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28/12/2005 | NIGER | N°28

Niger | Niger, Cour suprême, Chambre administrative, 28 décembre 2005, 28


Texte (pseudonymisé)
REPUBLIQUE DU NIGER

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Cour Suprême
Chambre Administrative

La Cour Suprême , Chambre Administrative statuant en matière de recours pour excès de pouvoir en son audience publique ordinaire du mercredi vingt huit décembre deux mille cinq, tenue au palais de ladite Cour, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :


Après lecture du rapport par Monsieur NOUHOU HAMANI MOUNKAILA, Conseiller à la Cour, les conclusions de Monsieur le Procureur Général et en avoir délibéré conformément à la loi;
Statuant sur la requête en date du 09 septembre 2

005, enregistrée au Greffe de la Cour Suprême sous le n° 0400, par laquelle Me COULIBALY MOUS...

REPUBLIQUE DU NIGER

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Cour Suprême
Chambre Administrative

La Cour Suprême , Chambre Administrative statuant en matière de recours pour excès de pouvoir en son audience publique ordinaire du mercredi vingt huit décembre deux mille cinq, tenue au palais de ladite Cour, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

Après lecture du rapport par Monsieur NOUHOU HAMANI MOUNKAILA, Conseiller à la Cour, les conclusions de Monsieur le Procureur Général et en avoir délibéré conformément à la loi;
Statuant sur la requête en date du 09 septembre 2005, enregistrée au Greffe de la Cour Suprême sous le n° 0400, par laquelle Me COULIBALY MOUSSA, Avocat à la Cour, Conseil constitué de l'Association Nigérienne pour la Défense des Droits de l'Homme (ANDDH) et 12 autres associations représentées chacune par son Président, Présidente ou Coordonnateur National, saisissaient la Chambre Administrative de la Cour Suprême d'un recours en annulation pour excès de pouvoir contre le décret n° 2005-192/PRN/MCRI du 29 juillet 2005 portant nomination des membres de la Commission Nationale des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales (CNDH/LF);

Vu la Constitution du 09 août 1999;
Vu la loi 2000-10 du 14 Août 2000 sur la Cour Suprême;
Vu la loi 2001-05 du 20 avril 2001 modifiant la loi n° 98-55 du 29 décembre 1998 portant attributions, composition et fonctionnement de la Commission Nationale des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales;
Vu la requête;
Vu les mémoires des parties;
Vu les pièces du dossier

EN LA FORME

Considérant que le recours en annulation a été précédé d'un recours gracieux adressé à Monsieur le Président de la République par lettre du 11 août 2005 enregistrée au courrier de la Présidence le même jour;
Considérant qu'aux termes des articles 96, 97 et 98 nouveaux de la loi n° 2000-10 du 14 août 2000 modifiée, ce recours est régulier eu égard aux délais prescrits;
Considérant que Me Marc LEBIHAN, Avocat à la Cour, Conseil constitué de l'Etat du Niger, soutient l'irrecevabilité de cette requête aux motifs suivants:
1°) violation de l'article 102 de la loi 2000-10 du 14 août 2000 déterminant les attributions, la composition et le fonctionnement de la Cour Suprême en ce que:
la requête contient le nom des associations et les arrêtés leur conférant existence légale mais, il n'est versé au dossier aucune pièce prouvant le mandat conféré aux personnes légalement habilitées à signer en leur lieu et place;
la requête n'énonce pas de façon exhaustive les pièces dont elle entend se servir;

2°) violation de l'article 103 de la loi 2000-10 susvisée en ce que le requérant a omis de faire certifier conformes les copies accompagnant la requête;

Considérant que le recours a été introduit par le biais d'un avocat qui n'a pas besoin de justifier son mandat;
Considérant que les requérantes sont identifiées et représentées chacune par son président, présidente ou coordonnateur;
Considérant que la requête contient bien les références des pièces jointes;
Considérant que le demandeur ne conteste pas l'authenticité des copies des pièces produites;
Considérant que dans ces conditions, les exigences des articles 102 et 103 n'ont pas été violées;
Qu'il y a lieu de rejeter les exceptions de l'Etat du Niger et de déclarer la requête recevable en la forme;
Considérant que le 18 octobre 2005, le Greffier en Chef de la Cour Suprême enregistrait sous le n° 452 l'intervention volontaire des sieurs Aa B et El Ac Ab C dont la nomination et la qualité de représentant des Associations de Défense des Droits de l'Homme sont contestées;
Considérant que cette intervention est faite selon les règles prescrites par l'article 120 de la loi 2000-10 susvisée;
Qu'il y a lieu de la déclarer recevable;

AU FOND

Considérant que les requérantes invoquent trois moyens à l'appui de leur recours:
Premier moyen tiré de la violation de l'article 3 nouveau de la loi n° 2001-05 du 20 avril 2001 portant modification de la loi n° 98-55 du 29 décembre 1998 portant attributions, composition et fonctionnement de la CNDH/LF sur la désignation des deux représentants des Associations de Défense des Droits de l'Homme et de Promotion de la Démocratie;
Deuxième moyen tiré de la violation du principe constitutionnel de l'égalité des citoyens devant la loi (article 8 de la Constitution du 09 août 1999);
Troisième moyen tiré de la violation des principes de PARIS;

Considérant que le moyen tiré de la violation du principe de PARIS est inopérant, la Cour n'ayant pas preuve de leur intégration dans l'ordonnancement juridique du Niger;
Considérant que l'argumentation des deux premiers moyens est identique en ce que les requérants reprochent en substance à l'Etat du Niger la différence de traitement faite entre les associations;
Qu'il y a donc lieu de les examiner conjointement;
Considérant que les requérantes soutiennent que les deux représentants nommés au titre des associations de Défense des Droits de l'Homme ne sont nullement membres desdites associations;
Qu'ils viennent d'Organisations Non Gouvernementales (ONG) de Développement, que le RODADHD n'est pas la seule structure concernée par la mise en place des organes de la CNDH/LF;
Que même si elles sont respectueuses des textes en la matière, elles ne sauraient désigner spontanément leurs représentants dès lors que la fin du mandat n'a pas été constatée et qu'elles n'ont été officiellement saisies pour procéder à une désignation, de concert avec toutes les Associations de Droit de l'Homme reconnues au Niger dont l'Etat doit garantir la représentativité en veillant à ce que les structures aient la même chance de participation;
Que la violation du principe constitutionnel de l'égalité des citoyens devant la loi réside dans le fait de mettre une catégorie dans les conditions d'exercer un droit tout en mettant d'autres dans des conditions ne leur permettant pas de l'exercer;
Considérant que l'Etat du Niger soutient que l'article 3 ne précise ni le mode de désignation (élection, cooptation, ..), ni les critères de représentativité des associations; qu'en retenant la proposition des deux membres d'un réseau comprenant plus de cent quatre vingt neuf (189) associations et ONG de Défense de Droits de l'Homme, le décret attaqué a fait une saine application de la loi n° 2001-05 du 20 avril 2001 à son article 3;
Que les requérants auraient dû proposer spontanément leurs représentants à la nouvelle mandature conformément aux articles 2 et 4 nouveaux de la loi 2001-05;
Que c'est ainsi que le 05 juillet 2005 le réseau des Organisations de Développement et Associations des Droits de l'Homme et de la Démocratie (RODADHD) transmettait à Monsieur le Ministre chargé des Relations avec les Institutions les noms des deux représentants devant siéger à la CNDH/LF au titre des Associations;
Que le RODADHD est la seule association reconnue, regroupant le Collectif d'Associations de Défense des Droits de l'Homme, même si au demeurant elle est qualifiée d'ONG;
Que pour qu'il ait rupture d'égalité, il faut que le citoyen ne se soit pas mis volontairement dans une situation d'exclusion en refusant délibérément l'exercice d'un droit, ce qui est le cas des requérantes qui, tout en sachant que le mandat de leurs représentants à la CNDH/LF était à terme, n'ont pas proposé de nouveaux alors qu'aucune loi ne soumet cette proposition à un formalisme quelconque;
Considérant que dans leur mémoire en date du 17 Octobre 2005, les intervenants volontaires adoptent intégralement les moyens développés par l'Etat du Niger;
Considérant que l'article 3 dans son libellé indique que la Commission Nationale des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales (CNDH/LF) comprend: deux représentants désignés par les Associations de Défense des Droits de l'Homme et de la Promotion de la démocratie.»;
Que selon ce texte, les Associations désigneront leurs représentants et en indiqueront leur identité au Ministre de la Justice, Garde des Sceaux;
Considérant que l'article 8 de la Constitution du 9 Août 1999 proclame que l'Etat du Niger est un Etat de droit qui assure à tous l'égalité devant la loi;
Considérant que le décret querellé est intervenu sur rapport du Ministre chargé des relations avec les institutions;
Considérant que rien n'indique qu'il y a eu une consultation préalable des Associations du secteur des Droits de l'Homme suite à la vacance de poste à pourvoir;
Considérant que les requérants soutiennent que le Ministre chargé des relations avec les Institutions a fait retirer le 1er juin sa lettre n° 110 du 31 mai 2005 qu'il leur avait adressée sous couvert de l'ANDDH;
Considérant que le 23 juin 2005, l'Association dénommée le RODADHD «Réseau des ONG de Développement et Associations des Droits de l'Homme et de la Démocratie» obtenait son arrêté de reconnaissance;
Considérant que de par les statuts et l'arrêté de reconnaissance versés au dossier, le RODADHD se présente comme une simple association et non comme un groupement d'associations;
Considérant que c'est cette association qui désignait par lettre du 5 juillet 2005 Aa B et Ab C comme représentants des associations des Droits de l'Homme devant siéger à la Commission Nationale des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales (CNDH/LF);
Considérant l'administration les a retenus et nommés comme membres au titre des Associations de Défense des Droits de l'Homme sans qu'aucune des associations créées antérieurement au RODADHD n'ait été consultée;
Considérant qu'il s'agit là, d'une violation de la procédure consultative obligatoire en l'espèce afin de garantir la régularité et la transparence de la nomination;
Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la loi 98-55 du 29 décembre 1998 modifiée par la loi 2001-05 du 20aril 2001«la Commission comprend: deux représentants des Associations de Défense des Droits de l'homme et la Promotion de la Démocratie. L'identité de chaque représentant doit être adressée au Ministre de la Justice, Garde des Sceaux»;
Considérant que la nomination de ces représentants comme membres de ladite Commission par décret du Président de la République ne pouvait intervenir qu'après consultation de la majorité des associations intéressées; qu'en l'espèce la nomination de El Ac Ab C et Aa B sur proposition d'une seule association méconnaît les termes du texte susvisé; qu'il y a lieu d'annuler partiellement l'acte attaqué;

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Article 1er: Le recours en annulation pour excès de pouvoir de l'ANDDH et 12 autres associations est recevable;

Article 2: Le Décret n° 2005-192/PRN/MCRI du 29 juillet 2005 portant nomination des membres de la Commission Nationale des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales (CNDH/LF) est annulé en ses dispositions relatives à la nomination de Ab C et Aa B au titre des représentants des Associations de Défense des Droits de l'Homme et de Promotion de la Démocratie;

Article 3: Les dépens sont mis à la charge du Trésor Public.

Ainsi fait, jugé et prononcé par la Cour Suprême , Chambre Administrative, les jour, mois et an que dessus.

ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER./.

ARRÊT N° 28
Du 28 décembre 2005

Administrative

DEMANDEUR :
ANDDH et 12 autres associations
Me COULIBALY MOUSSA

A :
ETAT DU NIGER
Me Marc Le Bihan
POURVOI N°

PRESENTS :
Bouba Mahamane
Président
Nouhou Hamani Mounkaila ; Jeannette Adabra
Conseillers
Sissoko Mory
Ministère Public
Me Nouhou Souley
Greffier

RAPPORTEUR
Nouhou Hamani Mounkaila


Synthèse
Formation : Chambre administrative
Numéro d'arrêt : 28
Date de la décision : 28/12/2005
Recours pour excès de pouvoir

Parties
Demandeurs : ANDDH et 12 autres associations Me COULIBALY MOUSSA
Défendeurs : ETAT DU NIGER Me Marc Le Bihan POURVOI N°

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ne;cour.supreme;arret;2005-12-28;28 ?
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