A l'audience publique ordinaire du mercredi vingt février deux mille
deux ;
La SHB NOVOTEL dont le siège social est à Dakar, Avenue Aa
A" poursuites et diligences de ses représentants légaux, mais faisant élection de
domicile en l'étude de Maître BLANCHER, Avocat à la Cour,
Ab B, Journaliste, demeurant à Dakar, 33, Boulevard Roosevelt, élisant domicile … l'étude de Maître Ousmane SEYE, Avocat à la Cour,
Défendeur ;
Statuant sur le pourvoi formé suivant requête enregistrée au Greffe de la Cour de cassation le 30 juin 1997 par Maître Arnaud BLANCHER, Avocat à la Cour, agissant au nom et pour le compte de la SHB NOVOTEL contre l'arrêt n° 91 du 31 janvier 1997 rendu par la Cour d'appel de Dakar dans la cause l'opposant à Ab B ;
VU le certificat attestant la consignation de l'amende de pourvoi ;
VU la signification du pourvoi au défendeur par exploit du 05 juillet 1997 de Maître Jacques D'ERNEVILLE, Huissier de Justice ;
VU le mémoire en réponse présenté pour le compte de Ab B et tendant au rejet du
pourvoi ;
OUI, Monsieur Ibrahima SAMBE, Auditeur, en son rapport ;
OUI, Monsieur Mohamed SONKO, Avocat Général, représentant le Ministère Public, en ses conclusions ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
VU la loi organique N° 92.25 du 30 mai 1992 sur la Cour de cassation ;
Sur le premier moyen tiré de la dénaturation du contrat liant les parties en ce que la Cour
d'appel a rejeté l'exception de nullité de la stipulation d'intérêts figurant dans la convention
d'avances du 15 décembre 1981 pour violation de l'article 542 alinéas 1 et 3 du Code des
Obligations Civiles et Commerciales, en soutenant que "en tout état de cause, la SHB ne
saurait s'engager clairement dans un acte authentique à rémunérer dans des conditions bien
définies les avances du sieur B, pour ensuite se rétracter en qualifiant la rémunération de stipulation d'intérêts illicites” alors que la convention d'avances d'actionnaires signée par les parties l'a été en forme d'acte sous seings privés.
Mais attendu que la qualification d'acte authentique donnée à la convention d'avances du 15 décembre 1981, alors qu'elle n'est qu'un acte sous seings privés ne suffit pas à caractériser le grief de dénaturation qui suppose l'altération du sens des clauses claires et précises d'un écrit ou la méconnaissance du sens de ses dispositions dépourvues d'obscurité ou d'ambiguïté ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen tiré de la dénaturation des clauses de la convention d'avances du 15 décembre 1981 en ce que la Cour d'appel a procédé à une disqualification de la convention
d'avances dont les teffiles clairs stipulaient un prêt sous forme d'avance jusqu'à hauteur de
5.000.000 F remboursable à compter du 1 er janvier 1986 avec stipulation d'intérêts à des
conditions précises pour requalifier le contrat en une souscription d'avance de capital alors
que la souscription du capital d'une société répond à des conditions de forme et de fond qui
jurent avec le procédé contractuel ayant lié les parties ;
Mais attendu que ce moyen tend à remettre en cause le pouvoir souverain du juge, à qui il
appartient d'apprécier la commune intention des parties lorsque les stipulations et la portée
d'un contrat ne sont pas exprimées suffisamment.
D'où il suit que le moyen est irrecevable.
Sur le troisième moyen tiré de la violation des articles 542 alinéa 1 et 3 et 85 du Code des
Obligations Civiles et Commerciales en ce que les juges d'appel ont estimé que la convention d'avance d'actionnaires qui est la loi des parties, prévoit clairement des conditions de
rémunération des avances, que tout solde créditeur d'un compte courant doit être rémunéré par des intérêts et qu'en tout état de cause, la SHB ne saurait clairement s'engager à rémunérer
dans des conditions bien définies les avances consenties par le sieur Ab B pour ensuite se rétracter pour qualifier ladite rémunération de stipulation illicite d'intérêts alors que la
formalité prévue par l'article 542 alinéa 1 du Code des Obligations Civiles et Commerciales est une formalité revêtant un caractère d'ordre public et ne saurait donc souffrir d'une
quelconque confirmation par les parties ;
Mais attendu qu'en analysant le contrat conclu entre la SHB NOVOTEL et Ab B
comme une souscription d'avances de capital non rémunérée par le versement de dividendes ou par l'augmentation des parts sociales de Ab B, mais par des intérêts conformément à la volonté des parties, la Cour d'appel ne pouvait appliquer l'article 542 du Code des
Obligations Civiles et Commerciales comme en matière de prêt d'argent ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé.
Sur le quatrième moyen tiré de la dénaturation des éléments de preuve en ce que la Cour
d'appel a estimé que la SHB NOVOTEL ne peut invoquer le nantissement par Ab B de ses avances au profit de la Caisse Centrale de Coopération parce qu'il n'est pas rapporté la preuve que la Caisse Centrale de Coopération a entrepris une quelconque action pour faire
bloquer les sommes entre les mains de la SHB NOVOTEL alors qu'elle avait bien soutenu
sans être contredite par Ab B, que par exploit d'huissier en date du 23 avril 1982, la
Caisse Centrale de Coopération lui avait signifié ledit nantissement d'avances avec défense de se dessaisir du montant nanti entre autres mains ;
Mais attendu que seul un écrit peut faire l'objet d'un grief fondé sur la dénaturation ;
D'où il suit que le moyen est irrecevable ;
Sur le cinquième moyen tiré du défaut de réponse à conclusions en ce que la Cour d'appel n'a pas cru devoir répondre à son moyen de défense contenu dans ses conclusions d'appel du 11 décembre 1996 qui soutenaient que «l'article 2 de la convention d'avance d'actionnaire avait défini de manière claire les conditions de remboursement et de rémunération desdites avances,
et que ni l'expert, ni le premier juge n'avaient tenu compte de ces conditions fixées de manière conventionnelle par les parties », qui, excluaient l'anatocisme ;
Mais attendu qu'il ne résulte pas des conclusions du 11 décembre 1996 invoquées que la
question de l'anatocisme avait été soulevée devant la Cour d'appel ;
D'où il suit que le moyen est irrecevable ;
Sur le sixième moyen tiré de la violation de l'article 543 du Code des Obligations Civiles et
Commerciales en ce que la Cour d'appel a confirmé le jugement entrepris en homologuant le rapport d'expertise du Cabinet Bécaye SENE qui a capitalisé les intérêts pour leur faire
produire eux-mêmes des intérêts alors que l'article 543 du Code des Obligations Civiles et
Commerciales conditionne son application à une stipulation spéciale des parties à la
convention, ce qui n'est pas le cas en l'espèce parce que la convention excluait toute
capitalisation des intérêts ;
Mais attendu que le moyen tiré de la violation de l'article 543 du Code des Obligations Civiles et Commerciales qui n'avait pas été soulevé devant la Cour d'appel est nouveau ;
D'où il suit que ce moyen est également irrecevable ;
Rejette le pourvoi.
Condamne la demanderesse aux dépens.
Ordonne la confiscation de l'amende consignée.
Dit que le présent arrêt sera imprimé, qu'il sera transcrit sur les registres de la Cour d'appel de Dakar en marge ou à la suite de la décision attaquée ;
Ainsi fait, jugé et prononcé par la Cour de cassation, Deuxième
Chambre, statuant en matière Civile et Commerciale en son audience publique tenue les jour, mois et an que dessus et où étaient présents Mesdames et Messieurs:
Nicole DIA, Président de Chambre, Président ;
Célina CISSE, Conseiller ;
Ibrahima SAMBE, Auditeur-Rapporteur ;
Mohamed SONKO, Avocat Général, représentant le Ministère Public ;
Fatou DIA BA, Greffier.
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le Président, le Conseiller, l'Auditeur-Rapporteur et le Greffier.