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06/04/1995 | SéNéGAL | N°13

Sénégal | Sénégal, Cour de cassation, 06 avril 1995, 13


Texte (pseudonymisé)
1°) Procureur Général près la Cour d'Appel de Dakar; 2°) Administration des Douanes
C/
A Aa Ac

POURVOI - PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL - CONDITIONS DE RECEVABILITE - DOUANES - TEMOIGNAGES - CONSTATATIONS MATERIELLES - PROCES VERBAUX - FORCE PROBANTE - DEFAUT DE REPONSE A CONCLUSIONS - MOYEN MANQUANT EN FAIT - DOUANE - DETENTION - TRANSPORT OU VENTE DE MARCHANDISES SPECIALEMENT DESIGNEES - JUSTIFICATIONS D'ORIGINE (NON) - PRESOMPTION ABSOLUE DE CONTREBANDE.

Chambre civile et commerciale

Arrêt n° 13, du 06 avril 1995


LA COUR,

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur la recevabilité d...

1°) Procureur Général près la Cour d'Appel de Dakar; 2°) Administration des Douanes
C/
A Aa Ac

POURVOI - PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL - CONDITIONS DE RECEVABILITE - DOUANES - TEMOIGNAGES - CONSTATATIONS MATERIELLES - PROCES VERBAUX - FORCE PROBANTE - DEFAUT DE REPONSE A CONCLUSIONS - MOYEN MANQUANT EN FAIT - DOUANE - DETENTION - TRANSPORT OU VENTE DE MARCHANDISES SPECIALEMENT DESIGNEES - JUSTIFICATIONS D'ORIGINE (NON) - PRESOMPTION ABSOLUE DE CONTREBANDE.

Chambre civile et commerciale

Arrêt n° 13, du 06 avril 1995

LA COUR,

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur la recevabilité du pourvoi:

ATTENDU que le défendeur soulève l'irrecevabilité du pourvoi, en ce que le Procureur Général
a produit la requête contenant ses moyens de cassation plus de dix jours après la déclaration de pourvoi et l'a signifiée aux parties adverses avant son dépôt au greffe de la Cour;

MAIS attendu que le pourvoi du Ministère public ne doit obéir pour sa recevabilité qu'à certaines dispositions des articles 43, 44 et 47 et en l'espèce de l'article 54 alinéa 1 de la loi organique sur la Cour de Cassation;

ATTENDU que le Procureur Général a formé son pourvoi dans le délai de six jours après le prononcé de l'arrêt de non-lieu par la Chambre d'Accusation par une déclaration au greffe de la Cour d'Appel signée par le greffier et le demandeur lui-même et l'a signifié à la partie contre laquelle il est dirigé; que son pourvoi qui a satisfait à toutes les conditions exigées par la loi doit être déclaré recevable;

Au fond

Sur le premier moyen pris de la violation de l'article 232 du Code des Douanes, en ce que l'arrêt
attaqué a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue en faveur de Aa Ac A, inculpé de contrebande, au motif que les témoignages recueillis par le magistrat instructeur sont de nature à écarter cette infraction alors qu'aux termes de l'article visé au moyen, les procès-verbaux de douanes, rédigés par deux agents des douanes et les procès-verbaux constatant les infractions douanières rédigés par deux agents assermentés font foi jusqu'à inscription de faux des constatations matérielles qu'ils relatent;

ATTENDU qu'il appert des énonciations de l'arrêt attaqué et des procès-verbaux auxquels il se réfère expressément, que des policiers ont interpellé DIOUM alors qu'il était porteur de lingots d'or d'un poids de 9.993 grammes et l'ont conduit devant les agents du Bureau des Enquêtes douanières qui ont établi procès-verbal et ont consigné les mêmes aveux qu'il avait souscrits devant les policiers selon lesquels, alors qu'il était installé au Zaïre, il a introduit au Sénégal, sur plusieurs années, de petites quantités d'or, dont une partie constituée de bijoux offerts à ses épouses; qu'il a fait fondre le tout dans le but de le revendre; que ces déclarations ont été confirmées par celles-ci ainsi que par un bijoutier qui a affirmé être celui qui a procédé à la fonte;
ATTENDU qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le magistrat instructeur en faveur de DIOUM au motif que les témoignages recueillis sont de nature à écarter toute infraction de contrebande alors que les procès-verbaux de douane rédigés par deux agents, et les procès-verbaux constatant des infractions douanières rédigés par deux agents assermentés font foi jusqu'à inscription de faux des constatations matérielles qu'ils relatent;

MAIS attendu que si les dispositions du texte visé au moyen constituent une exception aux règles qui gouvernent le droit commun des preuves et excluent toute preuve contraire fournie par témoins ou par écrit, cette exception ne vaut que lorsqu'elle porte, comme l'indique d'ailleurs le demandeur, sur les faits matériels constatés par les rédacteurs des procès-verbaux eux-mêmes tels que la nature de la marchandise saisie, son poids, mais non sur les circonstances que les agents ont pu déduire des déclarations recueillies ou sur la sincérité des aveux que le juge apprécie librement;
Qu'il s'ensuit que le moyen doit être rejeté;

Sur le deuxième moyen pris d'un défaut de réponse à un moyen péremptoire, en ce que l'arrêt attaqué a omis de répondre par un motif exprés ou par une motivation indirecte au moyen soulevé par le demandeur et par lequel il demandait l'infirmation de l'ordonnance de non-lieu au motif «que manquerait de base légale la décision de non-lieu fondée sur l'existence de déclarations contraires aux mentions contenues dans le procès-verbal»;

MAIS attendu que, sans s'attacher au bien fondé du motif qu'elle a exposé, il y a lieu de relever que la Chambre d'Accusation a examiné et répondu au moyen qui lui a été soumis par le Procureur Général;
Qu'en effet, elle a dit que «les témoignages recueillis sont de nature à écarter toute infraction de contrebande et à établir l'origine de l'or saisi et que dès lors, l'autorité absolue qui s'attache aux constatations contenues dans les procès-verbaux pouvait être contrebattue par ces témoignages»; Qu'il s'ensuit que le moyen manque en fait et doit être déclaré irrecevable;

Sur les troisième et quatrième moyens réunis, tirés de la violation des articles 208 et 312 du Code des douanes, de l'arrêté n° 012-588/M.E.F/DGD/DERD, en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue en faveur de Aa Ac A, inculpé de contrebande, au motif que les témoignages suffisent pour déterminer l'origine des lingots d'or saisis entre ses mains en l'absence de tout certificat justificatif d'origine alors que les textes susvisés édictent une présomption légale absolue de contrebande, sauf cas de force majeure, à l'encontre de ceux qui détiennent ou transportent les marchandises spécialement désignées par des arrêtés du Ministre chargé des Finances, s'ils n'ont, à première réquisition des agents des douanes, produit un certificat justificatif d'origine émanant d'une autorité ou d'un organisme dûment habilité et comportant des indications nécessaires à leur identification et certifiant sans ambiguïté qu'elles sont originaires d'un pays déterminé;

ATTENDU qu'aux termes de l'article 208 du Code des douanes, ceux qui détiennent ou transportent les marchandises spécialement désignées par des arrêtés du Ministre chargé des Finances doivent, à première réquisition des agents des douanes, produire soit des quittances attestant que ces marchandises ont été régulièrement importées, soit des factures d'achat, bordereaux de fabrication ou toutes autres justifications d'origine émanant de personnes ou sociétés régulièrement établies à l'intérieur du territoire douanier; qu'aux termes de l'article 312 du même Code, les marchandises visées à l'article suscité sont réputées avoir été importées en contrebande à défaut de justifications d'origine et qu'aux termes de l'arrêté ministériel visé au moyen, les dispositions de l'article) 208 du Code des douanes relatives à la justification de la détention, du transport, de la vente de certaines catégories de marchandises sur l'ensemble du territoire douanier s'appliquent...à l'or et matières d'or;

ATTENDU que ces textes instituent une présomption absolue de contrebande dès lors que des
marchandises spécialement désignées ont été détenues ou transportées sans justification d'origine;

ATTENDU qu'en se fondant sur les témoignages des épouses de l'inculpé et du bijoutier pour confirmer J'ordonnance de non-lieu entreprise alors que selon les procès-verbaux auxquels il se réfère expressément et ses propres énonciations, l'inculpé a reconnu avoir introduit clandestinement par petites quantités la marchandise litigieuse au Sénégal et n'a pu produire aucun document justificatif de son origine, l'arrêt attaqué a violé les dispositions combinées des articles visés aux moyens;

PAR CES MOTIFS

Déclare le pourvoi recevable;

AU FOND

Casse et annule l'arrêt n° 58 rendu le 21 Juin 1994 par la Chambre d'Accusation et, pour être à nouveau statué conformément à la loi, renvoie la cause et les parties devant la Chambre d'Accusation autrement composée;

Met les dépens à la charge du Trésor public.

Président: Madame Mireille NDIAYE. Rapporteur: Madame Mireille NDIAYE. Avocat Général: Monsieur Cheikh Tidiane FAYE. Avocats: Maîtres Ab B et Birame Ad C.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 13
Date de la décision : 06/04/1995
Chambre civile et commerciale

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;sn;cour.cassation;arret;1995-04-06;13 ?
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