Aa B A
c/
BICIS
CASSATION ; MOYEN ; CHEFS DU DISPOSITIF DE LA DECISION ATTAQUEE ; CONTRADICTION ENTRE EUX ; IRRECEVABILITE ; POUVOIR DES JUGES ;
PREUVE ; ELEMENT DE PREUVE ; OFFICE DU JUGE ; DENATURATION ;
EXCLUSION ; APPRECIATION SOUVERAINE.
Si une contradiction entre les énonciations des faits constatés par les juges du fond entraîne la cassation, en revanche, l'arrêt attaqué pour contrariété de motifs n'encourt pas le reproche du moyen lorsque la contradiction alléguée concerne les conséquences juridiques découlant des faits qu'il énonce.
C'est hors toute dénaturation que le juge, saisi d'une question de preuve, apprécie souverainement la pertinence des productions effectuées par les parties et se détermine par une décision motivée.
En conséquence, justifie légalement sa décision, la Cour d'appel, qui retient que la postériorité d'une inscription d'hypothèque n'entraîne pas nécessairement annulation d'une première inscription d'hypothèque dans le temps ;
Dès lors que les parties ont débattu contradictoirement des preuves de leurs allégations et exceptions dont le juge apprécie souverainement l'efficacité, c'est à bon droit que la Cour d'appel a accueilli les prestations du demandeur, sans contrevenir à l'article 841 de la loi n° 76-60 du 12 juin 1976 portant garantie des créanciers.
Est irrecevable le moyen qui tend à remettre en discussion, devant la Cour de cassation les éléments de fait et de preuve souverainement appréciés par les juges du fond.
CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE
ARRET N° 6 DU 7 DECEMBRE 2005
LA COUR
OUI Monsieur Pape Makha NDIAYE, Conseiller en son rapport ;
OUI Monsieur François DIOUF, Avocat Général, représentant le Ministère Public en ses conclusions ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
VU la loi organique n° 92.25 du 30 mai 1992 sur la Cour de cassation ;
VU les textes reproduits en annexe ;
ATTENDU, selon l'arrêt confirmatif attaqué, que subséquemment à la déclaration de la Société AFRISEN en règlement judiciaire, la Banque Internationale pour le Commerce et l'Industrie du Sénégal, dite BICIS et créancière de celle-ci, a fait inscrire une hypothèque forcée sur l'immeuble objet du titre foncier n° 18 578/DG appartenant à Aa B A qui, s'étant porté caution solidaire, avait donné cette garantie à la banque pour le paiement des dettes de la Société débitrice, dont il était le Directeur Général ;
Sur le premier moyen tiré de la contrariété de motifs, en ce que, après avoir constaté que Aa B A a réfuté tant le principe de la créance que son quantum, la Cour d'appel, en appréciant la validité de la caution solidaire, a retenu que le montant et l'exigibilité de la créance de la BICIS ne sont pas contestés, alors que la contradiction des motifs équivaut à un défaut de motif ;
MAIS ATTENDU QUE la contradiction alléguée concerne, non l'énonciation des faits constatés par la Cour d'appel, mais les conséquences juridiques que celle-ci en a tirées ;
D'où il suit que le moyen est irrecevable ;
Sur le deuxième moyen tiré d'un manque de base légale, d'une absence de motif et de la dénaturation des faits, en ce que tout en constatant que « le requérant a produit un acte d'hypothèque du chalutier » subséquent « à l'acte de cautionnement », la Cour d'appel énonce que celui-ci « n'a versé aux débats aucune pièce annulant l'acte de cautionnement solidaire du 26 juin 1985 ou emportant substitution de celui-ci » et, sans indiquer les « motifs et les dispositions juridiques » qui l'ont déterminée, elle a déclaré que « la postériorité de l'hypothèque prise sur le chalutier n'implique pas annulation de l'inscription d'hypothèque forcée », dénaturant ainsi les faits alors, d'une part, que de simples affirmations ne permettent pas de vérifier si la loi a été correctement appliquée et, d'autre part qu'il s'agissait d'annuler, non pas l'inscription de l'hypothèque forcée mais plutôt l'acte de cautionnement solidaire ;
MAIS ATTENDU, qu'ayant relevé, appréciant les productions, que Aa B A n'a versé aux débats aucune pièce annulant l'acte de cautionnement solidaire du 26 juin 1985, la Cour d'appel, qui a souverainement retenu que « la postériorité de l'hypothèque prise sur le chalutier n'implique pas nécessairement annulation de l'inscription d'hypothèque contestée », a, sans dénaturation, légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen pris de la violation de l'article 841 de la loi n° 76.60 du 12 juin 1976 portant garantie des créanciers, en ce que, la Cour d'appel a opiné à l'argumentation de la BICIS qui soutient qu'on ne peut lui reprocher de s'être entourée de garantie, alors que le problème, en droit, consiste à se demander si, entre le 11 juillet 1985, date de l'inscription d'hypothèque, qui lui a été consentie par AFRISEN S.A sur le chalutier « Cap-Vert » et le 4 juillet 1988 date à laquelle ladite société a été déclarée en règlement judiciaire, la BICIS n'étant pas obligée de faire toutes les diligences nécessaires pour réaliser la garantie de sa créance ;
MAIS ATTENDU qu'appréciant les éléments de preuve soumis à son examen, la Cour d'appel, qui a relevé que ni la caution solidaire ni l'exigibilité de la créance n'étaient contestées a, à bon droit, validé l'hypothèque conservatoire pratiquée sur le titre foncier n° 18 578/DG appartenant à Aa B A, caution solidaire ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le quatrième moyen pris de la violation de l'article 841 de la loi n° 76.60 du 12 juin 1976 portant sur les garanties des créanciers, en ce que la Cour d'appel affirme que la postériorité de l'hypothèque n'implique pas nécessairement annulation du cautionnement, alors que l'hypothèque consentie à la BICIS étant postérieure à l'acte de cautionnement signé par le requérant, il y a eu transformation de l'obligation, selon les dispositions combinées des articles 849 et 247 du Code des Obligations Civiles et Commerciales ;
MAIS ATTENDU QUE le moyen ne tend qu'à remettre en cause les éléments de fait et de preuve souverainement appréciés par les juges du fond ;
D'où il suit que le moyen est irrecevable ;
PAR CES MOTIFS,
Rejette le pourvoi de Aa B A formé contre l'arrêt numéro 154 rendu le 02 avril 1993 par la Cour d'appel de Dakar ;
Le condamne aux dépens ;
Ordonne la confiscation de l'amende consignée ;
Président : Ibrahima GUEYE ; Conseiller : Ab C ; Conseiller-Rapporteur : Pape Makha NDIAYE ; Avocat général : François DIOUF ; Avocats : Mes FARHAT ; MBAYE et NDIAYE.
ANNEXE
Article 840 du Code des Obligations Civiles et Commerciales
Cautionnement simple - Bénéfice de discussion
S'il existe plusieurs cautions simples pour un même débiteur et une même dette, chacune d'elles peut, sur premières poursuites du créancier demander la division de la dette entre les cautions solvables au jour où l'exception est invoquée. La caution ne répond pas des insolvabilités survenues après la division.
Le créancier qui divise volontairement son action ne peut revenir sur cette division et supporte l'insolvabilité des cautions poursuivies sans pouvoir la reporter sur les autres cautions.
Article 840 du Code des Obligations Civiles et Commerciales
Autres exceptions
La caution, simple ou solidaire, est déchargée quand la subrogation aux droits et garanties du créancier ne peut plus s'opérer en sa faveur par le fait du créancier.
Si le fait reproché au créancier limite seulement cette subrogation, la caution est déchargée dans la mesure où la garantie conservée est insuffisante.
Sous réserve des dispositions des articles 831 alinéa 1er et 836 alinéa 3 toute caution peut opposer les mêmes exceptions que le débiteur principal ainsi que la compensation de ce que le créancier poursuivant doit au débiteur principal.