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28/02/2014 | ROUMANIE | N°787/2CC/2014

Roumanie | Roumanie, Haute cour de cassation et de justice, 2e chambre civile, 28 février 2014, 787/2CC/2014


Est examiné le pourvoi de la réclamante S.C A ROMANIA SRL Cluj-Napoca contre la décision civile n°28/2013 du 15 février 2013, rendue par la Cour d’Appel de Cluj – IIe section civile de contentieux administratif et fiscal.

A l’appel nominal sont présents la requérante-réclamante SC A ROMANIA SRL de Cluj- Napoca représentée par Maître CS et l’intimée- accusée SC OVI GROUP SA de Cluj Napoca, représentée par l’avocat remplaçant DD, en l’absence de l’intimée-appelée en garantie SC REI SRL Cluj-Napoca.

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Le compte-rendu de l’affaire est présenté par le magistrat assistant, qui met en évidence que...

Est examiné le pourvoi de la réclamante S.C A ROMANIA SRL Cluj-Napoca contre la décision civile n°28/2013 du 15 février 2013, rendue par la Cour d’Appel de Cluj – IIe section civile de contentieux administratif et fiscal.

A l’appel nominal sont présents la requérante-réclamante SC A ROMANIA SRL de Cluj- Napoca représentée par Maître CS et l’intimée- accusée SC OVI GROUP SA de Cluj Napoca, représentée par l’avocat remplaçant DD, en l’absence de l’intimée-appelée en garantie SC REI SRL Cluj-Napoca.

La procédure de citation est légalement remplie.

Le compte-rendu de l’affaire est présenté par le magistrat assistant, qui met en évidence que le recours est insuffisamment timbré de la taxe judiciaire du montant de 9.502 lei, la requérante-réclamante ayant déposé au dossier la copie du reçu de paiement de la taxe judiciaire de timbre, que le recours est déclaré et motivé dans le cadre du délai procédural prévu par les dispositions de l’art. 301 du Code de Procédure Civile. Il est encore mis en évidence que, le 12 février 2014, l’intimée-accusée SC OVI SA Cluj-Napoca a déposé au dossier un mémoire, communiqué à la requérante.

L’avocat de la requérante-réclamante dépose au dossier la preuve du paiement de la taxe judiciaire de timbre, d’un montant de 9.502 lei, en original.

Ayant constaté qu’il n’y a pas d’autres demandes ni questions préalables à débattre par les parties, et que l’affaire est en état d’être jugée, la Haute Cour accorde la parole aux parties sur le pourvoi.

L’avocat de la requérante-réclamante SC A ROMANIA SRL Cluj-Napoca demande l’admission du recours et la modification de la décision attaquée dans le sens du rejet de l’appel déclaré par l’accusée et le maintien de la sentence commerciale, en répétant de vive voix les critiques liées aux raisons d’illégalités prévues à l’art. 304 pts. 8 et 9 du Code de procédure civile, développées dans la demande de recours.

Il indique avoir conclu en l’espèce, le 24.11. 2006, avec l’intimée- accusée , un contrat d’assurance, non-affecté de conditions, dans le respect des normes légales et, vu que la prime d’assurance a été versée, apparait à la charge de l’assureur l’obligation de dédommagement, pour le cas où se produit le risque assuré.

En argumentant le point 8 de l’art. 304 du Code de procédure civile, il indique que, selon l’art. 969 du Code civil, le contrat entre parties contractantes a force obligatoire, mais ne produit d’effets que dans la mesure où il ne porte pas atteinte aux dispositions légales et aux bonnes moeurs.

Il précise que, en l’espèce, il s’agit d’un contrat spécial, réglementé par les dispositions de la Loi n° 136/1995 concernant les assurances et réassurances de Roumanie, ce qui fait que les dispositions de la police d’assurance sont complétées et sont à interpréter conformément aux prévisions de cette loi spéciale.

Il indique aussi que, par l’art. IV des Conditions spécifiques concernant la Police Flexa, on a établi les cas où l’assureur ne doit pas d’indemnisation et par rapport aux dispositions de l’art. 20 de la Loi n° 136/1995, pour que soit incident le cas d’exclusion, l’assureur doit, d’une part, faire la preuve de l’existence de ce cas d’exclusion et, d’autre part, prouver que le risque assuré a été intentionnellement produit par l’assuré, les deux conditions étant cumulatives. Or, en l’espèce, l’assureur n’en a pas fait la preuve.

Il précise en même temps que, par les Conditions spécifiques de la Police Flexa, l’obligation de paiement du dédommagement dû par l’assureur était conditionnée par l’obligation de ne pas utiliser de feu à découvert, obligation qui incombait directement à l’assuré. Cette clause d’exclusion, stipulée dans les conditions spéciales d’assurance, avait donc la priorité par rapport aux clauses comprises dans les conditions générales et en cas situation peu claire ou ambiguë, son interprétation était opposée à celui qui les avait stipulées, en l’espèce, à l’assureur.

Il met en évidence que, par la police d’assurance, il n’avait pas dérogé aux dispositions de l’art.20 de la Loi n° 136/1995, mais que l’on avait simplement énuméré les cas d’exclusion, soutenant en même temps que l’instance d’appel avait donné une interprétation erronée du point 4.1.IV. du contrat, en élargissant de façon illégale les cas d’exclusion convenues par les parties.

Dans l’argumentation du point 9 de l’art.304 du Code de procédure civile, il indique que, à son avis et contrairement à ce qu’avait retenu l’instance d’appel, par rapport au spécifique du contrat d’assurance, à savoir de couvrir un risque, la distinction entre la qualité de propriétaire et celle de gardien juridique du bien n’était pas importante.

Il indique qu’en la présente espèce, ne se posait pas la question d’engager la responsabilité civile délictuelle, l’instance étant investie d’une action en responsabilité contractuelle, une éventuelle action fautive et non intentionnée d’un tiers n’étant pas de nature à exonérer l’assureur de l’obligation de payer l’indemnisation.

En ce qui concerne, sa prétendue faute, retenue par l’instance d’appel, faute consistant à avoir entreposé des ballots ayant favorisé la propagation de l’incendie, il indique que le simple fait d’avoir entreposé ces ballots n’était pas de nature à provoquer un incendie, le feu étant provoqué par l’acte d’un tiers, respectivement de la SC RIE SRL, agissant sous la surveillance directe de la SC CJ SA, cette dernière ayant assumé l’obligation de prévenir un incendie et ayant délégué cette obligation à la RIE SRL qui, pour sa part, n’a jamais demandé son accord sur l’utilisation du feu à découvert.

Il précise qu’il demandait des frais de justice, pour la taxe judiciaire de timbre, pour le timbre judiciaire, les honoraires d’avocat, ainsi que les frais d’hébergement et de déplacement.

L’avocat de l’intimée-accusée SC OVI SA de Cluj-Napoca demande le rejet du recours comme infondé et, par voie de conséquences, la conservation de la décision attaquée comme fondée et légale.

En combattant le premier motif de recours, fondé sur les dispositions de l’art. 304 pt. 8 du Code de procédure civile, il indique que l’instance d’appel n’avait pas dénaturé le sens visiblement clair de la clause 4.1.iv du contrat d’assurance. Ceci, vu qu’il résulte de l’ensemble du probatoire administré dans la cause, que la flamme oxyacétylénique avait été utilisée pour couper des déchets de fer, fait qui n’a été contesté par aucune des parties et que l’instance d’appel n’avait rien fait d’autre que d’appliquer la prévision contractuelle susmentionnée à la situation.

En combattant le motif de recours fondé sur les dispositions de l’art. 304 pt.9 du Code de procédure, il indique que l’instance d’appel n’avait pas mal interprété les dispositions de l’art. 969 du Code civil, rapportées aux dispositions de l’art. 20 de la Loi n° 136/1995, vu que, par les considérations de sa décision, l’on indiquait que la réclamante, en sa qualité de propriétaire, assumant la protection juridique du bien, aurait dû ne pas permettre l’accès du tiers. Il précise encore que même si la requérante-réclamante soutenait que la société d’assurance n’aurait pas prouvé sa non-opposition, en fait, il revenait à la réclamante d’en faire la preuve et non pas à la société d’assurance.

Il indique en même temps, que dans les raisons du recours, la requérante invoquait la situation de fait, et que le pourvoi n’entrait donc dans aucun des motifs de modification prévus par la loi.

Il précise ne pas demander de dépens de justice.

Conformément aux dispositions de l’art. 316 rapporté aux art. 298 et 150 du Code de procédure civile, la Haute Cour déclare clos les débats et retient la cause pour le prononcé.

LA HAUTE COUR,

Vu le présent recours, constate ce qui suit :

Jugement en première instance. Sentence du Tribunal Commercial de Cluj.

Par la sentence commerciale n° 2323/12.04.2011, le Tribunal de Commerce de Cluj a admis l’action formulée par la réclamante SC A ROMANIA SRL , contre l’accusée SC OVI SA., a obligé l’accusée à payer à la réclamante la somme de 1.509.262,98 lei, au titre de dédommagements et a rejeté la demande par laquelle l’accusée avait appelé en garantie la SC RIE SRL.

Pour rendre cette sentence, l’instance première a retenu que par la police d’assurance facultative contre les incendies et autres risques, série F n° 703471 du 24.11.2006, conclue avec la société accusée, la réclamante avait assuré l’immeuble sis à Cluj- Napoca, Piata 1 Mai, n° 4-5, département de Cluj, dont il est le propriétaire.

Elle a aussi constaté que le 09.01.2007, au rez-de-chaussée de l’immeuble assuré, un incendie avait commencé, puis s’était étendu au premier étage du bâtiment.

Dans ce contexte, l’instance de fond a noté qu’au moment du déclenchement de l’incendie, des employés de la SC RIE SRL effectuaient des travaux de désaffectation au rez-de-chaussée, faisant des coupures de métal à la flamme oxyacétylénique, sans avoir la permission d’utiliser le feu, sans écarter les matériaux combustibles et sans s’être munis de moyens de lutte contre les incendie sur les lieux du travail.

Le Tribunal a noté que dans le procès-verbal d’intervention n° 003 du 10.01.2007, les représentants de l’accusée qui se sont rendus sur les lieux ont identifié, comme source probable du feu les braises, et comme moyen possible d’allumage, ce qui en fait une circonstance déterminante, une cigarette. Le procès-verbal a ultérieurement été complété du rapport de constat technique n° 371063/16.01.2007, qui a identifié une source d’allumage de nature thermique (cigarette ou métal fondu), une cigarette jetée au hasard ou l’utilisation d’un appareil de soudure et découpage à flamme oxyacétylénique et comme circonstance déterminante - le non- respect des règles de protection contre les incendies en ce qui concerne les fumeurs ou la soudure.

L’instance première a aussi noté que le Tribunal de première instance de Cluj- Napoca avait ajouté au dossier n°889/211/2007, une demande pour assurer des preuves, procédure dans le cadre de laquelle une expertise avait été effectuée, référence y étant faite à un contrat par lequel l’ancien propriétaire de l’espace (SC CJ SA) avait vendu à la SC RIE SRL des déchets de fer et la réclamante – qui avait acquis droit de propriété sur l’immeuble le 14.09.2006, en l’achetant à la SC CJ SA , - lui aurait permis de démembrer les ensembles métalliques se trouvant dans cet espace. Cependant, le rez-de-chaussée était gardé à la date respective par une société de gardiennage travaillant sous contrat avec la SC CJ SA. Ce qui fait qu’après avoir analysé toutes les preuves, le tribunal a estimé que la SC CJ SA avait continué de se comporter en propriétaire de l’immeuble, permettant aux employés de la SC RIE SRL d’utiliser le feu non protégé, estimant que l’acte de cette société, qui a déterminé l’événement du cas assuré, ne pouvait être imputé à la réclamante, qui n’avait d’ailleurs même pas eu connaissance des travaux de désaffectation de l’espace par l’ancien propriétaire.

Pour conclure, l’instance première a retenu l’absence de faute de la réclamante dans l’incendie du 09.01.2007 – qu’elle a jugé comme un risque couvert par l’assurance – et elle a donc admis l’action et obligé l’accusée à payer des dédommagements d’un montant de 1.509.262,98 lei.

Elle a néanmoins rejeté la demande d’appel en garantie, estimant que la SC RIE SRL n’était pas coupable, reconnaissant que la propriété de l’immeuble avait été transmise à la réclamante, tandis que la SC CJ SA s’était comportée comme si elle avait continué d’en être la propriétaire. Elle a encore noté que les preuves ne relevaient pas que l’appelée en garantie eut assumé une quelconque obligation de prendre des mesures pour faire respecter les mesures légales concernant les autorisations de travail avec un feu non protégé.

L’Appel.

La décision de l’instance de premier contrôle judiciaire

Contre cette sentence, la SC OVI SA s’est pourvue en appel, ce dernier étant admis par la Cour d’Appel de Cluj – IIe section civile, de contentieux administratif et fiscal, par la décision civile n°28/15.022013 ; par voie de conséquences, la décision attaquée a été partiellement changée, dans le sens du rejet de l’action de la réclamante ; les dispositions de la sentence concernant le rejet de la demande d’appel en garantie furent cependant maintenues et la réclamante a dû verser à l’accusée la somme de 23.647,49 lei, au titre de frais de justice.

Pour en décider ainsi, l’instance d’appel a retenu que les preuves avaient permis de constater la modalité de départ de l’incendie, provoqué par des opérations de coupe, effectuées à l’aide d’un appareil utilisant le feu découvert, qui a projeté du métal incandescent, celui-ci retombant sur des déchets inflammables entreposés dans l’enceinte.

Dans ces conditions, la Cour d’appel a jugé comme étant incidente la clause d’exclusion comprise au pt. 4.4.1.iv du contrat d’assurance, selon laquelle l’on n’accorde pas de dédommagements pour les préjudices produits ou favorisés par l’utilisation du feu non protégé, y compris celui d’une source de lumière à flamme découverte (même protégée par un tube en verre ou un treillis, dans des pièces où sont entreposés ou utilisés des produits facilement combustibles (fourrages, lin, chanvre, coton etc.) ou inflammables (pétrole brut, essence, autres dérivés du pétrole).

Ensuite, l’instance de premier contrôle judiciaire a constaté que, aussi longtemps que la liberté du choix du partenaire contractuel n’était pas entravée, la réclamante ne pouvait pas invoquer le fait que l’assurance serait un contrat d’adhésion pour obtenir, ne serait-ce qu’incidemment, l’annulation de la clause nette d’exclusion.

Elle a également écarté la défense de l’intimée-réclamante concernant l’absence de faute de sa part dans la production de l’incendie, en retenant que l’hypothèse agréée par les parties sous la forme de la clause d’exclusion était appliquée aussi bien dans le cas de d’un acte direct de l’assuré, que dans le cas de l’acte d’un tiers.

Compte tenu des arguments précédemment exposés, l’appel a été admis et la sentence de la première instance partiellement changée, dans le sens du rejet de l’action, comme infondée ; par rapport à cette solution, on a maintenu la disposition de rejet de la demande d’appel en garantie.

Le recours. Les motifs d’illégalité invoqués

Contre cette décision, la SC A ROMANIA SRL a déclaré recours, demandant sa modification, au sens du rejet de l’appel comme infondé.

Dans sa motivation, la requérante a largement exposé la situation des faits, puis a indiqué que par une interprétation erronée des clauses de la police d’assurance, l’instance d’appel avait changé le sens clairement explicite de celles-ci, mais aussi que la décision attaquée avait été rendue en violation et application erronée des dispositions de la Loi n° 136/1995 ; elle a ainsi invoqué les raisons de recours prévues par l’art. 304 pts.8 et 9 du C.proc.civ.

Dans le développement de la première raison de recours, elle a affirmé que, selon l’art. 969 C.civ. , le contrat a force obligatoire entre les parties, uniquement dans la mesure où il ne porte pas atteinte aux dispositions légales et aux bonnes moeurs, comme l’indique l’art. 5 C.civ.

Elle a ainsi soutenu que le contrat d’assurance en son intégralité et, particulièrement les cas d’exclusion qu’il règle, sont complétés et doivent être interprétés par rapport à la Loi n° 136/1995.

Dans cet ordre d’idées, la requérante a souligné les prévisions de l’art. 20 de cette loi , selon laquelle, dans les cas fixés par contrat d’assurance, pour l’assurance de biens et pour responsabilité civile , l’assureur ne doit pas d’indemnisation, si le risque assuré est produit intentionnellement par l’assuré ou le bénéficiaire ou par un membre dirigeant de la personne morale, travaillant en cette qualité.

En rapportant à ces dispositions les hypothèses d’exclusion comprises à l’art. IV des Conditions spécifiques de la police d’assurance, la requérante a affirmé que, pour rendre incident le cas d’exclusion, l’assureur devait prouver que le risque assuré avait été produit intentionnellement.

Ceci étant, elle a soutenu que, même si dans l’espèce, l’existence du motif d’exclusion était réelle, l’assureur intimé n’était pas en droit de refuser le paiement de l’indemnisation tant qu’il n’avait pas prouvé que le risque avait été produit intentionnellement par l’assuré.

Dans le développement du deuxième motif de recours, la requérante a indiqué que, selon les preuves administrées, la cause de l’incendie étaient : des opérations de coupe de métaux utilisant du feu non protégé sans respecter les règles et mesures de prévention et extinction des incendies, par les employés de la SC RIE SRL, sous la direction de la SC CJ SA ; dans ce contexte, la requérante a affirmé qu’elle n’avait pas donné son accord pour ce genre d’activités, qui ne lui avaient d’ailleurs pas été communiquées. Ainsi, la requérante a-t-elle présenté dans son ensemble le probatoire administré aux instances du fond et a-t-elle soutenu que la décision attaquée enfreignait les prévisions de l’art. 969 C.civ., puisque la Cour d’appel avait appliqué les principes de la responsabilité civile délictuelle, bien que l’action fût fondée sur la responsabilité contractuelle. C’est pourquoi elle a jugé que l’acte d’un tiers n’était pas de nature à exclure le paiement de l’indemnisation, d’autant plus que l’art. 22 de la Loi n° 136/1995, repris aussi par l’art. 14 des Conditions Générales de l’assurance, reconnaissait la subrogation de l’assureur dans les droits de l’assuré contre les tiers responsables de la production du dégât.

Ainsi la requérante a-t-elle affirmé qu’elle n’était pas la partie responsable pour l’incendie, les responsables étant soit la SC CJ SA, soit la SC RIE SRL ;

Elle a aussi affirmé, que l’on ne saurait lui reprocher de ne pas avoir pris toutes les mesures pour prévenir le risque assuré, puisque l’incendie n’était pas un acte de la requérante, l’assureur ayant accepté de signer la police d’assurance, près d’un mois avant l’incendie, suite à une inspection de risque, qui lui avait permis d’évaluer l’état physique de l’immeuble.

La requérante a encore fait référence à la modalité dont on avait entreposé au rez-de-chaussée les déchets d’éponges qui avaient favorisé la propagation du feu, mais il a souligné que les preuves ne relevaient pas son intention de provoquer un incendie, raison pour laquelle il estimait que l’intimée-accusée devait payer l’indemnisation d’assurance.

Le 12.02.2014, l’intimée accusée a déposé au dossier un mémoire, demandant le rejet du recours comme infondé.

Analysant les documents du dossier, ainsi que la décision attaquée, à travers les motifs de recours invoqués, la Haute Cour retient ce qui suit :

Conformément à l’art.304 pts 8 et 9 du C. proc. civ., la décision peut être modifiée, lorsque l’instance, ayant mal interprété l’acte juridique soumis au jugement, a changé la nature ou le sens clair, indiscutable et évident de cet acte, ou lorsque la décision est dépourvue de base légale, ou a été rendue en infraction ou mauvaise application de la loi.

En ce qui concerne le premier motif de recours, parmi les susmentionnés, il convient de souligner que le législateur ne permet pas à une simple interprétation erronée du document juridique soumis au jugement de servir de base pour la modification de la décision attaquée ; en réalité, seul le changement de la nature ou du sens évident et clair de ce document, suite à une mauvaise interprétation pouvait être circonscrit au motif de recours prévu par l’art. 304 pt.8 C.proc. civ.

Dans ce contexte la Haute Cour note que l’auteur de la voie d’attaque n’avait pas invoqué le changement de nature de l’acte juridique soumis au jugement et n’avait pas indiqué le sens clair et évident du contrat, tel qu’il a été changé par l’instance d’appel.

En fait, les critiques de la requérante étaient dirigées contre l’interprétation des cas d’exclusion convenus à l’art. IV des Conditions spécifiques de l’assurance sans corrélation avec les prévisions de l’art. 20 de la Loi n° 136/1995.

Ces affirmations ne peuvent cependant pas être circonscrites au motif de recours prévu par l’art. 304 pt.8 C. proc. civ., mais uniquement à celui indiqué au pt. 9 de ce même article, dans les limites duquel il sanctionne les décisions rendues en infraction de la loi .

Constatant donc que le premier motif de recours était infondé, et rattachant, en vertu de l’art. 306 al. 3 du C.proc. civ., ces critiques au motif de recours prévu par l’art. 304 pt. 9 du C.proc. civ., la Haute Cour a procédé à leur examen, les a trouvées dépourvues de fondement juridique , compte tenu des considérations suivantes :

A l’art. 4.1.iv des Conditions Spécifiques de l’assurance, les parties ont convenu que l’assureur n’accordera pas de dédommagements pour des préjudices produits ou favorisés par l’utilisation d’un feu non protégé, y compris d’une source de lumière à flamme découverte (même protégée par un abat-jour en verre ou en treillis, dans des pièces ou sont entreposés ou utilisés des produits facilement combustibles ou inflammables.

La requérante reconnait l’existence, le 09.01.2007, d’un incendie pouvant être rattaché à ce cas d’exclusion, mais elle estime que l’hypothèse convenue par les parties dans la clause antérieurement citée enfreignait les prévisions de l’art. 20 de la Loi n° 136/1995 et ne devait donc être interprétée que dans les limites permises par le texte de loi.

Conformément à l’art. 20 al.1 de la Loi n° 136/1995, dans les cas fixés par le contrat d’assurance, pour les assurances de biens et de responsabilité civile, l’assureur ne doit pas d’indemnisation, si le risque assuré est produit intentionnellement par l’assuré ou le bénéficiaire ou par un membre dirigeant de la personne morale assurée, travaillant en cette qualité.

C’est pourquoi la requérante a soutenu que, même si l’existence dans l’espèce du motif d’exclusion était réelle, l’assureur- intimé n’avait pas le droit de refuser le paiement de l’indemnisation, tant qu’il n’avait pas prouvé que le risque avait été produit intentionnellement par l’assuré.

La Haute Cour constate cependant que la requérante fait une grave erreur concernant le contenu du texte de loi sur lequel sont fondées ses critiques.

Dans la présente espèce, les dispositions de l’art. 20 al. 1 de la Loi n° 136/1995 ne sont pas applicables, car elles ont pour prémisse l’existence justement d’un risque assuré – cas où l’assureur est exonéré de l’obligation de paiement de l’indemnisation, lorsqu’il constate l’existence d’une faute, sous forme d’intention de l’assuré ou des autres personnes indiquées dans le texte, tandis que à l’art. 4.1. iv des Conditions spécifiques de l’assurance, les parties avaient agréé les hypothèses du risque non assuré et même, exclu de l’assurance.

Dans de telles situations, il n’est plus question de prouver l’intention de l’assureur, pour justifier le refus de payer l’indemnisation d’assurance, car la simple incidence du cas exclu entraine le non octroi de dédommagements.

Dans ces conditions, l’instance d’appel a donné une application légale à l’art. 4.1.iv des Conditions Spécifiques de l’assurance, l’interprétation de cette clause ne pouvant être, vus les arguments sus exposés , celle proposée par la requérante.

Dans ce contexte de l’incidence de la clause d’exclusion, toutes les autres affirmations de l’auteur de la voie d’attaque, concernant la modalité d’interprétation du matériel probatoire par l’instance d’appel, du point de vue de l’absence de faute de la société requérante pour la production de l’incendie, sont, non seulement dépourvues d’importance, mais elles échappent à l’examen par l’instance de recours, cet examen ne portant que sur la décision attaquée, du point de vue des critiques d’illégalité.

C’est pourquoi, la Haute Cour retient que, par leur volonté, exprimée à l’art. 4.1.iv des Conditions Spécifiques de l’assurance, les parties ont délimité les risques couverts par l’assurance et ceux qui en sont exclus et, comme il est incontestable que l’incendie du 09.01.2007 entre dans la catégorie des risque exclus, elle estime légale la décision de l’instance d’appel, raison pour laquelle, en vertu de l’art. 312al.1 C.proc.civ., elle rejettera le recours comme infondé.

POUR CES RAISONS

AU NOM DE LA LOI

DECIDE

Rejette comme non fondé le recours déclaré par la réclamante SC A ROMANIA SRL Cluj-Napoca contre la décision civile n°28/2013 du 15 février 2013, rendue par la Cour d’Appel de Cluj – IIe section civile, de contentieux administratif et fiscal.

Définitive.

Rendue en séance publique, en ce 28 février 2014.

Sens de la décision : rejet

Décision attaquée

Juridiction : Cour d’Appel de Cluj
Date de la décision : 15.02.2013


Synthèse
Formation : 2e chambre civile
Numéro d'arrêt : 787/2CC/2014
Date de la décision : 28/02/2014

Analyses

Contrat d’assurances. Exclusion de certains risques des assurances. Conséquences par rapport aux dispositions de l’art.20 al. (1) de la Loi n°136/1995

Conformément à l’art. 20 al. (1) de la Loi n° 136/1995, dans les cas fixés par le contrat d’assurance, concernant les assurances de biens et de responsabilité civile, l’assureur ne doit pas d’indemnisation, si le risque assuré a été intentionnellement produit par l’assuré ou par le bénéficiaire, ou par un membre dirigeant de la personne morale assurée, travaillant en cette qualité. - Ces prévisions légales - ayant pour prémisse l’existence d’un risque assuré – ne sont pas applicables au cas d’un risque intentionnellement exclu de l’assurance par la volonté des parties, puisqu’il n’est plus nécessaire dans ce cas de prouver l’intention de l’assuré dans la production du risque, pour justifier le refus de l’assureur de payer la police d’assurance, vu que la simple incidence du cas exclus entraine le fait de ne pas accorder de dédommagements.


Origine de la décision
Date de l'import : 23/02/2018
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ro;haute.cour.cassation.justice;arret;2014-02-28;787.2cc.2014 ?
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