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06/02/2020 | FRANCE | N°18/15628

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 06 février 2020, 18/15628


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE


Chambre 1-5





ARRÊT AU FOND


DU 06 FEVRIER 2020


hg


N° 2020/ 78




















N° RG 18/15628 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDEE3











W... H... épouse Q...


C... Q...








C/





J... G...


D... L... épouse G...


T... G... épouse I...


SCI LA DATCHA












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Copie exécutoire délivrée


le :


à :





Me Benjamin DERSY





SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE
































Décision déférée à la Cour :





Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 03 Septembre 2018 enregistré au répertoire général sous le n°...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 06 FEVRIER 2020

hg

N° 2020/ 78

N° RG 18/15628 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDEE3

W... H... épouse Q...

C... Q...

C/

J... G...

D... L... épouse G...

T... G... épouse I...

SCI LA DATCHA

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Benjamin DERSY

SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 03 Septembre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 14/02113.

APPELANTS

Madame W... H... épouse Q...

demeurant [...]

représentée par Me Benjamin DERSY, avocat au barreau de NICE, plaidant

Monsieur C... Q...

demeurant [...]

représenté par Me Benjamin DERSY, avocat au barreau de NICE, plaidant

INTIMES

Monsieur J... G...

demeurant [...]

représenté par la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Myriam DUBURCQ de la SCP DONNET - DUBURCQ, avocat au barreau de GRASSE

Madame D... L... épouse G...

demeurant [...]

représentée par la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Myriam DUBURCQ de la SCP DONNET - DUBURCQ, avocat au barreau de GRASSE

Madame T... G... épouse I...

demeurant [...]

représentée par la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Myriam DUBURCQ de la SCP DONNET - DUBURCQ, avocat au barreau de GRASSE

SCI LA DATCHA prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié [...]

représentée par la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Myriam DUBURCQ de la SCP DONNET - DUBURCQ, avocat au barreau de GRASSEd'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785,786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Décembre 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Hélène GIAMI, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Florence BRENGARD, Président

Madame Hélène GIAMI, Conseiller

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Février 2020.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Février 2020

Signé par Madame Marie-Florence BRENGARD, Président et Madame Danielle PANDOLFI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE - MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES :

Depuis le [...] , W... H... mariée à C... Q... (les époux Q...) est propriétaire d'une maison d'habitation cadastrée au Cannet, lieudit [...] , section [...] pour 8 ares 90 centiares.

L'accès à leur propriété s'effectue par une servitude de passage de 3,50 m de large créée par acte du 9 mars 1979 sur la longueur de la limite sud du fonds [...] .

La SCI la Datcha, dont les associés sont J... G... dit G..., D... L... épouse G... et T... G... épouse I... est propriétaire depuis le [...] du bien cadastré section [...] jouxtant et servant le fonds Q... et formant le lot [...] du lotissement Howarth.

Se plaignant de nuisances causées par leurs voisins, la SCI la Datcha, J... G... dit G..., D... L... épouse G..., et T... G... épouse I... ont saisi le juge des référés qui a dit n'y avoir lieu à référé par ordonnance du 3 novembre 2010, puis par acte du 31 mars 2014, ils ont fait assigner les époux Q... devant le tribunal de grande instance de Grasse.

Le tribunal, par jugement contradictoire du 3 septembre 2018, a statué en ces termes:

«CONDAMNE Monsieur C... Q... et Madame W... H... épouse Q... à enlever le portail automatique en fer et les deux piliers sous astreinte de 500 euros par jour à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision,

CONDAMNE Monsieur C... Q... et Madame W... H... épouse Q... à déplacer la boîte aux lettres du mur de la SCI la Datcha sous astreintes de 200 euros par jour à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision,

CONDAMNE Monsieur C... Q... et Madame W... H... épouse Q... à enlever la caméra de l'interphone qui se trouve sur le terrain de la SCI la Datcha sous astreintes de 200 euros par jour à compter de la signification de la présente décision,

CONDAMNE Monsieur C... Q... et Madame W... H... épouse Q... à enlever les pieds de vigne plantés contre la propriété de la SCI Datcha, sous astreintes de 50 euros par jour à compter de la signification de la présente décision,

CONDAMNE Monsieur C... Q... et Madame W... H... épouse Q... à verser à une somme de 4 000 euros à titre de dommages et intérêts pour abus de droit d'une servitude de passage,

DEBOUTE la SCI la Datcha, J... G... dit G..., D... L... épouse G..., et T... G... épouse I... du surplus de leurs demandes de dommages et intérêts,

DEBOUTE Monsieur C... Q... et Madame W... H... épouse Q... de leur demande de dommages et intérêts,

CONDAMNE in solidum Monsieur C... Q... et Madame W... H... épouse Q... à verser à une somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC,

CONDAMNE in solidum Monsieur C... Q... et Madame W... H... épouse Q... aux entiers dépens».

Par déclaration du 3 octobre 2018, les époux Q... ont fait appel de ce jugement.

Aux termes de leurs dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 20 décembre 2018 auxquelles il convient de se référer pour un exposé détaillé des moyens et prétentions, les époux Q... entendent voir :

- infirmer le jugement en ce qu'il les a condamnés et a rejeté leur demande de dommages et intérêts

statuant à nouveau,

- rejeter toutes les prétentions adverses,

- condamner la SCI la Datcha, J... G... dit G..., D... L... épouse G..., et T... G... épouse I... à leur payer 5 000 € de dommages et intérêts ainsi que 10 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Aux termes de leurs dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 19 mars 2019, auxquelles il convient de se référer pour un exposé détaillé des moyens et prétentions, la SCI la Datcha, J... G... dit G..., D... L... épouse G..., et T... G... épouse I... entendent voir:

- confirmer le jugement sauf à y ajouter la condamnation in solidum des époux Q... à leur payer :

.11 000 € de dommages et intérêts pour préjudice moral et physique et atteinte à l'intimité de leur vie privée,

.10 000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeter toutes les prétentions adverses,

- condamner in solidum les époux Q... à une amende civile,

- condamner les époux Q... aux entiers dépens.

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 3 décembre 2019.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Les consorts G... font valoir que les époux Q... ont aggravé la servitude de passage et se sont même appropriés son assiette, que l'un des piliers du portail implanté au niveau du débouché sur l'avenue empiète au delà de l'assiette de 3,50 m de large, que parallèlement à l'installation du portail contesté, ils ont supprimé celui qui fermait leur fonds, et procèdent à des plantations, laissent divaguer leur chien et les insultent ou les menacent s'ils se trouvent sur ledit chemin, se comportant en propriétaires des lieux.

Sur la demande de condamnation des époux Q... à enlever le portail automatique en fer et les deux piliers :

Selon l'ancienne propriétaire du fonds servant, D... K... , le portail litigieux a été installé vers 2000-2002 avec son consentement pour sécuriser les lieux et elle n'avait pas estimé utile de disposer d'une clé pour l'ouvrir.

Il ferme l'accès à la propriété du fonds servant à quelques mètres de la voie publique.

Le souhait des consorts G..., tel qu'exprimé dans le courrier daté du 25 mars 2008 adressé par la SCI la Datcha aux époux Q... était que ces derniers ferment leur propre fonds par le déplacement de leur portail à l'entrée de leur fonds, et qu'eux-mêmes installent un nouveau portail à l'emplacement de celui existant.

Compte tenu de l'accord intervenu entre les propriétaires des deux fonds à l'époque de l'installation, alors qu'il n'est pas contesté que les clés du portail sont à la disposition de la SCI la Datcha, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de condamnation des époux Q... à enlever le portail litigieux, totalement implanté sur le fonds de la SCI, quand bien même il n'est pas justifié de son implantation trentenaire et il ne peut être considéré comme un ouvrage nécessaire à l'usage de la servitude bénéficiant aux époux Q..., qui relèverait des dispositions de l'article 697 du code civil.

Son implantation, telle qu'elle existe, résulte de l'accord des propriétaires de l'époque quant à la fermeture du chemin privé plutôt que de l'aménagement de la servitude de passage.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il avait accueilli la demande de condamnation des époux Q... à enlever le portail automatique en fer et les deux piliers.

Sur la demande de condamnation des époux Q... à enlever la caméra de l'interphone qui se trouve sur le terrain de la SCI la Datcha :

Cette installation est un accessoire destiné à permettre de visualiser à distance qui sonne afin d'actionner le portail pour l'ouvrir depuis le fonds des époux Q....

Il est totalement lié à l'implantation du portail et rien n'établit qu'il soit à l'origine d'indiscrétions au préjudice de la SCI la Datcha et des consorts G..., alors que la «caméra» permet uniquement de visualiser qui sonne depuis l'extérieur du portail.

Eu égard à l'accord des propriétaires de l'époque sur l'installation du portail, il n'y a pas lieu de satisfaire à la demande d'enlèvement de son accessoire.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il avait accueilli cette demande.

Sur la demande de condamnation des époux Q... à déplacer la boîte aux lettres du mur de la SCI la Datcha :

Il est admis qu'une boîte aux lettres constitue un accessoire indispensable de la servitude de passage puisqu'elle ne peut être implantée au bout d'un chemin privé et en l'espèce fermé par l'accord des parties.

La demande formée par la SCI la Datcha et les consorts G... tendant à son déplacement sans préciser à quel autre endroit de leur propriété elle pourrait être installée ne saurait être accueillie puisqu'en l'espèce, la boîte aux lettres ne peut être placée sur le fonds Q..., enclavé et inaccessible depuis la voie publique.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il avait accueilli cette demande.

Sur la demande de condamnation des époux Q... à enlever les pieds de vigne plantés contre la propriété de la SCI Datcha :

Les époux Q... prétendent s'être limités à entretenir les pieds de vignes plantés sur l'assiette de la servitude de passage, mais il leur est opposé le témoignage d'D... K... suivant lequel ils les ont eux-mêmes plantés.

La validité et la fiabilité de ce témoignage de l'ancienne propriétaire du fonds servant n'étant pas remises en question, et le droit de passage bénéficiant aux époux Q... ne leur permettant pas de procéder à des plantations sur le terrain d'autrui, le jugement ayant fait droit à cette demande, sera confirmé, sans qu'il soit utile de se prononcer sur le caractère nuisible ou non des plantations litigieuses.

Sur les demandes de dommages et intérêts :

La SCI la Datcha et les consorts G... entendent obtenir 11 000 € de dommages et intérêts pour préjudice moral et physique et atteinte à l'intimité de leur vie privée.

Ils se plaignent en premier lieu du refus de laisser accéder Monsieur G... ou des employés au passage et de la présence dissuasive du chien des époux Q....

Sur le refus de laisser accéder au chemin, il appartient à la SCI la Datcha et aux consorts G... de prendre possession des clés du portail mises à leur disposition afin de ne pas dépendre des époux Q... pour l'utilisation par eux ou par leurs employés du chemin qui est le leur.

La présence effrayante du chien sur le passage est attestée par P... X... qui avait été missionné pour une fuite d'eau chez Monsieur G... et qui ne relate qu'un fait unique, tandis que U... B... mentionne la présence de ce chien qui aboie sans que ces deux témoignages suffisent à établir la répétition de l'errance du chien sur le terrain grevé de la servitude de passage.

La preuve d'une volonté d'appropriation et d'un refus de laisser circuler les propriétaires du fonds servant n'est pas rapportée dès lors qu'ils peuvent disposer des clés leur permettant l'accès, qu'un portillon leur permet également d'y accéder, étant cependant précisé comme l'a pertinemment rappelé le premier juge que l'assiette de la servitude de passage doit être laissée libre, y compris de la présence d'un chien.

La preuve d'un lien causal entre un fait fautif des époux Q... et un préjudice d'ordre moral ou physique subi par les associés de la SCI la Datcha n'est pas rapportée, et leur demande en paiement de dommages et intérêts sera donc rejetée.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il avait accueilli cette demande.

Les époux Q... entendent obtenir 5 000 € de dommages et intérêts en réparation des troubles soufferts à l'occasion d'une agression de Monsieur G... du 8 septembre 2015 à propos de laquelle ne sont produits qu'un dépôt de plainte du 8 septembre 2015 et un certificat médical du lendemain mentionnant des «fourmillements au niveau du bras, des cervicalgies, des douleurs à la hanche droite et des insomnies depuis l'agression».

Le premier juge a rejeté cette demande par des motifs pertinents que l'argumentation développée en appel sans élément nouveau ne permet pas de contrer.

En effet, dans un contexte de relations tendues entre les parties, le dépôt de plainte non suivi d'une condamnation et le certificat relatant plutôt des plaintes et douleurs ou syndrome subjectif, sont insuffisants à prouver les faits dénoncés.

Le jugement ayant rejeté cette demande sera donc confirmé.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Les époux Q... succombant partiellement à l'instance, seront condamnés aux dépens et à payer 2 000 € à la SCI la Datcha et aux consorts G... au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour l'instance de premier degré et l'appel.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Infirme le jugement sauf en ce qu'il a :

- condamné C... Q... et W... H... épouse Q... à enlever les pieds de vigne plantés contre la propriété de la SCI Datcha, sous astreinte de 50 euros par jour à compter de la signification du jugement,

- rejeté la demande de dommages et intérêts de C... Q... et W... H... épouse Q...,

Pour le surplus l'infirme et statuant à nouveau,

Rejette les demandes tendant à la condamnation de C... Q... et W... H... épouse Q... à :

-enlever le portail automatique en fer et les deux piliers,

-déplacer la boîte aux lettres du mur de la SCI la Datcha,

-enlever la caméra de l'interphone qui se trouve sur le terrain de la SCI la Datcha,

-payer 11 000 € de dommages et intérêts à la SCI la Datcha, J... G... dit G..., D... L... épouse G..., et T... G... épouse I...,

Condamne C... Q... et W... H... épouse Q... aux dépens, avec distraction pour ceux d'appel dans les conditions prévues par l'article 699 du code de procédure civile et à payer 2 000 € à la SCI la Datcha et aux consorts G... au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour l'instance de premier degré et l'appel.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 18/15628
Date de la décision : 06/02/2020

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 4A, arrêt n°18/15628 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-02-06;18.15628 ?
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