La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/04/2012 | MONACO | N°8788

Monaco | Tribunal correctionnel, 17 avril 2012, Ministère public c/ g. GO.


Motifs

TRIBUNAL CORRECTIONNEL

2011/002272

JUGEMENT DU 17 AVRIL 2012

____________________

En la cause du MINISTÈRE PUBLIC ;

Contre le nommé :

- g. GO., né le 26 décembre 1974 à CAGNES-SUR-MER (06800), de Léonard et de Mireille BO., de nationalité française, gérant de sociétés, demeurant X à BEAUSOLEIL (06240) ;

Prévenu de :

- BLESSURES INVOLONTAIRES

- VENTE D'ALCOOL À DES MINEURS

(contravention connexe)

- PRÉSENT aux débats, assisté de Maître t. GIACCARDI, avocat-défenseur près la Cour d'appe

l et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

LE TRIBUNAL, jugeant correctionnellement, après débats à l'audience du 27 mars 2012 ;

Vu la pr...

Motifs

TRIBUNAL CORRECTIONNEL

2011/002272

JUGEMENT DU 17 AVRIL 2012

____________________

En la cause du MINISTÈRE PUBLIC ;

Contre le nommé :

- g. GO., né le 26 décembre 1974 à CAGNES-SUR-MER (06800), de Léonard et de Mireille BO., de nationalité française, gérant de sociétés, demeurant X à BEAUSOLEIL (06240) ;

Prévenu de :

- BLESSURES INVOLONTAIRES

- VENTE D'ALCOOL À DES MINEURS

(contravention connexe)

- PRÉSENT aux débats, assisté de Maître t. GIACCARDI, avocat-défenseur près la Cour d'appel et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

LE TRIBUNAL, jugeant correctionnellement, après débats à l'audience du 27 mars 2012 ;

Vu la procédure enregistrée au Parquet Général sous le numéro 2011/002272 ;

Vu la citation signifiée, suivant exploit, enregistré, de Maître Marie-Thérèse ESCAUT-MARQUET, huissier, en date du 1er février 2012 ;

Ouï le prévenu, en ses réponses ;

Ouï le Ministère Public en ses réquisitions ;

Ouï Maître t. GIACCARDI, avocat-défenseur pour le prévenu, en ses moyens de défense et plaidoiries ;

Ouï le prévenu, en dernier, en ses moyens de défense ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

g. GO. est poursuivi correctionnellement sous la prévention :

* « - D'avoir à MONACO, le 29 juillet 2011, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription,

* » - en tant que directeur général de la BRASSERIE de « MONACO, par maladresse, imprudence, négligence, inattention ou inobservation des règlements, en l'espèce en contrevenant à l'interdiction de servir des boissons alcooliques à des mineurs, involontairement causé des blessures à t. OR., victime d'un coma éthylique,

* » DÉLIT prévu et réprimé par les articles 250 et 251 du Code Pénal ;

* « - Dans les mêmes circonstances de temps et de lieu, en tant que directeur général de la BRASSERIE de MONACO, servi des boissons alcooliques à des mineurs âgés de moins de 18 ans, en l'espèce s. TO. née le 19 novembre 1994, t. FR. né le 10 novembre 1993 et u. RE. né le 30 juin 1994,

* » CONTRAVENTION connexe prévue et réprimée par l'article 417-8° du Code pénal «.

Le 29 juillet 2011, t. OR., s. TO., t. FR. et u. RE., tous mineurs, se rendaient dans l'établissement la BRASSERIE de MONACO aux alentours de 18 heures 30.

Ils reconnaissaient avoir consommé de l'alcool qui leur avait été servi sans qu'aucune question ne leur soit posée, ni aucun justificatif demandé, concernant leur âge.

Il ressortait des déclarations non contestées des intéressés que si s. TO. et t. FR. n'avaient consommé qu'une pinte de bière chacun, en revanche, u. RE. s'était fait servir 2 pintes de bière et 2 shots d'une liqueur fortement alcoolisée, le jägermeister.

t. OR., le plus jeune du groupe, âgé de 16 ans et demi, était celui qui s'était le plus alcoolisé lors de la soirée puisqu'il a admis avoir consommé 2 litres de bière ainsi que 4 shots de jägermeister.

t. OR. quittait l'établissement vers 20 heures 30. Il était retrouvé peu de temps après, sous un arrêt de bus situé boulevard Albert 1er, allongé sur le sol, après avoir été victime d'un malaise.

Pris en charge par les sapeurs-pompiers, il était transporté à l'hôpital où un certificat mentionnait que son état était dû à une » intoxication alcoolique aiguë «.

h. ZA. et c. AN., mères et représentantes légales respectives de t. OR. et d'u. RE. déposaient plainte à l'encontre de la BRASSERIE de MONACO.

SUR CE,

Sur la responsabilité pénale

La délégation de pouvoirs en date du 3 novembre 2011 par laquelle g. GO., en sa qualité de » General Manager «, endosse la responsabilité pénale concernant notamment l'interdiction de ne pas servir d'alcool à des mineurs ne peut avoir un effet rétroactif et s'appliquer à des faits du 29 juillet 2011, soit antérieure à sa signature.

Il convient dès lors d'identifier, en dehors de la délégation de pouvoirs produite, la personne pénalement responsable des faits survenus à la date 29 juillet 2011.

Si le gérant associé de la BRASSERIE de MONACO, exploitée sous la forme d'une S.A.R.L., est, au sens large et général, le pénalement responsable de l'établissement, il convient toutefois de relever que le texte de l'article 417-8° vise les » débitants qui auront reçu dans leur établissement des gens manifestement ivres ou qui auront servi des boissons alcooliques à des mineurs âgés de moins de 18 ans accomplis «.

Il est fait référence à celui qui exploite le débit de boisson et qui est chargé d'assurer le respect des dispositions et des réglementations en matière de consommation d'alcool, et non au membre du personnel ayant personnellement apporté les boissons alcoolisés, ni au gérant de la S.A.R.L. dont la responsabilité trop éloignée et non objective ne peut être ici recherchée.

En l'occurrence, l'exploitant est bien g. GO., qui est certes salarié de la S.A.R.L., mais qui procède aux embauches, participe aux décisions de licenciement et exerce un pouvoir disciplinaire sur les employés, ce qui signifie qu'il dispose de l'autorité suffisante pour faire appliquer des règles, si besoin est en prononçant des sanctions.

En tant qu'exploitant, il est donc celui qui est tenu pénalement responsable dans l'hypothèse où il est contrevenu aux dispositions de l'article 417-8° du Code pénal, puisqu'il reconnaît que c'est à lui de faire appliquer les réglementations en la matière, notamment en mettant en œuvre toutes les mesures adéquates afin d'aiguiser la vigilance des serveurs.

Il convient donc de déclarer g. GO. coupable des trois contraventions qui lui sont reprochées et de le condamner en conséquence à trois peines de 200 euros d'amende chacune.

Sur le délit de blessures involontaires

Le non-respect de l'interdiction de servir des boissons alcoolisées à des mineurs ne relève pas du Code du travail ou des règlements pris en son application en vue d'assurer l'hygiène et la sécurité des travailleurs. Si tel était le cas, la responsabilité objective du gérant de la S.A.R.L. pourrait être engagée.

Toutefois, l'intoxication éthylique dont a été victime t. OR. est liée au non-respect d'une règle posée par le Code pénal, ce qui relève d'un autre régime de responsabilité qui exige qu'une faute personnelle puisse être caractérisée à l'encontre de l'employé ayant servi des boissons à un mineur jusqu'à l'ivresse. Une telle faute ne peut pas être établie à l'encontre de g. GO., qui en tant que manager n'a pas même été en mesure d'affirmer qu'il était présent sur son lieu de travail au moment où les consommations alcoolisées ont été servies au mineur.

Outre la responsabilité personnelle de la serveuse, la responsabilité de la S.A.R.L., exploitant l'établissement la BRASSERIE de MONACO, prise en la personne de son gérant aurait pu être recherchée.

Il convient dès lors de constater que l'existence d'une faute imputable à g. GO. n'est pas établie quant à la survenance des » blessures " subies par t. OR.

Il sera relaxé des fins de la poursuite en ce qui concerne le délit de blessures involontaires.

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

LE TRIBUNAL, statuant contradictoirement,

Relaxe g. GO. du délit de blessures involontaires qui lui est reproché ;

Le déclare en revanche coupable des contraventions qui lui sont reprochées ;

En répression, faisant application de l'article 417-8° du Code Pénal,

Le condamne à DEUX CENTS EUROS D'AMENDE pour chacune des trois contraventions ;

Le condamne, en outre, aux frais.

Composition

Ainsi jugé après débats du vingt-sept mars deux mille douze en audience publique tenus devant le Tribunal correctionnel, composé par Madame Stéphanie VIKSTRÖM, Premier Juge faisant fonction de Président, Madame Sophie LEONARDI-FLEURICHAMP, Juge, Monsieur Morgan RAYMOND, Juge, le Ministère Public dûment représenté, et prononcé à l'audience publique du dix-sept avril deux mille douze, par Madame Stéphanie VIKSTRÖM, Premier Juge faisant fonction de Président, en présence de Monsieur Jean-Jacques IGNACIO, Substitut du Procureur Général, assistés de Madame Joëlle JEZ-ANDRIEU, Greffier.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 8788
Date de la décision : 17/04/2012

Analyses

Si le gérant d'un établissement exploité en la forme d'une SARL est, au sens large et général, pénalement responsable de l'établissement, l'article 417-8° réprimant la vente d'alcool aux mineurs vise « les débitants qui auront reçu dans leur établissement des gens manifestement ivres ou qui auront servi des boissons alcooliques à mineurs âgés de moins de 18 ans accomplis ». Il est fait référence à celui qui exploite le débit de boissons et qui est chargé d'assurer le respect des dispositions et règlementations en matière de consommation d'alcool et non au personnel ayant personnellement servi les boissons ou au gérant de la SARL dont la responsabilité trop éloignée et non objective ne peut être recherchée.L'exploitant au sens de ce texte est en l'espèce la personne qui, certes salariée de la SARL, procède aux embauches, participe aux décisions de licenciement et exerce un pouvoir disciplinaire sur les employés, en ce qu'il dispose de l'autorité suffisante pour faire appliquer les règles. En tant qu'exploitant, il est donc pénalement responsable de la contravention de vente d'alcool aux mineurs puisqu'il a reconnu qu'il lui appartenait de faire appliquer la réglementation.Concernant le délit de blessures involontaires, le non-respect de l'interdiction de servir de l'alcool aux mineurs ne relève pas du Code du travail ou des règlements pris en son application pour l'hygiène et la sécurité des travailleurs, cas dans lesquels la responsabilité objective du gérant de la SARL pourrait être engagée.L'intoxication alcoolique de la victime est liée au non-respect d'une règle posée par le Code pénal qui relève d'un autre régime de responsabilité et exige la caractérisation à l'encontre d'un employé ayant servi des boissons alcoolisées à un mineur jusqu'à l'ivresse d'une faute personnelle. La responsabilité du manager, dont il n'est même pas certain qu'il se trouvait sur les lieux au moment du service de ces boissons, ne peut être retenue à défaut de faute imputable à sa personne et doit conduire à sa relaxe de ce chef. En revanche, la responsabilité personnelle de la serveuse, aurait pu être recherchée, de même que la responsabilité de la SARL, prise en la personne de son gérant.

Infractions contre les personnes  - Responsabilité pénale  - Dirigeant et associé.

Blessures involontaires - Vente d'alcool à des mineurs - Responsabilité pénale SARL - Responsabilité du gérant - Qualité d'exploitant - Responsabilité de l'exploitant.


Parties
Demandeurs : Ministère public
Défendeurs : g. GO.

Références :

articles 250 et 251 du Code Pénal
article 417-8° du Code pénal
Code pénal


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.correctionnel;arret;2012-04-17;8788 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award