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09/03/2023 | BELGIQUE | N°38/2023

Belgique | Belgique, Cour constitutionnel, 09 mars 2023, 38/2023


Cour constitutionnelle
Arrêt n° 38/2023
du 9 mars 2023
Numéro du rôle : 7639
En cause : la question préjudicielle relative aux articles 40bis, § 2, alinéa 1er, 3°, et 40ter, § 1er et § 2, alinéa 1er, 1°, de la loi du 15 décembre 1980 « sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers », posée par le Conseil d’État.
La Cour constitutionnelle,
composée des présidents P. Nihoul et L. Lavrysen, et des juges T. Giet, J. Moerman, E. Bribosia, W. Verrijdt et K. Jadin, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, prÃ

©sidée par le président P. Nihoul,
après en avoir délibéré, rend l’arrêt suivant :
I. Objet de la...

Cour constitutionnelle
Arrêt n° 38/2023
du 9 mars 2023
Numéro du rôle : 7639
En cause : la question préjudicielle relative aux articles 40bis, § 2, alinéa 1er, 3°, et 40ter, § 1er et § 2, alinéa 1er, 1°, de la loi du 15 décembre 1980 « sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers », posée par le Conseil d’État.
La Cour constitutionnelle,
composée des présidents P. Nihoul et L. Lavrysen, et des juges T. Giet, J. Moerman, E. Bribosia, W. Verrijdt et K. Jadin, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président P. Nihoul,
après en avoir délibéré, rend l’arrêt suivant :
I. Objet de la question préjudicielle et procédure
Par l’arrêt n° 251.479 du 14 septembre 2021, dont l’expédition est parvenue au greffe de la Cour le 22 septembre 2021, le Conseil d’État a posé la question préjudicielle suivante :
« Les articles 40bis, § 2, alinéa 1er, 3°, 40ter, § 1er, et 40ter, § 2, alinéa 1er, 1°, de la loi du 15 décembre 1980 sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers violent-ils les articles 10 et 11 de la Constitution, interprétés et appliqués en ce sens qu’ils exigent, tant du regroupé majeur descendant d’un Belge sédentaire que du regroupé majeur descendant d’un ressortissant Belge ou de l’Union ayant exercé son droit à la libre circulation, d’être à charge du regroupant dans le pays de provenance ou d’origine, alors que cette exigence résulte, selon la Cour de justice de l’Union européenne, de l’exercice par le citoyen Belge ou de l’Union de son droit à la libre circulation ? ».
Des mémoires ont été introduits par :
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- Amirouche Djabri, assisté et représenté par Me D. Andrien, avocat au barreau de Liège-Huy;
- le Conseil des ministres, assisté et représenté par Me S. Matray, avocat au barreau de Liège-Huy.
Le Conseil des ministres a également introduit un mémoire en réponse.
Par ordonnance du 9 novembre 2022, la Cour, après avoir entendu les juges-rapporteurs K. Jadin et J. Moerman, a décidé :
- que l’affaire ne pouvait pas encore être déclarée en état;
- d’inviter les parties à répondre aux questions suivantes par un mémoire complémentaire, accompagné le cas échéant de toute pièce utile, à introduire le 9 décembre 2022 au plus tard et à communiquer dans le même délai à l’autre partie :
« Dans son mémoire en réponse, le Conseil des ministres affirme qu’Amirouche Djabri a introduit une nouvelle demande de carte de séjour le 14 novembre 2019 et qu’à la suite de cette demande, une carte F valable pour une durée de cinq ans lui a été octroyée le 29 juin 2020.
Chaque partie est invitée à répondre aux questions suivantes :
1. Quelle est la situation de séjour actuelle d’Amirouche Djabri ? Amirouche Djabri est en particulier invité à faire savoir s’il confirme ou non l’affirmation précitée du Conseil des ministres.
2. Quelle éventuelle incidence déduisez-vous de la réponse à la question précédente sur la présente question préjudicielle ? »
Des mémoires complémentaires ont été introduits par :
- Amirouche Djabri;
- le Conseil des ministres.
Par ordonnance du 21 décembre 2022, la Cour, après avoir entendu les juges-rapporteurs K. Jadin et J. Moerman, a décidé que l’affaire était en état, qu’aucune audience ne serait tenue, à moins qu’une partie n’ait demandé, dans le délai de sept jours suivant la réception de la notification de cette ordonnance, à être entendue, et qu’en l’absence d’une telle demande, les débats seraient clos le 18 janvier 2023 et l’affaire mise en délibéré.
Aucune demande d’audience n’ayant été introduite, l’affaire a été mise en délibéré le 18 janvier 2023.
Les dispositions de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle relatives à la procédure et à l’emploi des langues ont été appliquées.
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II. Les faits et la procédure antérieure
La partie requérante devant la juridiction a quo est une personne de nationalité algérienne née en 1977 et arrivée en Belgique en 2006 avec un visa valable pour 30 jours. Après avoir introduit sans succès plusieurs demandes d’autorisation de séjour, cette personne introduit, le 6 juillet 2017, une demande de carte de séjour de membre de la famille d’un citoyen de l’Union européenne en qualité de descendant de Belge. Le 3 janvier 2018, cette demande fait l’objet d’une décision de refus. La partie requérante devant la juridiction a quo introduit un recours en annulation de cette décision auprès du Conseil du contentieux des étrangers. Par son arrêt n° 226.051
du 12 septembre 2019, ce dernier rejette le recours en annulation. La partie requérante devant la juridiction a quo introduit auprès de la juridiction a quo un recours en cassation dirigé contre cet arrêt. Par son arrêt n° 251.479 du 14 septembre 2021, la juridiction a quo pose à la Cour la question préjudicielle reproduite plus haut.
III. En droit
-A-
Quant à l’utilité de la question préjudicielle
A.1.1. Dans son mémoire en réponse, le Conseil des ministres indique qu’à la suite d’une nouvelle demande de carte de séjour de membre de la famille d’un citoyen de l’Union européenne, la partie requérante devant la juridiction a quo s’est vu octroyer, le 29 juin 2020, une carte F valable pour une durée de cinq ans. Selon le Conseil des ministres, la juridiction a quo n’était pas informée de l’existence de cette carte F lorsqu’elle a décidé de poser la question préjudicielle. Se référant à la jurisprudence du Conseil d’État, il fait valoir que la partie requérante devant la juridiction a quo n’a plus intérêt au recours en cassation qui est pendant devant la juridiction a quo. Il en conclut que la question préjudicielle n’est manifestement pas utile à la solution du litige a quo et qu’elle n’appelle dès lors pas de réponse.
Dans le mémoire complémentaire qu’il a déposé à la suite de l’ordonnance de la Cour du 9 novembre 2022, le Conseil des ministres confirme que la partie requérante devant la juridiction a quo bénéficie, depuis le 29 juin 2020, d’une carte F valable pour cinq ans. Se référant à la jurisprudence du Conseil d’État, il fait valoir que la partie requérante devant la juridiction a quo n’a plus d’intérêt actuel au recours en cassation, dès lors qu’elle a obtenu un droit de séjour correspondant à celui qui était initialement demandé. Il ajoute qu’une éventuelle annulation de la décision de refus litigieuse ne saurait conférer un quelconque avantage en matière de séjour à la partie requérante devant la juridiction a quo, dès lors qu’un éventuel réexamen de la demande initiale ne pourrait aboutir qu’à un constat de défaut d’objet. Le Conseil des ministres réitère sa conclusion selon laquelle la question préjudicielle n’est manifestement pas utile à la solution du litige a quo et n’appelle dès lors pas de réponse.
A.1.2. Dans le mémoire complémentaire qu’elle a déposé à la suite de l’ordonnance de la Cour du 9 novembre 2022, la partie requérante devant la juridiction a quo confirme qu’une carte F lui a été octroyée le 29 juin 2020. Elle fait valoir que la question préjudicielle conserve néanmoins son intérêt. Elle souligne que la juridiction a quo, dès lors qu’elle est saisie d’un recours en cassation et non d’un recours en annulation, doit se prononcer sur l’arrêt, attaqué, du Conseil du contentieux des étrangers et non sur la décision administrative de refus de séjour. Elle se réfère à cet égard à l’arrêt du Conseil d’État n° 254.038 du 17 juin 2022. À titre subsidiaire, elle observe que le Conseil des ministres ne prétend pas que le refus de séjour litigieux aurait été retiré. Enfin, elle souligne que, si l’arrêt attaqué du Conseil du contentieux des étrangers est cassé et que le refus de séjour litigieux est ensuite annulé, une nouvelle décision devra être prise au sujet de la demande qu’elle a introduite le 6 juillet 2017. Selon elle, elle pourra prétendre, en application de l’article 42quinquies de la loi du 15 décembre 1980 « sur
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l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers », à un séjour définitif avec effet au 7 juillet 2022 et elle pourra donc même prétendre à l’acquisition de la nationalité belge à partir de cette date.
Quant à la demande de poser des questions préjudicielles à la Cour de justice de l’Union européenne
A.2.1. Dans son argumentation au fond, la partie requérante devant la juridiction a quo demande que deux questions préjudicielles soient posées à la Cour de justice de l’Union européenne.
A.2.2. Selon le Conseil des ministres, il n’y a pas lieu de poser les questions préjudicielles suggérées par la partie requérante devant la juridiction a quo.
-B-
B.1. La question préjudicielle porte sur les articles 40bis, § 2, alinéa 1er, 3°, 40ter, § 1er, et 40ter, § 2, alinéa 1er, 1°, de la loi du 15 décembre 1980 « sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers ».
B.2. La partie requérante devant la juridiction a quo a introduit une demande de carte de séjour de membre de la famille d’un citoyen de l’Union européenne en qualité de descendant de Belge. Cette demande a fait l’objet d’une décision de refus le 3 janvier 2018.
Il ressort des informations communiquées par les parties qu’à la suite d’une nouvelle demande, la partie requérante devant la juridiction a quo a reçu, le 29 juin 2020, une carte de séjour de membre de la famille d’un citoyen de l’Union européenne (carte F), valable pour une durée de cinq ans.
Il peut en résulter une perte de l’intérêt de la partie requérante devant la juridiction a quo au recours en cassation dirigé contre l’arrêt du Conseil du contentieux des étrangers rejetant le recours en annulation de la décision de refus de séjour du 3 janvier 2018, qui est l’arrêt attaqué devant la juridiction a quo (voy., entre autres, CE, 29 juin 2022, n° 254.153).
B.3. En conséquence, il y a lieu de renvoyer l’affaire à la juridiction a quo, afin qu’elle décide si la réponse à la question préjudicielle lui est toujours indispensable pour rendre son
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arrêt et il n’y a pas lieu de poser à la Cour de justice de l’Union européenne les questions préjudicielles suggérées par la partie requérante devant la juridiction a quo.
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Par ces motifs,
la Cour
renvoie l’affaire à la juridiction a quo.
Ainsi rendu en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l’article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 9 mars 2023.
Le greffier, Le président,
P.-Y. Dutilleux P. Nihoul


Synthèse
Numéro d'arrêt : 38/2023
Date de la décision : 09/03/2023
Type d'affaire : Droit constitutionnel

Origine de la décision
Date de l'import : 30/05/2023
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.constitutionnel;arret;2023-03-09;38.2023 ?

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