un recours en annulation :
1) de la loi du 1er octobre 2021, du décret de la Communauté flamande du 1er octobre 2021, du décret de la Communauté française du 30 septembre 2021, du décret de la Communauté germanophone du 30 septembre 2021, du décret de la Région wallonne du 30 septembre 2021, de l’ordonnance de la Commission communautaire commune du 30 septembre 2021 et du décret de la Commission communautaire française du 30 septembre 2021 « portant assentiment à l’accord de coopération du 27 septembre 2021 visant à la modification de l’accord de coopération du 14 juillet 2021 entre l’État fédéral, la Communauté flamande, la Communauté française, la Communauté germanophone, la Commission
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communautaire commune, la Région wallonne et la Commission communautaire française concernant le traitement des données liées au certificat COVID numérique de l’UE et au COVID Safe Ticket, le PLF et le traitement des données à caractère personnel des travailleurs salariés et des travailleurs indépendants vivant ou résidant à l’étranger qui effectuent des activités en Belgique » (publiés au Moniteur belge du 1er octobre 2021, deuxième édition),
2) de la loi du 29 octobre 2021, du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021, du décret de la Communauté française du 28 octobre 2021, du décret de la Communauté germanophone du 29 octobre 2021, du décret de la Région wallonne du 28 octobre 2021, de l’ordonnance de la Commission communautaire commune du 29 octobre 2021 et du décret de la Commission communautaire française du 29 octobre 2021 « portant assentiment à l’accord de coopération [législatif] du 28 octobre 2021 visant à la modification de l’accord de coopération du 14 juillet 2021 entre l’Etat fédéral, la Communauté flamande, la Communauté française, la Communauté germanophone, la Commission communautaire commune, la Région wallonne et la Commission communautaire française concernant le traitement des données liées au certificat COVID numérique de l’UE et au COVID Safe Ticket, le PLF et le traitement des données à caractère personnel des travailleurs salariés et des travailleurs indépendants vivant ou résidant à l'étranger qui effectuent des activités en Belgique » (publiés au Moniteur belge du 29 octobre 2021, deuxième édition) et
3) du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 « relatif au COVID Safe Ticket » (publié au Moniteur belge du 29 octobre 2021, deuxième édition).
Par la même requête, les parties requérantes demandaient également la suspension des mêmes normes. Par l’arrêt n° 71/2022 du 19 mai 2022 (ECLI:BE:GHCC:2022:ARR.071), publié au Moniteur belge du 5 octobre 2022, la Cour a rejeté la demande de suspension.
Ces affaires, inscrites sous les numéros 7668, 7669, 7671, 7672, 7676, 7677, 7678, 7681, 7682, 7687, 7691, 7692, 7694, 7739 et 7743 du rôle de la Cour, ont été jointes.
Des mémoires et mémoires en réplique ont été introduits par :
- le Conseil des ministres, assisté et représenté par Me M. Feys et Me E. Van den Eynde, avocats au barreau de Gand (dans toutes les affaires);
- le Gouvernement flamand, assisté et représenté par Me B. Martel, Me K. Caluwaert et Me A. Van de Meulebroucke, avocats au barreau de Bruxelles, et par Me M. Feys et Me E. Van den Eynde (dans toutes les affaires);
- le Collège réuni de la Commission communautaire commune, assisté et représenté par Me M. Feys et Me E. Van den Eynde, et par Me P. Slegers, avocat au barreau de Bruxelles (dans les affaires nos 7739 et 7743);
- le Gouvernement wallon, assisté et représenté par Me M. Feys et Me E. Van den Eynde, et par Me M. Uyttendaele et Me P. Minsier, avocats au barreau de Bruxelles (dans les affaires nos 7739 et 7743);
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- le Gouvernement de la Communauté française, assisté et représenté par Me M. Feys et Me E. Van den Eynde (dans les affaires nos 7739 et 7743);
- le Collège de la Commission communautaire française, assisté et représenté par Me M. Feys et Me E. Van den Eynde (dans les affaires nos 7739 et 7743);
- le Gouvernement de la Communauté germanophone, assisté et représenté par Me M. Feys et Me E. Van den Eynde (dans les affaires nos 7739 et 7743).
Les parties requérantes dans les affaires nos 7681 et 7739 ont introduit des mémoires en réponse.
Par ordonnance du 1er février 2023, la Cour, après avoir entendu les juges-rapporteurs S. de Bethune et T. Giet, a décidé que les affaires étaient en état, qu’aucune audience ne serait tenue, à moins qu’une partie n’ait demandé, dans le délai de sept jours suivant la réception de la notification de cette ordonnance, à être entendue, et qu’en l’absence d’une telle demande, les débats seraient clos le 15 février 2023 et les affaires mises en délibéré.
À la suite de la demande des parties requérantes dans l’affaire n° 7739 à être entendues, la Cour, par ordonnance du 15 février 2023, a fixé l’audience au 15 mars 2023.
À l’audience publique du 15 mars 2023 :
- ont comparu :
. Me J. De Groote et Me T. Bronselaer, avocat au barreau d’Anvers, loco Me N. Somers, pour les parties requérantes dans l’affaire n° 7739;
. Me M. Feys, pour le Conseil des ministres, le Gouvernement de la Communauté française, le Collège de la Commission communautaire française et le Gouvernement de la Communauté germanophone;
. Me T. Moonen, avocat au barreau de Bruxelles, loco Me B. Martel, Me K. Caluwaert et Me A. Van de Meulebroucke, Me M. Feys et Me H. Abraham, avocat au barreau de Gand, pour le Gouvernement flamand;
. Me M. Feys et Me P. Slegers, pour le Collège réuni de la Commission communautaire commune;
. Me M. Feys et Me E. Lippens, avocat au barreau de Bruxelles, pour le Gouvernement wallon;
- les juges-rapporteurs S. de Bethune et T. Giet ont fait rapport;
- les avocats précités ont été entendus;
- les affaires ont été mises en délibéré.
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Les dispositions de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle relatives à la procédure et à l’emploi des langues ont été appliquées.
II. En droit
-A-
Quant à la recevabilité
En ce qui concerne les recours dans les affaires n os 7668, 7669, 7671, 7672, 7676, 7677, 7678, 7681, 7682, 7687, 7691, 7692 et 7694
A.1. Les parties requérantes dans les affaires nos 7668, 7669, 7672, 7676, 7677, 7678, 7681, 7682, 7687 et 7694 font valoir, à l’appui de leur intérêt, qu’elles ne se sont pas fait vacciner contre la COVID-19. Elles n’entendent pas acheter ni utiliser un smartphone et refusent de se faire tester tous les deux jours. Leur situation pourrait être affectée directement et défavorablement par le décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 « relatif au COVID Safe Ticket » (ci-après : le décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021), dès lors que le COVID Safe Ticket (ci-après : le CST) les empêche de fréquenter les établissements horeca dans des conditions normales. Les parties requérantes dans les affaires nos 7672 et 7687 ajoutent que l’utilisation du CST
constitue une atteinte à la vie privée et une violation du règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 « relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données) » (ci-après : le RGPD). La partie requérante dans l’affaire n° 7681 ajoute que sa vie est pour le moment marquée par l’isolement social, et ce, depuis des mois. Cette situation aurait des répercussions très néfastes sur son bien-être mental. Le décret attaqué serait contraire à l’éthique et inhumain, dès lors que les vaccins et les tests ne sont pas obligatoires. Sa décision personnelle de ne pas se faire vacciner ne devrait pas pouvoir aboutir à une restriction de ses droits fondamentaux.
Les parties requérantes dans les affaires nos 7671, 7691 et 7692 allèguent qu’elles sont vaccinées, mais que le CST les empêche de continuer à fréquenter des établissements horeca avec des membres de leur famille et des amis qui ne sont pas vaccinés. Elles aussi sont d’avis que le CST viole leur vie privée et le RGPD.
A.2.1. Le Conseil des ministres et le Gouvernement flamand contestent l’intérêt des parties requérantes dans les affaires nos 7668, 7669, 7671, 7672, 7676, 7677, 7678, 7681, 7682, 7687, 7691, 7692 et 7694.
Dans l’exposé de leur intérêt, les parties requérantes dans les affaires nos 7668, 7669, 7672, 7676, 7677, 7678, 7681, 7682, 7687 et 7694 ne font que reprendre une formulation type mise à disposition par un tiers sur un site Web satirique. Dès lors qu’elles n’établissent aucun lien entre cet exposé générique et leur situation personnelle, il est impossible de déterminer si elles justifient de l’intérêt personnel requis. Leur recours constituerait dès lors une action populaire inadmissible. L’affirmation des parties requérantes dans les affaires nos 7672 et 7687 selon laquelle l’utilisation du CST constitue une atteinte à la vie privée n’exprimerait qu’une impression subjective, qui ne pourrait pas non plus être admise.
Les parties requérantes dans les affaires nos 7671, 7691 et 7692 ne démontreraient pas l’existence d’un lien direct entre la norme attaquée et leur situation en ce qu’elles allèguent ne pas pouvoir, en tant que personnes vaccinées, fréquenter des établissements horeca avec des membres de leur famille qui ne sont pas vaccinés. Cette allégation est en tout cas inexacte. Les personnes non vaccinées sont en effet autorisées à se rendre dans des établissements horeca où le CST est obligatoire, à condition de présenter un certificat de rétablissement ou de test.
L’affirmation selon laquelle la norme attaquée constitue une violation du droit au respect de la vie privée et du RGPD porte sur le bien-fondé de leur recours et non sa recevabilité.
En tout état de cause, l’affirmation selon laquelle il est très désagréable de devoir s’installer à la terrasse d’un établissement horeca pendant une certaine période de l’année ne saurait être perçue comme une conséquence de la disposition attaquée qui soit défavorable au point de conférer aux parties requérantes l’intérêt requis.
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A.2.2. Le Conseil des ministres et le Gouvernement flamand font en outre valoir que les recours en annulation ne sont recevables qu’en ce qu’ils sont dirigés contre l’article 5, § 2, du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021, qui prévoit l’utilisation obligatoire du CST dans les établissements horeca et dans les centres de fitness. Ce n’est en réalité que contre cette disposition que des moyens sont développés.
A.2.3. Enfin, le Conseil des ministres et le Gouvernement flamand soutiennent que le moyen unique est irrecevable en ce qu’il est pris de la violation de l’article 22 de la Constitution, des articles 1er et 8 de la Convention européenne des droits de l’homme et de l’article 2 du Protocole n° 4 à cette même Convention. En effet, aucune des parties requérantes n’exposerait en quoi ces dispositions sont violées.
En ce qui concerne le recours dans l’affaire n° 7739
A.3. Les parties requérantes dans l’affaire n° 7739 affirment qu’elles justifient d’un intérêt à l’annulation des normes attaquées, eu égard à la portée générale de ces dernières. Les normes attaquées réduisent de manière importante la liberté de mouvement de tous les citoyens, et sont assorties de sanctions. En pareil cas, il n’est pas nécessaire d’examiner les éléments que les parties requérantes invoquent quant à leur situation personnelle.
En tout état de cause, tant la première partie requérante et ses membres que la deuxième partie requérante font usage de l’espace public, y compris des établissements du secteur socio-culturel, du secteur horeca et des infrastructures sportives. Les normes attaquées limitent fortement les possibilités de participer à la vie sociale, ce qui suffit pour constater que les deux parties requérantes justifient d’un intérêt.
Par ailleurs, par la présente procédure, la première partie requérante agit conformément à son but statutaire, qui est de « s’efforcer de sauvegarder la vie privée de chaque citoyen ».
En ce qui concerne le recours dans l’affaire n° 7743
A.4. Les parties requérantes renvoient, en ce qui concerne leur intérêt, à l’arrêt de la Cour n° 10/2022 du 20 janvier 2022 (ECLI:BE:GHCC:2022:ARR.010), dans lequel la Cour a admis leur intérêt à la suspension et à l’annulation des mêmes normes attaquées. Elles soulignent qu’elles n’ont actuellement plus accès à aucun établissement horeca du Royaume et que, dans la région de langue française, la possibilité de se rendre aux toilettes depuis la terrasse n’a pas été prévue.
Quant aux moyens invoqués
Dans les affaires nos 7668, 7669, 7671, 7672, 7676, 7677, 7678, 7681, 7682, 7687, 7691, 7692 et 7694
En ce qui concerne le moyen unique
A.5. Les parties requérantes dans les affaires nos 7668, 7669, 7671, 7672, 7676, 7677, 7678, 7681, 7682, 7687, 7691, 7692 et 7694 allèguent, dans leur moyen unique, que le décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 viole les articles 10, 11 et 22 de la Constitution, lus en combinaison ou non avec les articles 1er, 8 et 14 de la Convention européenne des droits de l’homme et avec l’article 2 du Protocole n° 4 à cette même Convention.
L’article 5, § 2, du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 rend obligatoire l’utilisation du CST dans les établissements horeca et dans les centres de fitness pour les visiteurs âgés de seize ans et plus. La vaccination contre la COVID-19 n’est pourtant pas une obligation légale. Il ressortirait de l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme du 8 avril 2021 en cause de Vavřička e.a. c. République tchèque (ECLI:CE:ECHR:2021:0408JUD004762113) que, en pareil cas, le fait de ne pas être vacciné ne peut entraîner des effets préjudiciables. Il découlerait en outre de cet arrêt qu’une obligation vaccinale ne peut être appliquée que dans des circonstances précises : pour un groupe spécifique, dans le cadre d’une injection unique et efficace ciblant une maladie très bien connue, avec une indemnisation en cas d’effets secondaires. Pour ce qui concerne le CST, qui constitue une obligation vaccinale indirecte, ces éléments n’ont pas été pris en compte. Par conséquent, la limitation du droit de fréquenter les cafés, les restaurants et les centres de fitness violerait le droit à la protection de la vie privée sociale et la liberté de mouvement.
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Le décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 ferait par ailleurs naître une différence de traitement non raisonnablement justifiée entre différentes catégories de personnes non vaccinées, à savoir entre, d’une part, le retraité qui souhaite boire sa petite bière quotidienne au café du village et qui doit s’installer en terrasse par tous les temps et, d’autre part, l’employé qui se rend au travail en train et qui a le droit de s’installer dans un wagon chauffé, mais aussi entre, d’une part, l’amateur de fitness qui n’a pas accès à son centre de fitness et, d’autre part, le lutteur qui a librement accès à son club de lutte.
Un test PCR négatif et un test antigénique rapide négatif ne pourraient être obtenus de manière utile que par les détenteurs d’un smartphone. Dès lors qu’il n’est pas assorti de mesures suffisantes garantissant un accès égal, pour tous les justiciables, aux connaissances ou à l’application nécessaires à l’utilisation du CST, le décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 produirait des effets disproportionnés au détriment de certaines catégories de personnes et n’est pas compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution.
Par conséquent, le droit à la protection de la vie privée, le principe d’égalité et la liberté de mouvement seraient manifestement violés au détriment des personnes non vaccinées contre la COVID-19.
A.6.1. Le Conseil des ministres et le Gouvernement flamand allèguent que le décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 n’impose pas une obligation vaccinale, que ce soit implicitement ou explicitement.
Les citoyens qui ne souhaitent pas se faire vacciner peuvent en effet toujours obtenir un CST sur la base d’un certificat de rétablissement ou d’un certificat de test. De plus, les parties requérantes tireraient des conclusions erronées de l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme du 8 avril 2021 en cause de Vavřička e.a.
c. République tchèque, précité. Dans cette affaire, la Cour européenne reconnaît que des ingérences dans la vie privée résultant d’une obligation légale de vaccination assortie de sanctions peuvent se justifier au regard de la protection de la santé publique. Le Conseil des ministres ajoute que, en tout état de cause, cet arrêt ne saurait trouver à s’appliquer dans les affaires présentement examinées, dès lors qu’il porte sur une obligation vaccinale explicite, que le décret attaqué ne prévoit pas.
A.6.2. En ce qui concerne la violation, alléguée, du droit au respect de la vie privée et de la liberté de mouvement, le Conseil des ministres et le Gouvernement flamand constatent que les parties requérantes omettent d’étayer par des arguments cette prétendue violation. En tout état de cause, le droit au respect de la vie privée et la liberté de mouvement ne sont pas des droits absolus, ils supposent aussi l’existence d’obligations correspondantes, telle l’obligation de ne pas porter atteinte au droit de mener une vie conforme à la dignité humaine ni au droit à la santé d’autrui.
A.6.3. Selon le Conseil des ministres et le Gouvernement flamand, la norme attaquée n’est pas non plus contraire au principe d’égalité. La première différence de traitement qu’invoquent les parties requérantes n’existerait pas. Si un travailleur non vacciné se rend dans un établissement horeca pour y prendre un verre et qu’il ne dispose pas d’un CST, il devra s’installer en terrasse, tout comme le retraité non vacciné. Et aucun des deux ne devra présenter le CST pour prendre le train. À titre subsidiaire, le Gouvernement flamand ajoute que, eu égard à la réglementation attaquée, le retraité non vacciné qui souhaite se rendre dans son café du village ne saurait être comparé à l’employé non vacciné qui utilise les transports publics pour se rendre au travail. Les différences entre les établissements horeca et les transports publics justifient à tout le moins la différence de traitement. Alors qu’une obligation totale du port du masque est difficilement combinable avec les activités habituellement pratiquées dans les établissements horeca, de sorte que des mesures d’atténuation des risques, comme le CST, sont nécessaires, le port du masque peut être imposé dans les transports publics sans que cela nuise à l’expérience normale et à la finalité de ces transports. À titre plus subsidiaire, le Gouvernement flamand soutient que la différence de traitement ne résulte pas du décret attaqué, mais de l’accord de coopération du 14 juillet 2021, qui définit le champ d’application matériel du CST. Les secteurs qui figurent dans cet accord sont par ailleurs ceux dans lesquels il est difficile de maintenir d’autres mesures de santé et de sécurité, mais où il existe dans un même temps un risque important de propagation du coronavirus SARS-CoV-2, de sorte que l’alternative est souvent la fermeture complète de ces secteurs. Partant, il serait dès lors raisonnablement justifié que l’utilisation du CST soit imposée pour ces secteurs.
Selon le Gouvernement flamand, la seconde différence de traitement alléguée est irrecevable, à défaut d’exposé. Le Conseil des ministres et le Gouvernement flamand soutiennent qu’il est en tout cas manifestement inexact d’affirmer que l’amateur de fitness n’a pas accès au centre de fitness. Il suffit en effet que l’intéressé dispose d’un CST valable, qu’il peut également obtenir sur la base d’un certificat de rétablissement ou d’un certificat de test valable. Le fait qu’il n’existe pas d’obligation comparable pour le « lutteur qui a librement accès
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à son club de lutte » pourrait se justifier par le fait que les clubs de lutte accueillent moins de visiteurs que les centres de fitness, de sorte que le risque de propagation de la COVID-19 y est moindre.
En ce qui concerne l’allégation des parties requérantes selon laquelle un certificat de test coûte très cher et ne peut par ailleurs pas être obtenu de manière utile par les personnes qui ne possèdent pas de smartphone, le Conseil des ministres soutient que les parties requérantes omettent de mentionner la disposition législative ou le principe qui seraient ainsi violés. Le Gouvernement flamand comprend la critique en ce sens que les parties requérantes font valoir en substance que le décret attaqué ferait naître une discrimination entre les personnes physiques, selon qu’elles disposent d’un smartphone ou non. Tant le Conseil des ministres que le Gouvernement flamand renvoient à la position de la section de législation du Conseil d’État selon laquelle l’obtention du CST est aisée d’un point de vue financier comme d’un point de vue organisationnel. Le CST est disponible non seulement par le biais de l’application pour smartphones, mais il l’est également sur les plateformes gouvernementales bien connues : Mijn Burgerprofiel, masanté.be et MyHealthViewer. Tout citoyen peut imprimer son CST en passant par ces sites. Le citoyen qui ne maîtrise pas suffisamment le numérique peut demander de l’aide à un membre de sa famille ou de son cercle d’amis pour se connecter à son compte sur l’un de ces sites et imprimer ensuite son CST. Par ailleurs, nombre de villes et communes possèdent des espaces numériques où elles mettent gratuitement à disposition des ordinateurs connectés à Internet, ainsi qu’un accompagnateur disposé à aider en cas de demandes relatives au numérique. Compte tenu de la grande quantité de tests effectués dans le contexte de pandémie actuel et de la durée de validité limitée d’un certificat de test, il serait impossible pour les autorités de fournir tous les certificats de test aux intéressés par la poste dans les temps. En ce qui concerne les certificats de vaccination, en revanche, les autorités ont prévu la possibilité de les faire parvenir par la poste. Le Gouvernement flamand ajoute que le préjudice de ne pas pouvoir prendre place à l’intérieur d’un café, mais de devoir s’installer en terrasse ne suffit pas pour conclure à l’inconstitutionnalité d’une réglementation qui vise, notamment, à protéger la santé publique.
A.6.4. Le Conseil des ministres et le Gouvernement flamand soutiennent enfin que le décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021, attaqué, n’a été en vigueur que pendant une période limitée, à savoir du 30 octobre 2021 au 7 mars 2022. Dès que la situation épidémiologique l’a permis, le Gouvernement flamand a fait le nécessaire pour rendre le décret attaqué inopérant.
Dans l’affaire n° 7739
A.7. Les parties requérantes dans l’affaire n° 7739 demandent l’annulation des actes portant assentiment à l’accord de coopération du 14 juillet 2021 entre l’État fédéral, la Communauté flamande, la Communauté française, la Communauté germanophone, la Commission communautaire commune, la Région wallonne et la Commission communautaire française « concernant le traitement des données liées au certificat COVID
numérique de l’UE et au COVID Safe Ticket, le PLF et le traitement des données à caractère personnel des travailleurs salariés et des travailleurs indépendants vivant ou résidant à l’étranger qui effectuent des activités en Belgique » (ci-après : l’accord de coopération du 14 juillet 2021), ainsi que de toutes les modifications, toutes les exécutions et tous les assentiments ultérieurs, plus précisément des actes portant assentiment à l’accord de coopération du 27 septembre 2021 « visant à la modification d’accord de coopération du 14 juillet 2021 entre l’État fédéral, la Communauté flamande, la Communauté française, la Communauté germanophone, la Commission communautaire commune, la Région wallonne et la Commission communautaire française concernant le traitement des données liées au certificat COVID numérique de l’UE et au COVID Safe Ticket, le PLF et le traitement des données à caractère personnel des travailleurs salariés et des travailleurs indépendants vivant ou résidant à l’étranger qui effectuent des activités en Belgique » (ci-après : l’accord de coopération du 27 septembre 2021), des actes portant assentiment à l’accord de coopération du 28 octobre 2021 « visant à la modification de l’accord de coopération du 14 juillet 2021 entre l’État fédéral, la Communauté flamande, la Communauté française, la Communauté germanophone, la Commission communautaire commune, la Région wallonne et la Commission communautaire française concernant le traitement des données liées au certificat COVID numérique de l’UE et au COVID Safe Ticket, le PLF et le traitement des données à caractère personnel des travailleurs salariés et des travailleurs indépendants vivant ou résidant à l’étranger qui effectuent des activités en Belgique » (ci-après :
l’accord de coopération du 28 octobre 2021), de l’ordonnance de la Commission communautaire commune du 14 octobre 2021 « relative à l’extension du COVID Safe Ticket en cas de nécessité découlant d’une situation épidémiologique particulière », de l’ordonnance de la Commission communautaire commune du 14 janvier 2022
« prolongeant le champ d’application temporel de l’ordonnance du 14 octobre 2021 relative à l’extension du COVID Safe Ticket en cas de nécessité découlant d’une situation épidémiologique particulière », du décret de la Région wallonne du 21 octobre 2021 « relatif à l’usage du COVID Safe Ticket et à l’obligation du port du masque », du décret de la Région wallonne du 24 novembre 2021 « modifiant les articles 2, 5 et 8 du décret du
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21 octobre 2021 relatif à l’usage du COVID Safe Ticket et à l’obligation du port du masque et y insérant un article 10/1 » et du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021.
En ce qui concerne le premier moyen dans l’affaire n° 7739
A.8. Le premier moyen dans l’affaire n° 7739 est pris de la violation de l’article 187 de la Constitution, lu en combinaison ou non avec les droits fondamentaux inscrits au titre II de la Constitution.
Les parties requérantes soutiennent que, bien que l’article 187 de la Constitution ne soit pas mentionné dans la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle (ci-après : la loi spéciale du 6 janvier 1989), cette disposition constitutionnelle comprend une garantie essentielle en ce qui concerne les dispositions du titre II de la Constitution, de sorte qu’elle est implicitement contenue dans l’article 1er, 2°, de cette loi spéciale. Il serait inadmissible que la Cour soit compétente pour examiner une suspension partielle de la Constitution (notamment la suspension d’une disposition relevant de l’article 1er de la loi spéciale du 6 janvier 1989), mais incompétente pour examiner la suspension de l’ensemble de la Constitution pour cause de violation de l’article 187 de la Constitution. Il découlerait de la nature et de la fonction de l’article 187, qui compte parmi les valeurs fondamentales de la Constitution et qui exprime en substance la même idée que l’article 33 de la Constitution, que la Cour est compétente pour exercer son contrôle au regard de cette disposition constitutionnelle.
Les normes attaquées porteraient assentiment à une réglementation qui subordonne la libre participation à un pan essentiel de la vie sociale à une condition préalable, à savoir la présentation du CST. Plus que la limitation d’un droit fondamental, cela en constituerait la suspension, ce qui serait contraire à l’article 187 de la Constitution.
En effet, la suspension d’un droit fondamental irait au-delà de la seule impossibilité pour le juge d’exercer un contrôle de proportionnalité. Il y aurait suspension dès que la substance du droit se trouve affectée.
Les normes attaquées violeraient à tout le moins l’article 187 de la Constitution, lu en combinaison avec les droits fondamentaux qui sont mentionnés dans les autres moyens invoqués.
A.9. Le Conseil des ministres, le Gouvernement flamand, le Gouvernement de la Communauté française, le Gouvernement de la Communauté germanophone, le Gouvernement wallon, le Collège réuni de la Commission communautaire commune et le Collège de la Commission communautaire française (ci-après collectivement : les autorités institutionnelles) font valoir dans leurs mémoires pratiquement identiques que, puisque l’article 187 de la Constitution ne figure pas dans l’article 1er de la loi spéciale du 6 janvier 1989, la Cour n’est pas compétente pour connaître du premier moyen.
Les autorités institutionnelles soutiennent en outre que les normes attaquées ne constituent pas une suspension de la Constitution. Elles n’impliquent pas, en effet, que les pouvoirs législatif et exécutif soient soustraits au contrôle juridictionnel. La présente procédure en annulation ainsi que la procédure en référé et la procédure au fond que les parties requérantes ont introduites contre l’utilisation du CST prouvent le contraire. Il serait par ailleurs évident que les normes attaquées ne suspendent pas le droit à la libre circulation ni le droit au respect de la vie privée, étant donné que le juge peut contrôler les normes attaquées au regard de ces droits fondamentaux. Il s’agit d’une limitation mûrement réfléchie, nécessaire et temporaire de ces droits fondamentaux, ce que la section de législation du Conseil d’État a confirmé à maintes reprises dans ses avis sur le sujet. Puisqu’il n’est pas question d’une suspension de la Constitution, le premier moyen devrait être rejeté comme étant non fondé.
En ce qui concerne le deuxième moyen dans l’affaire n° 7739
A.10.1. Le deuxième moyen dans l’affaire n° 7739 est pris de la violation des articles 10, 11, 12, alinéa 1er, 22, 22ter, 23, 26 et 27 de la Constitution, des articles 11, 14 et 38 de la Convention européenne des droits de l’homme, de l’article 2 du Protocole n° 4 à cette Convention, des articles 1er, 2, 3, 6, 7, 8, 12, 20, 21 et 45 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et des articles 12, 17, 21, 22 et 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
A.10.2. Dans une première branche, les parties requérantes invoquent la violation des articles 10 et 11 de la Constitution. Les normes attaquées feraient naître une différence de traitement injustifiée entre les personnes vaccinées et les personnes non vaccinées, en ce que les personnes vaccinées pourraient obtenir le CST beaucoup plus facilement, et ce, alors que la différence entre ces catégories de citoyens serait négligeable d’un point de vue
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épidémiologique. La différence de traitement poursuivrait un objectif illégitime, à savoir une obligation vaccinale déguisée. Divers rapports et avis démontrent pourtant que le CST n’empêche aucunement la propagation du coronavirus SARS-CoV-2. Par ailleurs, les normes attaquées feraient naître une identité de traitement injustifiée entre les personnes non vaccinées, selon qu’elles disposent ou non des ressources financières permettant de se faire continuellement tester pour pouvoir participer à la vie sociale. Enfin, les parties requérantes perçoivent une discrimination entre les personnes non vaccinées, selon que ces personnes possèdent un smartphone ou non. Le citoyen qui ne possède pas de smartphone doit en effet commander une version papier du CST, ce qui s’avère totalement impraticable. Entre le moment où le test est effectué et le résultat connu et le moment où le citoyen reçoit la version papier du CST, le résultat du test n’est déjà plus valide.
A.10.3. Dans une deuxième branche, les parties requérantes invoquent une violation des articles 12 et 22 de la Constitution, qui comprennent le droit d’utiliser les facilités ouvertes au public, sans ingérence de la part des autorités. Le CST limiterait ce droit de manière disproportionnée. En outre, le principe de précaution serait violé, dès lors qu’il s’avérerait que le CST ne convient pas pour empêcher les contaminations dans les secteurs visés.
A.10.4. Dans une troisième branche, les parties requérantes soulèvent une violation du principe de légalité contenu dans les articles 12 et 22 de la Constitution. Les normes attaquées constitueraient une ingérence, non prévue par une norme législative régulière, dans le droit à la libre circulation et dans le droit au respect de la vie privée. Les accords de coopération qui régissent le CST seraient en effet contraires au règlement (UE) 2021/953
du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2021 « relatif à un cadre pour la délivrance, la vérification et l’acceptation de certificats COVID-19 interopérables de vaccination, de test et de rétablissement (certificat COVID
numérique de l’UE) afin de faciliter la libre circulation pendant la pandémie de COVID-19 » (ci-après : le règlement (UE) 2021/953), dès lors que le CST implique une obligation vaccinale déguisée.
A.10.5. Dans une quatrième branche, les parties requérantes invoquent la violation des articles 22bis et 22ter de la Constitution, en ce que les personnes vulnérables qui ne peuvent pas se faire vacciner subissent un préjudice disproportionné du fait du CST. Elles se verraient empêchées de participer pleinement à la société, dès lors qu’elles doivent recourir à des tests répétés, ce qui s’avère contraignant tant financièrement que physiquement. Par ailleurs, les personnes visées à l’article 22ter de la Constitution dépendent dans une large mesure des prestataires de soins et sont donc également affectées lorsqu’elles obtiennent elles-mêmes un CST, mais que leur accompagnateur n’en obtient pas. Cela vaudrait aussi, mutatis mutandis, pour les personnes visées à l’article 22bis de la Constitution.
A.10.6. Dans une cinquième branche, les parties requérantes soulèvent la violation de l’article 23 de la Constitution, en ce que le CST, en tant que mesure préventive, empêche une pleine participation à la vie sociale et limite sérieusement l’épanouissement social des personnes non vaccinées.
A.10.7. Dans une sixième branche, les parties requérantes invoquent une violation des articles 26 et 27 de la Constitution. Le droit de réunion et le droit d’association seraient en effet, par le biais du CST, soumis à une condition préalable illicite. Les normes attaquées ne résisteraient pas aux contrôles de proportionnalité et de subsidiarité, eu égard au caractère inadéquat du CST et au fait qu’il n’est pas avéré que des conditions moins drastiques n’auraient pas pu être imposées.
A.11.1. En ce qui concerne la première branche, les autorités institutionnelles soutiennent que la différence de traitement entre les personnes vaccinées et les personnes non vaccinées repose sur un critère objectif et raisonnablement justifié. En effet, les personnes qui ont été vaccinées ou qui se sont récemment rétablies de la COVID-19 sont moins contagieuses et présentent un risque d’admission à l’hôpital beaucoup plus faible que les personnes qui n’ont pas été vaccinées ou qui ne se sont pas récemment rétablies de la COVID-19. Par ailleurs, le CST respecte le libre choix de ne pas se faire vacciner, puisque les personnes non vaccinées peuvent également obtenir un CST par le biais d’un certificat de test ou d’un certificat de rétablissement. La différence de traitement résulte dès lors de choix propres à chacun, libres et mûrement réfléchis, dont les conséquences étaient connues à l’avance. Qui plus est, l’utilisation du CST a été limitée dans le temps, et celui-ci a été désactivé dès que les circonstances épidémiologiques l’ont permis.
En ce qui concerne la discrimination alléguée au sein même de la catégorie des personnes non vaccinées, les autorités institutionnelles soutiennent que l’accès tant aux vaccins qu’aux tests est suffisamment général et accessible. Un juste équilibre aurait été recherché entre, d’une part, l’endiguement et la prévention du coronavirus SARS-CoV-2 et, d’autre part, la reprise des activités sociales. Cette dernière s’est d’ailleurs faite de manière progressive, sachant que l’objectif n’était pas d’avoir chaque jour des contacts sociaux différents. En outre, tant qu’aucun confinement général n’est déclaré, les personnes non vaccinées ne sont pas obligées de se faire tester
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pour entretenir des contacts sociaux. Le citoyen qui ne possède pas de smartphone ne serait pas davantage discriminé, puisqu’il pourrait facilement obtenir une version papier du certificat COVID numérique de l’UE.
A.11.2. En ce qui concerne la deuxième branche, les autorités institutionnelles font valoir que l’utilisation du CST est subsidiaire et proportionnée au regard des droits fondamentaux prétendument limités. Il ressortirait en effet de divers avis et de la jurisprudence que le droit à la libre circulation est suffisamment garanti. Le CST serait d’autant plus proportionné que son utilisation est limitée à des secteurs et à des événements énumérés limitativement qui présentent un risque accru de contamination ou qui rassemblent un public particulièrement vulnérable. Le CST a de surcroît permis à ceux qui en disposaient de se mouvoir librement dans la vie socioculturelle, étant donné qu’il a permis la réouverture de toute une série de secteurs. Enfin, des études feraient apparaître que le CST constitue un moyen adéquat pour diminuer le taux de contamination, les admissions hospitalières et les cas mortels, de même que pour stimuler le produit intérieur brut et éviter des confinements aux graves conséquences économiques. Les parties requérantes ne démontreraient pas que d’autres mesures, moins intrusives, auraient été suffisantes pour endiguer la propagation du coronavirus SARS-CoV-2.
A.11.3. En ce qui concerne la troisième branche, les autorités institutionnelles allèguent qu’il n’appartient pas à la Cour de se prononcer sur la comptabilité d’un acte législatif avec un règlement européen. En tout état de cause, les accords de coopération qui régissent le CST ne seraient pas contraires au règlement (UE) 2021/953, puisque ces accords n’instaurent pas une obligation de vaccination. Le CST n’est effectivement pas uniquement lié à la vaccination.
A.11.4. En ce qui concerne la quatrième branche, les autorités institutionnelles soutiennent que les parties requérantes ne démontrent pas en quoi consiste la violation de l’article 22bis de la Constitution, de sorte que cette branche doit être déclarée non fondée à cet égard.
En ce qui concerne la prétendue violation de l’article 22ter de la Constitution, les autorités institutionnelles font valoir que les personnes qui, pour des raisons médicales, ne peuvent se faire vacciner contre la COVID-19
peuvent obtenir le remboursement d’un test PCR ou d’un test antigénique rapide sur présentation d’un certificat médical. Elles peuvent aussi se faire enregistrer sur Vaccinnet+ comme personne complètement vaccinée, même si tel n’est pas le cas. Les personnes handicapées auraient la possibilité d’obtenir un CST sans aucun problème.
Elles auraient accès à la vaccination et aux tests de la même manière que les personnes non porteuses d’un handicap. Il n’y a de surcroît aucune obligation vaccinale pour le personnel soignant. Une personne vulnérable peut donc se faire soigner par le prestataire de soins de son choix, que celui-ci dispose d’un CST ou non. Le prestataire de soins n’est en effet pas tenu de présenter un CST pour fournir des soins à une personne handicapée.
Enfin, les autorités institutionnelles contestent l’intérêt des parties requérantes à ce moyen, dès lors que ces dernières ne relèvent pas de la catégorie des personnes qui sont visées aux articles 22bis et 22ter de la Constitution.
A.11.5. En ce qui concerne la cinquième branche, les autorités institutionnelles allèguent que l’article 23 de la Constitution englobe tout autant le droit à la protection de la santé que le droit à la protection d’un environnement sain, les autorités ayant l’obligation positive de garantir ces droits. Aussi le droit à l’épanouissement culturel doit-
il être mis en balance avec le droit à la santé. Le CST serait proportionné au regard des objectifs qui consistent, d’une part, à réduire la propagation du virus et, d’autre part, à limiter le plus possible les conséquences économiques de la pandémie. Compte tenu du fait que l’utilisation du CST n’a été imposée que pendant une durée limitée, les dommages portés à la vie sociale et à l’épanouissement culturel ou social des personnes non vaccinées sont en tout état de cause pratiquement nuls.
A.11.6. En ce qui concerne la sixième branche, les autorités institutionnelles soutiennent que le CST est proportionné au regard de la limitation de la liberté de réunion et d’association. L’introduction du CST a permis d’éviter, ou à tout le moins de limiter dans le temps, l’instauration d’un confinement ou la fermeture de certains secteurs. Dans une situation de confinement ou de fermeture, le droit d’association et le droit de réunion sont en effet encore bien plus menacés.
En ce qui concerne le troisième moyen dans l’affaire n° 7739
A.12. Le troisième moyen dans l’affaire n° 7739 est pris de la violation de l’article 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, des articles 7 et 8 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, de l’article 22 de la Constitution et de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme.
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Dans une première branche, les parties requérantes font valoir que le CST viole le droit à la protection de la vie privée en ce qu’il constitue une ingérence disproportionnée dans la vie sociale, y compris dans les activités commerciales. Le principe de légalité serait violé, en ce que les accords de coopération et les normes d’assentiment attaqués, ainsi que le décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 prévoient une utilisation facultative du CST et ne sont, de ce fait, pas suffisamment clairs et prévisibles. Le principe de subsidiarité et le principe de proportionnalité seraient également violés, dès lors que les normes attaquées ne sont pas utiles, pertinentes et efficaces pour atteindre l’objectif visé et qu’il existe des mesures moins attentatoires qui permettent d’atteindre le même objectif, avec une incidence moindre sur la vie privée des intéressés. Les parties requérantes font référence à l’élargissement de l’obligation du port du masque, au recours accru à la ventilation, ainsi qu’à la mise en place de protocoles dans les secteurs concernés. L’utilisation du CST aurait rapidement été élargie au-delà de l’objectif pour lequel elle avait été prévue initialement, à savoir l’accès à des événements de masse ainsi qu’à des projets d’essai et des projets pilotes. Ce glissement de fonction dans le système du CST entraînerait indéniablement une violation du droit à la protection de la vie privée et des données à caractère personnel. En ce que le CST
constituerait de facto une contrainte de vaccination, il serait par ailleurs porté atteinte au droit à l’intégrité physique.
Dans une deuxième branche, les parties requérantes allèguent que le CST viole le droit à la protection des données à caractère personnel. Le traitement des données à caractère personnel, y compris des données de santé sensibles, ne serait pas proportionné à l’objectif poursuivi et porterait atteinte au principe de la minimisation des données inscrit à l’article 5, paragraphe 1, c), du RGPD. Par le biais du CST, les organisateurs d’événements et les exploitants de cafés auraient en effet connaissance d’une caractéristique importante concernant l’état de santé des visiteurs. Le CST ne serait pas conforme non plus au principe de la minimisation des données en ce qu’il montre les prénom et nom de famille complets des détenteurs. Serait également violé le principe de la licéité du traitement des données à caractère personnel inscrit à l’article 5, paragraphe 1, a), du RGPD, en ce que les organisateurs d’événements et les exploitants de certains établissements peuvent choisir d’utiliser le CST ou non. Il ne saurait effectivement être question d’une « obligation légale » au sens de l’article 6, paragraphe 1, c), du RGPD si la faculté d’utiliser le CST comme condition d’accès est laissée à l’organisateur ou à l’exploitant. L’accord de coopération du 14 juillet 2021, qui constitue le fondement juridique interne pour le traitement des données à caractère personnel dans le cadre de l’utilisation du CST, n’offrirait pas des garanties suffisantes pour protéger la vie privée des intéressés. Enfin, le principe d’intégrité et le principe de confidentialité inscrits à l’article 5, paragraphe 1, f), du RGPD seraient violés, en ce que tout utilisateur de l’application COVIDScan a la possibilité de choisir entre l’option de lecture du certificat COVID numérique de l’UE des voyageurs entrants en Belgique et l’option de lecture du CST donnant accès à des événements ou à d’autres lieux. À ce sujet, les parties requérantes renvoient également à une étude lancée par l’Autorité de protection des données au sujet d’une possible faille de sécurité de l’application COVIDScan, qui aurait entraîné une fuite des données à caractère personnel de 39 000 personnes.
A.13. Les autorités institutionnelles font valoir que le traitement des données à caractère personnel dans le cadre de l’utilisation du CST repose sur un fondement juridique adéquat. Les accords de coopération attaqués ainsi que les décrets et ordonnances attaqués des entités fédérées détailleraient tous les paramètres relatifs au traitement conformément à l’article 5 du RGPD. Les autorités institutionnelles auraient par ailleurs respecté leur obligation de transparence en prévoyant une déclaration de vie privée claire et accessible en ce qui concerne le traitement des données à caractère personnel dans le cadre des certificats COVID et de l’application COVIDsafe. Les objectifs du CST feraient l’objet d’une interprétation très restrictive et le CST, en n’affichant qu’un code QR, un nom et une date de naissance, serait l’instrument le plus adapté pour atteindre la minimalisation des données. Le CST ne fournirait aucune information sur le statut vaccinal, dès lors qu’il peut également être obtenu à l’aide d’un certificat de test ou de rétablissement. La seule donnée à caractère personnel traitée très brièvement lors de la validation est donc la donnée indiquant si le détenteur du certificat dispose d’un certificat valable ou non, ce qui constitue une donnée à caractère personnel limitée. L’exactitude des données à caractère personnel serait assurée par la combinaison de la lecture du code QR du CST avec le contrôle de la carte d’identité du visiteur. Le principe de la durée de conservation limitée des données à caractère personnel serait lui aussi rigoureusement pris en compte, puisque les données à caractère personnel sont immédiatement effacées après leur traitement au moment de la lecture du CST et que l’application du CST est limitée par les entités fédérées à une durée maximale de trois mois, et en tout état de cause jusqu’au 30 juin 2022, soit la date à laquelle le règlement (UE) 2021/953 devient inopérant.
Enfin, le CST satisferait à toutes les exigences en matière d’intégrité et de confidentialité qui sont exposées dans le RGPD, ce que les articles 16 et 17 de l’accord de coopération du 14 juillet 2021 confirment explicitement. Le Tribunal de première instance de Bruxelles aurait déjà constaté qu’il n’y a eu aucune fuite de données ni aucune insécurité dans l’application COVIDScan. En tout état de cause, la Cour ne serait pas compétente pour examiner l’adéquation et l’efficacité des mesures de sécurité techniques et organisationnelles relatives à l’application COVIDScan.
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Le CST satisferait dès lors à toutes les conditions juridiques pour justifier une ingérence dans le droit à la protection de la vie privée. Il aurait été instauré en vue de réduire le nombre de contaminations et d’hospitalisations et en vue de la relance économique et sociale de la Belgique. Les répercussions sur la vie privée seraient en outre très limitées, dès lors qu’aucune donnée n’est enregistrée et que l’obtention du CST est très aisée. La nature temporaire du CST, les restrictions concernant les lieux et les moments où il peut être utilisé ainsi que les nombreuses garanties légales en matière de droits et libertés qui sont contenues dans les accords de coopération relatifs au CST font que cette mesure ne constitue pas une violation du droit au respect de la vie privée. Aussi le CST était-il nécessaire et proportionné, eu égard à la situation épidémiologique extrêmement précaire dans laquelle se trouvait la Belgique.
En ce qui concerne le quatrième moyen dans l’affaire n° 7739
A.14. Le quatrième moyen dans l’affaire n° 7739 est pris de la violation des règles répartitrices de compétences, en ce que, dans l’hypothèse d’une déclaration d’un état d’urgence épidémique, les entités fédérées perdraient la possibilité de principe d’instaurer le CST et en ce que le législateur fédéral pourrait unilatéralement abroger ou modifier les décrets et ordonnances. Cela serait d’autant plus problématique que c’est le Roi qui s’en chargerait. Une telle délégation de pouvoirs ne serait pas admissible.
À titre subsidiaire, les parties requérantes soutiennent que le CST ne constitue pas une mesure de santé préventive, dès lors qu’il s’agit d’une mesure qui vise tous les citoyens, indépendamment du fait qu’il existe un risque d’infection ou non. Il s’agirait d’une mesure de police sanitaire, pour laquelle le législateur fédéral est exclusivement compétent.
A.15. Les autorités institutionnelles soutiennent que les entités fédérées ne sont pas privées d’une compétence sur la base de l’accord de coopération du 14 juillet 2021. Cet accord détermine simplement les modalités de l’intervention de chaque partenaire de l’État fédéral. Les signataires de l’accord fixent librement les modalités de leur coopération. C’est donc librement que les entités fédérées ont pu déterminer qu’elles n’exerceraient pas leurs compétences aussi longtemps qu’un état d’urgence épidémique serait déclaré.
En outre, les autorités institutionnelles affirment que les entités fédérées sont compétentes, sur la base de leur compétence en matière de soins de santé préventifs, pour prendre des mesures visant à prévenir la propagation de maladies contagieuses. La réglementation relative à l’accès à certains secteurs sur la base du CST serait dès lors une mesure relevant des activités et services en matière de soins de santé préventifs.
En ce qui concerne le maintien des effets
A.16. À titre subsidiaire, les autorités institutionnelles soutiennent que l’annulation des dispositions attaquées aurait des effets indésirables sur l’établissement et la délivrance des certificats de vaccination, de test et de rétablissement, étant donné qu’il ne serait alors plus possible d’obtenir un certificat COVID numérique de l’UE
par ce biais en Belgique. Il ne serait plus possible non plus d’utiliser le CST à des fins nationales. Compte tenu, d’une part, du fait que la situation épidémiologique en Belgique reste précaire et que, dans certaines parties du pays, le nombre de contaminations au coronavirus SARS-CoV-2 repart à la hausse, et, d’autre part, du fait qu’une résurgence du virus ne peut jamais être exclue, le certificat COVID numérique de l’UE et le CST sont des instruments non seulement utiles, mais aussi proportionnés et nécessaires, pour lutter contre le virus. L’annulation des normes attaquées aurait des effets désastreux et insurmontables pour les administrations et entités concernées, ainsi que sur la politique de lutte contre la COVID-19. Pour cette raison, à supposer que la Cour annule les dispositions attaquées, les autorités institutionnelles demandent le maintien des effets pour la période allant du 16 juin 2021 jusqu’à l’expiration du règlement (UE) 2021/953, ou à tout le moins jusqu’à l’adoption et l’approbation d’un nouvel accord de coopération, sans préjudice du maintien des effets des mesures visées dans l’accord de coopération, y compris pour l’avenir, conformément à l’article 33 de l’accord de coopération du 14 juillet 2021.
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Dans l’affaire n° 7743
A.17. Les parties requérantes dans l’affaire no 7743 demandent l’annulation des actes portant assentiment aux accords de coopération du 27 septembre 2021 et du 28 octobre 2021, ainsi que du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021.
Les parties requérantes indiquent que le contenu de leur requête est en partie semblable au contenu de la requête qu’elles ont introduite dans l’affaire n° 7666, dans le cadre de laquelle elles ont également demandé l’annulation des actes attaqués. Dans la présente affaire, les parties requérantes articulent trois moyens supplémentaires par rapport aux moyens soulevés dans l’affaire n° 7666, et développent également quelques considérations complémentaires à propos du contexte des actes attaqués.
A.18.1.1. Les parties requérantes prennent un premier moyen, qu’elles décrivent comme le « moyen principal » et le « plus important moyen », de la violation, par les dispositions attaquées, de l’article 15 de la Convention européenne des droits de l’homme, de l’article 4 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et des articles 10, 11, 12, 13, 14, 14bis, 16, 19, 22, 22ter, 23, 25, 26, 27 et 187 de la Constitution, et, en tant que de besoin, de la violation de l’article 5, § 1er, I, alinéa 2, 2°, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, lu en combinaison avec les articles 128, 161 et 187 de la Constitution, et lu isolément ou en combinaison avec les articles 1er, 2, 3, 5, 6, 7, 8, 10, 13, 14, 15 et 17 de la Convention européenne des droits de l’homme, avec l’article 1er du Premier Protocole additionnel à cette Convention, avec l’article 2 du Protocole n° 4
à la même Convention, avec les articles 2, 4, 6, 7, 9, 12, 14, 15, 17 et 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, avec les articles 1er, 2, 3, 4, 6, 8, 11, 17, 20, 21, 47, 48 et 49 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, avec le principe fraus omnia corrumpit, avec le principe « tout ce qui n’est pas défendu par la loi ne peut être empêché » tel qu’il était déjà mentionné dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, avec le principe de bonne législation, avec le principe général de la transparence, avec le principe général de la dignité humaine, avec le principe général du droit à un procès équitable et d’accès à un juge, avec le principe général de l’égalité des citoyens devant les charges publiques qui est consacré notamment par l’article 16 de la Constitution, avec le principe de bonne foi, avec le principe de l’interdiction du contournement de la règle de droit, avec le principe selon lequel il ne peut être porté atteinte à un droit fondamental de manière indirecte ou détournée, comme en témoigne la jurisprudence relative à la discrimination indirecte, avec le principe du monopole de la force et de la coercition de l’État, et avec le principe de précaution, et lus à la lumière de la loi du 10 avril 1990 « réglementant la sécurité privée et particulière », et en particulier ses articles 2 à 13 et 13.9 à 13.15, de l’article 1er de la loi du 10 janvier 1977 « organisant la réparation des dommages provoqués par des prises et des pompages d’eau souterraine », de l’article 8 de la loi du 30 juillet 1979 « relative à la prévention des incendies et des explosions ainsi qu’à l’assurance obligatoire de la responsabilité civile dans ces mêmes circonstances », de l’article 2.7.3.20, § 1er, du Code belge de la navigation, de l’article 31, 4°, de la loi du 1er août 1985 « portant des mesures fiscales et autres », des articles 1382 et 1383 de l’ancien Code civil, de l’article 11 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, de l’article 11 des lois sur le Conseil d’État, coordonnées le 12 janvier 1973, de l’article 25, § 1er, de l’arrêté ministériel du 26 novembre 1991 « portant les modalités d’application de la réglementation du chômage », de l’article 1er, alinéa 1er, 3°, de la loi du 20 juillet 1990 « relative à la détention préventive » et des articles 416 et 417 du Code pénal.
Ce moyen est divisé en vingt et une branches.
A.18.1.2. Dans une première branche, les parties requérantes soutiennent que les dispositions attaquées rendent la vaccination indirectement obligatoire, alors que les droits des personnes non vaccinées ne peuvent être restreints que si la vaccination est rendue obligatoire par la loi.
A.18.1.3. Dans une deuxième branche, les parties requérantes affirment que la différence de traitement entre les personnes vaccinées et les personnes non vaccinées est fondée sur des faits erronés, contestables ou à tout le moins non transparents, et qu’elle n’est donc pas raisonnablement justifiée.
A.18.1.4. Dans une troisième branche, les parties requérantes allèguent que le CST a un champ d’application manifestement déraisonnable, puisque les établissements horeca visés par les dispositions attaquées sont plus
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essentiels que certains lieux qui ne sont pas visés par ces dispositions, telles les écoles de danse, alors que l’exposé général de l’accord de coopération du 27 septembre 2021 affirme que le CST ne s’applique pas aux services essentiels.
A.18.1.5. Dans une quatrième branche, les parties requérantes relèvent qu’il n’existe aucune limitation technique à l’égard des personnes qui peuvent lire le CST, alors que les technologies modernes permettent d’en interdire la lecture aux personnes non autorisées.
A.18.1.6. Dans une cinquième branche, les parties requérantes soutiennent que les dispositions attaquées créent entre les personnes non vaccinées une discrimination fondée sur leurs situations financières, eu égard au caractère très onéreux des tests. Compte tenu des frais qu’elles rendent nécessaires à la jouissance de certains droits essentiels, les dispositions attaquées porteraient atteinte à la situation financière des personnes contre lesquelles elles sont dirigées à un tel point qu’elles constituent une mesure disproportionnée à l’objectif légitime qu’elles poursuivent, de sorte qu’elles entraînent une violation du droit de propriété.
A.18.1.7. Dans une sixième branche, les parties requérantes font valoir que les dispositions attaquées violent les articles 22 et 22ter de la Constitution, ainsi que l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, en ce que les dispositions attaquées ne tiennent pas compte de la situation des personnes qui ne peuvent pas recevoir de vaccin en raison de contre-indications médicales.
A.18.1.8. Dans une septième branche, les parties requérantes soutiennent que les dispositions attaquées ne prévoient pas des garanties procédurales suffisantes, et notamment l’intervention préalable d’un juge indépendant et impartial, pour contester la décision refusant l’accès à un des lieux visés par les dispositions attaquées. Partant, le volet procédural de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme et donc aussi de l’article 22
de la Constitution serait violé.
A.18.1.9. Dans une huitième branche, les parties requérantes affirment que les dispositions attaquées ne garantissent pas aux citoyens le droit d’accéder aux toilettes lorsqu’ils quittent leur domicile, ce qui peut notamment provoquer des cystites. Partant, les dispositions attaquées mettent en danger la santé de ceux-ci et violent le droit à la dignité humaine.
A.18.1.10. Dans une neuvième branche, les parties requérantes soutiennent que les dispositions attaquées violent le droit au respect de la vie privée en ce qu’elles obligent les visiteurs des lieux visés à présenter leur carte d’identité, laquelle permet de déduire leur domicile. Or, le domicile constitue un élément de la vie privée qui bénéficie d’une protection. Dans une société démocratique, aucun besoin social impérieux ne justifierait qu’il faille dévoiler son domicile à des personnes non assermentées, pour pouvoir exercer des droits élémentaires.
En outre, les parties requérantes soulignent que la Cour reconnaît le monopole de la violence de l’autorité publique comme un attribut de l’autorité publique. Les personnes chargées de contrôler le CST ne devraient donc pas être autorisées à faire usage de la force pour mettre à la porte des personnes qui ne causent aucun désordre.
C’est pourtant ce que les dispositions attaquées semblent exiger de ces personnes.
A.18.1.11. Dans une dixième branche, les parties requérantes affirment que l’exclusion des activités visées par les dispositions attaquées revêt un caractère principalement punitif, de sorte qu’elle constitue une sanction pénale au sens de la Convention européenne des droits de l’homme. Par conséquent, cette sanction ne saurait être prononcée que par un tribunal indépendant et impartial.
A.18.1.12. Dans une onzième branche, les parties requérantes soutiennent que les dispositions attaquées créent une différence de traitement entre les personnes qui se font vacciner pour obtenir le CST et celles qui se font vacciner en vertu d’une obligation légale, en ce que la responsabilité des pouvoirs publics diffère en cas d’effets secondaires graves. Les dispositions attaquées poursuivraient un objectif illégitime, à savoir obliger implicitement la population à se faire vacciner, sans que les autorités publiques concernées puissent être civilement ou pénalement tenues pour responsables en cas d’effets secondaires.
A.18.1.13. Dans une douzième branche, les parties requérantes affirment que les dispositions attaquées créent une discrimination envers les jeunes de douze à quinze ans, puisque ceux-ci ne peuvent pas télécharger eux-
mêmes l’application nécessaire à la présentation du CST et ne peuvent pas toujours utilement demander de l’aide à leurs parents.
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A.18.1.14. Dans une treizième branche, les parties requérantes relèvent que les dispositions attaquées ne contiennent pas des mesures d’accompagnement destinées aux personnes qui n’ont pas accès à l’application mobile nécessaire pour générer le CST ou qui ne disposent pas des connaissances nécessaires pour utiliser le CST, de telle sorte que ces personnes sont discriminées.
A.18.1.15. Dans une quatorzième branche, les parties requérantes affirment que les dispositions attaquées poursuivent un but frauduleux, à savoir faire en sorte que les autorités publiques échappent à leur responsabilité en cas d’effets secondaires du vaccin.
A.18.1.16. Dans une quinzième branche, les parties requérantes soutiennent que les dispositions attaquées manquent de transparence et n’encouragent pas le débat public sur la question de la vaccination, contrairement à ce qui est exigé par la Cour européenne des droits de l’homme dans l’arrêt du 8 avril 2021 en cause de Vavřička e.a.
c. République tchèque, précité.
A.18.1.17. Dans une seizième branche, les parties requérantes affirment qu’il n’existe aucune garantie que le système de code QR ne permettra pas aux autorités de surveiller les déplacements des citoyens.
A.18.1.18. Dans une dix-septième branche, les parties requérantes soutiennent qu’il existe des mesures moins attentatoires aux libertés que celles que prévoient les dispositions attaquées, par exemple l’utilisation d’un scanner de température.
A.18.1.19. Dans une dix-huitième branche, les parties requérantes allèguent que les dispositions attaquées autorisent le refus d’accès à certains lieux, sans néanmoins préciser l’étendue des pouvoirs des personnes chargées de contrôler le CST. Ce manque de clarté est préjudiciable au droit à la sécurité des citoyens. Par ailleurs, le principe d’égalité serait violé en ce qu’il serait conféré aux personnes chargées de contrôler le CST plus de compétences qu’aux simples citoyens, lesquels ne sont même pas autorisés à toucher une personne qui veut mettre le feu à leur logement.
A.18.1.20. Dans une dix-neuvième branche, les parties requérantes allèguent qu’aucune restriction n’existe pour les personnes qui ont refusé la vaccination contre la polio, qui est la seule vaccination obligatoire en Belgique.
Partant, les dispositions attaquées créent une discrimination entre les personnes qui refusent le vaccin contre la polio et celles qui refusent le vaccin contre la COVID-19.
A.18.1.21. Dans une vingtième branche, les parties requérantes observent que les dispositions attaquées ne prévoient aucune dispense d’utilisation du CST, en particulier pour manger, boire et utiliser les toilettes dans un établissement horeca lors d’un déplacement visant à accomplir une activité urgente et nécessaire qui ne peut pas être reportée, comme se rendre dans un centre de test ou à l’enterrement d’un membre de la famille proche. Elles constituent par conséquent des mesures disproportionnées qui portent atteinte à l’article 2 du Protocole n° 4 à la Convention européenne des droits de l’homme, lu en combinaison avec les articles 10 et 11 de la Constitution.
A.18.1.22. Dans une vingt et unième et dernière branche, les parties requérantes soutiennent que les dispositions attaquées ne garantissent pas que les personnes qui refusent le vaccin contre la COVID-19 ne seront pas traitées plus sévèrement que celles qui refusent un vaccin légalement obligatoire. Il ne serait donc pas garanti que les personnes qui refusent le vaccin contre la COVID-19 ne pourront être condamnées qu’une seule fois à une amende modérée et qu’elles ne pourront pas être exclues de toute participation à des activités obligatoires, comme la participation à l’enseignement inférieur et supérieur pour les mineurs et l’exercice d’une activité professionnelle.
Sans qu’existe une justification raisonnable à cet égard, les dispositions attaquées ne feraient aucune distinction entre un arrêt au café pendant une excursion de loisir et un arrêt au café sur le chemin du travail.
A.18.1.23. En ce qui concerne le seul décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021, les parties requérantes soutiennent en outre que celui-ci viole les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu’il rend l’utilisation du CST obligatoire pour les visiteurs qui se rendent à l’intérieur des établissements horeca et des centres de fitness, et non pour les visiteurs d’autres centres sportifs, de foires, de congrès et d’installations relevant des secteurs culturel, associatif et festif. Selon elles, la pratique de certaines activités non visées par cette obligation ne permet pas de respecter la distanciation sociale ni de porter un masque, alors que cette impossibilité est l’argument invoqué par le législateur décrétal pour justifier l’obligation de présenter le CST. Cette différence de traitement n’est donc pas raisonnablement justifiée.
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Les parties requérantes soutiennent du reste que certains restaurateurs dotés des compétences techniques nécessaires sur les sites Web parviennent à contourner l’obligation d’utilisation du CST, ce qui est discriminatoire par rapport à ceux qui n’ont pas les connaissances nécessaires pour ce faire.
A.18.2. Les parties requérantes prennent un deuxième moyen, qu’elles qualifient de « premier nouveau moyen », de la violation de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme.
Selon les parties requérantes, l’utilisation du CST conduit à un traitement dégradant au sens de cette disposition conventionnelle, dans la mesure où elle les incite à se faire vacciner contre leur volonté ou leur conscience, à leurs propres risques. Les parties requérantes subiraient également un traitement dégradant en ce que l’utilisation du CST les empêche de se rendre à l’intérieur des établissements horeca. Les parties requérantes demandent à titre accessoire à la Cour d’annuler et de suspendre les dispositions attaquées en ce qu’elles ne prévoient pas des garanties adéquates en ce qui concerne l’indemnisation du dommage qui pourrait résulter d’une vaccination contre la COVID-19.
A.18.3. Les parties requérantes prennent un troisième moyen, qu’elles qualifient de « deuxième nouveau moyen », de la violation des articles 10, 11, 16, 22 et 23 de la Constitution, lus en combinaison ou non avec les articles 1er, 3, 8 et 14 de la Convention européenne des droits de l’homme, avec l’article 1er du Premier Protocole additionnel à cette Convention, avec l’article 2 du Protocole n° 4 à la même Convention, avec le préambule et l’article 10, paragraphe 1, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et avec le droit à la dignité humaine.
Selon les parties requérantes, les dispositions attaquées, en particulier l’article 5 du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021, créent une différence de traitement non raisonnablement justifiée entre différentes catégories de personnes non vaccinées contre la COVID-19, selon qu’elles souhaitent se rendre dans un établissement horeca ou dans un centre de fitness, ou prendre le train, ou se rendre dans un club de lutte. Les parties requérantes déduisent de l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme du 8 avril 2021 en cause de Vavřička e.a. c. République tchèque, précité, que, lorsqu’une vaccination n’est pas légalement obligatoire, la non-
vaccination ne peut pas avoir des effets préjudiciables, comme celui de priver les personnes non vaccinées de l’accès à certaines infrastructures. En outre, le test PCR et le test antigénique sont chers, de sorte que les personnes aux revenus modestes qui souhaitent obtenir un certificat de test sont plus durement touchées, d’autant qu’un tel certificat ne peut être obtenu utilement que par des personnes possédant un smartphone. Les dispositions attaquées ne sont pas assorties de mesures suffisantes pour garantir que les personnes qui ne possèdent pas de smartphone puissent également obtenir et utiliser un CST.
A.18.4. Les parties requérantes prennent un quatrième moyen, qu’elles qualifient de « troisième nouveau moyen », de la violation des articles 10, 11, 12, 14, 22 et 23 de la Constitution, lus en combinaison ou non avec les articles 1er, 3, 7, 8 et 14 de la Convention européenne des droits de l’homme, avec l’article 1er du Premier Protocole additionnel à cette Convention, avec l’article 2 du Protocole n° 4 à la même Convention, avec le préambule et l’article 10, paragraphe 1, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, avec le droit à la dignité humaine, avec le principe de la sécurité juridique, avec le principe de la confiance légitime, avec le principe de la non-rétroactivité des lois, avec l’interdiction de la rétroactivité de la loi pénale, avec le principe de bonne législation et avec le principe du raisonnable.
Les parties requérantes exposent que le décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 a été publié le jour même au Moniteur belge et qu’il est entré en vigueur deux jours plus tard, à savoir le 1er novembre 2021, et que l’utilisation du CST était donc obligatoire à partir de cette date. L’entrée en vigueur immédiate du décret a, selon les parties requérantes, créé une différence de traitement entre différentes catégories d’habitants de la Région flamande, selon qu’ils disposaient de moyens financiers suffisants pour voyager à l’étranger et s’étaient déjà fait vacciner avant leur voyage, ainsi qu’entre les habitants de la Région flamande qui ne s’étaient pas fait vacciner et les habitants des Pays-Bas ou de la France qui s’étaient déjà fait vacciner auparavant à la suite de la réglementation en vigueur dans ces pays. L’absence d’un régime transitoire méconnaît en outre les attentes légitimes des personnes non vaccinées, sans qu’il existe un motif impérieux d’intérêt général pour le justifier. En outre, le décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 est en réalité rétroactif, selon les parties requérantes, en ce qu’il leur fait subir des inconvénients résultant de leur choix de ne pas se faire vacciner, alors qu’elles avaient fait ce choix avant l’entrée en vigueur de ce décret. Le décret du 29 octobre 2021 peut également conduire à infliger des amendes à des personnes non vaccinées qui se rendent dans un établissement horeca, ce qui équivaudrait à
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instaurer une sanction pénale avec effet rétroactif. Enfin, les parties requérantes relèvent que la possibilité de se soumettre à un test COVID-19 ne peut pas être considérée comme une alternative valable à la vaccination.
A.18.5. Les parties requérantes prennent un cinquième moyen, qu’elles qualifient de « quatrième nouveau moyen », de la violation des articles 10, 11, 22 et 23 de la Constitution, lus en combinaison ou non avec les articles 1er, 2, 3, 8 et 14 de la Convention européenne des droits de l’homme.
Selon les parties requérantes, ces dispositions sont violées dans la mesure où les actes attaqués n’énoncent pas un régime analogue à celui qui est prévu à l’article 11 des lois sur le Conseil d’État, coordonnées le 12 janvier 1973. De ce fait, les personnes qui doivent se faire vacciner en vertu d’une loi formelle ne disposent pas des mêmes possibilités d’indemnisation que les personnes qui doivent se faire vacciner en vertu d’un arrêté royal.
A.19.1. Dans leurs mémoires pratiquement identiques, les autorités institutionnelles soutiennent, en préambule, que le contenu de la requête dans l’affaire n° 7743 est, en ce qui concerne le moyen unique, quasiment identique à celui de la requête dans l’affaire n° 7666, qui a été introduite par les mêmes parties requérantes. Les soi-disant nouveaux moyens dans la requête dans l’affaire n° 7743 ne contiennent pas d’éléments entièrement nouveaux, mais reprennent les points de vue développés dans le cadre de la précédente requête. Les autorités institutionnelles réfutent ces points de vue dans les branches du moyen unique où ils sont le mieux adaptés.
Les autorités institutionnelles allèguent ensuite que le moyen unique est irrecevable en ce qu’il est pris de la violation de normes qui ne figurent pas à l’article 1er de la loi spéciale du 6 janvier 1989.
A.19.2. En ce qui concerne la première branche du premier moyen, les autorités institutionnelles affirment que les accords de coopération du 14 juillet 2021 et du 27 septembre 2021 n’imposent une obligation vaccinale ni explicitement ni implicitement. Les citoyens qui ne souhaitent pas se faire vacciner peuvent toujours obtenir un CST valable sur la base d’un certificat de rétablissement ou d’un certificat de test. Il n’est aussi nullement question d’effets disproportionnés au regard des objectifs visés, dès lors que l’accès tant aux vaccins qu’aux tests est suffisamment général et aisé.
A.19.3. En ce qui concerne la deuxième branche du premier moyen, les autorités institutionnelles soutiennent que les différents accords de coopération conclus entre l’autorité fédérale et les entités fédérées concernées quant au dépistage et au traçage, à l’application CoronAlert, à la stratégie de vaccination, au certificat COVID numérique de l’UE et au CST témoignent tous d’un respect du libre choix du citoyen ainsi que de l’égalité de traitement qui y est liée.
A.19.4. En ce qui concerne la troisième branche du premier moyen, les autorités institutionnelles font valoir que l’argument selon lequel les établissements horeca sont plus essentiels que les écoles de danse parce qu’ils disposent d’installations sanitaires ne tient pas. En effet, les écoles de danse aussi sont normalement pourvues des installations sanitaires nécessaires. Les autorités institutionnelles soulignent en outre que les écoles de danse organisent des activités éducatives et qu’elles ne peuvent pas, pour cette raison, être soumises au CST. En effet, le droit des enfants à l’enseignement et à l’épanouissement est, dans tous les domaines, considéré comme essentiel par les parties défenderesses, en tout cas plus essentiel qu’une visite occasionnelle dans un établissement horeca.
A.19.5. En ce qui concerne la quatrième branche du premier moyen, les autorités institutionnelles allèguent que l’article 13 de l’accord de coopération du 14 juillet 2021 détermine très clairement par quelles personnes le CST peut être lu. Les personnes qui procèdent à la lecture du CST à des fins qui ne sont pas prévues par l’accord de coopération encourent des sanctions de droit commun, ainsi que des sanctions pénales. Par conséquent, l’affirmation des parties requérantes selon laquelle la catégorie des personnes pouvant lire le CST n’est pas limitée, est erronée.
A.19.6. En ce qui concerne la cinquième branche du premier moyen, les autorités institutionnelles soutiennent que les parties requérantes semblent comparer, d’une part, les personnes non vaccinées, qui doivent subir un test Covid-19 pour accéder à certains lieux et à certaines activités, et, d’autre part, les autres personnes, qui ne doivent pas se faire tester pour accéder à certains lieux et à certaines activités parce qu’elles disposent d’un certificat de vaccination ou de rétablissement. Les autorités institutionnelles soulignent que la législation attaquée s’applique à tout le monde de la même manière. Toute personne souhaitant accéder à un lieu où le CST est obligatoire peut choisir tout à fait librement de se faire vacciner, d’obtenir un certificat de rétablissement ou de se faire tester. La distinction opérée repose sur un critère suffisamment objectif, à savoir la présence d’anticorps, de cellules immunitaires et de globules blancs, qui sont produits grâce à la vaccination ou par le rétablissement après
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une infection au coronavirus. Les dispositions attaquées poursuivent par ailleurs des objectifs légitimes, à savoir lutter contre la propagation du coronavirus, éviter la saturation des hôpitaux, relancer l’économie et permettre à la population de retrouver une vie sociale. Enfin, il n’est nullement question d’effets disproportionnés au regard de ces objectifs, dès lors que l’accès tant aux vaccins qu’aux tests est suffisamment général et aisé du point de vue financier comme du point de vue organisationnel. Par ailleurs, le CST n’est pas requis sur la terrasse d’un établissement horeca. Chacun peut entretenir des contacts sociaux au café ou au restaurant sans posséder de CST
et peut, dans ce cadre, se rendre à l’intérieur de l’établissement pour aller payer et pour utiliser les installations sanitaires. Ainsi, tant qu’aucun confinement général n’est déclaré, les personnes non vaccinées ne sont pas obligées d’effectuer un test pour pouvoir entretenir des contacts sociaux. Elles ne subissent donc pas une atteinte disproportionnée ou inéquitable à leur patrimoine ou à leurs droits de propriété comparativement aux autres personnes ou au regard des exigences de l’intérêt général.
A.19.7. En ce qui concerne la sixième branche du premier moyen, les autorités institutionnelles soutiennent que les dispositions attaquées tiennent compte de la situation des personnes qui ne peuvent pas recevoir le vaccin en raison de contre-indications médicales. Elles ont en effet la possibilité d’obtenir tout à fait gratuitement un certificat de test qui peut faire office de CST. Ce dernier est donc délibérément rendu plus accessible aux personnes non vaccinées qui ne peuvent pas se faire vacciner pour des raisons médicales, de sorte qu’il est tenu compte des contraintes auxquelles ces personnes seraient confrontées.
A.19.8. En ce qui concerne la septième branche, les autorités institutionnelles soutiennent que le droit au respect de la vie privée n’exige pas que toute mesure susceptible d’affecter la vie privée doive être assortie d’une procédure spécifique, distincte, permettant d’attaquer la mesure en question. Toute personne a par ailleurs accès au juge, en ce sens qu’elle peut attaquer la législation concernée devant la Cour constitutionnelle.
En tout état de cause, les autorités institutionnelles font valoir que le droit au respect de la vie privée n’est pas absolu. La législation attaquée est suffisamment précise et poursuit les objectifs légitimes mentionnés en A.3.6
qui répondent à un besoin social impérieux de mettre fin le plus rapidement possible à la crise sanitaire actuelle et de permettre que, entretemps, la situation soit aussi supportable que possible. La législation attaquée est par ailleurs proportionnée au regard des objectifs poursuivis.
A.19.9. En ce qui concerne la huitième branche, les autorités institutionnelles soutiennent que tant les personnes possédant un CST que les personnes n’en possédant pas ont toujours accès aux installations sanitaires.
Par conséquent, nul ne sera obligé de faire ses besoins dans la rue ou de se souiller, et l’on n’assistera pas à des situations humiliantes, contraires à la dignité humaine ou nuisant à l’intégrité.
A.19.10. En ce qui concerne la neuvième branche, les autorités institutionnelles soutiennent que ni le CST
ni la carte d’identité ne mentionnent une adresse et que cette dernière n’est donc pas portée à la connaissance de personnes privées. Elles soulignent en outre que les personnes chargées de contrôler le CST ne peuvent interdire l’accès aux personnes ne possédant pas de CST qu’à un lieu déterminé ou à une activité déterminée. Ce faisant, les personnes chargées de contrôler le CST ne peuvent en aucune façon recourir à la violence. En cas de problème ou de conflit, elles doivent faire appel au personnel de sécurité ou à la police.
A.19.11. Selon les autorités institutionnelles, la dixième branche est irrecevable, en ce qu’elle est prise de la violation de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, dès lors que les parties requérantes n’exposent pas en quoi cette disposition serait violée.
Cette disposition ne serait en tout cas pas violée. En effet, les mesures prises ne correspondraient pas à la notion de « peine » au sens de l’article 7 de la Convention européenne des droits de l’homme. Un « signal rouge »
ou un « accès interdit » sur le CST ne serait pas la conséquence d’un fait punissable, mais uniquement une mesure de prévention visant à éviter et à limiter la propagation du coronavirus. En outre, les obligations découlant des dispositions attaquées constitueraient des mesures administratives préventives. Il ne s’agirait dès lors nullement d’un litige de droit civil ou de droit pénal au sens de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme.
A.19.12. En ce qui concerne la onzième branche, les autorités institutionnelles rappellent qu’il n’existe aujourd’hui aucune obligation vaccinale dans le contexte de la propagation du coronavirus SARS-CoV-2 en Belgique. Dans la mesure où les parties requérantes contestent la stratégie de vaccination, les autorités institutionnelles soutiennent que la stratégie suivie ne constitue pas un élément des normes attaquées. Par ailleurs, les autorités institutionnelles n’aperçoivent pas en quoi les parties requérantes pourraient invoquer le principe
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fraus omnia corrumpit dans le cadre de l’actuel contentieux objectif. Elles estiment en tout état de cause qu’aucune des conditions de cet adage ne serait remplie dans l’affaire présentement examinée.
A.19.13. En ce qui concerne la douzième branche, les autorités institutionnelles affirment que l’application requise peut être téléchargée sur n’importe quel smartphone, et donc également sur le smartphone des adolescents âgés de douze à quinze ans. La seule chose que ces adolescents ne peuvent pas faire eux-mêmes, c’est générer le certificat COVID numérique de l’UE à partir de l’application. Leurs parents peuvent cependant le faire pour eux.
Ensuite, il ressort d’instruments du droit de la santé que l’accès aux données de santé des adolescents âgés de douze à quinze ans doit s’effectuer par l’intermédiaire de leurs parents. Ce grief n’a donc rien à voir avec le CST.
Enfin, les adolescents de douze à quinze ans ne disposant pas d’un smartphone peuvent obtenir une version papier du CST. Il ne serait donc nullement question d’une discrimination des adolescents de douze à quinze ans, puisqu’ils peuvent facilement obtenir les certificats nécessaires, et ce, qu’ils disposent d’un smartphone ou non.
A.19.14. En ce qui concerne la treizième branche, les autorités institutionnelles soutiennent que l’utilisation de l’application COVIDScan ne nécessite que peu voire aucune connaissance technique et que le CST peut être généré de manière très simple à partir de cette application. Par ailleurs, la majorité de la population dispose aujourd’hui d’un smartphone, et les personnes qui n’en disposent pas peuvent facilement obtenir une version papier du CST.
A.19.15. En ce qui concerne la quatorzième branche, les autorités institutionnelles renvoient à leur défense relative à la onzième branche du moyen.
A.19.16. En ce qui concerne la quinzième branche, les autorités institutionnelles allèguent que les parties requérantes font une lecture erronée de l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme du 8 avril 2021 en cause de Vavřička e.a. c. République tchèque, précité. Au paragraphe 298 de cet arrêt, il est justement établi qu’il ne saurait être affirmé que le régime actuel pâtit d’un important défaut de transparence. Les parties requérantes omettent de démontrer que les normes attaquées seraient contraires à cette jurisprudence.
A.19.17. En ce qui concerne la seizième branche, les autorités institutionnelles contestent le fait que le système des codes QR n’offrirait aucune garantie que l’autorité publique ne se mettra pas à contrôler les déplacements de chacun ou les clients accueillis par chacun. Les objectifs de l’utilisation du CST sont en effet énumérés de manière détaillée et limitative dans les accords de coopération du 14 juillet 2021 et du 27 septembre 2021. Eu égard au principe de la limitation des finalités inscrit à l’article 5, paragraphe 1, b), du RGPD, il est donc interdit d’utiliser des données à des fins autres que celles prévues par la loi.
A.19.18. En ce qui concerne le dix-septième moyen, les autorités institutionnelles soutiennent que la prise de température proposée par les parties requérantes mènerait dans de très nombreux cas à un traitement de données à caractère personnel. Ce serait le cas pour la prise de température dans des établissements horeca ou lors d’événements de masse, qui sont des lieux pour lesquels des listes de présence sont disponibles, de sorte qu’il serait possible de relier une personne précise à une température précise. Ce traitement des données à caractère personnel serait beaucoup plus intrusif que le traitement des données à caractère personnel dans le cadre de l’utilisation du CST.
A.19.19. En ce qui concerne la dix-huitième branche, les autorités institutionnelles considèrent que la Cour n’est pas compétente pour contrôler les normes attaquées au regard du droit à la sécurité, lequel n’est pas ancré dans la Constitution.
En ce qui concerne la violation alléguée du principe d’égalité, les autorités institutionnelles estiment que les parties requérantes omettent d’exposer clairement quelle différence de traitement discriminatoire il y aurait entre quelles catégories de personnes comparables. Dans la mesure où une comparaison est effectuée entre les personnes qui commettent un homicide commandé par la nécessité actuelle de légitime défense de soi-même ou d’autrui, les autorités institutionnelles allèguent que ces catégories de personnes sont fondamentalement différentes et que, partant, il est justifié qu’elles soient traitées différemment. La différence de traitement est en tout état de cause raisonnablement justifiée au regard de l’objectif susmentionné que poursuit le législateur en imposant la législation attaquée.
A.19.20. En ce qui concerne la dix-neuvième branche, les autorités institutionnelles contestent le fait que les personnes qui refusent le vaccin contre la polio seraient moins lourdement sanctionnées que les personnes qui ne se font pas vacciner contre la COVID-19. Les personnes qui refusent de se faire vacciner contre la polio risquent en effet une amende de 800 euros au maximum et une peine d’emprisonnement d’un mois au maximum. Le vaccin
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contre la COVID-19 n’est, lui, pas obligatoire, et aucune mesure pénale de privation de liberté ne peut être prise contre les personnes qui le refusent. La seule différence de traitement repose sur un critère objectif, à savoir la différence du nombre de cas de contamination, le taux de vaccination, la présence sur le territoire belge, la présence géographique dans le monde et la croissance économique. La différence de traitement est raisonnablement justifiée au regard de l’objectif susmentionné que poursuit le législateur en imposant la législation attaquée.
A.19.21. En ce qui concerne la vingtième branche, les autorités institutionnelles n’aperçoivent pas en quoi la liberté de mouvement est limitée au motif qu’une personne ne pourrait pas s’arrêter dans un établissement horeca. Le CST ne doit pas être présenté si l’on reste moins de quinze minutes dans l’établissement. Par ailleurs, il n’est pas non plus obligatoire de le présenter pour utiliser les installations sanitaires d’une station-service, par exemple. Pour le surplus, les autorités institutionnelles renvoient à leur réponse relative à la huitième branche du premier moyen.
A.19.22. En ce qui concerne la vingt et unième branche, les autorités institutionnelles soulignent qu’il ne s’agit pas de punir les personnes non vaccinées, dès lors que le CST peut également être obtenu sur la base d’un certificat de test et de rétablissement. Par ailleurs, il est clairement précisé dans l’accord de coopération du 27 septembre 2021 que le CST ne peut pas être utilisé dans le contexte professionnel, pas même dans les restaurants d’entreprise. La distinction qu’il y a lieu d’effectuer, selon les parties requérantes, entre les visiteurs qui se rendent dans un établissement horeca à des fins professionnelles et ceux qui s’y rendent à des fins de loisir entraînerait tout d’abord une grave violation du droit au respect de la vie privée des visiteurs d’un établissement horeca, dès lors que le personnel devrait alors être informé de la raison de la visite. Cette distinction entraînerait également un risque épidémiologique injustifié. Les personnes pouvant pénétrer dans l’établissement horeca sans CST
pourraient effectivement se mettre en danger elles-mêmes et mettre en danger les autres visiteurs.
A.19.23. En ce qui concerne la branche complémentaire du premier moyen, les autorités institutionnelles allèguent qu’aucune différence de traitement n’est créée entre les exploitants d’un établissement horeca selon qu’ils peuvent contourner ou non la législation attaquée, dès lors qu’ils ont la possibilité d’organiser des événements privés et d’appliquer un système de billetterie. Indépendamment de l’application d’un système de billetterie ou de réservation, ces établissements demeurent des établissements horeca où les visiteurs doivent présenter le CST. En tout état de cause, une norme n’est pas inconstitutionnelle au seul motif qu’elle est violée.
A.19.24. À titre subsidiaire, les autorités institutionnelles soutiennent que les parties requérantes ne visent que les dispositions de l’accord de coopération du 27 septembre 2021, et encore, uniquement les dispositions qui prévoient l’utilisation du CST dans les matières et installations annexes visées à l’article 1er, § 1er, 21°, de cet accord de coopération. En tout état de cause, l’annulation devrait être limitée à ces dispositions.
À titre infiniment subsidiaire, à supposer que les accords de coopération du 14 juillet 2021 et du 27 septembre 2021 soient annulés dans leur intégralité, les autorités institutionnelles soulignent que la Belgique ne sera plus en mesure de satisfaire aux normes européennes qui lui sont applicables. Elles demandent, en cas d’annulation par la Cour des dispositions attaquées, le maintien des effets pour la période allant du 16 juin 2021 jusqu’à l’expiration du règlement (UE) 2021/953, ou à tout le moins jusqu’à l’adoption et l’approbation d’un nouvel accord de coopération, sans préjudice du maintien des effets des mesures prévues par l’accord de coopération, y compris pour l’avenir, conformément à l’article 33 de l’accord de coopération du 14 juillet 2021.
-B-
Quant aux dispositions attaquées et à leur contexte
B.1.1. Les parties requérantes dans les affaires nos 7668, 7669, 7671, 7672, 7676, 7677, 7678, 7681, 7682, 7687, 7691, 7692 et 7694 demandent l’annulation du décret de la
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Communauté flamande du 29 octobre 2021 « relatif au COVID Safe Ticket » (ci-après : le décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021).
B.1.2. Les parties requérantes dans l’affaire n° 7739 demandent l’annulation :
- des actes portant assentiment à l’accord de coopération du 14 juillet 2021 entre l’État fédéral, la Communauté flamande, la Communauté française, la Communauté germanophone, la Commission communautaire commune, la Région wallonne et la Commission communautaire française « concernant le traitement des données liées au certificat COVID
numérique de l’UE et au COVID Safe Ticket, le PLF et le traitement des données à caractère personnel des travailleurs salariés et des travailleurs indépendants vivant ou résidant à l’étranger qui effectuent des activités en Belgique » (ci-après : l’accord de coopération du 14 juillet 2021);
- des actes portant assentiment à l’accord de coopération du 27 septembre 2021 « visant à la modification de l’accord de coopération du 14 juillet 2021 entre l’État fédéral, la Communauté flamande, la Communauté française, la Communauté germanophone, la Commission communautaire commune, la Région wallonne et la Commission communautaire française concernant le traitement des données liées au certificat COVID numérique de l’UE et au COVID Safe Ticket, le PLF et le traitement des données à caractère personnel des travailleurs salariés et des travailleurs indépendants vivant ou résidant à l’étranger qui effectuent des activités en Belgique » (ci-après : l’accord de coopération du 27 septembre 2021);
- des actes portant assentiment à l’accord de coopération du 28 octobre 2021 « visant à la modification de l’accord de coopération du 14 juillet 2021 entre l’État fédéral, la Communauté flamande, la Communauté française, la Communauté germanophone, la Commission communautaire commune, la Région wallonne et la Commission communautaire française concernant le traitement des données liées au certificat COVID numérique de l’UE et au COVID Safe Ticket, le PLF et le traitement des données à caractère personnel des travailleurs salariés et des travailleurs indépendants vivant ou résidant à l’étranger qui effectuent des activités en Belgique » (ci-après : l’accord de coopération du 28 octobre 2021);
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- du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021;
- du décret de la Région wallonne du 21 octobre 2021 « relatif à l’usage du COVID Safe Ticket et à l’obligation du port du masque » (ci-après : le décret de la Région wallonne du 21 octobre 2021) et du décret de la Région wallonne du 24 novembre 2021 « modifiant les articles 2, 5 et 8 du décret du 21 octobre 2021 relatif à l’usage du COVID Safe Ticket et à l’obligation du port du masque et y insérant un article 10/1 » (ci-après : le décret de la Région wallonne du 24 novembre 2021);
- de l’ordonnance de la Commission communautaire commune du 14 octobre 2021
« relative à l’extension du COVID Safe Ticket en cas de nécessité découlant d’une situation épidémiologique particulière » (ci-après : l’ordonnance du 14 octobre 2021) et de l’ordonnance de la Commission communautaire commune du 14 janvier 2022 « prolongeant le champ d’application temporel de l’ordonnance du 14 octobre 2021 relative à l’extension du COVID
Safe Ticket en cas de nécessité découlant d’une situation épidémiologique particulière » (ci-
après : l’ordonnance du 14 janvier 2022).
B.1.3. Les parties requérantes dans l’affaire n° 7743 demandent l’annulation des actes portant assentiment à l’accord de coopération du 27 septembre 2021, des actes portant assentiment à l’accord de coopération du 28 octobre 2021 et du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021.
B.2. Le 11 mars 2020, l’Organisation mondiale de la santé a qualifié de pandémie l’explosion du nombre de contaminations au coronavirus SARS-CoV-2. Depuis mars 2020, la Belgique aussi est confrontée à cette pandémie et à ses conséquences. Le coronavirus SARS-
CoV-2 est un virus très contagieux, qui cause la COVID-19, maladie qui peut entraîner de sérieux problèmes médicaux, voire la mort, principalement chez les personnes âgées et chez les personnes présentant des comorbidités (Doc. parl., Parlement flamand, 2019-2020, n° 415/1, p. 2; Doc. parl., Parlement flamand, 2020-2021, n° 488/1, p. 2; Doc. parl., Assemblée réunie de la Commission communautaire commune, 2019-2020, B-41/1, p. 1).
Dans le cadre de cette crise sanitaire et pour lutter contre la propagation de la COVID-19, le Conseil national de sécurité, d’abord, qui regroupe des représentants de l’autorité fédérale et
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des entités fédérées, puis le Comité de concertation ont été chargés de prendre des mesures concertées afin de freiner cette propagation (Doc. parl., Parlement flamand, 2019-2020, n° 415/1, p. 2; Doc. parl., Parlement flamand, 2020-2021, n° 488/1, p. 2).
B.3.1. Les lois, décrets et ordonnances attaqués s’inscrivent dans le cadre visant à compléter et à actualiser l’arsenal des mesures que les différentes autorités ont prises pour lutter contre la pandémie de COVID-19 et contre la propagation du coronavirus SARS-CoV-2.
B.3.2. Ainsi, lors de la phase initiale de la pandémie, des mesures strictes ont été prises afin d’enrayer la transmission du coronavirus SARS-CoV-2, parmi lesquelles l’interdiction de tous les contacts physiques entre personnes et des voyages (par exemple, maintien d’une distance d’un mètre et demi, interdiction de rassemblements, interdiction de déplacements non essentiels, etc.). À partir de mai 2020, le nombre d’admissions en hôpital et de décès a eu tendance à baisser et la pandémie est entrée dans une nouvelle phase, qui a nécessité la prise d’autres mesures de lutte contre la propagation du virus et de la COVID-19. Ces mesures concernaient en particulier le traçage et l’accompagnement des personnes (présumées) infectées et de leurs contacts.
B.3.3. En juillet 2020, compte tenu de la nouvelle phase de la crise de COVID-19, où, après une période dite de « lockdown light », les restrictions des contacts physiques entre personnes ont été assouplies et les voyages étaient à nouveau possibles, de nouvelles mesures ont été prises pour lutter contre les risques de propagation liés à ces assouplissements.
B.4.1 Le règlement (UE) 2021/953 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2021
« relatif à un cadre pour la délivrance, la vérification et l’acceptation de certificats COVID-19
interopérables de vaccination, de test et de rétablissement (certificat COVID numérique de l’UE) afin de faciliter la libre circulation pendant la pandémie de COVID-19 » (ci-après : le règlement (UE) 2021/953) prévoit, aux termes de son article 1er, premier alinéa, un cadre pour la délivrance, la vérification et l’acceptation du certificat COVID numérique de l’UE, à savoir un certificat interopérable contenant des informations sur la vaccination, les résultats des tests ou le rétablissement de son titulaire, délivré dans le contexte de la pandémie de COVID-19, et ce, aux fins de faciliter l’exercice, par les titulaires de tels certificats, du droit à la libre circulation pendant la pandémie de COVID-19.
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Le certificat COVID numérique de l’UE permet la délivrance, la vérification et l’acceptation transfrontières de l’un des certificats suivants :
- un certificat de vaccination : un certificat confirmant que le titulaire a reçu un vaccin contre la COVID-19 dans l’État membre qui délivre le certificat;
- un certificat de test : un certificat confirmant que le titulaire a été soumis à un test TAAN
ou à un test rapide de détection d’antigènes, et indiquant le type de test, la date à laquelle il a été effectué et le résultat du test;
- un certificat de rétablissement : un certificat confirmant que, à la suite du résultat positif d’un test TAAN, le titulaire s’est rétabli d’une infection par le coronavirus SARS-CoV-2
(article 3 du règlement (UE) 2021/953).
Le règlement (UE) 2021/953 prévoit la base juridique du traitement des données à caractère personnel nécessaires à la délivrance de ces certificats ainsi que du traitement des informations nécessaires pour vérifier et confirmer l’authenticité et la validité de ces certificats (article 1er, deuxième alinéa, du règlement (UE) 2021/953).
En vertu de son article 17, le règlement (UE) 2021/953 s’applique du 1er juillet 2021 au 30 juin 2022.
B.4.2. L’accord de coopération du 14 juillet 2021 définit une base juridique pour l’utilisation nationale du certificat COVID numérique de l’UE. Aux termes de son article 2, § 1er, cet accord constitue le fondement juridique pour le traitement des données à caractère personnel nécessaires à l’établissement et à la délivrance du certificat COVID numérique de l’UE, ainsi qu’à la génération du COVID Safe Ticket (ci-après : le CST) basée sur le certificat COVID numérique de l’UE.
Selon l’exposé général de cet accord de coopération, celui-ci procède de la nécessité « de limiter la propagation du coronavirus COVID-19 » mais également « de tenir compte de la reprise des activités des citoyens telles qu’elles étaient avant la pandémie de COVID-19 »
(Moniteur belge, 23 juillet 2021, troisième édition, p. 76710).
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B.4.3. L’accord de coopération du 14 juillet 2021 définit le CST comme le résultat de l’analyse du certificat COVID numérique de l’UE au moyen de l’application COVIDScan, afin de régler l’accès à certains lieux ou à certains événements dans le contexte de la pandémie de coronavirus COVID-19 (article 1er, § 1er, 4°).
B.4.4. Dans sa version initiale, l’accord de coopération du 14 juillet 2021 prévoyait l’utilisation du CST pour régler l’accès à un événement de masse, d’une part, et à une expérience et projet pilote, d’autre part, (articles 1er, § 1er, 4°, 11° et 12°, 12 et 13), et ce, jusqu’au 30 septembre 2021 (article 33, § 1er, 3°).
B.5.1. L’accord de coopération du 27 septembre 2021 prolonge l’applicabilité des dispositions relatives à l’utilisation du CST pour des événements de masse et des projets pilotes jusqu’au 31 octobre 2021, tout en l’étendant aux dancings et discothèques.
L’exposé général de l’accord de coopération du 27 septembre 2021 mentionne, en la matière :
« L’accord de coopération du 14 juillet 2021 a introduit l’utilisation du COVID Safe Ticket pour les évènements de masse et les projets pilotes et a également stipulé que cette mesure ne s’appliquait que jusqu’au 30 septembre 2021. Compte tenu du fait que, d’une part, la situation épidémiologique en Belgique reste précaire et que, dans certaines parties du pays, les infections par le coronavirus COVID-19 sont à nouveau en hausse, et, d’autre part, qu’une résurgence du virus ne peut jamais être exclue, le COVID Safe Ticket pourrait à ce moment-là être un instrument utile pour éviter que toute une série d’activités ne doivent à nouveau être restreintes ou que des secteurs ne doivent être fermés. En effet, le COVID Safe Ticket s’est avéré et continue d’être un outil important pour faciliter la relance économique et sociale de la société.
L’alternative dans laquelle notre société devrait retomber dans un nouveau confinement doit être évitée autant que possible. L’utilisation du COVID Safe Ticket a pour but de permettre la sortie de la crise et d’éviter autant que possible les fermetures. Il est donc jugé nécessaire d’autoriser l’utilisation du COVID Safe Ticket pour une période allant au-delà du 30 septembre 2021. En ce sens, l’applicabilité des articles liés au cadre juridique du COVID Safe Ticket ou expliquant ce cadre juridique est prolongée du 30 septembre 2021 jusqu’au 31 octobre 2021 »
(Moniteur belge, 1er octobre 2021, deuxième édition, p. 104680).
« Compte tenu de l’activité similaire et des risques d’une plus grande propagation du coronavirus COVID-19, les dancings et discothèques seront soumis aux mêmes mesures que les événements de masse et les expériences et projets pilotes à partir du 1er octobre 2021 »
(ibid., p. 104684)
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Par ailleurs, l’accord de coopération du 27 septembre 2021 prévoit la faculté pour les entités fédérées de permettre ou d’imposer l’utilisation du CST, du 1er octobre 2021 jusqu’au 30 juin 2022 au plus tard, en ce qui concerne l’accès aux « établissements et facilités pour lesquels l’utilisation du CST peut être appliquée », visés à l’article 1er, 21°, à savoir les établissements horeca, les centres de sport et de fitness, les foires commerciales et congrès, les établissements relevant des secteurs culturel, festif et récréatif et les établissements de soins résidentiels pour personnes vulnérables, ainsi que, du 1er novembre 2021 jusqu’au 30 juin 2022
au plus tard, l’accès aux événements de masse, aux expériences et projets pilotes et aux dancings et discothèques (articles 1er, 21°, et 2bis, §§ 1er et 2, de l’accord de coopération du 14 juillet 2021, tels qu’ils ont été insérés par l’accord de coopération du 27 septembre 2021).
L’entité fédérée compétente ne peut faire usage de cette faculté que si les circonstances épidémiologiques locales l’exigent et qu’elle adopte un décret ou une ordonnance à cet effet, qui précise une durée maximale de validité pour les mesures et modalités qu’il contient. Les circonstances épidémiologiques locales sont évaluées préalablement par le Risk Assessment Group (RAG), qui, dans un délai de cinq jours ouvrables à compter de la réception de la demande, rend un avis non contraignant (articles 2bis, §§ 1er et 2, 13bis et 13ter, de l’accord de coopération du 14 juillet 2021, tels qu’ils ont été insérés par l’accord de coopération du 27 septembre 2021).
L’exposé général de l’accord de coopération du 27 septembre 2021 mentionne, en la matière :
« [Et avec] la fin de la phase fédérale en vue, les entités fédérées demandent que le COVID
Safe Ticket soit utilisé dans les ou aux endroits où la transmission et/ou la super propagation sont les plus probables, comme indiqué dans les rapports du GEMS des 18 et 31 août 2021, établissant une cascade de secteurs, les définissant en partant du risque élevé pour arriver au risque faible de la propagation du coronavirus COVID-19. Il s’agit de lieux où les règles de base (ventilation optimale, distance, masques, contacts limités) ne peuvent ou ne pourront pas être pleinement respectées en raison de la nature de l’environnement/activité : vie nocturne, événements de masse, projets pilotes, horeca, centres de sport et de fitness, mais aussi les établissements relevant des secteurs culturel, festif et récréatif. A la demande des entités fédérées, il sera donc également possible - si les circonstances épidémiologiques le justifient sur le territoire des entités fédérées respectives - de rendre les articles relatifs au cadre juridique du COVID Safe Ticket ou fixant ce cadre juridique applicables à partir du 1er novembre 2021
si une entité fédérée prévoit cette possibilité dans un décret ou une ordonnance pour une période
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limitée, recommandant fortement de la limiter à un maximum de 3 mois » (Moniteur belge, 1er octobre 2021, deuxième édition, p. 104680-104681).
« On peut également observer que, la campagne de vaccination étant en cours, les conditions épidémiologiques locales divergent entre les différentes entités fédérées. Par exemple, une couverture vaccinale plus faible ou un nombre relativement plus élevé d’admissions à l’hôpital dans une entité fédérée. Ces différences épidémiologiques peuvent nécessiter ou permettre une extension de l’utilisation du COVID Safe Ticket pour une communauté ou une région donnée, alors que pour d’autres communautés et régions, un tel besoin n’existe pas ou ne peut être justifié par des circonstances épidémiologiques.
Dans le premier cas, il doit donc être possible pour une entité fédérée, dans le cadre de son autonomie, d’activer puis d’appliquer une extension des mesures sur son territoire, dans la mesure où les circonstances épidémiologiques le justifient et après une évaluation de ces circonstances par le [Risk Assessment Group (RAG)].
Cette application diversifiée du COVID Safe Ticket assure également une application proportionnelle de cet instrument. Ce n’est que lorsque la situation épidémiologique le justifie et après une évaluation de ces circonstances par le RAG qu’une région ou une communauté peut activer ces mesures. Après le 31 octobre 2021, le principe de base sera même que le COVID Safe Ticket n’est plus applicable/en vigueur et ne peut donc pas être utilisé, à moins qu’une situation épidémiologique alarmante soit présente dans une certaine région ou communauté et que le RAG y souscrive. De cette façon, l’utilisation est limitée à l’endroit et la période où elle est absolument nécessaire.
Cela permettra une diversification basée sur des paramètres scientifiques objectifs, par exemple en analysant la couverture vaccinale, le nombre d’admissions à l’hôpital et/ou le taux de reproduction par région ou communauté. Une région ou une communauté pourra alors décider elle-même, en fonction de sa situation épidémiologique, tout en respectant et justifiant le principe de proportionnalité, si l’utilisation du COVID Safe Ticket est obligatoire ou non et quel sera le champ d’application du COVID Safe Ticket dans le cadre déterminé par l’accord de coopération du 14 juillet 2021 » (Moniteur belge, 1er octobre 2021, deuxième édition, pp. 104688-104689).
L’article 2bis, § 3, de l’accord de coopération du 14 juillet 2021 prévoit un régime spécifique lorsqu’une situation d’urgence épidémique est déclarée conformément à l’article 3, § 1er, de la loi du 14 août 2021 « relative aux mesures de police administrative lors d’une situation d’urgence épidémique » (ci-après : la loi du 14 août 2021). Dans sa version initiale, tel qu’il a été inséré par l’accord de coopération du 27 septembre 2021, l’article 2bis, § 3, disposait que, dès qu’une situation d’urgence épidémique était déclarée, les articles 2bis, §§ 1er et 2, 13bis et 13ter ne s’appliquaient plus, et que les décrets et ordonnances mis en œuvre par les entités fédérées sur la base de ces dispositions en ce qui concerne l’utilisation du CST ne s’appliquaient plus ou étaient suspendus. Si les parties à l’accord de coopération souhaitent
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utiliser le CST en situation d’urgence épidémique, les modalités d’utilisation de celui-ci dans « les établissements et facilités pour lesquels l’utilisation du [CST] peut être [appliquée] » visés à l’article 1er, 21°, doivent faire l’objet d’un accord de coopération supplémentaire. En ce qui concerne les événements de masse, les expériences et projets pilotes, les dancings et discothèques, les modalités concrètes d’exécution doivent être déterminées, pour autant que ce soit nécessaire, par un arrêté royal ou dans un accord de coopération d’exécution (article 2bis, § 3, de l’accord de coopération du 14 juillet 2021, tel qu’il a été inséré par l’accord de coopération du 27 septembre 2021).
L’exposé général de l’accord de coopération du 27 septembre 2021 indique, en la matière :
« En cas d’application de la loi du 14 août 2021 relative aux mesures de police administrative lors d’une situation d’urgence épidémique, les articles concernant l’utilisation du COVID Safe Ticket par une approche différenciée et pour les secteurs complémentaires (notamment les articles 2bis, §§ 1 et 2, 13bis et 13ter du présent accord de coopération) ne seront plus d’application et seront suspendus. Afin de pouvoir fournir une approche adaptée à la situation épidémiologique du moment, il sera évalué si l’utilisation du COVID Safe Ticket doit être réintroduite pour l’ensemble (ou non) du territoire. Si nécessaire, il convient de préciser que cela n’est possible que pour une période allant jusqu’au 30 juin 2022. En ce sens, l’accord de coopération prévoira les dispositions suivantes :lorsqu’une situation d’urgence épidémique est déclarée et qu’il est ainsi décidé qu’une approche coordonnée de la crise sanitaire au niveau fédéral est nécessaire et, par conséquent, qu’une utilisation différenciée du COVID Safe Ticket n’est plus appropriée, les mesures prises par les entités fédérées individuellement en ce qui concerne l’utilisation du COVID Safe Ticket cesseront de s’appliquer ou seront suspendues.
Par conséquent, les entités fédérées ne pourront plus décider par décret ou ordonnance d’une utilisation différente du COVID Safe Ticket, car ces décrets et ordonnances ne pourront plus être appliqués et/ou seront suspendus dès l’annonce de la situation d’urgence épidémique. La poursuite de l’utilisation du COVID Safe Ticket pendant la situation d’urgence épidémique doit alors être prévue par les parties à l’accord de coopération :
- Par le biais d’un accord de coopération de rang législatif supplémentaire si les parties à l’accord de coopération souhaitent utiliser le COVID Safe Ticket pour les secteurs supplémentaires où le COVID Safe Ticket peut être utilisé; ou
- Par le biais d’un arrêté conformément à l’article 4, § 1 de la loi du 14 août 2021 relative aux mesures de police administrative lors d’une situation d’urgence épidémique ou par le biais d’un accord de coopération d’exécution concernant l’utilisation du COVID Safe Ticket pour les événements de masse, les projets pilotes et les salles de danse et discothèques.
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Si la situation d’urgence épidémique prend fin, les articles relatifs au cadre juridique du COVID Safe Ticket ou définissant ce cadre juridique redeviendront applicables, sauf si les parties à cet accord de coopération en décident explicitement autrement par le biais d’un [nouvel] accord de coopération » (Moniteur belge, 1er octobre 2021, deuxième édition, pp. 104692-104693).
B.5.2. L’accord de coopération du 28 octobre 2021 apporte plusieurs modifications à l’article 2bis, précité, de l’accord de coopération du 27 septembre 2021, dans le but « de pouvoir gérer la situation d’urgence attendue de manière ferme et correcte si la situation d’urgence épidémique est déclarée, conformément à l’article 3, § 1er, de la loi du 14 août 2021 » (Moniteur belge, 29 octobre 2021, deuxième édition, p. 110825).
L’article 2bis, § 3, alinéas 1er et 2, de l’accord de coopération du 14 juillet 2021, tel qu’il a été remplacé par l’accord de coopération du 28 octobre 2021, prévoit que, dès que et seulement tant qu’une situation d’urgence épidémique est déclarée conformément à la loi du 14 août 2021, les entités fédérées ne peuvent plus réglementer l’utilisation du CST pour l’accès aux événements de masse, aux expériences et projets pilotes et aux discothèques et dancings, et que les décrets, ordonnances et instruments d’exécution mis en œuvre en la matière ne s’appliquent plus, dès lors que cela est réglementé par l’accord de coopération du 14 juillet 2021. Les entités fédérées peuvent toutefois prendre ou maintenir des mesures liées à l’utilisation du CST pour l’accès aux événements de masse, aux expériences et projets pilotes et aux dancings et discothèques, pour autant que ces mesures soient plus strictes que les mesures prises en vertu de la loi du 14 août 2021 en vue de prévenir ou de limiter les conséquences de la situation d’urgence épidémique pour la santé publique (article 2bis, § 3, alinéa 4).
L’utilisation du CST pour l’accès aux « établissements et facilités pour lesquels l’utilisation du [CST] peut être [appliquée] » visés à l’article 1er, 21°, demeure toutefois réglementée par les décrets et ordonnances, bien que ces règles ne puissent pas entrer en conflit avec les mesures prises conformément à la loi du 14 août 2021 (article 2bis, § 3, alinéa 3).
L’exposé général renvoie, à titre d’exemple, à une mesure de fermeture ou à un « lockdown »
(Moniteur belge, 29 octobre 2021, deuxième édition, p. 110827).
B.6. L’accord de coopération du 14 juillet 2021, tel qu’il a été modifié par l’accord de coopération du 27 septembre 2021 et par l’accord de coopération du 28 octobre 2021, énumère
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ainsi de manière exhaustive les lieux dont l’accès peut être subordonné à la présentation du CST. Il appartient aux entités fédérées de mettre en œuvre cet accord de coopération et, le cas échéant, de rendre optionnelle ou d’imposer par un décret ou une ordonnance la présentation du CST pour accéder à ces lieux.
B.7.1. La Communauté flamande a mis en œuvre l’accord de coopération du 14 juillet 2021 par le décret du 29 octobre 2021.
En vertu de l’article 3 de ce décret, l’application du CST est autorisée pour les visiteurs âgés d’au moins douze ans et deux mois des établissements de soins résidentiels pour personnes vulnérables, plus précisément des hôpitaux, des centres de soins résidentiels, des centres et hôpitaux de revalidation et des établissements pour personnes handicapées.
En vertu de l’article 4 de ce décret, les organisateurs d’événements publics accessibles à un public d’au moins 200 personnes et de 2 999 personnes maximum lorsqu’ils se déroulent en intérieur et d’au moins 400 personnes et de 4 999 personnes maximum lorsqu’ils se déroulent en extérieur peuvent appliquer le CST pour les visiteurs âgés d’au moins douze ans et deux mois. Dans ce cas, les visiteurs doivent être informés préalablement de la nécessité de présenter un CST pour pouvoir accéder à l’événement et du traitement de leurs données à caractère personnel dans le cadre du CST.
L’article 5, § 1er, de ce décret prévoit l’utilisation obligatoire du CST pour les visiteurs âgés d’au moins douze ans et deux mois d’événements publics qui doivent être considérés comme des événements de masse, des expériences et des projets pilotes, et pour les visiteurs de dancings et de discothèques. L’article 5, § 2, de ce décret impose l’utilisation du CST pour les visiteurs âgés d’au moins seize ans d’établissements horeca, d’une part, à l’exception des espaces extérieurs de ces établissements, y compris les terrasses, de l’accès de courte durée non destiné à la consommation au sein de l’établissement, moyennant le port d’un masque buccal, et des organisations luttant contre la pauvreté, des initiatives d’aide alimentaire et des centres d’accueil de sans-abri et de sans-logis et de centres de fitness, d’autre part. En vertu de l’article 5, § 3, de ce décret, les infractions aux obligations précitées sont punies d’une amende de 50 à 500 euros pour les visiteurs et de 50 à 2 500 euros pour les organisateurs, membres de la direction et exploitants.
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Le décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 est entré en vigueur le 30 octobre 2021, soit le lendemain de sa publication au Moniteur belge, à l’exception de l’article 5 précité, qui est entré en vigueur le 1er novembre 2021. Le décret a cessé de produire ses effets le 7 mars 2022 (arrêté du Gouvernement flamand du 5 mars 2022 « relatif à la fin de vigueur du décret du 29 octobre 2021 relatif au COVID Safe Ticket »).
B.7.2. Par le décret de la Région wallonne du 21 octobre 2021, tel qu’il a été modifié par le décret de la Région wallonne du 24 novembre 2021, la Région wallonne a mis en œuvre l’accord de coopération du 14 juillet 2021.
L’article 5 du décret de la Région wallonne du 21 octobre 2021 impose l’utilisation du CST
sur le territoire de la région de langue française pour les événements de masse, les expériences et projets pilotes, les établissements horeca, les dancings et discothèques, les centres de sport et de fitness, les foires commerciales et congrès, les établissements relevant des secteurs culturel, festif et récréatif et les établissements de soins résidentiels pour personnes vulnérables. Le CST
n’est pas imposé dans les espaces extérieurs des établissements horeca qui accueillent moins de 100 personnes simultanément, sont situés à l’air libre et sont ouverts de trois côtés.
En vertu de l’article 7 du décret de la Région wallonne du 21 octobre 2021, les infractions aux obligations précitées sont punies d’une amende de 50 à 500 euros pour le visiteur et de 50
à 2 500 euros pour l’organisateur.
Les dispositions du décret de la Région wallonne du 21 octobre 2021 relatives au CST ont produit leurs effets du 1er novembre 2021 au 7 mars 2022.
B.7.3. La Commission communautaire commune a mis en œuvre l’accord de coopération du 14 juillet 2021 par l’ordonnance du 14 octobre 2021.
En vertu des articles 4, § 1er, et 5, § 2, de l’ordonnance du 14 octobre 2021, le Collège réuni peut imposer ou autoriser l’utilisation du CST sur le territoire de la région bilingue de Bruxelles-Capitale en ce qui concerne l’accès aux événements de masse, expériences et projets
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pilotes, aux établissements horeca, aux dancings et discothèques, aux centres de sport et de fitness, aux foires commerciales et congrès, aux établissements relevant des secteurs culturel, festif et récréatif et aux établissements de soins résidentiels pour personnes vulnérables.
L’utilisation du CST ne peut toutefois pas être imposée dans les espaces extérieurs des établissements horeca, à condition que certaines règles minimales soient respectées.
L’utilisation du CST ne peut être imposée qu’après que le Collège réuni a constaté que la situation épidémiologique propre au territoire de la région bilingue de Bruxelles-Capitale l’exige (article 5, § 1er). Cette situation épidémiologique est évaluée notamment sur la base du taux d’incidence, du taux de positivité, de la contagiosité des variants circulants, du taux de vaccination et du taux de remplissage des lits hospitaliers. Le Collège réuni fixe la durée d’application de l’utilisation du CST, qui ne peut excéder trois mois (article 5, § 3). Une nouvelle ordonnance doit être adoptée pour que le régime mis en place soit prorogé pour des durées complémentaires de trois mois maximum, qui ne peuvent en tout état de cause pas aller au-delà du 30 juin 2022 (article 6, alinéa 2).
En vertu de l’article 8, § 2, de l’ordonnance du 14 octobre 2021, les infractions aux dispositions de l’ordonnance sont punies d’une amende de 50 à 500 euros pour le visiteur ou le participant et de 50 à 2 500 euros pour l’organisateur.
L’ordonnance du 14 octobre 2021 est entrée en vigueur le 15 octobre 2021. L’article 10 de l’ordonnance prévoyait initialement que l’utilisation du CST prendrait fin au plus tard le 14 janvier 2022, mais cette utilisation a été prolongée jusqu’au 14 avril 2022 par l’ordonnance du 14 janvier 2022.
Quant à l’étendue des recours
B.8.1. La Cour doit déterminer l’étendue des recours en annulation à partir du contenu des requêtes et en particulier sur la base de l’exposé des moyens. La Cour limite son examen aux dispositions contre lesquelles des moyens sont dirigés.
B.8.2. Il ressort de l’exposé du moyen unique dans les affaires nos 7668, 7669, 7671, 7672, 7676, 7677, 7678, 7681, 7682, 7687, 7691, 7692 et 7694 que les griefs formulés par les parties
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requérantes sont exclusivement dirigés contre l’article 5, § 2, du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021, qui impose l’utilisation du CST aux visiteurs d’établissements horeca et de centres de fitness. Les recours en annulation dans ces affaires sont irrecevables en ce qu’ils sont dirigés contre d’autres dispositions.
Quant à l’intérêt des parties requérantes
B.9.1. Le Conseil des ministres et le Gouvernement flamand contestent l’intérêt des parties requérantes dans les affaires nos 7668, 7669, 7672, 7676, 7677, 7678, 7681, 7682, 7687 et 7694
parce que, dans leur exposé sur l’intérêt, elles se contentent de mentionner une formule type mise à disposition sur un site Web par un tiers, sans mettre cet exposé général en lien avec leur situation personnelle. Par ailleurs, les parties requérantes dans les affaires nos 7671, 7691 et 7692 ne démontreraient pas l’existence d’un lien direct entre la norme attaquée et leur propre situation, en ce qu’elles font valoir qu’en tant que personnes vaccinées, elles ne peuvent pas se rendre dans un établissement horeca avec des membres de leur famille qui ne sont pas vaccinés.
L’intérêt des parties requérantes dans les affaires nos 7739 et 7743 n’est pas contesté.
B.9.2. La Constitution et la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle imposent à toute personne physique ou morale qui introduit un recours en annulation de justifier d’un intérêt. Ne justifient de l’intérêt requis que les personnes dont la situation pourrait être affectée directement et défavorablement par la norme attaquée; il s’ensuit que l’action populaire n’est pas admissible.
B.9.3. Les parties requérantes dans les affaires nos 7668, 7669, 7672, 7676, 7677, 7678, 7681, 7682, 7687 et 7694 soutiennent, dans leurs requêtes, qui sont quasiment identiques, qu’elles ne se sont pas fait vacciner contre la COVID-19 et qu’elles ne peuvent pas fréquenter les établissements horeca de manière normale à cause du CST.
Elles peuvent être directement et défavorablement affectées par le décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021, qui impose l’utilisation du CST aux visiteurs âgés de seize ans et plus d’établissements horeca. La circonstance qu’elles ont introduit des requêtes quasiment identiques qui avaient été mises à leur disposition par un tiers ne change rien à ce constat.
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B.9.4. Étant donné que les parties requérantes dans les affaires nos 7668, 7669, 7672, 7676, 7677, 7678, 7681, 7682, 7687 et 7694 justifient d’un intérêt à l’annulation du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021, il n’est pas nécessaire que la Cour se prononce sur la recevabilité des requêtes dans les affaires nos 7671, 7691 et 7692, qui concernent la même disposition et reposent sur un moyen identique.
Quant à la recevabilité des moyens
En ce qui concerne la compétence de la Cour
B.10.1. En vertu de l’article 142, alinéa 2, de la Constitution et de l’article 1er de la loi spéciale du 6 janvier 1989, la Cour est compétente pour statuer sur les recours en annulation d’une loi, d’un décret ou d’une règle visée à l’article 134 de la Constitution pour cause de violation des règles qui sont établies par la Constitution ou en vertu de celle-ci pour déterminer les compétences respectives de l’autorité fédérale, des communautés et des régions et pour cause de violation des articles du titre II (« Des Belges et de leurs droits ») et des articles 143, § 1er, 170, 172 et 191 de la Constitution.
La Cour examine les moyens en ce qu’ils sont pris de la violation de normes au regard desquelles elle peut effectuer un contrôle direct.
B.10.2. Ni l’article 142 de la Constitution ni l’article 1er de la loi spéciale du 6 janvier 1989 ne confèrent à la Cour le pouvoir de contrôler des dispositions législatives directement au regard de dispositions conventionnelles. Par conséquent, la Cour n’est pas compétente pour contrôler les dispositions attaquées directement au regard de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme, et le deuxième moyen dans l’affaire n° 7743 n’est pas recevable.
B.10.3.1. L’article 142 de la Constitution et l’article 1er de la loi spéciale du 6 janvier 1989 ne confèrent pas davantage à la Cour le pouvoir de contrôler des dispositions législatives directement au regard de l’article 187 de la Constitution.
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Par conséquent, le premier moyen dans l’affaire no 7739 est irrecevable en ce qu’il est pris de la violation de l’article 187 de la Constitution « lu isolément ».
B.10.3.2. L’article 187 de la Constitution est une garantie étroitement liée aux dispositions constitutionnelles dont la Cour assure le respect.
La Cour tient dès lors compte de la garantie contenue dans cette disposition constitutionnelle lorsqu’elle est saisie d’une violation de droits fondamentaux mentionnés au titre II de la Constitution. Les moyens, en ce qu’ils sont pris de la violation des articles contenus dans le titre II de la Constitution, lus en combinaison avec l’article 187 de la Constitution, sont recevables.
En ce qui concerne l’exposé des moyens
B.11. Pour satisfaire aux exigences de l’article 6 de la loi spéciale du 6 janvier 1989, les moyens de la requête doivent faire connaître, parmi les règles dont la Cour garantit le respect, celles qui seraient violées ainsi que les dispositions qui violeraient ces règles et exposer en quoi ces règles auraient été transgressées par ces dispositions.
Les moyens invoqués par les parties requérantes dans l’affaire no 7743 ne répondent que partiellement à ces exigences, dès lors que certains griefs sont très sommaires et ambigus.
La Cour examine les moyens pour autant qu’ils satisfassent aux exigences précitées.
Quant au fond
B.12. L’examen de la conformité d’une disposition législative aux règles répartitrices de compétences doit en règle précéder celui de sa compatibilité avec les dispositions du titre II et des articles 170, 172 et 191 de la Constitution. La Cour examine donc d’abord le moyen qui est pris de la violation des règles répartitrices de compétences (B.13 à B.18).
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La Cour examine ensuite le moyen qui est pris de la violation des droits fondamentaux lus en combinaison avec l’article 187 de la Constitution (B.19), avant de se pencher sur chacun de ces droits fondamentaux. Ces moyens portent sur le principe d’égalité et de non-
discrimination (B.20 à B.34), sur le droit à la liberté individuelle, sur le droit au respect de la vie privée et familiale et sur le droit à la protection des données à caractère personnel (B.35 à B.58), sur les droits de l’enfant et sur les droits des personnes en situation de handicap (B.59 à B.62), sur le droit à l’épanouissement culturel et social (B.63 à B.65), sur la liberté de réunion et d’association (B.66 à B.68), sur le principe de la sécurité juridique et sur le principe de la non-rétroactivité des lois (B.69 à B.72), sur le droit de propriété (B.73 à B.74) et sur le droit à un procès équitable (B.75 à B.77).
En ce qui concerne les règles répartitrices de compétences (quatrième moyen dans l’affaire n° 7739)
B.13. Dans le quatrième moyen dans l’affaire n° 7739, les parties requérantes critiquent, dans une première branche, le fait que, en cas de déclaration d’une situation d’urgence épidémique, les entités fédérées perdraient leur faculté de principe d’appliquer le CST, et que l’autorité fédérale pourrait abroger ou modifier unilatéralement les décrets et ordonnances relatifs à l’utilisation du CST.
B.14.1. Contrairement à ce que soutiennent les parties requérantes, l’accord de coopération du 14 juillet 2021, tel qu’il a été modifié par l’accord de coopération du 28 octobre 2021, ne prévoit pas la possibilité pour l’autorité fédérale d’abroger ou de modifier unilatéralement des décrets ou des ordonnances.
Les entités fédérées ont en revanche donné leur assentiment à cet accord de coopération selon lequel, dès que et tant qu’une situation d’urgence épidémique est déclarée conformément à la loi du 14 août 2021, les décrets et ordonnances qu’elles ont édictés en exécution des articles 2bis, §§ 1er et 2, 13bis et 13ter de l’accord de coopération concernant l’utilisation du CST pour l’accès aux événements de masse, aux expériences et projets pilotes et aux dancings et discothèques ne s’appliquent, en principe, plus (article 2bis, § 3, alinéa 2, de l’accord de coopération du 14 juillet 2021, tel qu’il a été modifié par l’accord de coopération du 28 octobre
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2021). Pendant cette période, cette matière est régie par l’accord de coopération du 14 juillet 2021, qui était valable jusqu’au 31 octobre 2021, dans le cadre duquel les modalités concrètes d’exécution sont, en tant que de besoin, réglées dans un arrêté royal ou dans un accord de coopération d’exécution. Par ailleurs, les entités fédérées conservent le pouvoir de prendre ou de maintenir les mesures relatives à l’utilisation du CST pour l’accès aux événements de masse, aux expériences et projets pilotes et aux dancings et discothèques, pour autant que ces mesures soient plus strictes que les mesures prises en vertu de la loi du 14 août 2021 (article 2bis, § 3, alinéa 4, de l’accord de coopération du 14 juillet 2021, tel qu’il a été modifié par l’accord de coopération du 28 octobre 2021).
En ce qui concerne les « établissements et activités pour lesquels l’utilisation du [CST]
peut être [appliquée] », visés à l’article 1er, 21°, de l’accord de coopération du 14 juillet 2021, à savoir les établissements horeca, les centres de sport et de fitness, les foires commerciales et congrès, les établissements relevant des secteurs culturel, festif et récréatif, les établissements de soins résidentiels pour personnes vulnérables, l’accord de coopération prévoit que l’utilisation du CST reste régie par les décrets et ordonnances, mais que ces règles ne peuvent pas être en conflit avec les mesures qui ont été prises conformément à la loi du 14 août 2021
(article 2bis, § 3, alinéa 3, de l’accord de coopération du 14 juillet 2021, tel qu’il a été modifié par l’accord de coopération du 28 octobre 2021).
B.14.2. La première branche du quatrième moyen dans l’affaire n° 7739 n’est pas fondée, en ce que les parties requérantes soutiennent que les entités fédérées perdraient la possibilité d’appliquer le CST et que l’autorité fédérale pourrait abroger ou modifier unilatéralement les décrets et ordonnances relatifs à l’utilisation du CST.
B.15. Dans la seconde branche du quatrième moyen dans l’affaire n° 7739, les parties requérantes soutiennent que le CST ne constitue pas une mesure de médecine préventive pour laquelle les communautés sont compétentes, mais une mesure de police sanitaire pour laquelle seule l’autorité fédérale est compétente.
B.16.1. L’article 128 de la Constitution dispose :
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« § 1er. Les Parlements de la Communauté française et de la Communauté flamande règlent par décret, chacun en ce qui le concerne, les matières personnalisables, de même qu’en ces matières, la coopération entre les communautés et la coopération internationale, y compris la conclusion de traités.
Une loi adoptée à la majorité prévue à l’article 4, dernier alinéa, arrête ces matières personnalisables, ainsi que les formes de coopération et les modalités de conclusion de traités.
§ 2. Ces décrets ont force de loi respectivement dans la région de langue française et dans la région de langue néerlandaise, ainsi que, sauf si une loi adoptée à la majorité prévue à l’article 4, dernier alinéa, en dispose autrement, à l’égard des institutions établies dans la région bilingue de Bruxelles-Capitale qui, en raison de leur organisation, doivent être considérées comme appartenant exclusivement à l’une ou à l’autre communauté ».
B.16.2. L’article 5, § 1er, I, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles (ci-après : la loi spéciale du 8 août 1980) dispose :
« § 1. Les matières personnalisables visées à l’article 128, § 1er, de la Constitution, sont :
I. En ce qui concerne la politique de santé :
[...]
8° l’éducation sanitaire ainsi que les activités et services de médecine préventive, ainsi que toute initiative en matière de médecine préventive.
L’autorité fédérale reste toutefois compétente pour :
1° l’assurance maladie-invalidité;
2° les mesures prophylactiques nationales.
[...] ».
B.16.3. Il faut considérer que le Constituant et le législateur spécial, dans la mesure où ils n’en disposent pas autrement, ont attribué aux communautés toute la compétence d’édicter les règles propres aux matières qui leur ont été transférées, et ce, sans préjudice de la possibilité de recourir, le cas échéant, à l’article 10 de la loi spéciale du 8 août 1980.
B.16.4. Conformément à l’article 5, § 1, I, alinéa 1er, 8°, et alinéa 2, 2°, de la loi spéciale du 8 août 1980, les communautés sont compétentes pour les activités et services de médecine
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préventive, ainsi que pour toute initiative en matière de médecine préventive, à l’exception des mesures prophylactiques nationales.
Il découle de l’article 128, § 2, de la Constitution qu’en ce qui concerne ces « matières personnalisables », les communautés sont territorialement compétentes, dans la région de langue néerlandaise ou dans la région de langue française, ainsi qu’à l’égard des institutions établies dans la région bilingue de Bruxelles-Capitale qui, en raison de leur organisation, doivent être considérées comme appartenant exclusivement à l’une ou à l’autre communauté.
Ainsi, le législateur décrétal ne peut imposer des obligations aux personnes présentes sur le territoire de la région bilingue de Bruxelles-Capitale que pour autant que ces obligations résultent d’une décision libre de s’adresser à une institution appartenant à la Communauté flamande ou à la Communauté française. En région bilingue de Bruxelles-Capitale, des obligations concernant les matières personnalisables ne peuvent être imposées aux autres personnes que par la Commission communautaire commune, conformément à l’article 135 de la Constitution et à l’article 63 de la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux Institutions bruxelloises.
En application de l’article 138 de la Constitution, la Communauté française, la Région wallonne et la Commission communautaire française ont décidé, d’un commun accord, que la compétence relative à la médecine préventive est exercée par les institutions de la Région wallonne sur le territoire de la région de langue française, et par les institutions de la Commission communautaire française sur le territoire de la région bilingue de Bruxelles-
Capitale (article 3, 6°, du décret spécial de la Communauté française du 3 avril 2014 « relatif aux compétences de la Communauté française dont l’exercice est transféré à la Région wallonne et à la Commission communautaire française »; article 3, 6°, du décret de la Commission communautaire française du 4 avril 2014 « relatif aux compétences de la Communauté française dont l’exercice est transféré à la Région wallonne et à la Commission communautaire française »; article 3, 6°, du décret de la Région wallonne du 11 avril 2014 « relatif aux compétences de la Communauté française dont l’exercice est transféré à la Région wallonne et à la Commission communautaire française »).
B.16.5. Il ressort des travaux préparatoires de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles qu’« en ce qui concerne les activités et services de médecine préventive », il a été songé en particulier au dépistage et à la lutte contre les maladies transmissibles (Doc. parl.,
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Sénat, 1979-1980, n° 434/2, p. 125). En ce qui concerne la portée des « mesures prophylactiques nationales », il s’avère que cette compétence réservée à l’autorité fédérale se limite aux vaccinations obligatoires (ibid.).
Selon les travaux préparatoires de la loi spéciale du 6 janvier 2014 relative à la Sixième Réforme de l’État, par laquelle les « initiatives » en matière de médecine préventive ont été ajoutées à l’énumération des compétences communautaires prévues à l’article 5, § 1, I, alinéa 1er, 8°, les communautés disposent d’une « compétence générale concernant l’éducation sanitaire et la médecine préventive ». Ces mêmes travaux préparatoires mentionnent que « [l’]autorité fédérale ne pourra plus prendre des mesures en matière d’éducation sanitaire, ni en matière d’activités et de services de médecine préventive qui reviennent aux communautés ».
À cet égard, il a en particulier été relevé que l’autorité fédérale ne poursuivrait pas certaines initiatives de prévention, comme les campagnes de dépistage et de vaccination, et que, à l’avenir, elle ne pourrait plus non plus prendre pareilles nouvelles initiatives de prévention « sur la base de quelque compétence que ce soit » (Doc. parl., Sénat, 2012-2013, n° 5-2232/1, pp. 42-
43).
B.17. Le maintien de l’ordre public, y compris le maintien de la santé publique (qu’on appelle la police sanitaire), relève de la compétence résiduelle du législateur fédéral. Cela est confirmé par l’article 6, § 1er, VIII, alinéa 1er, 1°, de la loi spéciale du 8 août 1980, qui exclut expressément de la compétence des régions « l’organisation de et la politique relative à la police, en ce compris l’article 135, § 2, de la nouvelle loi communale ». Il ressort de l’article 135, § 2, de la Nouvelle loi communale, qui attribue aux communes la compétence de police administrative générale, que la compétence résiduelle du législateur fédéral en matière de maintien de l’ordre public, y compris le maintien de la santé publique, englobe « la propreté, la salubrité, la sûreté et la tranquillité dans les rues, lieux et édifices publics », et en particulier la prévention « par les précautions convenables, [des] accidents et fléaux calamiteux, tels que les incendies, les épidémies et les épizooties ». Cette compétence n’est pas limitée aux espaces publics, elle s’étend aussi aux causes qui ont leur origine dans l’enceinte des propriétés privées et dont l’action, se propageant au-dehors, menace la salubrité publique (voyez Cass. 20 juin 2008, C.06.0592.F, ECLI:BE:CASS:2008:ARR.20080620.2; CE, 23 septembre 2010, n° 207.515).
44
B.18.1. Il résulte de ce qui précède que la lutte contre les maladies contagieuses, telles que la COVID-19, relève de la compétence des communautés en matière de médecine préventive visée à l’article 5, § 1, I, alinéa 1er, 8°, de la loi spéciale du 8 août 1980, ainsi que de la compétence résiduelle de l’autorité fédérale en ce qui concerne le maintien de l’ordre public (voyez CE, avis n° 68.936 du 7 avril 2021; CE, avis nos 69.730 et 69.736 du 9 juillet 2021; CE, avis n° 70.159 du 23 septembre 2021). En réglementant l’instauration et l’utilisation du CST
dans un accord de coopération et en exerçant donc ces compétences en collaboration, l’autorité fédérale et les entités fédérées compétentes ont souhaité se conformer au principe de proportionnalité, qui est inhérent à tout exercice de compétence.
Le fait que l’accord de coopération du 14 juillet 2021 laisse aux législateurs décrétaux et ordonnanciel le soin d’instaurer et de régler l’utilisation du CST dans certains cas et sous certaines conditions peut s’inscrire dans la compétence des communautés en matière de médecine préventive. Ainsi qu’il ressort des avis de la section de législation du Conseil d’État, cette compétence comprend la possibilité d’imposer des obligations à des personnes en vue de la détection de certaines maladies et de prévenir la contamination d’autres personnes (voyez CE, avis n° 38.381/3 du 7 juillet 2005; CE, avis n° 40.537/3 du 22 octobre 2009; CE, avis n° 53.018 du 13 mai 2013; CE, avis n° 68.338/3 du 12 janvier 2021). Ainsi, les communautés sont compétentes pour interdire l’accès à certains lieux, pour autant, du moins, que cette mesure « ne ‘ s’adresse pas à la population en général ’, mais définisse spécifiquement à quels ‘ endroits et/ ou dans quelles circonstances ’ cette mesure, qui doit viser directement les personnes présentant une (un risque d’) infection ayant pour origine une maladie contagieuse et qui doit être directement liée à des maladies et infections, est imposée » (CE, avis n° 68.936 du 7 avril 2021, point 26; CE, avis n° 70.159 du 23 septembre 2021, point 5.1). Tel est le cas en l’espèce, dès lors que l’utilisation du CST est une mesure ciblée visant à limiter les contaminations, qui est imposée aux organisateurs, exploitants et visiteurs d’événements, d’établissements et de services énumérés limitativement, où de nombreuses personnes se réunissent et où les règles de base minimales visant à limiter les risques de contagion (ventilation optimale, distance, masque, contacts limités) seraient difficilement applicables.
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L’article 2bis, § 3, de l’accord de coopération du 14 juillet 2021, tel qu’il a été modifié par l’accord de coopération du 28 octobre 2021, prévoit en outre que, dès que et tant qu’une situation d’urgence épidémique est déclarée conformément à la loi du 14 août 2021, les entités fédérées peuvent prendre ou maintenir exclusivement des mesures relatives à l’utilisation du CST qui sont plus strictes que les mesures prises en vertu de la loi du 14 août 2021 ou qui ne sont pas contraires à celles-ci. Ainsi, il est garanti que, lorsqu’elles réglementent l’utilisation du CST, les entités fédérées respectent le principe de proportionnalité précité et ne rendent pas impossible ou exagérément difficile l’exercice des compétences de l’autorité fédérale en ce qui concerne, notamment, le maintien de l’ordre public, y compris le maintien de la santé publique.
B.18.2. En ce qu’il est pris de l’incompétence des entités fédérées, le quatrième moyen dans l’affaire n° 7739, en sa seconde branche, n’est pas fondé.
En ce qui concerne les droits fondamentaux
I. L’article 187 de la Constitution (premier moyen dans l’affaire n° 7739)
B.19.1. Dans la seconde branche du premier moyen dans l’affaire no 7739, les parties requérantes font valoir que les normes attaquées ne sont pas compatibles avec l’article 187 de la Constitution, lu en combinaison avec différents droits fondamentaux.
L’article 187 de la Constitution dispose :
« La Constitution ne peut être suspendue en tout ni en partie ».
B.19.2. Cette disposition confirme que la Constitution constitue la norme suprême, et oblige tous les pouvoirs de l’État à respecter cette dernière en toutes circonstances. Elle s’oppose dès lors à toute législation qui permettrait à un des pouvoirs de l’État de déclarer l’état d’urgence, même dans des situations de crise graves, et de rendre ainsi la Constitution ou l’une de ses dispositions temporairement inopérante.
Elle ne s’oppose pas, en revanche, à l’instauration d’un ensemble de mesures restrictives par lesquelles le législateur compétent apporte une réponse globale et radicale à un état
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d’urgence de fait, tel que la pandémie de COVID-19. Elle interdit en effet une « suspension »
de dispositions constitutionnelles qui aurait pour effet d’écarter temporairement l’application de ces dispositions, rendant de ce fait inopérant le contrôle juridictionnel des mesures y dérogeant. Elle n’interdit dès lors pas les mesures qui « restreignent » des droits fondamentaux, pour autant que le juge compétent puisse contrôler cette restriction au regard de ces droits fondamentaux, par le biais des procédures et critères de contrôle habituels.
B.19.3. Comme il est dit en B.3 à B.7, les lois, décrets et ordonnances attaqués ont un champ d’application strictement limité. Ils imposent, dans le cadre d’une pandémie bien définie, aux organisateurs, exploitants et visiteurs des événements, établissements et services qui y sont énumérés limitativement, l’utilisation du CST pour régler l’accès à ces événements, ces établissements et services, tout en réglant le traitement des données y afférent.
Même si le législateur fédéral, les législateurs décrétaux et le législateur ordonnanciel visent, par les normes attaquées, à lutter contre une situation d’urgence de fait et à en limiter les conséquences, de telles mesures ne reviennent aucunement à déclarer un état d’urgence tel que visé en B.19.2, par lequel la Constitution ou l’une de ses dispositions serait rendue temporairement inopérante.
B.19.4. Par conséquent, le premier moyen dans l’affaire no 7739, en sa seconde branche, n’est pas fondé, en ce que les parties requérantes allèguent que les dispositions attaquées suspendent totalement ou partiellement la Constitution.
II. Le principe d’égalité et de non-discrimination (moyen unique dans les affaires nos 7668, 7669, 7671, 7672, 7676, 7677, 7678, 7681, 7682, 7687, 7691, 7692 et 7694, première branche du deuxième moyen dans l’affaire n° 7739 et deuxième, troisième, cinquième, onzième, douzième, treizième, dix-neuvième branches et branche « supplémentaire » des premier et troisième moyens dans l’affaire n° 7743)
B.20. Les parties requérantes dans les affaires nos 7739 et 7743 soutiennent que les dispositions attaquées qui prévoient l’utilisation du CST pour l’accès à certains établissements et services sont contraires aux articles 10 et 11 de la Constitution. Elles estiment que les
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dispositions attaquées font naître une différence de traitement non raisonnablement justifiée entre les personnes, selon que celles-ci sont vaccinées contre la COVID-19 ou non, dès lors que les personnes vaccinées obtiendraient beaucoup plus facilement un CST que les personnes non vaccinées, alors que, d’un point de vue épidémiologique, la différence entre ces catégories de personnes distinctes serait négligeable. Par ailleurs, les dispositions attaquées feraient naître une identité de traitement injustifiée entre les personnes non vaccinées, en ce que l’obligation de se faire tester pour obtenir le CST s’applique à toutes les personnes non vaccinées, quelle que soit leur situation financière et indépendamment du fait qu’elles possèdent un smartphone ou non. Les parties requérantes dans l’affaire n° 7743 ajoutent qu’il y aurait une discrimination des jeunes âgés de douze à quinze ans, qui ne pourraient pas télécharger eux-mêmes l’application nécessaire à l’utilisation du CST. Par ailleurs, le champ d’application du CST
serait manifestement déraisonnable, en ce que ce dernier s’applique aux établissements horeca, alors qu’il ne s’applique pas aux écoles de danse. Enfin, le principe d’égalité et de non-
discrimination serait violé du fait de l’existence de régimes différents quant au vaccin contre la COVID-19 et aux vaccins légalement obligatoires, en ce qui concerne la responsabilité des pouvoirs publics en cas d’effets secondaires graves et les restrictions en cas de refus du vaccin.
B.21. Le principe d’égalité et de non-discrimination n’exclut pas qu’une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu’elle repose sur un critère objectif et qu’elle soit raisonnablement justifiée. Ce principe s’oppose, par ailleurs, à ce que soient traitées de manière identique, sans qu’apparaisse une justification raisonnable, des catégories de personnes se trouvant dans des situations qui, au regard de la mesure critiquée, sont essentiellement différentes.
L’existence d’une telle justification doit s’apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d’égalité et de non-discrimination est violé lorsqu’il est établi qu’il n’existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.
B.22. En vertu de l’article 1er, § 1er, 4°, de l’accord de coopération du 14 juillet 2021, tel qu’il a été modifié par l’accord de coopération du 27 septembre 2021 et par l’accord de coopération du 28 octobre 2021, le CST est le résultat de la lecture du certificat COVID
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numérique de l’UE au moyen de l’application COVIDScan, censée réguler l’accès à certains événements dans le cadre de la pandémie de COVID-19. Conformément au règlement (UE) 2021/953, ce certificat COVID numérique de l’UE contient des informations concernant le statut vaccinal, de test et/ou de rétablissement du titulaire. Ainsi, « le COVID
Safe Ticket est généré pour les personnes qui ont été vaccinées contre le coronavirus COVID-
19, qui ont un test TAAN reconnu ou un test rapide à l’antigénique reconnu négatif, ou qui se sont récemment rétablies d’une infection au coronavirus COVID-19 » (exposé général relatif à l’accord de coopération du 14 juillet 2021, Moniteur belge, 23 juillet 2021, troisième édition, p. 76177).
B.23.1. Comme il est dit en B.4.2, le législateur fédéral, les législateurs décrétaux et le législateur ordonnanciel, par l’instauration du CST, visaient à « limiter la propagation du coronavirus COVID-19 » et à « tenir compte de la reprise des activités des citoyens telles qu’elles étaient avant la pandémie de COVID-19 » (exposé général relatif à l’accord de coopération du 14 juillet 2021, Moniteur belge, 23 juillet 2021, troisième édition, p. 76170).
B.23.2. Les parties requérantes dans les affaires jointes contestent cet objectif et déduisent de plusieurs avis et articles de presse que les dispositions attaquées constituent « une obligation de vaccination déguisée ». Même si l’augmentation du taux de vaccination peut être une conséquence de l’instauration du CST, le législateur fédéral, les législateurs décrétaux et le législateur ordonnanciel n’ont en substance pas instauré une obligation vaccinale. En effet, le CST peut être obtenu sur la base non seulement d’un certificat de vaccination, mais également d’un certificat de test et de rétablissement. L’article 3, § 6, de l’accord de coopération du 14 juillet 2021 et l’article 3, paragraphe 7, du règlement (UE) 2021/953 soulignent l’identité de traitement entre ces différentes catégories de certificats.
B.24.1. Selon les connaissances scientifiques disponibles au moment de l’adoption des normes attaquées, les personnes qui ont été vaccinées, celles qui ont eu un test diagnostique négatif récent et celles qui se sont rétablies de la COVID-19 au cours des six derniers mois présentent un risque moindre de contaminer d’autres personnes à la COVID-19 (exposé général relatif à l’accord de coopération du 14 juillet 2021, Moniteur belge, 23 juillet 2021, troisième édition, pp. 76172 et 76177; voy. également le considérant n° 7 du règlement (UE) 2021/953).
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Les parties requérantes ne démontrent pas que les avis qu’elles invoquent pour contester ce point de vue sont plus fiables que l’étude scientifique sur laquelle le législateur fédéral, les législateurs décrétaux et le législateur ordonnanciel se sont fondés et que l’étude scientifique invoquée par les parties institutionnelles. Les avis invoqués par les parties requérantes sont en outre largement postérieurs à l’adoption des dispositions attaquées et, pour cette seule raison, n’ont pas pu être pris en considération par le législateur fédéral, les législateurs décrétaux et le législateur ordonnanciel.
B.24.2. Les trois catégories de personnes susceptibles d’obtenir un CST doivent accomplir une démarche préalable pour ce faire, qu’il s’agisse de se faire vacciner contre la COVID-19, d’obtenir un certificat de rétablissement ou d’obtenir un test diagnostique négatif.
Il est vrai que la durée de validité du CST est sensiblement plus courte lorsque celui-ci est obtenu à la suite d’un test diagnostique négatif – qui a une durée de validité de 24 ou 48 heures en fonction du type de test – que lorsqu’il est obtenu à la suite de l’administration d’un vaccin ou de l’obtention d’un certificat de rétablissement. En raison de cette durée de validité réduite, les personnes concernées peuvent être amenées à se faire tester à de nombreuses reprises pour pouvoir accéder aux établissements et services dont l’accès est restreint aux titulaires d’un CST.
Toutefois, la différence de traitement qui en résulte repose sur un critère objectif et pertinent au regard du but poursuivi, qui consiste à limiter la propagation du coronavirus SARS-CoV-2. En effet, contrairement au certificat de vaccination ou au certificat de rétablissement, un test diagnostique négatif ne démontre pas que la personne a développé une immunité contre la COVID-19. Il permet uniquement d’établir que la personne n’était pas porteuse du coronavirus SARS-Cov-2 au moment où le test a été réalisé.
B.24.3. Les dispositions attaquées ne sont du reste pas disproportionnées à l’objectif poursuivi.
En effet, le CST peut être obtenu non seulement sur la base d’un certificat de vaccination, mais également sur la base d’un certificat de rétablissement ou de test. Ainsi, les personnes qui ne souhaitent pas se faire vacciner ou qui, dans des cas très exceptionnels, ne peuvent pas se faire vacciner contre la COVID-19, peuvent également obtenir un CST en se faisant tester.
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Contrairement à ce que soutiennent les parties requérantes, une obligation de se faire tester ne constitue pas une charge organisationnelle ou financière excessive (voyez aussi CE, avis n° 70.159 du 23 septembre 2021, point 10.2). Ainsi, un test antigénique rapide, qui a une durée de validité de 24 heures pour l’accès à un établissement ou à un service et dont le prix s’élève à 26,72 euros et à 21,72 euros depuis le 1er juillet 2022 peut être effectué par un pharmacien local ou par un médecin. Un test PCR, qui a une validité de 48 heures pour l’accès à un établissement ou à un service, peut être effectué chez un médecin, dans un centre de test ou dans un laboratoire et coûte en moyenne 46,81 euros. Cette charge que la personne non vaccinée contre la COVID-19 doit supporter est la conséquence du choix qu’elle a fait librement de ne pas se faire vacciner. Les personnes qui, pour des raisons médicales, ne peuvent pas se faire vacciner ou ne peuvent pas se faire vacciner complètement contre la COVID-19 en raison d’un risque très élevé de réactions allergiques sévères lors de la vaccination ou d’effets secondaires graves lors de la première dose, rendant dangereuse la poursuite de la vaccination - ce qui est très exceptionnel - peuvent en outre obtenir un remboursement pour les tests PCR ou pour les tests antigéniques rapides (article 1/1 de l’arrêté royal du 1er juillet 2021 « portant exécution des articles 34 et 37 de la loi du 13 juin 2021 portant des mesures de gestion de la pandémie COVID-19 et d’autres mesures urgentes dans le domaine des soins de santé »).
L’application du CST est par ailleurs limitée aux événements, services et établissements, énoncés de manière restrictive dans les dispositions attaquées, « où les mesures de santé et de sécurité actuelles sont difficiles à maintenir, mais en même temps où un risque élevé de propagation du coronavirus COVID-19 est présent, et où la seule alternative serait une fermeture complète de ces secteurs » (exposé général relatif à l’accord de coopération du 27 septembre 2021, Moniteur belge, 1er octobre 2021, deuxième édition, p. 104682). Les dispositions attaquées n’ont donc pas pour effet que les personnes qui ne sont pas vaccinées contre la COVID-19 ne peuvent pas entretenir de contacts sociaux sans recourir à un CST
pendant la période où l’utilisation du CST est obligatoire. En limitant la propagation du coronavirus SARS-CoV-2, les dispositions attaquées visent précisément à éviter l’application de mesures plus strictes, telles qu’un « lockdown », qui réduiraient de manière significative la possibilité d’entretenir des contacts sociaux.
Enfin, l’application du CST est limitée dans le temps et à certaines circonstances. Ainsi, l’article 13bis de l’accord de coopération du 14 juillet 2021, tel qu’il a été modifié par l’accord de coopération du 27 septembre 2021 et par l’accord de coopération du 28 octobre 2021, prévoit
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que les entités fédérées ne peuvent permettre ou imposer l’utilisation du CST que « si les circonstances épidémiologiques locales l’exigent » (article 13bis, § 1er). Ces circonstances doivent être évaluées préalablement par le Risk Assessment Group, qui, dans les cinq jours ouvrables, rend un avis non contraignant. Le décret ou l’ordonnance instaurant le CST doit en outre prévoir la durée maximale de validité des mesures qu’il contient (article 13bis, § 2), sachant qu’il est « fortement » recommandé, selon l’exposé général relatif à l’accord de coopération du 27 septembre 2021, « de la limiter à un maximum de trois mois » (Moniteur belge, 1er octobre 2021, deuxième édition, p. 104683). Dans ce sens, l’ordonnance du 14 octobre 2021, le décret de la Région wallonne du 21 octobre 2021 et le décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 prévoient une durée d’application du CST, qui, en principe, s’élève à chaque fois au maximum à trois mois.
B.24.4. Compte tenu de ce qui précède, la différence de traitement, attaquée, entre les personnes, selon qu’elles sont vaccinées contre la COVID-19 ou non, est raisonnablement justifiée.
B.24.5. Le deuxième moyen dans l’affaire n° 7739, en sa première branche, et le premier moyen dans l’affaire n° 7743, en sa seconde branche, ne sont pas fondés dans cette mesure.
B.25.1. En ce que les parties requérantes dans l’affaire n° 7743 contestent l’allégation selon laquelle l’accord de coopération du 14 juillet 2021, tel qu’il a été modifié par l’accord de coopération du 27 septembre 2021 et par l’accord de coopération du 28 octobre 2021, prévoit l’utilisation du CST dans les établissements horeca, mais pas dans les écoles de danse, il suffit de constater que le législateur fédéral, les législateurs décrétaux et le législateur ordonnanciel pouvaient considérer que les activités d’enseignement, dont relèvent les écoles de danse, constituent un service essentiel auquel l’accès doit être assuré sans entrave (voy. dans ce sens l’exposé général relatif à l’accord de coopération du 27 septembre 2021, Moniteur belge, 1er octobre 2021, deuxième édition, p. 104680).
B.25.2. Le premier moyen dans l’affaire n° 7743, en sa troisième branche, n’est pas fondé.
B.26.1. En ce qui concerne l’identité de traitement, attaquée, entre les personnes qui ne sont pas vaccinées contre la COVID-19, quelle que soit leur situation financière et
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indépendamment du fait qu’elles possèdent un smartphone ou non, il suffit, comme il a été dit, de constater que l’obligation de se faire tester ne constitue pas une charge organisationnelle ou financière excessive. Par ailleurs, le CST peut être généré par d’autres moyens que via une application pour smartphone, il peut par exemple aussi être téléchargé et imprimé – avec assistance ou non – via un ordinateur.
L’identité de traitement, attaquée, entre les personnes qui ne sont pas vaccinées contre la COVID-19, quelle que soit leur situation financière et indépendamment du fait qu’elles possèdent un smartphone ou non, est donc aussi raisonnablement justifiée.
B.26.2. Le deuxième moyen dans l’affaire n° 7739, en sa première branche, et le premier moyen dans l’affaire n° 7743, en ses cinquième et treizième branches, ne sont pas fondés dans cette mesure.
B.27.1. En ce qui concerne l’identité de traitement entre les jeunes âgés de douze à quinze ans et les personnes âgées de seize ans et plus, il convient d’abord de constater que l’utilisation du CST ne peut être imposée à l’égard des jeunes de douze à quinze ans qu’en ce qui concerne l’accès aux événements de masse, aux expériences et projets pilotes, aux dancings et discothèques et aux établissements de soins résidentiels pour personnes vulnérables (article 12, § 4, de l’accord de coopération du 14 juillet 2021). L’identité de traitement attaquée n’existe donc qu’en ce qui concerne ces événements, établissements et services.
Par ailleurs, depuis la modification de l’accord de coopération, les jeunes de douze à quinze ans peuvent eux-mêmes installer l’application COVIDScan sur leur smartphone et générer le CST. Selon les parties requérantes, l’application COVIDScan, dans sa version initiale, ne prévoyait pas cette possibilité, et les jeunes de douze à quinze ans avaient besoin de l’assistance de leurs parents pour ce faire. Cela ne suffit toutefois pas pour conclure que, eu égard à l’objectif poursuivi par le législateur, mentionné en B.23.1, ils se trouvent dans une situation qui diffère essentiellement de celle dans laquelle se trouvent les personnes âgées de seize ans et plus.
L’identité de traitement, attaquée, entre les jeunes de douze à quinze ans et les personnes âgées de seize ans et plus n’est pas discriminatoire.
B.27.2. Le premier moyen dans l’affaire n° 7743, en sa douzième branche, n’est pas fondé.
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B.28.1. Dans la onzième branche du premier moyen dans l’affaire n° 7743, les parties requérantes invoquent une discrimination entre ceux qui se font vacciner contre la COVID-19
et ceux qui se font vacciner parce que la loi les y oblige, en ce que la responsabilité des pouvoirs publics différerait en cas d’effets secondaires graves.
Tout d’abord, il y a lieu de constater que cette branche du moyen procède de la prémisse erronée selon laquelle les dispositions attaquées poursuivent une obligation vaccinale déguisée.
Comme il est déjà dit en B.23.2, ce point de vue est contredit par le fait que le CST peut être obtenu non seulement sur la base d’un certificat de vaccination, mais aussi sur la base d’un certificat de test et d’un certificat de rétablissement. Le simple fait que la vaccination contre la COVID-19 ne soit pas exigée par la loi n’exclut par ailleurs pas que les pouvoirs publics pourraient être tenus pour responsables en cas d’effets secondaires graves. Il appartient aux cours et tribunaux de l’ordre judiciaire de statuer sur un tel litige. La simple circonstance que le Conseil d’État serait compétent pour accorder une indemnisation pour une vaccination qui est obligatoire en vertu d’une décision d’une autorité administrative ne suffit pas pour conclure qu’il s’agit d’une différence de traitement injustifiée.
B.28.2. Le premier moyen dans l’affaire n° 7743, en sa onzième branche, n’est pas fondé.
B.29.1. Dans la dix-neuvième branche du premier moyen dans l’affaire n° 7743, les parties requérantes invoquent une discrimination entre ceux qui refusent le vaccin contre la COVID-
19 et ceux qui refusent le vaccin obligatoire contre la poliomyélite, en ce qu’aucune restriction ne serait imposée à ces derniers et en ce que ceux-ci seraient ainsi traités plus favorablement.
À cet égard, il convient avant tout d’observer que la vaccination contre la COVID-19 n’est pas obligatoire, alors que tel est le cas de la vaccination contre la poliomyélite pour les enfants âgés de deux à dix-huit mois (article 1er de l’arrêté royal du 26 octobre 1966 « rendant obligatoire la vaccination antipoliomyélitique »). Les parents qui omettent de faire vacciner leur enfant contre la poliomyélite sont punissables d’une amende de 26 à 100 euros et/ou d’une peine d’emprisonnement de huit jours à un mois (article 8 de l’arrêté royal du 26 octobre 1966
et de la loi sanitaire du 1er septembre 1945). Par ailleurs, en Communauté française, la
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vaccination contre la poliomyélite constitue une condition d’accès à l’accueil de la petite enfance, ainsi qu’une condition d’emploi pour le personnel travaillant dans les structures d’accueil d’enfants et pour les accueillants d’enfants indépendants (décret de la Communauté française du 21 février 2019 « visant à renforcer la qualité et l’accessibilité de l’accueil de la petite enfance en Communauté française »). La branche du moyen procède donc de la prémisse erronée selon laquelle aucune restriction ne serait imposée à ceux qui refusent le vaccin contre la poliomyélite.
Pour le surplus, il convient de constater que la poliomyélite a disparu aujourd’hui en Belgique, alors qu’au moment de l’adoption des dispositions attaquées, le coronavirus SARS-
CoV-2, était très contagieux et mettait une énorme pression sur le système sanitaire belge et sur le tissu économique. La différence de traitement entre ceux qui refusent le vaccin contre la COVID-19 et ceux qui refusent le vaccin obligatoire contre la poliomyélite est raisonnablement justifiée.
B.29.2. Le premier moyen dans l’affaire n° 7743, en sa dix-neuvième branche, n’est pas fondé.
B.30. En ce qui concerne le décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021
uniquement, les parties requérantes dans l’affaire n° 7743 soutiennent qu’il viole les articles 10
et 11 de la Constitution, en ce qu’il rend l’utilisation du CST obligatoire pour les visiteurs qui se rendent dans les espaces intérieurs des établissements de restauration et des centres de fitness, mais pas pour les visiteurs d’autres centres sportifs, de foires commerciales, de congrès et d’installations relevant des secteurs culturel, festif et récréatif, alors que la pratique de certaines activités non visées par cette obligation ne permettrait pas le respect de la distanciation sociale ni le port d’un masque buccal. Par ailleurs, les parties requérantes dans l’affaire n° 7743, ainsi que les parties requérantes dans les affaires nos 7668, 7669, 7671, 7672, 7676, 7677, 7678, 7681, 7682, 7687, 7691, 7692 et 7694 soutiennent que l’article 5 du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 entraîne une différence de traitement non raisonnablement justifiée entre plusieurs catégories de personnes qui ne sont pas vaccinées contre la COVID-19, selon qu’elles souhaitent se rendre dans un établissement de restauration ou dans un centre de fitness où un CST est exigé, ou prendre le train ou se rendre dans des clubs de lutte où un CST
n’est pas exigé.
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B.31. Par l’article 5, § 2, attaqué, du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021, le législateur décrétal a fait usage de la possibilité qui est offerte aux entités fédérées par l’article 2bis de l’accord de coopération du 14 juillet 2021, tel qu’il a été inséré par l’accord de coopération du 27 septembre 2021 et modifié par l’accord de coopération du 28 septembre 2021, de prévoir l’utilisation du CST pour les visiteurs des « établissements et facilités pour lesquels l’utilisation du [CST] peut être appliquée », visés à l’article 1er, 21°, de l’accord de coopération du 14 juillet 2021, à savoir notamment les établissements horeca, les centres de sport et de fitness, les foires commerciales et congrès et les établissements qui relèvent des secteurs culturel, festif et récréatif.
L’article 5, § 2, attaqué, du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 impose l’utilisation du CST pour les visiteurs âgés de seize ans et plus d’établissements horeca et de centres de fitness. Sont toutefois exemptés de cette obligation d’utiliser le CST les espaces extérieurs de ces établissements, y compris les terrasses, l’accès de courte durée non destiné à la consommation au sein de l’établissement, moyennant le port d’un masque buccal, ainsi que les organisations luttant contre la pauvreté, les initiatives d’aide alimentaire et les centres d’accueil de sans-abris et de sans-logis.
L’exposé relatif au décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 mentionne :
« En raison de la hausse des cas de contamination à la COVID-19, l’autorité fédérale a adopté des mesures supplémentaires, afin d’éviter de nouvelles contaminations à la COVID-
19. Ainsi, une obligation élargie du port du masque est instaurée, notamment dans les établissements horeca et dans les espaces des établissements relevant du secteur sportif qui sont accessibles au public.
Dans les établissements horeca, une obligation totale du port du masque peut difficilement se combiner avec l’expérience normale de l’activité pratiquée dans les établissements horeca, puisqu’il n’est pas possible de manger ou de boire tout en portant le masque. L’introduction de mesures, telles que la distanciation sociale, a dès lors à nouveau un impact sur la rentabilité économique des établissements horeca. En instaurant l’obligation pour les établissements horeca d’imposer le COVID Safe Ticket (CST) à leurs visiteurs, la sécurité nécessaire des visiteurs contre une éventuelle contamination à la COVID-19 peut être garantie dans ces établissements, sans qu’il faille imposer l’obligation du port du masque. En raison du risque plus faible de contamination à l’air libre, les espaces extérieurs des établissements horeca sont exemptés de cette obligation. Il ne faut donc pas présenter un COVID Safe Ticket pour
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s’installer à la terrasse d’un établissement horeca, mais il est obligatoire de le présenter si l’on souhaite s’installer à l’intérieur du bâtiment ou dans un autre espace clos de l’établissement horeca. L’accès de courte durée à un établissement horeca, prévu pour une activité qui ne consiste pas à boire ou à manger, (par exemple, l’accès aux toilettes) est possible, sans qu’il soit obligatoire de présenter le COVID Safe Ticket, moyennant le port d’un masque buccal. Les organisations luttant contre la pauvreté, les initiatives d’aide alimentaire et les centres d’accueil de sans-abris et de sans-logis sont également exemptés de l’obligation de réclamer le COVID
Safe Ticket à leurs visiteurs, puisque le groupe cible de ces initiatives ne dispose normalement pas d’un COVID Safe Ticket. L’introduction de celui-ci pourrait rendre leur fonctionnement impossible.
Dans les centres de fitness également, le port d’un masque buccal se combine difficilement avec l’activité qui y est pratiquée. C’est pour cette raison qu’est introduite l’obligation pour les visiteurs de centres de fitness de présenter un COVID Safe Ticket. L’obligation porte uniquement sur les centres de fitness et sur les locaux dans les centres sportifs qui sont principalement utilisés pour la pratique des activités de fitness, et non sur tous les locaux des centres sportifs. En effet, des statistiques antérieures ont fait apparaître que les centres de fitness représentent un risque de transmission de la COVID-19 plus élevé que les autres centres de sport, en raison notamment de la densité élevée de visiteurs et du fait que les participants changent souvent d’appareil (et, pour des raisons d’organisation, une désinfection correcte des appareils pour chaque nouvel utilisateur est impossible à mettre en œuvre) » (Doc. parl., Parlement flamand, 2021-2022, n° 989/1, p. 8).
B.32. L’article 5, § 2, attaqué, du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021
fait naître une différence de traitement entre, d’une part, les visiteurs des espaces intérieurs d’établissements horeca et les visiteurs de centres de fitness et, d’autre part, les visiteurs d’autres centres sportifs, de foires commerciales, de congrès et d’établissements qui relèvent des secteurs culturel, festif et récréatif et les personnes qui voyagent en train. Alors que les premiers doivent obligatoirement utiliser le CST, tel n’est, en principe, pas le cas des seconds.
B.33.1. La différence de traitement attaquée repose sur un critère objectif, à savoir la nature de l’établissement ou de l’infrastructure que les personnes concernées souhaitent visiter.
B.33.2. Ce critère de distinction est pertinent à la lumière de l’objectif, mentionné en B.23.1, qui consiste à limiter la propagation du coronavirus SARS-CoV-2 et à tenir compte de la reprise des activités des citoyens telles qu’elles étaient exercées avant la pandémie de COVID-19. Il ressort en effet des travaux préparatoires du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 que le législateur décrétal a estimé que l’obligation du port du masque buccal se combine difficilement avec la pratique normale des activités horeca, alors que l’introduction d’autres mesures, telles que le maintien de la distance sociale, aurait un impact sur la rentabilité économique des établissements horeca. En ce qui concerne les centres de
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fitness, le législateur décrétal a constaté, sur la base de statistiques, qu’ils représentaient un risque plus élevé de transmission de la COVID-19 que d’autres centres sportifs, en raison de la densité élevée des visiteurs et du fait qu’ils changent souvent d’appareil. Les parties requérantes ne démontrent pas le contraire.
Le législateur décrétal a pu estimer que ces considérations ne s’appliquent en principe pas aux autres centres sportifs, foires commerciales, congrès et établissements relevant des secteurs culturel, festif et d’événements où le risque de transmission du virus est moins élevé, en ce que les règles minimales classiques pour limiter le risque de contamination (ventilation optimale, distance, masques buccaux, contacts limités) peuvent être appliquées de manière plus efficace.
Dans ces établissements et services également, l’utilisation du CST est en outre obligatoire lorsque des expériences et des projets pilotes ou des événements publics devant être considérés comme un événement de masse (au moins 3 000 visiteurs à l’intérieur ou 5 000 visiteurs à l’extérieur) s’y déroulent (article 5, § 1er, 1° et 2°, du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021).
En ce qui concerne les personnes qui voyagent en train, il convient de constater que l’accord de coopération du 14 juillet 2021, tel qu’il a été modifié par l’accord de coopération du 27 septembre 2021 et par l’accord de coopération du 28 octobre 2021, ne prévoit pas la possibilité pour les entités fédérées de permettre ou d’imposer l’utilisation du CST dans les trains. Ceci peut se justifier par le fait qu’il s’agit d’un service essentiel (voir dans ce sens l’exposé général relatif à l’accord de coopération du 27 septembre 2021, Moniteur belge, 1er octobre 2021, deuxième édition, p. 104680), ainsi que par le fait que les règles minimales classiques pour limiter le risque de contamination (ventilation optimale, distance, masques buccaux, contacts limités) peuvent y être appliquées plus efficacement.
B.33.3. Enfin, la différence de traitement ne produit pas des effets disproportionnés.
Comme il est dit en B.24.3, le CST peut en effet être obtenu au moyen d’un certificat de vaccination, d’un certificat de test et d’un certificat de rétablissement, de sorte que tout le monde peut en principe générer un CST pour pouvoir accéder aux espaces intérieurs des établissements horeca et aux centres de fitness.
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Par ailleurs, la disposition attaquée n’est pas applicable aux espaces extérieurs des établissements horeca, comme les terrasses. Eu égard au faible risque de contamination, ces espaces extérieurs ont été exemptés de l’obligation d’utilisation du CST. La disposition attaquée n’empêche pas non plus d’accéder pour une courte durée aux facilités d’un établissement horeca dans lesquelles on ne mange ni ne boit, comme, par exemple, les toilettes, sans disposer d’un CST, mais en portant tout de même d’un masque buccal. Les organisations luttant contre la pauvreté, les initiatives d’aide alimentaire et les centres d’accueil de sans-abris et de sans-logis ont eux aussi été exemptés de l’obligation d’utilisation du CST, puisque le législateur décrétal a estimé que le groupe cible de ces initiatives ne dispose normalement pas d’un CST et que cela rendrait dès lors impossible le fonctionnement de ces organisations.
Enfin, l’utilisation du CST a été limitée dans le temps. Ainsi, le décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021, n’était initialement en vigueur que du 1er novembre 2021 au 31 janvier 2022 (articles 7 et 8 du décret du 29 octobre 2021), ce qui a été prolongé jusqu’au 7 mars 2022 par le décret du 26 janvier 2022 et par l’arrêté du Gouvernement flamand du 5 mars 2022.
B.33.4. Compte tenu de ce qui précède, la différence de traitement, attaquée, entre, d’une part, les visiteurs des espaces intérieurs d’établissements horeca et ceux de centres de fitness, et, d’autre part, les visiteurs d’autres centres sportifs, de foires commerciales, de congrès et d’établissements relevant des secteurs culturel, festif et récréatif et les personnes qui voyagent en train est raisonnablement justifiée.
B.33.5. Le moyen unique dans les affaires nos 7668, 7669, 7671, 7672, 7676, 7677, 7678, 7681, 7682, 7687, 7691, 7692 et 7694, la branche « supplémentaire » du premier moyen et le troisième moyen dans l’affaire n° 7743 ne sont pas fondés dans cette mesure.
B.34.1. Enfin, les parties requérantes dans l’affaire n° 7743 soutiennent que certains restaurateurs dotés des compétences techniques nécessaires sur les sites Web parviendraient à contourner l’obligation d’utilisation du CST, ce qui serait discriminatoire envers ceux qui n’ont pas les connaissances nécessaires pour ce faire.
Cette différence de traitement ne résulte pas des dispositions attaquées, mais découlerait, le cas échéant, d’une pratique illégale qui ne relève pas de la compétence de la Cour.
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B.34.2. Le premier moyen dans l’affaire n° 7743, en sa branche supplémentaire, n’est pas fondé dans cette mesure.
III. Le droit à la liberté individuelle, le droit au respect de la vie privée et familiale et le droit à la protection des données à caractère personnel (moyen unique dans les affaires nos 7668, 7669, 7671, 7672, 7676, 7677, 7678, 7681, 7682, 7687, 7691, 7692 et 7694, deuxième et troisième branches du deuxième moyen et troisième moyen dans l’affaire n° 7739, et quatrième, sixième, septième, huitième, neuvième, seizième et vingtième branches du moyen unique dans l’affaire n° 7743)
B.35. Les parties requérantes dans les affaires nos 7668, 7669, 7671, 7672, 7676, 7677, 7678, 7681, 7682, 7687, 7691, 7692 et 7694 font valoir, dans leur moyen unique, que la restriction de la fréquentation des cafés, restaurants et salles de fitness, prévue à l’article 5, § 2, attaqué, du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021, viole le droit au respect de la vie privée et la liberté de mouvement, tels qu’ils sont garantis par l’article 22 de la Constitution, par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme et par l’article 2
du Protocole n° 4 à la même Convention.
Les parties requérantes dans l’affaire n° 7739 dénoncent, dans les deuxième et troisième branches de leur deuxième moyen et dans leur troisième moyen, que les dispositions attaquées qui prévoient l’utilisation du CST constituent une limitation de la liberté de mouvement, du droit au respect de la vie privée, du droit à l’intégrité physique et du droit à la protection des données à caractère personnel qui est contraire aux articles 12 et 22 de la Constitution, lus en combinaison avec l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, avec l’article 2 du Protocole n° 4 à cette Convention, avec les articles 7 et 8 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et avec l’article 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Par ailleurs, le principe de légalité qui est contenu dans les articles 12
et 22 de la Constitution serait violé, d’une part, en ce que le CST implique une obligation vaccinale cachée, ce qui est contraire au règlement (UE) 2021/953, et, d’autre part, en ce que les dispositions attaquées prévoient une utilisation facultative du CST et qu’elles ne sont donc pas suffisamment prévisibles et précises.
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Les parties requérantes dans l’affaire n° 7743 font valoir, dans les quatrième et sixième branches de leur premier moyen, que les dispositions attaquées violent l’article 22 de la Constitution et l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, en ce qu’il n’existe aucune restriction technique qui permette d’empêcher que des personnes non autorisées puissent lire le CST, et en ce que les dispositions attaquées ne tiennent pas compte de la situation des personnes qui ne peuvent pas recevoir de vaccin en raison de contre-indications médicales.
Elles font par ailleurs valoir, dans la septième branche de leur premier moyen, que les dispositions attaquées ne prévoient pas de garanties procédurales suffisantes, en ce qu’il n’existe pas d’intervention préalable d’un juge indépendant et impartial auprès duquel contester la décision de refus d’accès aux lieux visés par les dispositions attaquées. Dans les huitième et neuvième branches du premier moyen, elles soutiennent que le droit au respect de la vie privée est violé, en ce que le droit d’accéder aux toilettes n’est pas garanti, et en ce qu’il est obligatoire de présenter la carte d’identité, dont il est possible de déduire le lieu du domicile. Enfin, elles dénoncent, dans la vingtième branche de leur premier moyen, la violation de l’article 2 du Protocole n° 4 à la Convention européenne des droits de l’homme, lu en combinaison avec les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce que les dispositions attaquées ne prévoient pas la moindre dispense d’utilisation du CST, en particulier lorsqu’il s’agit de fréquenter un établissement horeca pour boire et manger et pour utiliser les toilettes lors d’un déplacement dans le cadre d’une activité urgente et nécessaire.
B.36.1. L’article 12 de la Constitution dispose :
« La liberté individuelle est garantie.
Nul ne peut être poursuivi que dans les cas prévus par la loi, et dans la forme qu’elle prescrit.
Hors le cas de flagrant délit, nul ne peut être arrêté qu’en vertu d’une ordonnance motivée du juge qui doit être signifiée au plus tard dans les quarante-huit heures de la privation de liberté et ne peut emporter qu’une mise en détention préventive ».
B.36.2. L’article 22 de la Constitution dispose :
« Chacun a droit au respect de sa vie privée et familiale, sauf dans les cas et conditions fixés par la loi.
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La loi, le décret ou la règle visée à l’article 134 garantissent la protection de ce droit ».
B.36.3. L’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme dispose :
« 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance.
2. Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui ».
B.36.4. L’article 2 du Protocole n° 4 à la Convention européenne des droits de l’homme dispose :
« 1. Quiconque se trouve régulièrement sur le territoire d’un État a le droit d’y circuler librement et d’y choisir librement sa résidence.
2. Toute personne est libre de quitter n’importe quel pays, y compris le sien.
3. L’exercice de ces droits ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au maintien de l’ordre public, à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui.
4. Les droits reconnus au paragraphe 1 peuvent également, dans certaines zones déterminées, faire l’objet de restrictions qui, prévues par la loi, sont justifiées par l’intérêt public dans une société démocratique ».
B.36.5. L’article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne dispose :
« Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de ses communications ».
B.36.6. L’article 8 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne dispose :
« 1. Toute personne a droit à la protection des données à caractère personnel la concernant.
2. Ces données doivent être traitées loyalement, à des fins déterminées et sur la base du consentement de la personne concernée ou en vertu d’un autre fondement légitime prévu par la
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loi. Toute personne a le droit d’accéder aux données collectées la concernant et d’en obtenir la rectification.
3. Le respect de ces règles est soumis au contrôle d’une autorité indépendante ».
B.36.7. L’article 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques dispose :
« 1. Nul ne sera l’objet d’immixtions arbitraires ou illégales dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d’atteintes illégales à son honneur et à sa réputation.
2. Toute personne a droit à la protection de la loi contre de telles immixtions ou de telles atteintes ».
B.37.1. L’article 12 de la Constitution et l’article 2 du Protocole n° 4 à la Convention européenne des droits de l’homme garantissent la liberté de mouvement.
L’article 22 de la Constitution, l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, l’article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et l’article 17
du Pacte international relatif aux droits civils et politiques garantissent le droit au respect de la vie privée et familiale, alors que l’article 8 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne vise spécifiquement à la protection des données à caractère personnel.
B.37.2. Le Constituant a recherché la plus grande concordance possible entre l’article 22
de la Constitution et l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme (Doc. parl., Chambre, 1992-1993, n° 997/5, p. 2). La portée de cet article 8 est analogue à celle de la disposition constitutionnelle précitée, de sorte que les garanties que fournissent ces deux dispositions forment un tout indissociable.
B.37.3. Le droit au respect de la vie privée et familiale, tel qu’il est garanti par les dispositions constitutionnelles et conventionnelles précitées, a pour but essentiel de protéger les personnes contre les ingérences dans leur vie privée et familiale.
Le droit au respect de la vie familiale englobe le droit au développement normal des relations familiales, et en particulier le droit, pour un parent et son enfant, d’être ensemble
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(CEDH, grande chambre, 13 juillet 2000, Elsholz c. Allemagne, ECLI:CE:ECHR:2000:0713JUD002573594, § 43; grande chambre, 12 juillet 2001, K. et T. c. Finlande, ECLI:CE:ECHR:2001:0712JUD002570294, § 151; 26 février 2002, Kutzner c. Allemagne, ECLI:CE:ECHR:2002:0226JUD004654499, § 58; 5 avril 2005, Monory c. Roumanie et Hongrie, ECLI:CE:ECHR:2005:0405JUD007109901, § 70; 26 mars 2013, Zorica Jovanović c. Serbie, 2013, ECLI:CE:ECHR:2013:0326JUD002179408, § 68).
Le droit au respect de la vie privée a une portée étendue et englobe, entre autres, le respect de l’intégrité physique de la personne (CEDH, grande chambre, 21 avril 2021, Vavřička e.a.
c. République tchèque, ECLI:CE:ECHR:2021:0408JUD004762113, § 261), à un certain degré, le droit de nouer et développer des relations avec ses semblables et avec le monde extérieur (CEDH, 16 décembre 1992, Niemietz c. Allemagne, ECLI:CE:ECHR:1992:1216JUD001371088, § 29; 29 avril 2002, Pretty c. Royaume-Uni, ECLI:CE:ECHR:2002:0429JUD000234602, §§ 61 et 67; 9 janvier 2013, Oleksandr Volkov c. Ukraine, ECLI:CE:ECHR:2013:0109JUD002172211, §§ 165-167; grande chambre, 24 janvier 2017, Paradiso et Campanelli c. Italie, ECLI:CE:ECHR:2017:0124JUD002535812, § 159; grande chambre, 5 septembre 2017, Bărbulescu c. Roumanie, ECLI:CE:ECHR:2017:0905JUD006149608, § 71; grande chambre, 8 avril 2021, Vavřička et autres c. République tchèque, § 261), et la protection des données à caractère personnel et des informations personnelles relatives à la santé (CEDH, 25 février 1997, Z. c. Finlande, ECLI:CE:ECHR:1997:0225JUD002200993, § 95; 10 octobre 2006, L.L. c. France, ECLI:CE:ECHR:2006:1010JUD000750802, § 32; 27 février 2018, Mockuté c. Lituanie, ECLI:CE:ECHR:2018:0227JUD006649009, § 93). La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme fait apparaître que de la protection de ce droit relèvent notamment les données et informations personnelles suivantes : le nom, l’adresse, les activités professionnelles, les relations personnelles, les empreintes digitales, les images filmées, les photographies, les communications, les données ADN, les données judiciaires (condamnations ou inculpations), les données financières, les informations concernant des biens et les données médicales (voy. notamment CEDH, 26 mars 1987, Leander c. Suède, ECLI:CE:ECHR:1987:0326JUD000924881, §§ 47-48; grande chambre, 4 décembre 2008, S.
et Marper c. Royaume-Uni, ECLI:CE:ECHR:2008:1204JUD003056204, §§ 66-68;
17 décembre 2009, B.B. c. France, ECLI:CE:ECHR:2009:1217JUD000533506, § 57;
10 février 2011, Dimitrov-Kazakov c. Bulgarie, ECLI:CE:ECHR:2011:0210JUD001137903, §§ 29-31; 18 octobre 2011, Khelili c. Suisse, ECLI:CE:ECHR:2011:1018JUD001618807,
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§§ 55-57; 9 octobre 2012, Alkaya c. Turquie, ECLI:CE:ECHR:2012:1009JUD004281106, § 29; 18 avril 2013, M.K. c. France, ECLI:CE:ECHR:2013:0418JUD001952209, § 26;
18 septembre 2014, Brunet c. France, ECLI:CE:ECHR:2014:0918JUD002101010, § 31;
13 octobre 2020, Frâncu c. Roumanie, ECLI:CE:ECHR:2020:1013JUD006935613, § 51).
La protection des données à caractère personnel relatives à la santé est capitale non seulement pour protéger la vie privée de la personne, mais également pour préserver sa confiance dans les services de santé (CEDH, 25 février 1997, Z. c. Finlande, ECLI:CE:ECHR:1997:0225JUD002200993, § 95). Sans une telle protection, les personnes pourraient être dissuadées de fournir les informations à caractère personnel et intime nécessaires à la prescription du traitement approprié, ce qui pourrait mettre en danger leur santé voire, dans les cas des maladies transmissibles, celle de la collectivité (ibid., § 95).
B.37.4. Les droits que garantissent les articles 12 et 22 de la Constitution, l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme et l’article 2 du Protocole n° 4 à la Convention européenne des droits de l’homme ne sont pas absolus. Ils n’excluent pas une ingérence d’une autorité publique dans la liberté de mouvement et dans l’exercice du droit au respect de la vie privée et familiale, mais exigent que cette ingérence soit prévue par une disposition législative suffisamment précise, qu’elle réponde à un besoin social impérieux dans une société démocratique et qu’elle soit proportionnée à l’objectif légitime qu’elle poursuit.
Le législateur dispose en la matière d’une marge d’appréciation. Cette marge n’est toutefois pas illimitée : pour qu’une norme soit compatible avec la liberté de mouvement et avec le droit au respect de la vie privée et familiale, il faut que le législateur ait établi un juste équilibre entre tous les droits et intérêts en cause.
B.37.5. Les articles 7 et 8 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ont, en ce qui concerne le traitement des données à caractère personnel, une portée analogue à celle de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme (CJUE, grande chambre, 9 novembre 2010, C-92/09 et C-93/09, Volker und Markus Schecke GbR et autres, ECLI:EU:C:2010:662) et de l’article 22 de la Constitution. Il en va de même pour l’article 17
du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
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B.37.6. Le respect du droit à la vie privée dans le cadre du traitement de données à caractère personnel se rapporte à toute information concernant une personne physique identifiée ou identifiable (CJUE, grande chambre, 9 novembre 2010, C-92/09 et C-93/09, Volker und Markus Schecke GbR e.a, ECLI:EU:C:2010:662, point 52; 16 janvier 2019, C-496/17, Deutsche Post AG, ECLI:EU:C:2019:26, point 54).
B.37.7. Les droits consacrés aux articles 7 et 8 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne n’apparaissent pas non plus comme étant des prérogatives absolues (CJUE, grande chambre, 16 juillet 2020, C-311/18, Data Protection Commissioner, ECLI:EU:C:2020:559, point 172).
Conformément à l’article 52, paragraphe 1, première phrase, de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, toute limitation de l’exercice des droits et libertés reconnus par celle-ci, dont notamment le droit au respect de la vie privée garanti par l’article 7
et le droit à la protection des données à caractère personnel consacré par l’article 8, doit être prévue par la loi, respecter le contenu essentiel de ces droits et, dans le respect du principe de proportionnalité, être nécessaire et répondre effectivement à des objectifs d’intérêt général ou au besoin de protection des droits et libertés d’autrui (CJUE, grande chambre, 6 octobre 2020, C-623/17, Privacy International, ECLI:EU:C:2020:790, point 64).
Dans le même sens, conformément à l’article 23 du règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 « relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données) » (ci-après : le RGPD), les limitations apportées à certaines obligations des responsables du traitement prévues par la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et aux droits des intéressés doivent être prévues par la loi, respecter l’essence des libertés et des droits fondamentaux et constituer une mesure nécessaire et proportionnée dans une société démocratique pour atteindre le but poursuivi et respecter les dispositions spécifiques contenues au paragraphe 2 (CJUE, grande chambre, 6 octobre 2020, C-511/18, C-512/18 et C-520/18, La Quadrature du Net, ECLI:EU:C:2020:791, points 209-210; 10 décembre 2020, C-620/19, Land Nordrhein-Westfalen, ECLI:EU:C:2020:1011, point 46).
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B.38. La Cour apprécie d’abord les moyens relatifs à la liberté de mouvement et au droit au respect de la vie privée et familiale, dans leurs dimensions relatives à l’intégrité physique et au maintien des relations familiales et sociales, et procède ensuite à l’examen des moyens relatifs au droit à la protection des données à caractère personnel.
a) la liberté de mouvement et le droit au respect de la vie privée et familiale
B.39. En ce que les parties requérantes soutiennent que les dispositions attaquées portent atteinte à leur intégrité physique parce qu’elles prévoient une obligation vaccinale, il suffit de constater que les parties requérantes fondent leur moyen sur une prémisse erronée.
Comme il est dit en B.23.2, il n’apparaît en effet pas que le législateur fédéral, les législateurs décrétaux et le législateur ordonnanciel aient instauré une obligation vaccinale.
B.40. La liberté individuelle, garantie par l’article 12 de la Constitution, et le droit de se déplacer librement sur le territoire de l’État, garanti par l’article 2 du Protocole n° 4 à la Convention européenne des droits de l’homme, garantissent que celui qui se trouve légalement sur le territoire n’est pas limité arbitrairement dans sa liberté de circuler par une mesure individuelle comme une assignation à résidence (par ex. CEDH, 7 décembre 2006, Ivanov c. Ukraine, ECLI:CE:ECHR:2006:1207JUD001500702, § 95) ou une interdiction temporaire de lieu (par ex. arrêt n° 44/2015, 23 avril 2015, B.60.9, ECLI:BE:GHCC:2015:ARR.044), mais ils n’empêchent pas que l’accès à certains lieux soit soumis à des conditions d’application générale, comme l’achat d’un titre d’accès ou la présentation d’un CST. Par conséquent, les dispositions attaquées ne relèvent pas du champ d’application de l’article 12 de la Constitution et de l’article 2 du Protocole n° 4 à la Convention européenne des droits de l’homme.
B.41.1. La possibilité ou l’obligation de soumettre l’accès à certains lieux et à certains services à la présentation d’un CST peut toutefois constituer une ingérence dans le droit au respect de la vie privée et familiale. La Cour contrôle les dispositions attaquées au regard de l’article 22 de la Constitution, lu en combinaison avec l’article 8 de la Convention européenne
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des droits de l’homme, avec l’article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et avec l’article 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
B.41.2. Les ingérences dans le droit au respect de la vie privée et familiale doivent tout d’abord être suffisamment accessibles et énoncées avec assez de précision dans une disposition législative pour permettre aux personnes auxquelles elles s’appliquent de régler leur conduite (CEDH, grande chambre, 8 avril 2021, Vavřička e.a. c. République tchèque, ECLI:CE:ECHR:2021:0408JUD004762113, § 266). La disposition législative doit en outre offrir des garanties adéquates pour protéger les individus contre des atteintes arbitraires (CEDH, grande chambre, 10 mars 2009, Bykov c. Russie, § 81; CEDH, 14 janvier 2021, Vig c. Hongrie, ECLI:CE:ECHR:2021:0114JUD005964813, §§ 51-62).
B.41.3. Les parties requérantes dans l’affaire n° 7739 font valoir à tort que l’ingérence dans le droit au respect de la vie privée n’est pas prévue par une norme juridique valable parce que les dispositions attaquées instaureraient une obligation vaccinale, ce qui est contraire au règlement (UE) 2021/953. Pour les mêmes motifs que ceux qui sont mentionnés en B.39, ce grief repose sur une prémisse erronée.
B.41.4.1. Les parties requérantes dans l’affaire n° 7739 allèguent par ailleurs que les dispositions attaquées ne sont pas suffisamment prévisibles et précises, en ce qu’elles prévoient une utilisation facultative du CST.
B.41.4.2. En vertu des articles 13bis, § 2, 2°, et 13ter de l’accord de coopération du 14 juillet 2021, tels qu’ils ont été modifiés par l’accord de coopération du 27 septembre 2021
et par l’accord de coopération du 28 octobre 2021, les entités fédérées, lorsqu’elles décident de mettre en œuvre l’utilisation du CST dans les établissements et services visés à l’article 1er, § 1er, 21°, du même accord de coopération, peuvent rendre l’utilisation du CST facultative ou obligatoire.
B.41.4.3.1. Conformément à ces dispositions, l’article 5, § 2, alinéa 2, dernière phrase, de l’ordonnance du 14 octobre 2021 prévoit que, lorsque le Collège réuni impose l’utilisation du CST pour certains événements et services, l’organisateur d’un événement ou l’exploitant d’un
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établissement qui n’est pas concerné par l’obligation en raison du nombre limité de visiteurs (moins de 50 visiteurs simultanément pour les établissements et événements et moins de 200 personnes simultanément pour les centres sportifs et de fitness) « est autorisé à l’appliquer moyennant information préalable des visiteurs ».
Dans un sens analogue, l’article 4 du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 dispose que les organisateurs d’événements publics qui sont accessibles à un public d’au moins 200 personnes et de 2 999 personnes maximum lorsqu’ils sont organisés en intérieur et d’au moins 400 personnes et de 4 999 personnes maximum lorsqu’ils sont organisés en extérieur peuvent appliquer le CST pour les visiteurs âgés de douze ans et deux mois et plus.
Dans ce cas, ils doivent informer préalablement les visiteurs, d’une part, de la nécessité de présenter un CST pour accéder à l’événement et, d’autre part, du traitement de leurs données à caractère personnel dans le cadre du CST.
B.41.4.3.2. Lorsque les seuils à partir desquels le législateur compétent a souhaité imposer l’utilisation du CST ne sont pas atteints, l’article 5, § 2, alinéa 2, dernière phrase, attaqué, de l’ordonnance du 14 octobre 2021 et l’article 4, attaqué, du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 permettent ainsi aux organisateurs et exploitants des événements, établissements et services qu’ils visent de décider de la mise en œuvre ou non du CST.
Contrairement à ce que soutiennent les parties requérantes dans l’affaire n° 7739, la liberté des organisateurs et exploitants des événements, établissements et services de décider de la mise en œuvre ou non du CST et la liberté des intéressés d’assister ou non à ces événements et de fréquenter ou non ces établissements et services quand l’organisateur ou l’exploitant a choisi de mettre en œuvre le CST s’exercent dans un cadre législatif suffisamment prévisible et précis.
Tout d’abord, la faculté d’imposer le CST ou non ne s’applique que lorsque les seuils précités ne sont pas atteints. Ensuite, l’article 5, § 2, alinéa 2, dernière phrase, de l’ordonnance du 14 octobre 2021 et l’article 4 du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 mettent à charge de ces organisateurs et exploitants une obligation préalable d’information du visiteur de l’exigence de la présentation du CST. Ces dispositions établissent encore que l’application
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du CST doit, dans ce cas, valoir indistinctement pour tous les visiteurs. Enfin, elles sont applicables pendant une durée bien limitée, qui est décrite en B.7.1 et en B.7.3.
En ce qui concerne l’article 4, du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021
et l’article 5, § 2, alinéa 2, dernière phrase, de l’ordonnance du 14 octobre 2021, le moyen pris de la violation du principe de légalité contenu dans la garantie du droit au respect de la vie privée n’est pas fondé.
B.41.4.4.1. De plus, l’article 3 du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021
dispose que l’application du CST est autorisée pour les visiteurs âgés d’au moins douze ans et deux mois des établissements de soins résidentiels pour personnes vulnérables mentionnés dans cet article, à savoir les hôpitaux, centres de soins résidentiels, hôpitaux de revalidation et établissements pour personnes handicapées.
Dans les développements de la proposition de décret qui a conduit au décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021, il est précisé, en ce qui concerne cette disposition :
« Les circonstances épidémiologiques soumises à l’évaluation du RAG justifient l’extension du champ d’application du Covid Safe Ticket aux visiteurs de certains établissements de soins résidentiels accueillant des personnes vulnérables [...]. En effet, ces circonstances sont toujours les mêmes que celles décrites dans le commentaire relatif à l’accord de coopération susmentionné :
‘ L’introduction du COVID Safe Ticket pour les visiteurs des facilités accueillant des personnes vulnérables est à nouveau dictée par le constat que, même si elles sont complètement vaccinées, ces personnes courent toujours un risque plus élevé de tomber gravement malade ou de mourir d’une infection au coronavirus SARS-CoV-2. Par conséquent, des mesures de précaution supplémentaires sont nécessaires pour ces groupes. Le COVID Safe Ticket fait en sorte que les personnes qui visitent ces secteurs risquent moins d’être infectées et réduit sensiblement le risque d’infection pour les patients ou pour les résidents atteints du coronavirus COVID-19 est sensiblement réduit. L’utilisation du COVID Safe Ticket limite également davantage la circulation du coronavirus COVID-19 ainsi que l’énorme risque d’infections de percée. Cela permet d’éviter la saturation des établissements de santé et, en outre, d’éviter une nouvelle fermeture des établissements et facilités à haut risque.
Toutefois, l’utilisation du COVID Safe Ticket dans ces établissements ne s’étend pas aux personnes qui (i) se présentent pour recevoir des soins ou par le biais d’une consultation générale (par exemple : des patients ou des personnes nécessitant des soins) ou qui (ii) participent ou sont impliquées dans la prestation de soins (par exemple : médecin généraliste, kinésithérapeute, bénévole, intervenant de proximité, ...) et qui, de ce point de vue,
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peuvent être identifiées par la direction ou l’organisation de ces établissements. En outre, le COVID Safe Ticket ne peut être imposé aux personnes qui, en raison d’une nécessité de service ou de soins, ont besoin d’accéder à l’établissement et dans la mesure où ces personnes sont connues de l’établissement (on peut penser ici à la situation où une fille est appelée au centre de soins résidentiels pour assister son parent mourant). Ces catégories de personnes, auxquelles l’utilisation du COVID Safe Ticket ne s’applique pas dans ces établissements, peuvent être soumises à des mesures sanitaires supplémentaires ’ » (Doc. parl, Parlement flamand, 2021-
2022, n° 989/1, p. 3).
La section de législation du Conseil d’État a observé, en ce qui concerne cette disposition :
« À en juger par ces développements, on s’attendrait plutôt à ce que le texte même de la proposition définisse les cas dans lesquels l’utilisation du Covid Safe Ticket sera obligatoire dans les établissements concernés et les exceptions autorisées. Tel n’est toutefois pas le cas :
étant donné qu’il est mentionné que l’application du Covid Safe ticket ‘ est autorisée ’, la décision de l’appliquer est laissée de manière implicite, mais claire, aux établissements concernés, sans que soit prescrit le moindre critère à respecter par lesdits établissements et sans que soient garanties, par exemple, les exceptions citées dans ce commentaire. Aucun critère en rapport avec la présence ou l’imminence d’une infection dite ‘ de percée ’ n’est non plus formulé.
De tels critères sont pourtant d’une importance capitale pour éviter que les décisions qui résulteront de cette mesure et que prendront ces établissements soient entachées d’arbitraire et entraînent une restriction disproportionnée du droit au respect de la vie de famille, tant dans le chef des visiteurs que dans le chef des occupants des établissements concernés. Eu égard, notamment, au principe de légalité contenu dans l’article 22 de la Constitution, il est dès lors fortement conseillé d’élaborer des critères dans la réglementation proposée à proprement parler, dans le prolongement de ce que les auteurs de la proposition proposent eux-mêmes dans l’exposé des motifs, de sorte que les établissements disposent d’un cadre contraignant pour déterminer dans quels cas ils peuvent ou non prévoir l’obligation d’utiliser le Covid Safe Ticket.
Ces critères doivent de toute évidence être assez souples pour offrir la souplesse requise pour pouvoir réagir adéquatement aux infections de percée, mais ils doivent également être suffisamment précis et délimités pour ne pas aboutir à des décisions arbitraires et à des mesures disproportionnées » (CE, avis n° 70.319/3 du 22 octobre 2021, p. 11, point 9.2).
B.41.4.4.2. En ce que l’article 3, attaqué, du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 autorise les établissements de soins résidentiels pour personnes vulnérables mentionnés dans cet article à appliquer le CST pour les visiteurs âgés d’au moins douze ans et deux mois, sans élaborer des critères précisant les situations dans lesquelles ces établissements peuvent appliquer le CST et sans préciser les catégories de personnes auxquelles le CST n’est pas applicable, cette disposition ne permet pas suffisamment aux visiteurs de ces établissements de savoir si l’utilisation d’un CST est obligatoire ou non et n’offre pas des garanties adéquates contre des atteintes disproportionnées au droit au respect de la vie privée. De tels critères
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s’imposent d’autant plus que la réglementation de l’accès aux établissements de soins résidentiels pour personnes vulnérables est également susceptible de porter atteinte au droit au respect de la vie familiale.
L’article 3, attaqué, du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 ne satisfait donc pas à l’exigence de précision et de prévisibilité, telle qu’elle découle de l’article 22 de la Constitution et de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, en ce qu’il ne prévoit pas des critères et exceptions qui permettent aux visiteurs des établissements mentionnés dans cette disposition de prévoir si l’utilisation d’un CST est obligatoire ou non.
B.42. La Cour doit encore vérifier si les dispositions attaquées poursuivent un objectif légitime et si la mesure attaquée est nécessaire dans une société démocratique et est proportionnée à l’objectif poursuivi.
B.43. Les dispositions attaquées poursuivent un objectif légitime. Comme il est dit en B.23.1, l’utilisation du CST vise à « limiter la propagation du coronavirus COVID-19 » et à « tenir compte de la reprise des activités des citoyens telles qu’elles étaient avant la pandémie de COVID-19 » (exposé général relatif à l’accord de coopération du 14 juillet 2021, Moniteur belge, 23 juillet 2021, troisième édition, p. 76170). Une telle mesure vise dès lors à préserver la santé d’autrui et la santé publique, ainsi que les droits et libertés d’autrui.
B.44.1. Pour examiner la nécessité de la mesure attaquée, la Cour doit prendre en compte les spécificités du coronavirus SARS-CoV-2, ainsi que la réalité épidémiologique de la pandémie de COVID-19. Le coronavirus SARS-CoV-2 est un virus aéroporté très contagieux qui, dans la pratique, se transmet essentiellement par la respiration. Les contacts physiques rapprochés entre les personnes constituent donc le facteur de risque le plus important.
La pandémie de COVID-19 se caractérise par un taux de reproduction élevé. Si des mesures sanitaires ne sont pas prises, ce virus se propage très rapidement, de manière exponentielle.
Cette pandémie se caractérise aussi par un nombre élevé de patients asymptomatiques qui peuvent néanmoins s’avérer être des supercontaminateurs. Parmi les patients qui développent
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des symptômes, nombreux sont ceux qui doivent être hospitalisés et qui nécessitent même des soins intensifs, voire décèdent.
B.44.2. À cet égard, l’État belge est soumis à une obligation positive, découlant des articles 2 et 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, de prendre les mesures nécessaires à la protection de la vie et de la santé des personnes relevant de sa juridiction (voy.
en ce sens, CEDH, grande chambre, 8 avril 2021, Vavřička e.a. c. République tchèque, ECLI:CE:ECHR:2021:0408JUD004762113, § 282).
Il ressort des connaissances scientifiques telles qu’elles étaient disponibles au moment de l’adoption des dispositions attaquées que les personnes qui peuvent générer le CST, à savoir les personnes qui ont été récemment vaccinées contre la COVID-19, celles qui se sont rétablies récemment de la COVID-19 et celles qui ont subi un test COVID-19 dont le résultat était négatif, présentent un risque bien moins élevé de contaminer une autre personne à la COVID-
19 (voy. notamment l’exposé général relatif à l’accord de coopération du 14 juillet 2021, Moniteur belge, 23 juillet 2021, troisième édition, p. 76177; voy. dans ce sens aussi le considérant n° 7 du règlement (EU) 2021/953). Eu égard à ce consensus scientifique, le législateur pouvait considérer que l’utilisation du CST est nécessaire pour protéger la vie et la santé tant des personnes concernées elles-mêmes que des autres personnes au sein de la société, ainsi que pour « éviter que toute une série d’activités ne doivent à nouveau être restreintes ou que des secteurs ne doivent être fermés » (exposé général relatif à l’accord de coopération du 27 septembre 2021, Moniteur belge, 1er octobre 2021, deuxième édition, p. 104680), et ainsi protéger les droits et libertés d’autrui.
Comme il est dit en B.24.2, les parties requérantes ne démontrent pas que les avis qu’elles invoquent pour contester la nécessité et la pertinence de la mesure attaquée sont plus fiables que la recherche scientifique sur laquelle le législateur fédéral, les législateurs décrétaux et le législateur ordonnanciel se sont fondés et que la recherche scientifique invoquée par les parties institutionnelles.
B.45.1. Enfin, pour les motifs qui sont mentionnés en B.24.3, les dispositions attaquées ne sont pas disproportionnées à l’objectif poursuivi.
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B.45.2. En ce que les parties requérantes dans l’affaire n° 7743 soutiennent que le législateur n’a pas prévu de régime pour les personnes qui, pour des raisons médicales, ne peuvent pas recevoir le vaccin, il convient de constater que, dans ces cas très exceptionnels, les personnes concernées peuvent générer le CST sur la base d’un certificat de test ou de rétablissement. Comme il est dit en B.24.3, il n’apparaît pas que l’obligation de se faire tester constitue une charge financière ou organisationnelle excessive. En outre, les personnes qui, pour des raisons médicales, ne peuvent pas se faire vacciner ou ne peuvent pas se faire vacciner complètement contre la COVID-19 en raison d’un risque très élevé de réactions allergiques sévères lors de la vaccination ou d’effets secondaires graves lors de la première dose, ce qui rendrait la poursuite de la vaccination dangereuse, peuvent obtenir un remboursement pour un test PCR certifié ou pour un test antigénique rapide (article 1/1 de l’arrêté royal du 1er juillet 2021). L’autorisation de remboursement, qui est accordée par un médecin d’un centre de référence allergologique dans le cadre de la campagne de vaccination contre la COVID-19, vaut pour un nombre illimité de tests, est valable un an et est automatiquement prolongée si l’utilisation du CST est encore obligatoire.
B.45.3.1. Par ailleurs, les parties requérantes dans l’affaire n° 7743 allèguent que les dispositions attaquées ne prévoient aucune exemption d’utilisation du CST lorsqu’il s’agit de fréquenter un établissement horeca dans le cadre d’activités consistant à manger, boire et aller aux toilettes lors d’un déplacement dans le cadre d’une activité urgente et nécessaire qui ne saurait être reportée, et que le droit d’accès aux toilettes lors de déplacements n’est pas garanti.
B.45.3.2. Tant l’ordonnance du 14 octobre 2021 que le décret de la Région wallonne du 21 octobre 2021 et le décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 prévoient que l’utilisation du CST ne peut pas être imposée dans les espaces extérieurs d’établissements horeca, à condition que certaines règles minimales soient respectées, le cas échéant. Les autorités institutionnelles soulignent que, dans ce cadre, chacun peut payer à l’intérieur et utiliser les installations sanitaires, sans devoir présenter un CST. Dans ce sens, l’article 5, § 2, b), du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 prévoit expressément que l’utilisation du CST n’est pas obligatoire en ce qui concerne l’accès de courte durée à un établissement horeca qui n’est pas destiné à la consommation, à condition que la personne concernée porte un masque buccal. En outre, l’article 2, 12°, a), du décret de la Région wallonne du 21 octobre 2021 exclut de son champ d’application ratione personae la personne qui pénètre dans un établissement horeca dans le seul but de réaliser un achat à emporter, sans consommer
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sur place, ou qui est installée en terrasse et qui accède à l’intérieur pour commander, pour payer ou pour utiliser les toilettes. Enfin, l’article 2, 12°, de l’ordonnance du 14 octobre 2021 prévoit une exception pour les personnes qui n’accèdent que brièvement à l’évènement ou à l’établissement sans y participer ou y prendre place.
B.45.4. Contrairement à ce que soutiennent les parties requérantes dans l’affaire n° 7743, l’article 22 de la Constitution et l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme n’exigent pas une intervention judiciaire préalable chaque fois qu’est prise une décision de refuser l’accès à un événement, établissement ou service.
B.45.5. En ce que les parties requérantes dans les affaires n os 7668, 7669, 7671, 7672, 7676, 7677, 7678, 7681, 7682, 7687, 7691, 7692 et 7694 renvoient à l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme du 8 avril 2021 en cause de Vavřička e.a. c. République tchèque (ECLI:CE:ECHR:2021:0408JUD004762113), il suffit de constater que cet arrêt porte sur une obligation de vacciner les enfants contre certaines maladies, alors que les dispositions attaquées ne prévoient pas une obligation vaccinale. Contrairement à ce que soutiennent les parties requérantes, il ne découle aucunement de cet arrêt qu’en l’absence d’une obligation légale de vaccination, le fait de ne pas être vacciné ne peut avoir des effets préjudiciables.
B.46. Il découle de ce qui précède que l’article 3 du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 doit être annulé en cela seul qu’il ne prévoit ni critères ni exceptions qui permettent aux visiteurs des établissements mentionnés dans cette disposition de prévoir si l’utilisation d’un CST est obligatoire ou non.
Pour le surplus, les dispositions attaquées ne sont pas contraires au droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l’article 22 de la Constitution et par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme.
B.47. Le troisième moyen dans l’affaire n° 7739, en sa première branche, est fondé dans la mesure indiquée en B.46.
Pour le surplus, le moyen unique dans les affaires nos 7668, 7669, 7671, 7672, 7676, 7677, 7678, 7681, 7682, 7687, 7691, 7692 et 7694, le deuxième moyen, en ses deuxième et troisième branches, et le troisième moyen dans l’affaire n° 7739, en sa première branche, ainsi que le
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premier moyen dans l’affaire n° 7743, en ses sixième, septième, huitième et vingtième branches, ne sont pas fondés.
b) Le droit à la protection des données à caractère personnel
B.48.1. En vertu de l’article 12 de l’accord de coopération du 14 juillet 2021, le traitement des données personnelles du certificat COVID numérique de l’UE a pour but de lire et, le cas échéant, de générer le CST via le module CST de l’application COVIDScan, afin de contrôler si le titulaire du certificat COVID numérique de l’UE remplit les conditions d’accès à un événement, à un établissement ou à un service pour lesquels l’utilisation du CST doit ou peut être appliquée, ainsi que l’identité du titulaire d’un certificat COVID numérique de l’UE au moyen d’un document d’identité.
B.48.2. L’article 13, § 1er, de l’accord de coopération du 14 juillet 2021 dispose que, pour générer le CST, les catégories de données à caractère personnel du certificat COVID numérique de l’UE font l’objet d’un traitement. Conformément à l’article 9 du même accord de coopération, qui renvoie en la matière aux articles 5, paragraphe 2, 6, paragraphe 2, et 7, paragraphe 2, du règlement (UE) 2021/953, ces catégories de données à caractère personnel sont l’identité du titulaire du certificat et, dans le cas d’un certificat de vaccination, des informations sur le vaccin contre la COVID-19 administré au titulaire et sur le nombre de doses administrées au titulaire, dans le cas d’un certificat de test, des informations sur le test COVID-
19 certifié auquel le titulaire a été soumis, et, enfin, dans le cas d’un certificat de rétablissement, des informations sur les antécédents d’infection au coronavirus SARS-CoV-2 du titulaire à la suite du résultat positif d’un test datant de 180 jours maximum.
En vertu de l’article 14, § 1er, de l’accord de coopération du 14 juillet 2021, ces données ne sont pas conservées par l’émetteur plus longtemps que ce qui est strictement nécessaire à la finalité poursuivie et, en tout état de cause, elles ne sont pas conservées au-delà de la période durant laquelle le certificat COVID numérique de l’UE peut être utilisé pour exercer le droit à la libre circulation. En ce qui concerne les certificats de rétablissement, le délai de conservation est en tout cas limité à 180 jours.
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B.48.3. L’article 13, § 2, de l’accord de coopération du 14 juillet 2021, tel qu’il a été modifié par l’accord de coopération du 27 septembre 2021, prévoit que le CST contient et affiche les données suivantes :
« 1° l’indication si l’accès à l’événement de masse, à l’ expérience et au projet pilote, à un dancing ou une discothèque ou aux établissements et facilités pour lesquels l’utilisation du Covid Safe Ticket peut être appliquée, peut être autorisé ou doit être refusé au titulaire, en sa qualité de visiteur d’un événement de masse, d’une expérience et un projet pilote, d’un dancing ou une discothèque ou d’ établissements et facilités pour lesquels l’utilisation du COVID Safe Ticket peut être appliquée;
2° les données d’identité du titulaire, à savoir le nom et le prénom;
3° la durée de validité du COVID Safe Ticket ».
L’exposé général relatif à l’accord de coopération du 14 juillet 2021 souligne en la matière :
« Le COVID Safe Ticket est le certificat COVID numérique de l’UE, mais sous une forme différente qui contient moins de données personnelles dans la front-end. De cette façon, les principes de proportionnalité, de confidentialité et d’intégrité des données sous-jacentes du certificat COVID numérique de l’UE sont garantis. [...]
[...]
En outre, le COVID Safe Ticket est l’instrument le plus approprié pour réaliser la minimisation des données. Si les organisateurs d’événements pouvaient scanner et lire le certificat COVID numérique de l’UE, ils recevraient diverses données concernant la santé du titulaire, ce qui ne serait pas du tout souhaitable et serait contraire au principe de proportionnalité du Règlement Général sur la Protection des Données. Avec le COVID Safe Ticket, seuls un code-barres, une durée de validité et un nom sont affichés. En outre, le COVID
Safe Ticket est généré pour les personnes qui ont été vaccinées contre le coronavirus COVID-
19, qui ont un test TAAN reconnu ou un test rapide à l’antigénique reconnu négatif, ou qui se sont récemment rétablies d’une infection au coronavirus COVID-19. Il a été scientifiquement démontré que les personnes qui se trouvent dans l’une de ces situations sont beaucoup moins susceptibles d’infecter une autre personne avec le coronavirus COVID19 » (Moniteur belge, 23 juillet 2021, troisième édition, pp. 76176-76177).
En vertu de l’article 13, § 3, de l’accord de coopération du 14 juillet 2021, tel qu’il a été modifié par l’accord de coopération du 27 septembre 2021, le CST ne peut être lu qu’au moyen du module CST de l’application COVIDScan par les personnes chargées du contrôle d’accès aux événements, établissements et services pour lesquels l’utilisation du CST doit ou peut être
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appliquée, soit par les gestionnaires et directeurs et le personnel de ces établissements et facilités pour lesquels l’utilisation du CST peut être appliquée, pour autant que ceux-ci soient déployés sur une base exclusive et chargés du contrôle du CST, soit par le personnel d’une entreprise de surveillance ou d’un service de surveillance interne.
L’article 14, § 2, de l’accord de coopération du 14 juillet 2021 dispose que les données visées à l’article 13, § 2, précité, sont supprimées immédiatement après le traitement des données à caractère personnel pour la lecture du CST. L’exposé général relatif à l’accord de coopération du 27 septembre 2021 souligne en la matière :
« Les données à caractère personne[l] qui sont traitées par la lecture du COVID Safe Ticket ne peuvent pas être stockées ou échangées. Le code-barres du certificat COVID numérique de l’UE est lu par l’application COVIDScan et, sur la base de ces données, le COVID Safe Ticket visualise les données qu’il contient. Les données à caractère personnel lues ne sont pas stockées dans un fichier et les données dans la mémoire cache sont supprimées dès qu’un nouveau code-
barres est scanné ou que l’application COVIDScan est désactivée. Les données à caractère person[n]el ne sont pas non plus échangées avec une application externe. Par conséquent, il n’est pas possible d’utiliser l’application COVIDScan pour tracer ou enregistrer des visiteurs de manière illicite, ce qui est bien entendu interdit dans tous les cas. En ce sens, il n’est donc pas permis, lors de la lecture du COVID Safe Ticket, d’effectuer un stockage direct ou indirect de données à caractère personnel autre que celui expressément prévu dans le présent accord de coopération » (Moniteur belge, 1er octobre 2021, deuxième édition, p. 104687).
B.49. Comme il est dit en B.37.3, le droit au respect de la vie privée englobe la protection des données à caractère personnel et des informations personnelles dont relèvent, notamment, le nom et les données de santé.
En ce que les dispositions attaquées prévoient le traitement de données à caractère personnel, y compris de données sensibles sur la santé, pour la génération et la lecture du CST, elles entraînent une ingérence dans le droit à la protection des données à caractère personnel.
B.50. Les parties requérantes dans l’affaire n° 7739 allèguent que cette ingérence n’est pas proportionnée et que les dispositions attaquées portent atteinte au principe de la minimisation du traitement des données, au principe de la légitimité et au principe de l’intégrité et de la confidentialité.
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B.51. En ce qui concerne le caractère proportionné du traitement des données à caractère personnel, les parties requérantes se contentent de renvoyer à leur exposé relatif à la violation de la liberté de mouvement et du droit au respect de la vie privée.
Pour les mêmes motifs que ceux qui sont mentionnés en B.45, la mesure attaquée n’est pas disproportionnée.
B.52.1. En vertu du principe de la minimisation des données, les données à caractère personnel doivent être adéquates, pertinentes et limitées à ce qui est nécessaire au regard des finalités pour lesquelles elles sont traitées (article 5, paragraphe 1, c), du RGPD).
B.52.2. Il peut être considéré que le traitement des catégories de données à caractère personnel du certificat COVID numérique de l’UE visées à l’article 9 de l’accord de coopération du 14 juillet 2021, à savoir les données sur l’identité du titulaire du certificat et les données sur le vaccin contre la COVID-19 administré, sur le test COVID-19 effectué ou sur les antécédents d’infection au coronavirus SARS-CoV-2, est nécessaire pour contrôler si le titulaire du certificat COVID numérique de l’UE satisfait aux conditions d’accès aux événements, établissements et services pour lesquels l’utilisation du CST doit ou peut être appliquée, et ce, afin de limiter la propagation du coronavirus SARS-CoV-2 et, partant, de garantir la santé d’autrui et la santé publique.
B.52.3. Il ressort par ailleurs de l’exposé relatif à l’accord de coopération du 14 juillet 2021 mentionné en B.49.3 que le législateur entendait respecter le principe de la minimisation du traitement des données en limitant les données qui s’affichent pour la lecture du CST au nom et au prénom du titulaire du CST, à la mention selon laquelle cette personne peut être autorisée ou non à accéder à l’événement, à l’établissement ou au service en question, ainsi qu’à la durée de validité du CST. Il peut être considéré que ces données sont nécessaires pour apprécier si l’intéressé peut être autorisé ou non à accéder à l’événement, à l’établissement ou au service en question, afin de limiter la propagation de la COVID-19 et, partant, de garantir la santé d’autrui et la santé publique.
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Contrairement à ce que soutiennent les parties requérantes dans l’affaire n° 7739, les organisateurs d’événements et les exploitants d’établissements et de services qui peuvent lire le CST via l’application COVIDScan en vertu de l’article 13, § 3, de l’accord de coopération n’ont pas connaissance de la situation sanitaire ni du statut vaccinal du titulaire du CST. Ils ne sont en effet pas informés du type de certificat ayant servi à générer le CST, ni de la raison pour laquelle l’accès doit être accordé ou refusé. Contrairement à ce que soutiennent les parties requérantes dans l’affaire n° 7743, les organisateurs d’événements et les exploitants d’établissements et de services précités ne sont pas non plus informés de l’adresse du titulaire du CST, dès lors que ni le CST proprement dit ni la carte d’identité qui est vérifiée afin d’authentifier le titulaire du CST n’affichent ce type de donnée à caractère personnel.
En ce que les parties requérantes dans l’affaire n° 7739 soutiennent que « des mesures de protection, le port de masques buccaux et le recours à la ventilation maximale où cela est possible » sont des mesures moins attentatoires qui permettent d’atteindre le même objectif, il suffit de constater que le CST a précisément été instauré pour permettre l’accès aux événements, établissements et services énumérés limitativement où les règles minimales classiques visant à limiter le risque de contamination (ventilation optimale, distance, masques, contacts restreints)
sont difficilement applicables (voir dans ce sens l’exposé général relatif à l’accord de coopération du 27 septembre 2021, Moniteur belge, 1er octobre 2021, deuxième édition, p. 104680).
B.53.1. Les parties requérantes dans l’affaire n° 7739 soutiennent par ailleurs que la possibilité pour les organisateurs et exploitants de certains événements, établissements et services d’utiliser le CST de manière facultative viole le principe de la légitimité du traitement des données à caractère personnel consacré par l’article 5, paragraphe 1, a), du RGPD. Les parties requérantes reprennent à ce sujet leur exposé sur la violation du principe de légalité contenu dans les articles 12 et 22 de la Constitution.
B.53.2. L’article 5, paragraphe 1, a), du RGPD établit que les données à caractère personnel doivent être traitées « de manière licite, loyale et transparente au regard de la personne concernée (licéité, loyauté, transparence) ». L’article 6, paragraphe 1, a), du même
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règlement établit que le traitement est licite quand la personne concernée a consenti au traitement de ses données à caractère personnel pour une ou plusieurs finalités spécifiques.
B.53.3. La personne concernée qui décide d’assister à des événements ou de fréquenter des établissements et services quand l’organisateur ou l’exploitant a lui-même choisi de mettre en œuvre le CST dans les conditions décrites en B.41.4.3.1 est informée de la condition de présentation du CST et donne nécessairement son consentement au traitement des données que constitue la consultation du CST. À ces mêmes conditions, ce traitement respecte les obligations de loyauté et de transparence.
En ce qu’il concerne l’article 4 du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021
et l’article 5, § 2, alinéa 2, dernière phrase, de l’ordonnance du 14 octobre 2021, le moyen, en cette branche, n’est pas fondé.
B.53.4. Dès lors que, comme il est dit en B.46, l’article 3 du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 doit être annulé, la branche du moyen ne peut conduire à une annulation plus étendue de cette disposition et il n’y a pas lieu de l’examiner.
B.54.1. Les parties requérantes dans l’affaire n° 7739 allèguent que les dispositions relatives au CST qui sont attaquées portent atteinte au principe de l’intégrité et de la confidentialité du traitement des données à caractère personnel, en ce qu’il serait possible, en tant qu’utilisateur, de changer l’option permettant de scanner le certificat COVID numérique de l’UE de voyageurs entrants et d’utiliser l’option permettant de scanner le CST pour accéder à des événements. Par ailleurs, les parties requérantes renvoient à une étude sur une éventuelle faille de sécurité dans l’application COVIDScan, que l’Autorité de protection des données a entamée en octobre 2021.
B.54.2. En vertu du principe d’intégrité et de confidentialité, les données à caractère personnel doivent être adéquates, pertinentes et limitées à ce qui est nécessaire au regard des finalités pour lesquelles elles sont traitées (article 5, paragraphe 1, f), du RGPD).
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B.54.3. En ce qui concerne l’affirmation des parties requérantes selon laquelle l’utilisateur de l’application COVIDScan, pourrait, lors de la vérification du CST, activer soit le mode « Voyageur entrant Belgique » soit le mode « Événements (COVID Safe Ticket) », il convient d’observer que l’utilisation de l’application COVIDScan en mode « Voyageur entrant Belgique » ne fait apparaître sur l’écran que le prénom, le nom et la date de naissance du titulaire du certificat COVID, ainsi que la validité de ce dernier (voy. dans ce sens le Tribunal de l’Union européenne, 27 avril 2022, T-710/21, T-722/21 et T-723/21, Roos e.a. c. Parlement européen, ECLI:EU:T:2022:262, § 183). Les parties requérantes ne démontrent pas les conséquences préjudiciables qui en découlent, d’autant que ces données apparaissent également lorsque l’application COVIDScan est utilisée en mode « Événements (COVID Safe Ticket) » et lors du contrôle de la carte d’identité aux fins de l’authentification du titulaire du CST.
B.54.4. En ce qui concerne la prétendue faille de sécurité à laquelle les parties requérantes font référence, il suffit de constater que la simple existence d’une étude menée par l’Autorité de protection des données ne suffit pas pour conclure à une violation du principe de l’intégrité et du principe de la confiance. Les parties requérantes n’invoquent pas d’autres éléments concrets à l’appui de la prétendue violation de ce principe.
B.55. Les parties requérantes dans l’affaire n° 7743 critiquent le fait qu’aucune « limitation technique » ne permet d’empêcher que des personnes non autorisées puissent lire le CST. Il suffit, à cet égard, de constater que le CST ne peut être lu qu’avec la collaboration du titulaire du CST, qui doit le générer lui-même en téléchargeant une application sur son smartphone ou via un ordinateur. Une telle « limitation technique » a donc pu être considérée comme n’étant pas nécessaire.
B.56.1. Les parties requérantes dans l’affaire n° 7743 soutiennent par ailleurs qu’il n’existe aucune garantie que l’utilisation du CST ne permettra pas à l’autorité publique de suivre les titulaires du CST.
B.56.2. En vertu du principe de la limitation des finalités, les données à caractère personnel doivent être collectées pour des finalités déterminées, explicites et légitimes et le traitement ultérieur éventuel de ces données doit être compatible avec ces finalités initiales (article 5, paragraphe 1, b), du RGPD).
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B.56.3. En vertu de l’article 12 de l’accord de coopération du 14 juillet 2021, le traitement des données à caractère personnel du certificat COVID numérique de l’UE a pour but de lire et, le cas échéant, de générer le CST via le module CST de l’application COVIDScan, afin de contrôler si le titulaire du certificat COVID numérique de l’UE remplit les conditions d’accès à un événement, établissement et service pour lesquels l’utilisation du CST doit ou peut être appliquée, et afin de contrôler l’identité du titulaire d’un certificat COVID numérique de l’UE
au moyen d’un document d’identité. L’accord de coopération du 14 juillet 2021 prévoit donc expressément les finalités pour lesquelles les données à caractère personnel précitées sont collectées et traitées.
Dans l’exposé relatif à l’accord de coopération du 14 juillet 2021, il est souligné qu’il « est strictement interdit de générer et de lire le COVID Safe Ticket à des fins autres que celles stipulées dans le présent accord de coopération. Les personnes qui génèrent ou lisent le COVID
Safe Ticket à des fins non prévues par le présent accord seront soumises à des sanctions de droit commun, y compris des sanctions pénales » (exposé général relatif à l’accord de coopération du 14 juillet 2021, Moniteur belge, 23 juillet 2021, troisième édition, p. 76178). Il appartient au juge compétent d’exercer un contrôle à cet égard.
L’article 14, § 2, de l’accord de coopération du 14 juillet 2021 prévoit en outre que les données à caractère personnel qui sont traitées pour la lecture du CST sont supprimées immédiatement après le traitement. Dans l’exposé général relatif à l’accord de coopération du 27 septembre 2021, il est précisé, à cet égard, que « les données à caractère personnel lues ne sont pas stockées dans un fichier et les données dans la mémoire cache sont supprimées dès qu’un nouveau code-barres est scanné ou que l’application COVIDScan est désactivée. Les données à caractère personnel ne sont pas non plus échangées avec une application externe. Par conséquent, il n’est pas possible d’utiliser l’application COVIDScan pour tracer ou enregistrer des visiteurs de manière illicite, ce qui est bien entendu interdit dans tous les cas » (Moniteur belge, 1er octobre 2021, deuxième édition, p. 104687).
B.57. En outre, il convient d’observer que l’article 17, § 3, de l’accord de coopération du 14 juillet 2021 dispose que « l’application COVIDScan et ses modules respectent les principes
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conformément aux articles 5 et 25 du règlement général sur la protection des données ». Une éventuelle violation de ces principes lors de l’exécution ou de l’application des dispositions attaquées peut être soulevée devant le juge compétent.
B.58. Eu égard à ce qui précède, les dispositions attaquées ne portent pas atteinte au droit à la protection des données à caractère personnel.
Le troisième moyen dans l’affaire n° 7739, en sa deuxième branche, et le premier moyen dans l’affaire n° 7743, en ses quatrième, neuvième et seizième branches, ne sont pas fondés.
IV. Les droits de l’enfant et les droits des personnes handicapées (quatrième branche du deuxième moyen dans l’affaire n° 7739 et sixième branche du premier moyen dans l’affaire n° 7743)
B.59. Les parties requérantes dans l’affaire n° 7739 font valoir, dans la cinquième branche de leur deuxième moyen, que les dispositions attaquées portent atteinte à l’article 22ter de la Constitution, en ce que les personnes ayant des antécédents de réactions allergiques graves qui ne peuvent pas se faire vacciner sont lésées de manière disproportionnée par le CST. Elles seraient également lésées lorsqu’elles obtiennent elles-mêmes un CST mais que leurs accompagnants n’en obtiennent pas un. Ceci s’appliquerait mutatis mutandis aux personnes visées à l’article 22bis de la Constitution.
Les parties requérantes dans l’affaire n° 7743 dénoncent également, dans la sixième branche de leur premier moyen, une violation de l’article 22ter de la Constitution, en ce que les dispositions attaquées ne tiennent pas compte de la situation des personnes qui ne peuvent pas recevoir de vaccin en raison de contre-indications médicales.
B.60. En ce que les parties institutionnelles contestent l’intérêt des parties requérantes dans l’affaire n° 7739 à la cinquième branche de leur deuxième moyen, il suffit de rappeler que, si les parties requérantes ont intérêt à l’annulation des dispositions attaquées, elles ne doivent pas, en outre, justifier d’un intérêt à chacun des moyens.
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B.61. L’article 22bis de la Constitution garantit le droit de chaque enfant au respect de son intégrité morale, corporelle, mentale et sexuelle.
L’article 22ter de la Constitution garantit le droit de chaque personne en situation de handicap à une pleine inclusion dans la société.
B.62.1. Comme il est dit en B.45.2, les personnes qui, pour des raisons médicales, ne peuvent pas recevoir de vaccin, ce qui est très exceptionnel, peuvent générer le CST sur la base d’un certificat de test ou d’un certificat de rétablissement. Il n’apparaît pas que l’obligation de se faire tester constitue une charge organisationnelle ou financière excessive, comme il est déjà dit en B.24.3 et en B.45.2.
B.62.2. En ce que les parties requérantes dans l’affaire n° 7739 allèguent en outre que les personnes en situation de handicap et les mineurs sont également affectés lorsque leurs accompagnants n’obtiennent pas de CST, il suffit de constater que ces accompagnants – comme tout un chacun – peuvent toujours générer un CST sur la base d’un certificat de vaccination, de test ou de rétablissement.
B.62.3. Eu égard à ce qui précède, ainsi qu’au fait que l’application du CST est limitée aux événements, établissements et services mentionnés limitativement dans les dispositions attaquées et n’est valable que pour une durée maximale prévue par la loi, les dispositions attaquées ne portent pas atteinte aux articles 22bis et 22ter de la Constitution.
B.62.4. Le deuxième moyen dans l’affaire n° 7739, en sa quatrième branche, et le premier moyen dans l’affaire n° 7743, en sa sixième branche, ne sont pas fondés.
V. Le droit à l’épanouissement culturel et social (cinquième branche du deuxième moyen dans l’affaire n° 7739)
B.63. Les parties requérantes dans l’affaire n° 7739 soutiennent, dans la cinquième branche de leur deuxième moyen, que les dispositions attaquées limitent sérieusement le droit à l’épanouissement culturel et social, sans qu’existe une justification suffisante à cet égard.
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B.64.1. L’article 23 de la Constitution dispose :
« Chacun a le droit de mener une vie conforme à la dignité humaine.
À cette fin, la loi, le décret ou la règle visée à l’article 134 garantissent, en tenant compte des obligations correspondantes, les droits économiques, sociaux et culturels, et déterminent les conditions de leur exercice.
Ces droits comprennent notamment :
[...]
5° le droit à l’épanouissement culturel et social;
[...] ».
B.64.2. L’article 23, alinéa 1er, de la Constitution dispose que chacun a le droit de mener une vie conforme à la dignité humaine et l’alinéa 3, 5°, inscrit parmi les droits économiques, sociaux et culturels « le droit à l’épanouissement culturel et social ». Cette disposition ne précise pas ce qu’implique ce droit, dont seul le principe est exprimé, étant donné que chaque législateur est chargé de garantir ce droit, conformément à l’article 23, alinéa 2, « en tenant compte des obligations correspondantes ». Le législateur compétent peut, à cet égard, imposer des limites à ce droit. Ces restrictions ne sont inconstitutionnelles que si elles ne sont pas raisonnablement justifiées.
B.65.1. Les dispositions attaquées contribuent à éviter que le secteur des soins de santé, et en particulier les hôpitaux, soit soumis à une pression trop importante en raison d’une augmentation des contaminations à la COVID-19. Ces obligations garantissent de ce fait le droit à la protection de la santé et à l’assistance médicale des personnes qui nécessitent des soins médicaux lourds et pour lesquelles une telle assistance est donc la plus urgente.
B.65.2. Eu égard à l’objectif qui consiste à lutter contre la propagation de la maladie contagieuse COVID-19 et pour les motifs qui sont mentionnés en B.44 et en B.45, la mesure attaquée n’est pas dénuée de justification raisonnable.
B.65.3. Le deuxième moyen dans l’affaire n° 7739, en sa cinquième branche, n’est pas fondé.
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VI. La liberté de réunion et d’association (sixième branche du deuxième moyen dans l’affaire n° 7739)
B.66. Les parties requérantes dans l’affaire n° 7739 dénoncent, dans la sixième branche de leur deuxième moyen, une violation des articles 26 et 27 de la Constitution, en ce que, du fait de l’application du CST, la liberté de réunion et d’association est soumise à une condition préalable interdite et en ce que les dispositions attaquées ne résistent pas au contrôle de proportionnalité et de subsidiarité.
B.67.1. L’article 26 de la Constitution dispose :
« Les Belges ont le droit de s’assembler paisiblement et sans armes, en se conformant aux lois qui peuvent régler l’exercice de ce droit, sans néanmoins le soumettre à une autorisation préalable.
Cette disposition ne s’applique point aux rassemblements en plein air, qui restent entièrement soumis aux lois de police ».
B.67.2. L’article 27 de la Constitution dispose :
« Les Belges ont le droit de s’associer; ce droit ne peut être soumis à aucune mesure préventive ».
B.67.3. Les articles 26 et 27 de la Constitution reconnaissent le droit de réunion et d’association, et s’opposent, sauf en ce qui concerne les réunions en plein air, à ce que ces libertés soient soumises à des mesures préalables. Ces dispositions ne s’opposent pas à ce que le législateur règle l’exercice de ces libertés en ce qui concerne les matières dans lesquelles son intervention est nécessaire, dans une société démocratique, à la protection des droits d’autrui, entre autres.
B.68.1. Les dispositions attaquées qui prévoient l’utilisation du CST pour l’accès à certains événements, établissements et services n’empêchent pas qu’une association puisse être
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créée ou puisse continuer à exister ni que cette association puisse se réunir. Elles ne soumettent dès lors pas la liberté de réunion et d’association à des mesures préalables.
B.68.2. L’ingérence dans la liberté de réunion est, pour les mêmes motifs que ceux qui sont exposés en B.44 et en B.45, nécessaire dans une société démocratique et n’emporte pas des conséquences disproportionnées. En outre, à supposer que les dispositions attaquées constituent une ingérence dans la liberté d’association, elle serait justifiée pour les mêmes motifs.
B.68.3. Le deuxième moyen dans l’affaire n° 7739, en sa sixième branche, n’est pas fondé.
VII. Le principe de la sécurité juridique et le principe de la non-rétroactivité des lois (quatrième moyen dans l’affaire n° 7743)
B.69. Les parties requérantes dans l’affaire n° 7743 critiquent, dans leur quatrième moyen, l’entrée en vigueur immédiate du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021, qui ferait naître plusieurs discriminations entre les personnes selon que ces dernières s’étaient déjà fait vacciner ou non avant son entrée en vigueur. L’absence d’un régime transitoire porterait en outre atteinte aux attentes légitimes des personnes non vaccinées, sans un motif impérieux d’intérêt général justifie cette atteinte. En outre, le décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021, attaqué, aurait en réalité un effet rétroactif, en ce que les parties requérantes subissent des inconvénients résultant de leur choix de ne pas se faire vacciner, alors qu’elles avaient fait ce choix avant l’entrée en vigueur de ce décret.
B.70. Le décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 est paru le jour même au Moniteur belge et est entré en vigueur le lendemain, à l’exception de l’article 5. Cette disposition, qui impose l’utilisation du CST pour les événements de masse, les expériences et projets pilotes, les dancings et les discothèques, les établissements horeca et les centres de fitness, est entrée en vigueur le 1er novembre 2021.
B.71. C’est le propre d’une nouvelle règle d’établir une distinction entre les personnes qui sont concernées par des situations juridiques qui entraient dans le champ d’application de la règle antérieure et les personnes qui sont concernées par des situations juridiques qui entrent
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dans le champ d’application de la nouvelle règle. Semblable distinction ne viole pas en soi les articles 10 et 11 de la Constitution. À peine de rendre impossible toute modification de la loi, il ne peut être soutenu qu’une disposition nouvelle violerait ces dispositions constitutionnelles par cela seul qu’elle modifie les conditions d’application de la législation ancienne.
Par ailleurs, si le législateur estime qu’un changement de politique s’impose, il peut décider de lui donner un effet immédiat et, en principe, il n’est pas tenu de prévoir un régime transitoire.
Les articles 10 et 11 de la Constitution ne sont violés que si l’absence d’une mesure transitoire entraîne une différence de traitement qui n’est pas susceptible de justification raisonnable ou s’il est porté une atteinte excessive au principe de la confiance légitime. Ce principe est étroitement lié au principe de la sécurité juridique, qui interdit au législateur de porter atteinte sans justification objective et raisonnable à l’intérêt que possèdent les sujets de droit d’être en mesure de prévoir les conséquences juridiques de leurs actes.
B.72.1. Pour les mêmes motifs que ceux qui sont mentionnés en B.44 et en B.45, l’entrée en vigueur immédiate des dispositions relatives à l’utilisation du CST est justifiée par rapport à l’objectif légitime poursuivi par le législateur décrétal, qui consiste à lutter contre la propagation du coronavirus SARS-CoV-2 et elle ne produit pas des effets disproportionnés.
L’absence d’une disposition transitoire et l’entrée en vigueur immédiate du décret attaqué ne portent dès lors pas une atteinte discriminatoire au principe de la sécurité juridique et au principe de la confiance.
B.72.2. Le décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 n’est pas non plus de nature à porter une atteinte discriminatoire au principe de la non-rétroactivité. C’est l’effet ordinaire de toute règle de nature législative de s’appliquer immédiatement non seulement aux faits survenant après son entrée en vigueur mais également aux effets juridiques de faits antérieurs à cette entrée en vigueur. Une règle ne peut être qualifiée de rétroactive que si elle s’applique à des faits, actes et situations qui étaient définitifs au moment où elle est entrée en vigueur. Le décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021, qui prévoit, à compter de
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son entrée en vigueur, l’utilisation du CST pour accéder aux événements, établissements et services qu’il mentionne, n’est donc pas rétroactif.
B.72.3. Le quatrième moyen dans l’affaire n° 7743 n’est pas fondé.
VIII. Le droit de propriété (cinquième branche du premier moyen dans l’affaire n° 7743)
B.73. Les parties requérantes dans l’affaire n° 7743 allèguent, dans la cinquième branche de leur premier moyen, que les dispositions attaquées portent atteinte au droit de propriété, compte tenu des frais qu’elles exposent nécessairement pour exercer certains droits essentiels.
B.74.1. Contrairement à ce que soutiennent les parties requérantes, les dispositions attaquées ne rendent aucunement nécessaire l’exposition de frais aux fins d’accéder aux événements, établissements ou services où le CST est d’application. Le CST peut en effet être généré sur la base d’un certificat de vaccination, d’un certificat de rétablissement ou d’un certificat de test, sachant que tant la vaccination contre la COVID-19 que le test effectué après une contamination au coronavirus SARS-CoV-2 sont gratuits. Le fait qu’une personne non vaccinée contre la COVID-19 doive exposer des frais pour générer le CST sur la base d’un certificat de test est la conséquence du choix qu’elle a fait librement de ne pas se faire vacciner.
B.74.2. Le premier moyen dans l’affaire n° 7743, en sa cinquième branche, repose donc sur une prémisse erronée et, pour cette raison, n’est pas fondé.
IX. Le droit à un procès équitable (dixième branche du premier moyen dans l’affaire n° 7743)
B.75. Les parties requérantes dans l’affaire n° 7743 soutiennent, dans la dixième branche de leur premier moyen, que l’exclusion des activités visées par les dispositions attaquées constitue une sanction pénale au sens de la Convention européenne des droits de l’homme et que, par conséquent, elle ne peut être prononcée que par un tribunal indépendant et impartial.
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B.76. Une mesure constitue une sanction pénale au sens de l’article 6, paragraphe 1, de la Convention européenne des droits de l’homme si elle a un caractère pénal selon sa qualification en droit interne ou s’il ressort de la nature de l’infraction, à savoir de la portée générale et du caractère préventif et répressif de la sanction, qu’il s’agit d’une sanction pénale ou encore s’il ressort de la nature et de la sévérité de la sanction subie par l’intéressé qu’elle a un caractère punitif et donc dissuasif (CEDH, grande chambre, 23 novembre 2006, Jussila c. Finlande, ECLI:CE:ECHR:2006:1123JUD007305301, §§ 30-31; grande chambre, 10 février 2009, Zolotoukhine c. Russie, ECLI:CE:ECHR:2009:0210JUD001493903, § 53; grande chambre, 15 novembre 2016, A et B c. Norvège, ECLI:CE:ECHR:2016:1115JUD002413011, §§ 105-107). La Cour européenne des droits de l’homme utilise les mêmes critères en ce qui concerne l’application de l’article 7 de la même Convention (pour exemple, CEDH, 4 octobre 2016, Žaja c. Croatie, ECLI:CE:ECHR:2016:1004JUD003746209, § 86; 4 juin 2019, Rola c. Slovénie, ECLI:CE:ECHR:2019:0604JUD001209614, § 54).
B.77.1. La mesure attaquée qui prévoit l’utilisation du CST en ce qui concerne l’accès à certains événements, établissements et services, n’est considérée comme une sanction pénale ni sur le vu de la place occupée par les dispositions attaquées dans la législation, ni sur le vu des travaux préparatoires.
Comme il est dit en B.4.2, le législateur fédéral, les législateurs décrétaux et le législateur ordonnanciel entendaient, en adoptant cette mesure, « limiter la propagation du coronavirus COVID-19 », et également « tenir compte de la reprise des activités des citoyens, telles qu’elles étaient avant la pandémie de COVID-19 » (exposé général relatif à l’accord de coopération du 14 juillet 2021, Moniteur belge, 23 juillet 2021, troisième édition, p. 76170). La mesure attaquée ne poursuit donc pas un but répressif, mais un but d’intérêt général, à savoir garantir la santé d’autrui et la santé publique, ainsi que les droits et libertés d’autrui.
La mesure attaquée a pour effet de priver les personnes qui ne disposent pas d’un CST de l’accès à certains événements, établissements et services, prévus de manière limitative, « où les mesures de santé et de sécurité actuelles sont difficiles à maintenir, mais en même temps où un risque élevé de propagation du coronavirus COVID-19 est présent » (exposé général relatif à
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l’accord de coopération du 27 septembre 2021, Moniteur belge, 1er octobre 2021, deuxième édition, p. 104682). La mesure attaquée ne produit pas des effets à ce point graves qu’elle devrait être qualifiée de sanction pénale.
B.77.2. La mesure attaquée ne relève dès lors pas du champ d’application des articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l’homme.
B.77.3. Le premier moyen dans l’affaire n° 7743, en sa dixième branche, n’est pas fondé.
Quant au maintien des effets
B.78.1. Les parties institutionnelles qui sont intervenues demandent à la Cour de maintenir les effets des dispositions annulées, au motif que l’annulation produirait des effets insurmontables pour les administrations et entités concernées et pour la politique de lutte contre la pandémie de COVID-19.
B.78.2. En ce qui concerne l’article 3 du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021, les parties institutionnelles ne démontrent pas que l’annulation de cette disposition produirait des effets insurmontables. En outre, cette disposition n’est plus applicable depuis le 7 mars 2022.
B.78.3 La demande de maintien des effets doit dès lors être rejetée.
92
Par ces motifs,
la Cour
- annule l’article 3 du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 « relatif au COVID Safe Ticket », en ce qu’il ne prévoit pas des critères et exceptions qui permettent aux visiteurs des établissements mentionnés dans cette disposition de prévoir si l’utilisation d’un CST est obligatoire ou non;
- rejette les recours pour le surplus.
Ainsi rendu en langue néerlandaise, en langue française et en langue allemande, conformément à l’article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 27 avril 2023.
Le greffier, Le président,
F. Meersschaut L. Lavrysen


Synthèse
Numéro d'arrêt : 68/2023
Date de la décision : 27/04/2023
Type d'affaire : Droit constitutionnel

Analyses

- Annulation (article 3 du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021, en ce qu'il ne prévoit pas des critères et exceptions qui permettent aux visiteurs des établissements mentionnés dans cette disposition de prévoir si l'utilisation d'un CST est obligatoire ou non) - Rejet des recours pour le surplus

COUR CONSTITUTIONNELLE - DROIT PUBLIC ET ADMINISTRATIF - COUR CONSTITUTIONNELLE - les recours en annulation 1) du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 « relatif au COVID Safe Ticket », introduits par Jo Smolders, par Luc Lamine, par Valérie Leroi, par Robbe Tack, par Rosita Hesbeens, par Sofie Vanleenhove, par Walter Digneffe, par Bart Van Humbeeck, par Yves Soers, par Nico Devos, par Frédéric Van der Stock, par Johan Steynen, par Hilde Steynen, par la fondation privée « Ministry of Privacy » et Matthias Dobbelaere-Welvaert et par Luc Lamine et autres, 2) du décret de la Région wallonne du 15 juillet 2021, du décret de la Communauté germanophone du 19 juillet 2021, du décret de la Communauté française du 19 juillet 2021, du décret de la Communauté flamande du 19 juillet 2021, de l'ordonnance de la Commission communautaire commune du 22 juillet 2021 et du décret de la Commission communautaire française du 22 juillet 2021 « portant assentiment à l'accord de coopération du 14 juillet 2021 entre l'Etat fédéral, la Communauté flamande, la Communauté française, la Communauté germanophone, la Commission communautaire commune, la Région wallonne et la Commission communautaire française concernant le traitement des données liées au Certificat COVID numérique de l'UE et au COVID Safe Ticket, le PLF et le traitement des données à caractère personnel des travailleurs salariés et des travailleurs indépendants vivant ou résidant à l'étranger qui effectuent des activités en Belgique », - de la loi du 20 juillet 2021 « portant assentiment à l'accord de coopération entre l'Etat fédéral, la Communauté flamande, la Communauté française, la Communauté germanophone, la Commission communautaire commune, la Région wallonne et la Commission communautaire française concernant le traitement des données liées au certificat COVID numérique de l'UE et au COVID Safe Ticket, le PLF et le traitement des données à caractère personnel des travailleurs salariés et des travailleurs indépendants vivant ou résidant à l'étranger qui effectuent des activités en Belgique », introduits par la fondation privée « Ministry of Privacy » et Matthias Dobbelaere-Welvaert, 3) de l'ordonnance de la Commission communautaire commune du 30 septembre 2021, du décret de la Région wallonne du 30 septembre 2021, du décret de la Communauté germanophone du 30 septembre 2021, du décret de la Communauté française du 30 septembre 2021, du décret de la Communauté flamande du 1er octobre 2021 et de la loi du 1er octobre 2021 « portant assentiment à l'accord de coopération du 27 septembre 2021 visant à la modification de l'accord de coopération du 14 juillet 2021 entre l'État fédéral, la Communauté flamande, la Communauté française, la Communauté germanophone, la Commission communautaire commune, la Région wallonne et la Commission communautaire française concernant le traitement des données liées au certificat COVID numérique de l'UE et au COVID Safe Ticket, le PLF et le traitement des données à caractère personnel des travailleurs salariés et des travailleurs indépendants vivant ou résidant à l'étranger qui effectuent des activités en Belgique », - du décret de la Région wallonne du 28 octobre 2021, du décret de la Communauté française du 28 octobre 2021, de l'ordonnance de la Commission communautaire commune du 29 octobre 2021, du décret de la Communauté germanophone du 29 octobre 2021, du décret de la Communauté flamande du 29 octobre 2021 et de la loi du 29 octobre 2021 « portant assentiment à l'accord de coopération [législatif] du 28 octobre 2021 visant à la modification d'accord de coopération du 14 juillet 2021 entre l'Etat fédéral, la Communauté flamande, la Communauté française, la Communauté germanophone, la Commission communautaire commune, la Région wallonne et la Commission communautaire française concernant le traitement des données liées au certificat COVID numérique de l'UE et au COVID Safe Ticket, le PLF et le traitement des données à caractère personnel des travailleurs salariés et des travailleurs indépendants vivant ou résidant à l'étranger qui effectuent des activités en Belgique », introduits par la fondation privée « Ministry of Privacy » et Matthias Dobbelaere-Welvaert et par Luc Lamine et autres, 4) de l'ordonnance de la Commission communautaire commune du 14 octobre 2021 « relative à l'extension du COVID Safe Ticket en cas de nécessité découlant d'une situation épidémiologique particulière », - du décret de la Région wallonne du 21 octobre 2021 « relatif à l'usage du COVID Safe Ticket et à l'obligation du port du masque », - du décret de la Région wallonne du 24 novembre 2021 « modifiant les articles 2, 5 et 8 du décret du 21 octobre 2021 relatif à l'usage du COVID Safe Ticket et à l'obligation du port du masque et y insérant un article 10/1 », - de l'ordonnance de la Commission communautaire commune du 14 janvier 2022 « prolongeant le champ d'application temporel de l'ordonnance du 14 octobre 2021 relative à l'extension du COVID Safe Ticket en cas de nécessité découlant d'une situation épidémiologique particulière », introduit par la fondation privée « Ministry of Privacy » et Matthias Dobbelaere-Welvaert. Soins de santé - Pandémie de COVID-19 - Initiatives en vue de contrer la diffusion des infections au COVID-19 - Accord de coopération - COVID Safe Ticket (CST) - 1. Enumération exhaustive des lieux pour lesquels la présentation du CST peut être exigée - 2. Traitement des données à caractère personnel que le CST contient


Origine de la décision
Date de l'import : 30/05/2023
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.constitutionnel;arret;2023-04-27;68.2023 ?

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