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31/03/2021 | NIGER | N°21-023

Niger | Niger, Cour de cassation, 31 mars 2021, 21-023


Texte (pseudonymisé)
ARRET N° 21-023
/ CC/CRIM
Du 31 mars 2021
MATIERE : PENALE
DEMANDEUR
A. H. A alias Ab
A :
1°) Ministère Public
2°) M. A
PRESENTS
Salissou Ousmane,
Président
Mme Adamou Aissata & Ibrahim Malam Moussa, Conseillers
Ministère Public
Me Balkissa Lawali Idi, Greffière
RAPPORTEUR :
Mme Adamou Aissata

REPUBLIQUE ps DU NIGER
COUR DE CASSATION
CHAMBRE CRIMINELLE
La Cour de Cassation, Chambre Criminelle, statuant pour les
affaires pénales en son audience publique ordinaire du mercredi trente
un mars deux m

il vingt un, tenue au palais de ladite Cour, a rendu l’arrêt
dont la teneur suit :
ENTRE :
A. H. A alias Ab : né le … … … à...

ARRET N° 21-023
/ CC/CRIM
Du 31 mars 2021
MATIERE : PENALE
DEMANDEUR
A. H. A alias Ab
A :
1°) Ministère Public
2°) M. A
PRESENTS
Salissou Ousmane,
Président
Mme Adamou Aissata & Ibrahim Malam Moussa, Conseillers
Ministère Public
Me Balkissa Lawali Idi, Greffière
RAPPORTEUR :
Mme Adamou Aissata

REPUBLIQUE ps DU NIGER
COUR DE CASSATION
CHAMBRE CRIMINELLE
La Cour de Cassation, Chambre Criminelle, statuant pour les
affaires pénales en son audience publique ordinaire du mercredi trente
un mars deux mil vingt un, tenue au palais de ladite Cour, a rendu l’arrêt
dont la teneur suit :
ENTRE :
A. H. A alias Ab : né le … … … à Cotonou/Bénin et
Aa, Commerçant demeurant à Konni, assisté de la SCP DMBG ;
Demandeur;
D’une part ;
ET
1°) MINISTERE PUBLIC :
2°) M. A : 44 ans, né à …, et de Ac, Entrepreneur
y demeurant, assisté de Me Yagi Ibrahim, avocat à la Cour ;
Défendeurs ;
D'autre part ;
LA COUR
Après la lecture du rapport par Mme Adamou Aissata, conseiller
rapporteur, les conclusions du Ministère Public et après en avoir délibéré
conformément à la loi ;

Statuant sur le pourvoi formé par déclaration au greffe de la
Cour d’Appel de Tahoua en date du 20 mars 2020 contre l’arrêt N°
002/2020 du 17 mars 2020 de ladite Cour qui a statué en ces termes :
- Reçoit les appels du Procureur de la République, du prévenu et
de la partie civile réguliers en la forme ;
Rejette les exceptions d’incompétence soulevées par le conseil
de la partie civile ;
Se déclare compétente ;
Au fond, infirme le jugement attaqué dans ses dispositions
finales ;
Le confirme dans ses autres dispositions relativement aux
intérêts civils de la victime ; relaxe le prévenu des faits
d’émission de chèque sans provision ;
En outre, le déclare coupable du délit d’escroquerie portant sur
du ciment d’une valeur de 172 300 000 FCFA ;
Condamne le prévenu à la peine d’un (1) an d’emprisonnement
ferme et 20 000 F d’amende ;
Décerne mandat d’arrêt contre lui ;
Le condamne aux dépens.
Vu la loi organique N°2013-003 du 13 janvier 2013 déterminant
la composition, l’organisation, les attributions et le
fonctionnement de la Cour de Cassation ;
Vu la loi 2018-37 du 1” juin 2018 fixant l’organisation et la
compétence des juridictions en République du Niger ;
Vu les articles 333 du Code Pénal et 405, 504, 509, 563, 564 et
572 du Code de Procédure Pénale ;
Vu la déclaration de pourvoi et le mémoire qui y déposé ;
Vu les conclusions du ministère public ;
Ensemble avec les autres pièces du dossier.
EN LA FORME
Attendu que le pourvoi a été introduit dans les forme et délai
prévus par la loi, qu’il y a lieu de le déclarer recevable.

AU FOND
Attendu que Me Omar Dan Malam, conseil du requérant a fait
des observations orales selon lesquelles il sollicite de la Cour de casser
et annuler la décision attaquée sans renvoi conformément à l’article 101
de la loi 2013-03 du 23 janvier 2013 portant organisation, composition,
attribution de la Cour de Cassation ;
Attendu cependant que les observations orales sont accordées
aux parties pour étayer des points du mémoire ; que la demande susvisée
étant une demande nouvelle doit être rejetée ;
Attendu que le requérant a produit un mémoire dans lequel, il a
soulevé six moyens de cassation tirés de la violation de la loi ;
Sur le premier moyen de cassation tiré de la violation de la
loi article 586 du Code de Procédure Pénale, défaut, insuffisance de
motifs, défaut de réponse à conclusions en ce que la Cour d’Appel a
omis de statuer sur l’exception d’incompétence soulevée par le requérant
dans ses conclusions visées et produites aux débats.
Attendu qu’aux termes de l’article 586 du Code de procédure
Pénale « les arrêts de la chambre d’accusation ainsi que les arrêts et
jugements rendus en dernier ressort sont déclarés nuls s’ils ne
contiennent pas de motifs ou si leurs motifs sont insuffisants et ne
permettent pas à la Cour suprême d’exercer son contrôle et de connaître
si la loi a été respectée dans le dispositif ;
Il en est de même lorsqu’il a été omis ou refusé de se prononcer
sur une ou plusieurs demandes des parties, soit sur une ou plusieurs
réquisitions du ministère public » ;
Qu’au sens de ce texte, l’omission ou le refus de répondre à une
ou plusieurs demandes des parties entraine la nullité de la décision
rendue sans réponse ;
Attendu qu’il est de jurisprudence constante que les juges
doivent statuer sur tous les chefs de conclusions dont ils sont saisis et
l’arrêt qui laisse sans réponse encourt cassation ;
Attendu qu’en l’espèce, il résulte de la lecture de l’arrêt que le
prévenu et la partie civile ont, à l’audience, soulevé l’exception

d’incompétence de la Cour d’Appel de Tahoua ; mais que l’arrêt n’a fait
état que de l’exception soulevée par le conseil de la partie civile lorsqu'il
énonce à la page 2 : « que le conseil de la partie civile Me Yagi Ibrahim,
avocat à la Cour a soulevé l’incompétence de la Cour de céans tirée de
la violation de l’article 20 de la loi 2015-02 du 15 janvier 2015 « -------
-- qu’il y a lieu de rejeter l’exception d’incompétence de la Cour
soulevée par le conseil de la partie civile en l’espèce » ; Que ce
faisant, la Cour ayant omis d’exposer et de répondre aux conclusions du
prévenu, n’a pas légalement justifié sa décision qui encourt cassation de
ce chef.
Sur le deuxième moyen de cassation tiré de la violation de
l’article 2 alinéa 2 de la loi 2018-37 du 1“ juin 2018 fixant
l’organisation et la compétence des juridictions en République du
Niger, défaut de motifs et manque de base légale en ce que d’une part
la Cour s’est contentée pour condamner le requérant pour escroquerie,
de poser la règle générale ou le texte normatif de base à savoir l’article
504 du Code de Procédure Pénale sans explication et sans en tirer les
conséquences juridiques qui s’imposent alors que le texte n’est à priori
pas en adéquation avec les faits de l’espèce. D’autre part la Cour a
confirmé le jugement sur les intérêts civils sans aucune motivation.
Sur la 1° branche du moyen tiré du défaut de motifs
Attendu qu’il résulte cependant de la lecture de la décision
contestée que le juge d’Appel, après avoir relaté les faits, a évoqué les
dispositions de l’article 333 du Code Pénal pour déclarer coupable et
condamner le requérant ;
Qu’il n’a évoqué l’article 504 du Code de Procédure Pénale que
pour infirmer la décision après requalification des faits, entrer en
condamnation et décerner mandat d’arrêt; que ce moyen étant
inopérant, il y a lieu de le rejeter.
Sur la 2è"° branche du moyen pris du défaut de base légale
Attendu que le demandeur au pourvoi reproche à l’arrêt de
confirmer le jugement de première instance sur les intérêts civils et les
dépens sans se référer à aucun texte.

Attendu qu’il ressort cependant de l’examen de la décision
attaquée que la Cour d’Appel après avoir infirmé le jugement du 1“ juge
sur la culpabilité, l’a confirmé sur les intérêts civils et les dépens ;
Attendu qu’il est de jurisprudence constante que les juges en
confirmant une décision en appel reprennent pour leur compte la
motivation du premier juge, qu’ainsi cette branche du moyen n’est pas
fondée ; qu’il y a lieu de la rejeter.
Sur le troisième moyen tiré de la violation de la loi article 20
de la loi N° 2015-02 du 13 janvier 2015 portant création,
composition, organisation et la compétence d’un pôle judiciaire et
des chambres spécialisées en matières économique et financière : en
ce que la chambre correctionnelle de la Cour d’Appel de Tahoua s’est
déclarée compétente dans une matière qui relève de la compétence du
pôle judiciaire spécialisé en matière économique et financière.
Attendu qu’aux termes de l’article 20 de la loi susvisée « le pôle
judiciaire est compétent pour l’enquête, la poursuite, l’instruction et le
jugement des infractions à caractère économique et financier qui sont ou
apparaissent d’une grande complexité en raison du grand nombre
d’acteurs, de complices ou de victimes, de l’importance du préjudice ou
du ressort géographique sur lequel elles s’étendent.
Ces infractions sont :
Les infractions liées à l’utilisation des chèques »
Attendu que si ce texte attribut compétence matérielle et
territoriale au pôle judiciaire spécialisé en matière économique et
financière c’est à condition que les infractions apparaissent d’une
grande complexité en raison du grand nombre d’auteurs, de complice ou
de victimes, de l’importance du préjudice ou du ressort géographique
sur lequel elles s’étendent, d’autre part que les procureurs veulent

demander le dessaisissement des juridictions de droit commun à son
profit ;
Attendu qu’en l’espèce qu’il n’apparait pas des pièces du dossier
que le procureur général près la Cour d’Appel de Tahoua ait introduit
une requête aux fins de dessaisissement auprès du président de la dite
Cour, puisque l’initiative de requête appartient selon les stades de la
procédure aux seuls procureurs ;
Que dès lors le prévenu est mal fondé à critiquer l’absence de
dessaisissement, et son moyen doit être écarté,
Sur le quatrième moyen tiré de la violation de l’article 333
du Code Pénale en ce que la décision attaquée a infirmé le jugement
qui l’avait relaxé des faits d’escroquerie et l’a condamné pour cette
infraction, alors même que les manœuvres frauduleuses, un des éléments
constitutifs, ne sont pas constituées ;
Attendu qu’aux termes de l’article 333 du Code Pénal :
« quiconque par des manœuvres frauduleuses quelconque se sera fait
remettre ou délivrer ou aura tenté de se faire remettre ou délivrer des
fonds, des meubles ou des obligations, dispositions, billets, promesses,
quittances ou décharges et aura ainsi escroqué ou tenté d’escroquer tout
ou partie de la fortune d’autrui sera puni d’un emprisonnement de un à
cinq ans et d’une amende de 20 000 F à 200 000 F » ;
Attendu que pour déclarer le requérant coupable d’escroquerie
l’arrêt attaqué énonce « qu’il ressort des pièces du dossier qu’il ne s’est
pas agi de vente assortie de condition entre le prévenu et la partie civile,
que le premier a approché le second afin qu’il lui cède sa marchandise
en lui promettant le règlement de la valeur aussitôt après la livraison,
laquelle promesse a déterminée l’acceptation de la victime ; Qu’il y a en
l’espèce tromperie et mensonge pour obtenir la livraison du ciment,
constituant des manœuvres frauduleuses rendant les faits délictueux à
l’encontre du prévenu tels que prévus par l’article 333 du Code Pénal --
Attendu, qu’il est constant que le mensonge simple ne vaut à lui
seul escroquerie que s’il se manifeste par l’usage d’un faux nom ou

d’une fausse qualité ou s’il émane d’un tiers, et qu’en tout autre cas il n
y a délit que si le mensonge s’accompagne de manœuvres frauduleuses
lesquelles doivent être pratiquées pour persuader l’existence de fausses
entreprises, d’un pouvoir ou d’un crédit imaginaire ou faire naître
l’espérance ou la crainte d’un succès, d’un accident ou de tout autre
évènement chimérique ;
Attendu qu’en se contentant d’une affirmation générale sans
spécifier le mensonge ou les manœuvres frauduleuses qui ont eu pour
but de tromper la victime, la Cour d’Appel n’a pas suffisamment justifié
sa décision ; Qu’il y a lieu de déclarer fonder ce moyen ;
Sur le cinquième moyen pris de la dénaturation des faits : en
ce que l’arrêt attaqué a condamné le requérant à payer au défendeur la
somme de 172300 000 F alors même qu’il a été condamné pour
escroquerie portant sur 151 200 000 F.
Attendu que la dénaturation des faits, qui est un motif de
cassation en matière civile et commerciale, n’existe pas en matière
pénale ; que ce moyen est inopérant, il y a lieu de le rejeter.
Sur le sixième moyen de cassation tiré de la violation de la loi
article 2 al 2 loi 2018-37 du ''" juin 2018 fixant l’organisation, la
compétence des juridictions en République du Niger et les articles
405 al 3 et 509 du Code de Procédure Pénale ensemble défaut
insuffisance de motif, en ce que d’une par l’arrêt attaqué au lieu
d’annuler le jugement n°93 du 02/04/2019 et évoquer et statuer à
nouveau en respectant les dispositions de l’article 509 susvisé s’est
contenté d’infirmer ledit jugement sur l’action publique et de le
confirmer dans ses dispositions civiles; d’autre part l’arrêt en
confirmant le jugement sur les intérêts civils alors que le premier juge a
octroyé des dommages et intérêts plus qu’il n’a été demandé a violé
l’article 405 al 3 du Code de Procédure Pénale ;
Sur la violation de l’article 509 du Code de Procédure Pénale
Attendu que selon l’article 509 l’évocation n’est possible qu’en
cas d’annulation d’un jugement fondé sur la violation de la loi ou
omission non réparée des formes prescrites par la loi à peine de nullité ;

Attendu qu’en l’espèce il ne résulte pas de l’arrêt attaqué que
l’un des appelant, y compris le prévenu ait demandé l’annulation du
jugement, qu’il s’est agi d’infirmation ou de confirmation du jugement
demandée par l’un ou l’autre des appelants, qu’aucune violation de la
loi ou omission de forme prescrite à peine de nullité n’a été invoquée ;
Que le juge d’Appel ayant apprécié les faits, a déclaré non établie
l’infraction d’émission de chèque sans provision et a retenu comme
constituée l’infraction d’escroquerie ; Qu’il n’a donc pas annulé le
jugement attaqué mais l’a infirmé, comme la loi (article 504 du Code de
Procédure Pénale) le lui permet ;
Que dès lors en statuant comme elle l’a fait, la Cour n’a
nullement enfreint l’article 509 visé au moyen ;
Sur la violation de l’article 405 al 3 du Code de Procédure
Pénale
Attendu qu’il y a lieu de rappeler d’une part que l’article 405 al
3 du Code de Procédure Pénale qui permet à la partie civile à l’appui de
sa constitution de demander des dommages intérêts correspondant au
préjudice qui lui a été causé, ne prévoit qu’une simple faculté que la
partie est libre de ne pas user, et d’autre part que l’appel de la partie
civile ne peut porter que sur ses intérêts civils ;
Attendu qu’en l’espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier
que la partie civile ait demandé au juge d’Appel d’augmenter les
dommages intérêts après que ce dernier ait déclaré le prévenu coupable ;
Que c’est donc à bon droit que le juge d’Appel a confirmé le
jugement attaqué sur les intérêts civils étant entendu que sans motifs
spécifiques la confirmation implique l’adoption des motifs du premier
juge ;
Qu’il y a lieu de rejeter ce moyen.
PAR CES MOTIFS
- Déclare recevable en la forme le pourvoi de A.H. À alias
Ab ;
- Au fond, casse et annule l’arrêt N° 02 du 17 mars 2020 de la
chambre correctionnelle de la Cour d’Appel de Tahoua ;

- Renvoi la cause et les parties devant la même juridiction mais
autrement composée pour y être jugées conformément à la loi ;
- Reserve les dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé, les jours, mois et an que dessus.
Et ont signé le PRESIDENT ET LA GREFFIERE. /


Synthèse
Numéro d'arrêt : 21-023
Date de la décision : 31/03/2021

Origine de la décision
Date de l'import : 12/04/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ne;cour.cassation;arret;2021-03-31;21.023 ?
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