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27/07/2006 | TOGO | N°103

Togo | Togo, Cour d'appel de lomé, 27 juillet 2006, 103


Texte (pseudonymisé)
Un bail commercial a été conclu entre les parties en 1986 pour une durée de 15 ans. Selon une des clauses de ce contrat, le contrat est renouvelable par tacite reconduction de mêmes périodes faute de congé préalable donné par lettre recommandée avec accusé de réception six mois avant l’expiration de la période en cours par l’une ou l’autre des parties. Le bailleur ayant signifié le congé au preneur cinq mois huit jours avant l’expiration du délai, ce dernier prétend que le contrat est déjà renouvelé. Le bailleur invoque devant le juge, l’article 92 de l’AUDCG. La

Cour d’appel, infirmant le jugement, estime que le bail conclu par les partie...

Un bail commercial a été conclu entre les parties en 1986 pour une durée de 15 ans. Selon une des clauses de ce contrat, le contrat est renouvelable par tacite reconduction de mêmes périodes faute de congé préalable donné par lettre recommandée avec accusé de réception six mois avant l’expiration de la période en cours par l’une ou l’autre des parties. Le bailleur ayant signifié le congé au preneur cinq mois huit jours avant l’expiration du délai, ce dernier prétend que le contrat est déjà renouvelé. Le bailleur invoque devant le juge, l’article 92 de l’AUDCG. La Cour d’appel, infirmant le jugement, estime que le bail conclu par les parties sous l’ancien régime ne saurait être régi par les dispositions de l’article 92 de l’AUDCG; les parties ayant prévu dans leur convention que le congé au preneur doit être signifié six mois avant l’expiration du bail et qu’à défaut le contrat de bail devant être considéré comme renouvelé par tacite reconduction, le congé délivré par le bailleur dans un délai de cinq mois huit jours est en violation de cette convention. C’est donc à tort que le premier juge a fait application de l’article 92 de l’AUDCG habilitant le bailleur à se prévaloir du délai de trois mois prévu par ce texte.
ARTICLE 1134 DU CODE CIVIL ARTICLE 92 AUDCG
Cour d’appel de Lomé, arrêt n° 103 du 27 juillet 2006, Sieur A Aa // B Ac Ab
La cour;
Ouï les parties en leurs conclusions respectives,
Le Ministère Public entendu ; Vu le jugement n° 1840/2003 du Tribunal de Première Instance de Lomé en date du 05 décembre 2003 ;
Vu l’appel interjeté le 12 décembre 2003 ensemble avec les autres pièces du dossier de la procédure ;
Ouï le Conseiller AKAKPO Kossi en son rapport ;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
EN LA FORME :
Attendu que par exploit de Maître AMEGBO Ablavi, Huissier de Justice à Lomé, en date du 12 Décembre 2003 ; le sieur A Aa, demeurant et domicilié à Lomé, assisté de Maître Koudjovi DOSSOU, Avocat à la Cour à Lomé ; a interjeté appel du jugement n° 1840/2003 rendu le 15 décembre par le Tribunal de Première instance de Lomé ;
Attendu que cet appel relevé dans les forme et délai de la loi est régulier et partant recevable ;
AU FOND :
Attendu que Maître Kodjovi DOSSOU, Conseil de l’appelant, fait grief au jugement entrepris d’avoir ordonné son expulsion des lieux pour n’avoir pas demandé le renouvellement du bail trois mois avant l’expiration de l’échéance des 15 ans, qu’il sollicite qu’il plaise à la Cour infirmer l’intégralité du jugement querellé, statuant à nouveau, constater qu’il existe bel et bien un bail commercial entre les parties, ordonner une expertise des bâtiments érigés et en ordonner leur remboursement si tant est que le bailleur entend reprendre les lieux et le condamner à des dommages et intérêts d’éviction de 255 millions de F CFA au profit de l’appelant ;
Attendu qu’il expose qu’il est lié par un nouveau bail avec l’intimé, le sieur B Ac qui a continué de percevoir des loyers depuis plus d’un an avant la saisine du Tribunal ; que par ailleurs, le contrat conclu le 07 avril 1986 n’a prévu nulle part que les constructions en dur érigées sur les lieux ne sont nullement remboursables par le bailleur ;
Qu’il ne saurait être expulsé sans que le bailleur ait remboursé le coût des bâtiments érigés sur les lieux, que le bailleur ne peut continuer à nier qu’il n’a pas autorisé le preneur du moment où il a été démontré que le bâtiment n’a pas poussé d’un coup et que le propriétaire ou le bailleur habite les lieux et y entrepose son conteneur de marchandises ;
Que la loi fait obligation au bailleur de rembourser le coût des installations avant toute expulsion ; que le premier juge aurait dû ordonner une expertise des bâtiments et ordonner leur remboursement avant toute expulsion ; qu’il sollicite qu’il plaise à la Cour condamner l’intimé à payer à titre de dommages intérêts d’éviction la somme de 255 millions au profit de l’appelant ;
Attendu que Maître DZOKA E. Koko, Avocat à la Cour à Lomé, Conseil de l’intimé, dans ses conclusions en date du 23 novembre 2006 ; pour sa part, soutient que les demandes fantaisistes de l’appelant ne sauraient guère prospérer et que ses arguments appellent certaines observations ;
Que l’appelant a été au bout du rouleau et n’apporte rien de nouveau aux débats si ce n’est de demander la condamnation à des dommages intérêts de 255 millions contre 160 millions en première instance ; que les conclusions de l’appelant n’ont été déposées qu’après 16 mois de renvoi pour lui et ce, après le dépôt des conclusions de carence de l’intimé ;
Qu’au demeurant, le contrat qui a lié les parties est, on ne peut plus clair ; le paragraphe 7 rubriques charges et conditions, stipule que les installations, modifications, améliorations, décors et embellissements quelconques, sauf les machines, resteront à la fin du bail la propriété du bailleur ; que le bailleur n’a cependant pas autorisé une quelconque construction sinon, il aurait été arrêté les modalités d’amortissement ;
Que l’appelant n’a ni rapporté la preuve de l’autorisation qu’il aurait reçue de l’intimé, ce qui lui aurait permis de bénéficier des dispositions de l’article 99 de l’Acte Uniforme sur le Droit Commercial Général qui permettent les remboursements, ni demandé le remboursement
des termes des dispositions de l’article 92 du même Acte Uniforme, qu’il sollicite qu’il plaise à la Cour rejeter les vains et stériles moyens soulevés par l’appelant et confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Attendu que par conclusions en réplique en date du 23 mars 2006, Maître Kodjovi DOSSOU, Conseil de l’appelant, fait remarquer que les articles 1739 et 1759 du Code civil déclarent expressément que c’est par la continuation de jouissance du locataire, après l’expiration du bail, que s’opère la tacite reconduction, qu’il est de principe et de jurisprudence ancienne et constante que « tacite reconduction naît d’une volonté que la conduite seule des parties démontre, et que ne manifestent ni paroles ni écrits ; qu’ainsi le locataire qui reste dans les lieux après expiration du bail et le fait du bailleur qui le souffre, ont été de tout temps considérés comme des indications certaines de la volonté réciproque de continuer les rapports précédemment établis » ; que la jurisprudence de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) est dans ce sens dans son arrêt n°014/2002 rendu le 18 avril 2002, Recueil de jurisprudence CCJA, n° spécial janvier 2003 Pages 29 ;
Qu’en soutenant n’avoir autorisé quelconque construction, l’intimé s’écarte de la réalité et tente de s’enrichir sans cause ; qu’en l’espèce, les parties sont en matière commerciale où la preuve peut être rapportée par tous les moyens, qu’il s’ensuit que c’est par erreur que le premier juge a confondu la construction d’un grand édifice sur un terrain nu à un embellissement, décor et installation ;
Attendu qu’il est constant que les parties se sont engagées dans le bail commercial d’un terrain nu pour une durée de 15 ans renouvelable par tacite reconduction suivant acte notarié à Lomé, en date du 07 avril 1986 ;
Attendu qu’en l’espèce, il s’agit bien d’un contrat à durée déterminée (15 ans) et non d’un contrat emphytéotique comme le prétend le preneur, que s’agissant d’un bail dont la durée est précise, le renouvellement est soumis à une procédure dont l’inobservation entraîne la déchéance du droit ;
Attendu que le contrat liant les parties, celui du 07 avril 1986, conclu sous l’ancien régime ne saurait être régi par les dispositions de l’article 92 de l’Acte Uniforme portant Droit Commercial général ;
Attendu qu’il est aussi constant que congé a été donné au preneur par lettre à lui signifiée le 23 avril 2001, soit cinq (05) mois huit (08) jours avant l’expiration de l’échéance ;
Attendu qu’il ressort du contrat du 07 avril 1986 dans sa rubrique intitulée « DUREE » que « le présent bail est consenti et accepté pour une durée de 15 ans à compter du 1er octobre 1986 pour prendre fin à pareille époque de l’année 2001 et renouvelable ensuite par tacite reconduction de même s périodes, faute de congé préalable donné par lettre recommandée avec accusé de réception six (06) avant l’expiration de la période en cours par l’une ou l’autre parties » ;
Attendu que s’il est vrai que le bailleur a signifié congé au preneur, il n’est pas moins constant que la signification du congé a été fait dans un délai de cinq (05 )mois huit (08) jours au lieu de six (06) mois comme prévu dans le contrat encore en vigueur,
Attendu qu’aux termes des dispositions de l’article 1134 du Code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; que c’est à tort que le premier juge a fait application des dispositions de l’article 92 de l’Acte Uniforme portant Droit Commercial Général, que n’ayant pas respecté le délai prescrit par la loi des parties en l’occurrence le contrat du 07 avril 1986, le bailleur n’est pas fondé à évoquer le délai de trois (03) mois prévu par la nouvelle loi de l’OHADA qui ne peut recevoir application que dans l’acte de renouvellement ; qu’il échet de rejeter ce moyen comme non fondé et infirmer en conséquence le jugement entrepris dans toutes ses dispositions et statuant à nouveau, dire et juger que le contrat liant les parties a été reconduit conformément audit contrat, l’intimé n’ayant pas dénoncé le contrat dans le délai stipulé au contrat ;
Attendu que l’appelant a sollicité la condamnation de l’intimé à lui servir la somme de 255 millions de francs CFA à titre de dommages et intérêts d’éviction ; que le contrat étant à tacite reconduction, il s’ensuit que ce chef de demande n’est plus justifié et qu’il échet de le rejeter ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en appel ;
EN LA FORME : Reçoit l’appelant ;
AU FOND : Le déclare fonder ;
Infirme en conséquence le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
STATUANT A NOUVEAU :
Dit que le contrat liant les parties a été tacitement reconduit pour n’avoir pas été dénoncé dans le délai stipulé par le contrat ;
Rejette la demande de dommages intérêts pour évictions comme non fondée ;
Condamne l’intimé aux dépens ;
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement par la Chambre Civile de la Cour d’Appel de Lomé, les jour, mois et an que dessus ;
Et ont signé, le Président et le Greffier



Analyses

DROIT COMMERCIAL GENERAL - BAIL COMMERCIAL - DELAI DU CONGE - ARTICLE 92 AUDCG - APPLICATION (NON) - CONVENTION DES PARTIES - ARTICLE 1134 CODE CIVIL - TACITE RECONDUCTION


Références :

Ohada.com/Unida


Origine de la décision
Tribunal : Cour d'appel de lomé
Date de la décision : 27/07/2006
Date de l'import : 22/11/2019

Numérotation
Numéro d'arrêt : 103
Identifiant URN:LEX : urn:lex;tg;cour.appel.lome;arret;2006-07-27;103 ?
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