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09/06/1993 | SéNéGAL | N°076

Sénégal | Sénégal, Cour de cassation, 09 juin 1993, 076


Texte (pseudonymisé)
A l'audience publique ordinaire du mercredi neuf juin mil neuf cent quatre vingt treize
La Compagnie Ab Ac dite (C.S.S.)
Af C, Ae A, Aa B
VU les déclarations de pourvois de Me Bourgi et Kanjo, Avocats à la Cour, agissant au nom et pour le compte de la C.S.S. et tendant à ce qui il plaise à la Cour casser et annuler les arrêts n°s 147 du 13 Mars 1990, 47 du 5 février 1991 et 160 du 24 Mars 1992 de la
Chambre sociale de la Cour d'Appel de Dakar ;
CE faisant attendu que les arrêts attaqués ont :
- manqué de base légale pour avoir déclaré le procès verbal de concili

ation inopposable ;
- Violé la loi en statuant ultra petita ;
- Violé l'article...

A l'audience publique ordinaire du mercredi neuf juin mil neuf cent quatre vingt treize
La Compagnie Ab Ac dite (C.S.S.)
Af C, Ae A, Aa B
VU les déclarations de pourvois de Me Bourgi et Kanjo, Avocats à la Cour, agissant au nom et pour le compte de la C.S.S. et tendant à ce qui il plaise à la Cour casser et annuler les arrêts n°s 147 du 13 Mars 1990, 47 du 5 février 1991 et 160 du 24 Mars 1992 de la
Chambre sociale de la Cour d'Appel de Dakar ;
CE faisant attendu que les arrêts attaqués ont :
- manqué de base légale pour avoir déclaré le procès verbal de conciliation inopposable ;
- Violé la loi en statuant ultra petita ;
- Violé l'article 64 de la loi organique sur la Cour Suprême ;
-violé la loi pour avoir alloué des sommes d'argent à des travailleurs retraités ;
- Violé le double degré de juridiction;
VU les arrêts attaqués ;
VU les lettres du greffe en date des 7 Mai 1990, 7 Mars 1991 et 19 Mai 1992 portant
notification des pourvois aux défendeurs ;
VU le Code du Travail ;
VU la loi n° 92-25 du 30 Mai 1992 portant loi organique sur la Cour de Cassation ;

OUI Monsieur Amadou Makhtar Samb, Président de Chambre, en son rapport ; OUI Monsieur Laïty KAMA, Avocat Général, représentant le ministère public en ses
conclusions;
APRES en avoir délibéré conformément à la loi ;
SUR LA JONCTION :
ATTENDU que la Compagnie Ab Ac (C.S.S.) s'est pourvue en cassation contre les arrêts n°147 du 13 Mars 1990, n° 47 du 5 Février 1991 et n° 160 du 24 Mars 1992 de la
Chambre sociale de la Cour d'Appel ;

QUE les trois pourvois concernent les mêmes parties et ont le même objet (puisque les deux derniers arrêts ne sont que des arrêts d'homologation de décomptes relatifs au premier arrêt n° 147 du 13 Mars 1990 qui a notamment écarté le procès verbal de conciliation du 13 Avril
1988 passé devant l'Inspecteur du travail et qui a condamné la C.S.S. à payer aux travailleurs diverses indemnités) ; qu'il y a lieu de les joindre pour y être statué par une seule et même
décision ;
SUR le moyen soulevé et tiré du manque de base légale en ce que la Cour d'Appel a déclaré le procès verbal de conciliation du 13 Avril 1988 inopposable aux travailleurs et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens :
ATTENDU qu'il est constant que le 2 Avril 1982 les délégués du personnel à la Compagnie
Ab Ac (C.S.S.), Af C , Ae A , Ae Ad et
Aa B furent licenciés après autorisation de l'inspecteur du travail ; que le
Ministère chargé du travail ayant infirmé l'autorisation de licenciement , ceux-ci saisirent le tribunal du travail qui par jugement en date du 26 juillet 1984 ordonna la réintégration des
travailleurs, condamna la C.S.S. à payer à chacun une indemnité égale au salaire qu'il aurait perçu s'il avait travaillé, débouté lesdits travailleurs de l'indemnité supplémentaire prévue à
l'article 188 bis du Code du travail, ordonna la liquidation sur état des sommes à payer; que sur appel de la C.S.S., la Cour d'Appel confirma le jugement du tribunal par arrêt en date du 28 Janvier 1986 ; que le 2 juillet 1987 saisi à nouveau par les travailleurs aux fins de
s'entendre allouer des indemnités de rupture, le tribunal de Dakar ordonna la réintégration
desdits travailleurs avec paiement des salaires dûs du 30 Avril 1986 au 30 juin 1987;
que sur appel de la C.S.S. et avant que la Cour d'Appel n'ait statué sur l'affaire, les parties en cause convenaient d'un règlement négocié, intervenu suivant procés verbal établi et signé par les parties devant l'Inspecteur du travail, le 13 Avril 1988, aux termes duquel il était convenu notamment que "pour mettre fin au contentieux de la réintégration qui les oppose depuis Avril 1982, les parties ont' décidé de mettre fin d'accord parties à leurs liens contractuels moyennant paiement de diverses sommes d'argent à titre d'indemnités de rupture ; que la présente
conciliation règle définitivement et irrévocablement le contentieux opposant les parties; que celles-ci renoncent à se prévaloir, à l'avenir, de la décision de la Chambre sociale de la Cour d'Appel en date du 3 Mai (ou du 28 Janvier), 1986 et de celle du tribunal du travail du 26
Juillet 1984 " ; que nonobstant cette conciliation , la Cour d'Appel, par l'arrêt n° 147 du 13
Mars 1990, a confirmé le jugement entrepris et déclaré que les travailleurs avaient remis en cause devant la Cour la validité, du procés verbal de conciliation en affirmant qu'ils avaient été induits en erreur par leur mandataire syndical ; que la conciliation aurait dû intervenir
devant le juge dés lors que les juridictions du travail étaient saisies , ce qui a pour effet
principal de dessaisir l'Inspecteur du travail qui n'a plus qualité pour concilier sur les chefs de réclamation dont le tribunal est saisi; que ledit procés verbal qui n'est pas revêtu de la formule exécutoire conformément à l'article 211 du Code du Travail, n'est pas opposable aux
travailleurs ;
QUE saisie par les travailleurs d'une requête aux fins d'homologation du décompte des
sommes qui leur sont dues , la Cour d'Appel a, par arrêt n°47 du 5 Février 1991 et en
exécution de l'arrêt n° 147 du 13 Mars 1990 , homologué les décomptes des sommes dues
pour les périodes du 1er Juillet 1987 au 30 Juin 1990 et du 1er juillet au 31 Décembre 1990, déduction faite des primes de transport; et par arrêt n° 160 du 24 Mars 1992 les décomptes
concernant la période du 1er Janvier 1991 au 31 Décembre 1991, aprés avoir rejeté comme
mal fondées les objections soulevées par la C.S.S. pour faire échec à l'homologation ;
ATTENDU que l'article 188 bis alinéa 3 du Code du Travail dispose qu'" en cas de
licenciement prononcé par l'employeur, sans que l'autorisation préalable de l'inspecteur ait été

demandée ou malgré le refus opposé par l'Inspecteur ou en cas d'annulation par le Ministre de la décision de l'Inspecteur autorisant le licenciement , le délégué du personnel ainsi licencié
est réintégré d'office avec paiement d'une indemnité égale au salaire qu'il aurait perçu s'il avait travaillé.
Si l'employeur ne réintègre pas le délégué du personnel 15 jours après la notification ……
est tenu de verser au délégué du personnel une indemnité supplémentaire égale à:
- 12 mois de salaire brut lorsqu'il compte 1 à 5 ans d'ancienneté dans l'entreprise ;
- 20 mois de salaire brut lorsqu'il compte 5 à 10 ans d'ancienneté "
- 2 mois de salaire brut par année de présence avec un maximum de 36 mois lorsqu'il compte plus de 10 ans d'ancinneté
- Le versement de cette indemnité est sans influence sur la nullité du licenciement."
QU'IL résulte de ces dispositions que la sanction de la violation de l'article 188 bis est la
nullité du licenciement avec l'obligation de réintégration du délégué et paiement d'une
indemnité égale au salaire qu'il aurait perçu s'il avait travaillé, conséquence logique de
l'illégalité et de la nullité du licenciement :
QU'IL est prévu en outre, une indemnité supplémentaire qui peut s'ajouter à l'indemnité
représentative des salaires dûs au cas où le délégué n'aurait pas été réintégré 15 jours après la notification de la décision de l'autorité administrative ; cette indemnité spéciale vise à
accélérer l'exécution de la réintégration et à décourager les employeurs récalcitrants ;
ATTENDU que pour confirmer le jugement du tribunal du travail qui a condamné la
Compagnie Ab Ac (C.S.S.) à payer aux travailleurs les salaires dûs du 30, Avril 1986 au 30 Juin 1987 à l'exclusion de l'indemnité supplémentaire prévue à l'article 188 bis
précité du Code du Travail et pour déclarer , en outre que le procés-verbal de conciliation du 13 Avril 1988 n'est pas opposable aux travailleurs, l'arrêt attaqué en date du 13 Mars 1990 a fait valoir que les travailleurs ont remis en cause devant la Cour d'Appel la validité dudit
procès-verbal en affirmant qu'ils avaient été induits en erreur par le mandataire syndical et
que la conciliation aurait dû intervenir devant le juge puisque la saisine des juridictions du
travail a pour effet principal de dessaisir l'Inspecteur du travail qui n'a plus aucune qualité
pour concilier les parties sur les chefs de réclamation dont le tribunal est saisi ;
Qu'en tout état de cause, selon la Cour d'Appel, ledit procés-verbal de conciliation n'est pas
revêtu de la formule exécutoire conformément â l'article 211 du Code du travail, et qu'un
procés verbal de conciliation non rendu exécutoire n'est pas opposable aux travailleurs
ATTENDU, qu'en l'espéce , la Cour d'Appel a, à tort , omis de faire application stricte des
dispositions de l'article 188 bis prévoyant que si le délégué n'a pas été réintégré 15 jours après la notification de la décision de l'autorité administrative, l'employeur pourra être con damné â verser une indemnité supplémentaire qui précisément vise à accélérer et à décourager les
employeurs récalcitrants ;
QU'EN outre, après avoir encaissé les sommes arrêtées dans le procès verbal de conciliation pendant plus d'un an, les travailleurs concernés qui sont tous délégués du personnel, donc
aussi avisés que leur mandataire syndical, ne sauraient alléguer qu'ils étaient induits en erreur par leur mandataire ou que le procès verbal n'est pas revêtu de la formule exécutoire, dès lors que la formule exécutoire qui peut être apposée par le Président du Tribunal du travail, d'après l'article 211 du Code du Travail, n'est pas une condition de validité du procès verbal de
conciliation, mais permet simplement à ce document administratif de pouvoir être exécuté
comme une décision de justice ; que par suite, la non-apposition de la formule exécutoire ne saurait signifier, comme l'a affirmé la Cour d'appel, l'inopposabilité dudit procès verbal; qu'il ne résulte pas non plus de l'article 211 du Code du travail, évoqué dans l'arrêt attaqué, qu'une fois les luridictions sociales saisies, notamment lorsqu'une affaire est pendante devant la Cour d'Appel, l'Inspecteur du travail ne peut plus concilier, ainsi que l'affirme la Cour d'Appel; que par suite , la conciliation peut intervenir à tout moment de la procédure ;

QU'EN l'espèce, le procès-verbal de conciliation établi devant l'Inspecteur du travail dont ni la compétence ni la qualité ne sont contestées et qui est dûment signé par les travailleurs eux
mêmes et par leur mandataire syndic, qui donc n'est entaché d'aucun vice dûment relevé, ne saurait être déclaré inopposable aux travailleurs en vertu des dispositions de l'article 211 du Code du Travail qui ne sont pas applicables pour la seule raison que les travailleurs ont remis en cause la validi1 dudit procès verbal alléguant qu'ils ont été induits en erreur pal leur
mandataire syndical ;
QUE par suite, il y a lieu de déclarer que le procès-verbal de conciliation du 13 Avril 1988
met fin au litige qui
oppose les parties, et emporte renonciation définitive des parties aux prétentions qu'elles
avaient formulées.
CASSE sans renvoi les arrêts n° 147 du 13 Mars 1990, n° 47 du 5 février
1991 et n° 160 du 24 Mars 1992 de la Chambre sociale de la Cour d'Appel ;
DECLARE que le procès verbal du 13 Avril 1988 met fil au litige opposant les parties ;
DIT qu'à la diligence de Monsieur le Procureur Général prés la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transcrit sur les registres de la Cour d'Appel en marge ou à la suite de l'arrêt
attaqué.
AINSI fait, jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre
sociale, en son audience publique ordinaire des jour, mois et an que dessus à laquelle
siégeaient Messieurs :
Amadou Makhtar Samb, Président de Chambre, Président-Rapporteur; Meïssa DIOUF, et
Bassirou DIAKHATE, Conseillers ;
EN PRESENCE de Monsieur Laïty KAMA, Avocat Général représentant le Ministère Public et avec l'assistance de Me Abdou Razakh Dabo, Greffier ;
Et ont signé le présent Le Président- Rapporteur, Les Conseillers et le
Greffier.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 076
Date de la décision : 09/06/1993

Origine de la décision
Date de l'import : 17/11/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;sn;cour.cassation;arret;1993-06-09;076 ?
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