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22/11/2019 | FRANCE | N°18MA04155

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 22 novembre 2019, 18MA04155


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... E... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 9 octobre 2017 par laquelle le conseil départemental des Bouches-du-Rhône de l'ordre des médecins a refusé de saisir la chambre disciplinaire de première instance de Provence Alpes Côte d'Azur Corse d'une plainte contre Mme A... D....

Par une ordonnance n° 1709219 du 17 avril 2018, le président de la 7ème chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :


Par une requête, enregistrée le 6 septembre 2018, M. E..., représenté par Me H..., demand...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... E... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 9 octobre 2017 par laquelle le conseil départemental des Bouches-du-Rhône de l'ordre des médecins a refusé de saisir la chambre disciplinaire de première instance de Provence Alpes Côte d'Azur Corse d'une plainte contre Mme A... D....

Par une ordonnance n° 1709219 du 17 avril 2018, le président de la 7ème chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 6 septembre 2018, M. E..., représenté par Me H..., demande à la Cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du président de la 7ème chambre du tribunal administratif de Marseille du 17 avril 2018 ;

2°) d'annuler la décision du 9 octobre 2017 du conseil départemental des Bouches-du-Rhône de l'ordre des médecins ;

3°) d'enjoindre au conseil départemental des Bouches-du-Rhône de l'ordre des médecins de réexaminer sa demande et de lui permettre de saisir directement le conseil national de l'ordre des médecins.

Il soutient, qu'eu égard aux mentions erronées des voies de recours portées sur la lettre de notification de la décision en litige, c'est à tort que le premier juge a estimé qu'il n'était pas recevable à demander l'annulation de cette décision.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 juin 2019, Mme D..., représentée par la SCP Carlini et associés, conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- comme l'a jugé à bon droit le premier juge, la demande de première instance était irrecevable faute pour son auteur d'avoir formé un recours administratif préalable obligatoire devant le conseil national de l'ordre des médecins avant de saisir la juridiction ;

- c'est à bon droit que le conseil départemental de l'ordre des médecins a refusé de saisir la chambre disciplinaire de première instance d'une plainte à son encontre.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 juillet 2019, le conseil départemental des Bouches-du-Rhône de l'ordre des médecins déclare s'en remettre à la sagesse de la Cour.

M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 juillet 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de M. Chanon, rapporteur public,

- et les observations de Me G..., substituant la SCP Carlini et associés, représentant Mme D....

Considérant ce qui suit :

1. Saisi d'une plainte de M. E... contre Mme D..., chef de clinique assistante au pôle psychiatrique universitaire " Solaris " de l'hôpital Sainte-Marguerite de Marseille, où l'intéressé avait été hospitalisé, le conseil départemental des Bouches-du-Rhône de l'ordre des médecins a refusé, par une décision du 9 octobre 2017 notifiée le 17 octobre 2017, de traduire ce praticien hospitalier devant la chambre disciplinaire de première instance de l'ordre des médecins de Provence Alpes Côte d'Azur Corse. M. E... relève appel de l'ordonnance du 17 avril 2018 par laquelle le président de la 7ème chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision au motif que, préalablement à son recours contentieux, le requérant n'avait pas formé de recours administratif devant le conseil national de l'ordre.

2. Les écritures du conseil départemental des Bouches-du-Rhône de l'ordre des médecins, qui, bien qu'informé de l'obligation de recourir au ministère d'un avocat, ont été présentées sans ce ministère, doivent être écartées des débats.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

3. Aux termes de l'article L. 4123-2 du code de la santé publique, dans sa rédaction applicable à la date de la décision en litige : " Il est constitué auprès de chaque conseil départemental une commission de conciliation composée d'au moins trois de ses membres. (...) / Lorsqu'une plainte est portée devant le conseil départemental, son président en accuse réception à l'auteur, en informe le médecin (...) mis en cause et les convoque dans un délai d'un mois à compter de la date d'enregistrement de la plainte en vue d'une conciliation. En cas d'échec de celle-ci, il transmet la plainte à la chambre disciplinaire de première instance avec l'avis motivé du conseil dans un délai de trois mois à compter de la date d'enregistrement de la plainte, en s'y associant le cas échéant. / (...) / En cas de carence du conseil départemental, l'auteur de la plainte peut demander au président du conseil national de saisir la chambre disciplinaire de première instance compétente. Le président du conseil national transmet la plainte dans le délai d'un mois ".

4. Par dérogation à ces dispositions, l'article L. 4124-2 du code la santé publique prévoit, s'agissant des " médecins (...) chargés d'un service public et inscrits au tableau de l'ordre ", qu'ils " ne peuvent être traduits devant la chambre disciplinaire de première instance, à l'occasion des actes de leur fonction publique, que par le ministre chargé de la santé, le représentant de l'Etat dans le département, le directeur général de l'agence régionale de santé, le procureur de la République, le conseil national ou le conseil départemental au tableau duquel le praticien est inscrit (...) ". Les personnes et autorités publiques mentionnées à cet article ont seules le pouvoir de traduire un médecin chargé d'un service public devant la juridiction disciplinaire à raison d'actes commis dans l'exercice de cette fonction publique. En particulier, un conseil départemental de l'ordre des médecins exerce, en la matière, une compétence propre et les décisions par lesquelles il décide de ne pas déférer un médecin devant la juridiction disciplinaire peuvent faire directement l'objet d'un recours pour excès de pouvoir devant la juridiction administrative.

5. Par ailleurs, aux termes de l'article R. 4127-112 du même code : " Toutes les décisions prises par l'ordre des médecins en application du présent code de déontologie doivent être motivées. / Celles de ces décisions qui sont prises par les conseils départementaux peuvent être réformées ou annulées par le conseil national soit d'office, soit à la demande des intéressés ; celle-ci doit être présentée dans les deux mois de la notification de la décision ". Les décisions visées par ces dispositions sont les décisions d'ordre administratif prises par les instances ordinales en application du code de déontologie des médecins, lesquelles ne comprennent pas les décisions que ces instances peuvent prendre en matière disciplinaire, comme celles qui sont mentionnées aux articles L. 4124-2 et L. 4123-2 du code de la santé publique, cités aux points précédents.

6. Il découle de ce qui a été dit au point 4 que les dispositions de l'article L. 4123-2 du code la santé publique citées au point 3 ne s'appliquent pas aux décisions par lesquelles un conseil départemental de l'ordre des médecins apprécie, sur le fondement de l'article L. 4124-2 du même code, s'il y a lieu de traduire un médecin chargé d'une fonction publique devant la juridiction disciplinaire à raison d'actes commis dans l'exercice de cette fonction publique.

7. Il en résulte que c'est à tort que le président de la 7ème chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté comme irrecevables les conclusions de M. E... tendant à l'annulation de la décision du conseil départemental des Bouches-du-Rhône de l'ordre des médecins au motif qu'il lui appartenait de saisir préalablement le Conseil national de l'ordre des médecins en application de l'article L. 4123-2 du code de la santé publique. Par suite, l'ordonnance attaquée doit être annulée.

8. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Marseille pour qu'il statue à nouveau sur la demande de M. E....

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

9. Le présent arrêt n'appelle aucune mesure d'exécution et les conclusions présentées par M. E... sur le fondement des dispositions de l'article L. 911-2 du code de justice administrative tendant à ce qu'il soit enjoint au conseil départemental des Bouches-du-Rhône de l'ordre des médecins de réexaminer sa demande et de lui permettre de saisir directement le conseil national de l'ordre des médecins de son affaire ne peuvent dès lors qu'être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : L'ordonnance n° 1709219 du 17 avril 2018 du président de la 7ème chambre du tribunal administratif de Marseille est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée devant le tribunal administratif de Marseille.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. E... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... E..., au conseil départemental des Bouches-du-Rhône de l'ordre des médecins et à Mme A... D....

Délibéré après l'audience du 8 novembre 2019, où siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- M. B..., président assesseur,

- Mme F..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 22 novembre 2019.

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N° 18MA04155

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 18MA04155
Date de la décision : 22/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Procédure - Introduction de l'instance - Liaison de l'instance - Recours administratif préalable.

Professions - charges et offices - Discipline professionnelle - Procédure devant les juridictions ordinales.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: M. Georges GUIDAL
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : SEKLY-LIVRATI DORINE

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-11-22;18ma04155 ?
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