Au nom d’ALLAH Le haut et le tout puissant
République Volamique de Mauritanie Honneur - Fraternité- Justice
L'affaire N° : 12/2013
Nature de l’affaire : pénale
Nature du recours : pourvoi en
Cassation
Le 1°" demandeur : le ministère
public
Le deuxième demandeur :
l'accusé, Abd. O. Med. El Hn, assisté
par Me Youssouf Ould Abdellahi ,
L'arrêt : N° 07/2021 du 17/02/2021
Dispositif de l’arrêt :
La Cour siégeant en Chambres Réunies déclare le recours de l’accusé est recevable en la forme et le rejette au fond ; le recours formé par le ministère public recevable en la forme et au fond, casse l’arrêt attaqué et renvoie l’affaire devant la même cour qui l’a rendue autrement composée.
La Cour Suprême siégeant en Chambres Réunies a tenu une audience publique, le mercredi
17/02/2021 à 12 heures dans la salle d’audiences
de la cour suprême à Nouakchott sous la présidence de son président monsieur : El Houssein Ould Nagi,
président de la cour suprême,
Et ses membres les conseillers :
-Haimedde Ould Elemine, Président de la Chambre commerciale, conseiller.
-Md El Gaith Ould Oumar, président de la 18e
chambre civile et sociale, conseiller.
-Mohamed Sidia Ould Mohamed Mahmoud, président de la 2èM€ Chambre Civile et Sociale, conseiller.
-Sidi Aly o/ Beyaye, président de la chambre
administrative, conseiller.
-Mohamed 0o/ Yewgatt, conseiller.
-Mohamed Yeslem Sidi Jed Oumou, conseiller.
-Limam Ould Mohamed Vall, conseiller.
-Najy ould Mohamed El Moustafa, conseiller.
-Md Abderrahmane o/ Mohameden, conseiller.
-Yahye Ould Ne o/ Md Cheikh, conseiller.
-Abdel Wahab Ould Hammoud, conseiller.
-El Hadj Ould Mohameden Tolba, conseiller.
-Ahmed Mahmoud o/ Bellamech, conseiller.
-Md Mahmoud o/ Mohamed Salem, conseiller.
En présence du Magistrat, Moctar Ould Mohameden, substitut du procureur général près la cour suprême, représentant le ministère public ; et avec l'assistance de Me Mohamed Yeslem Ould Khaled, greffier en chef près les Chambres Réunies ; et ce pour statuer sur les dossiers enrôlés pour cette audience, dont figure l'affaire audiencée citée en marge N° RP/12/2013, relative au litige opposant le ministère public, premier demandeur au pourvoi en cassation à l'accusé Abd. O. Med El Hn, assisté de Me Youssouf Ould Abdellahi: deuxième demandeur au pourvoi ;
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sur quoi la Cour Suprême siégeant en Chambres Réunies, a rendu le présent arrêt :
Les Faits :
_ Le 02/05/2019, le procureur général près la cour d'appel de Nouakchott
-Ouest s'est pourvu en cassation contre l’arrêt N° 69/ 2019 bis rendu le 05/02/2019 par la Chambre Criminelle de la Cour d'Appel de Nouakchott Ouest (autrement composée); L'appel a été formé par déclaration inscrite sur le procès-verbal de pourvoi en cassation N°52/2019 délivréé à la même date par le greffe de la juridiction ayant rendu l’arrêt attaqué.
Le 05/09/2019 un second pourvoi en cassation a été déposé par Maître Youssef Ould Abdallahi - en sa qualité d’avocat de l’accusé : Abd. O. Med El-Hn - contre l’arrêt précitée N° 69/2019/ bis ; L'appel a été formé par déclaration sur le procès-verbal de pourvoi en cassation N°47/2019 délivré à la même date par le greffe de la juridiction ayant rendu l’arrêt attaqué.
Le 08/08/2019, la défense du deuxième demandeur a déposé un mémoire ampliatif de cassation - suite à la notification à lui faite 09/07/2019 par le greffe de la cour par laquelle elle lui signifie que l’arrêt attaqué a été rédigé ; Il a requis la recevabilité de son pourvoi en la forme et la cassation de l’arrêt attaqué et le renvoi de l’affaire de nouveau devant la cour d'appel autrement composée pour rectifier les erreurs reprochées a l'arrêt précédent.
Le 04/10/2019, le premier demandeur : le procureur général près la cour d'appel a déposé un mémoire ampliatif en cassation - après que le greffe de ladite cour lui eût notifié le 06/09/2019 que l'arrêt attaqué a été rédigé, et a par la même occasion demandée que son pourvoi soit déclaré recevable en la forme et au fond, que l’arrêt attaqué soit cassé et l'affaire renvoyée devant une autre formation de la même cour d'appel.
Le ministère public près la Cour suprême a présenté un avis, conforme aux réquisitions du Procureur général près la cour d'appel.
Attendu que lors de l'audience de cette cour tenue le 11/11/2020, l'affaire a été présentée comme il a été indiqué au procès-verbal d'audience et le Conseiller-rapporteur a lu un résumé de son rapport, après quoi, la cour a autorisé les parties à présenter leurs conclusions, et le représentant du ministère public, présent, a déclaré s'en tenir à ses réquisitions écrites versées au dossier. Enfin, l'affaire fut mise en délibéré et l’arrêt rendu en audience publique à la date susmentionnée.
LACOUR:
Vues les pièces du dossier, et après en avoir délibéré conformément à la loi.
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Attendu que les deux pourvois ont été formés conformément aux formes légales dans les délais impartis, de même, les deux mémoires des deux parties sont parvenus dans le délai requis, que dès lors ils remplissent les conditions et sont de ce fait recevables en la forme selon les dispositions des articles 530, 535, 538, 540 et 541 du Code de procédure pénale.
Attendu que les faits - tel qu'il ressort clairement de l'arrêt attaqué et de toutes les pièces du dossier - se résument en ce que les autorités mauritaniennes avaient reçu sur leur demande, de l'Etat Pakistanais, le sieur Abd. O. Med El-Hn O. Med Sim, qui était recherché en raison de sa participation à l'attaque de la garnison militaire d'Al-Maghaiti aux côtés du Groupe salafiste pour la prédication et le combat, devenu plus tard, ‘AI- Qaïda au Maghreb islamique, et en raison de son adhésion à ce groupement.
Après que fut informé le procureur de la république près le tribunal de la région de Nouakchott, une enquête préliminaire a été ouverte contre le suspect : Abd. O. Med El-Hn O. Med SIm, pour avoir pris les armes contre la Mauritanie, ayant entraîné la mort de plusieurs personnes, menace de la sécurité intérieure et extérieure de l'État, appartenance à un groupe constitué, ayant pour objectif la commission des infractions terroristes, entrainements à l'étranger dans le but de commettre des infractions terroristes, et aussi, d’avoir prôné leur commission. Ces ’actes terroristes, étant incriminés et punis par les articles 04 (alinéas 1, 5) , 06 (alinéas 1, 2, 7), 08, 10, 17 de la loi portant sur la lutte contre le terrorisme.
Attendu qu’il a ensuite été renvoyé devant le juge d'instruction du premier cabinet du tribunal de la Wilaya de Nouakchott, qui, après avoir terminé l'instruction, a renvoyé le dossier devant la cour criminelle. Cette dernière a jugé l'accusé et l'a reconnu coupable de crimes d’atteinte à la sureté intérieure de l'État, de l’utilisation illégale d'armes, de l'affiliation à un groupe terroriste existant, d’avoir subi des entrainements en dehors du territoire national dans le but de commettre des crimes terroristes, d’avoir prôné le ralliement d’un groupe ayant un rapport avec les infractions terroristes, et l’a de ce fait condamné à vingt ans d'emprisonnement ferme et à payer une amende de vingt milllons d'ouguiyas, et aux frais et dépens estimés à son encontre à six millions d'ouguiyas, le tout en vertu du jugement N° 66/2015 rendu le 20/04/2015.
Attendu que ce jugement a fait l'objet d'un appel de la part de la défense de l'accusé devant la Chambre criminelle de la cour d'appel de Nouakchott qui qui a réduit la peine infligée à l'accusé, en première instance, à quinze ans d'emprisonnement et une amende de quinze millions d'ouguiyas, tout en confirmant le reste du jugement.
Attendu que l'accusé et le ministère public ont chacun formé un pourvoi en cassation contre ledit arrêt et la chambre pénale de la Cour suprême l’a
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cassé par son arrêt N° 65/2018 du 25/01/2018, et renvoyé l'affaire devant la cour d’appel autrement composée.
Attendu que la Chambre Criminelle de la cour d'appel de Nouakchott Ouest dans sa formation différente a statué, en tant que juridiction de renvoi sur l'affaire et, a rendu son arrêt N° 69/2019 (bis) du 02/05/2019 qui a condamné l'accusé pour infractions d'appartenance à un groupe terroriste formé dans le but de commettre des actes de terrorisme, d’entrainement à l'éttanger pour commettre des actes terroristes, d'atteinte à la sécurité extérieure du pays et l'a condamné à une peine d'emprisonnement ferme de sept ans et à payer une amende de 250.000 MRU (ouguiyas nouvelles), le tout en application des articles 06 alinéas (1 , 2 3), 08 (dernier alinéa) de la loi 047/2005 se rapportant à la lutte contre le terrorisme, en vigueur au moment de l’accomplissement des faits, et l’article 91 dernier alinéa du code pénal mauritanien et les articles 460 , 461 , 560 du code de procédure pénale.
Attendu que les deux pourvois en cassation ont été formés contre cet arrêt par le ministère public d'abord, et l'accusé ensuite, que le ministère public a versé son avis, et le recours a été soumis à la cour.
Considérant que le ministère public reproche à l'arrêt de renvoi attaqué l'erreur dans l'application de la loi, qui constiue un cas d'ouverture à cassation conformément à l'article 545 du Code de procédure pénale, et malgré le fait que parmi les crimes imputés à l’accusé et dont il a été reconnu coupable, figurent des crimes continus, tels que l'appartenance à un groupe terroriste et la propagande en faveur d’un groupe ayant pour but de commettre des actes terroristes, que les faits constitutifs des infractions avaient continué, jusqu'à la promulgation de la loi antiterroriste de 2010.
Considérant que le deuxième demandeur au pourvoi, représenté par sa défense, fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé la loi et commis une erreur d'application de la loi, en fondant sa décision sur de nouvelles charges et a ajouté que la cour, lorsqu’elle a estimé que la loi sur laquelle, le juge d'instruction a fondé son ordonnance de renvoi, ne s'applique pas aux faits et donc devait prononcer l’acquittement de l’accusé et n’avait pas à chercher un nouveau fondement juridique aux faits reprochés ; et a ajouté dans sa défense que la juridiction ne s'est pas prononcée sur les demandes formulées par la défense à tous les stade de l'affaire, concernant la nullité des aveux extorqués à leur client.
Considérant que l'argument soutenu par la défense en vertu duquel la juridiction de renvoi n’a pas à s’ériger en autorité d'accusation, la cour a estimé que ce grief est partiellement vrai; néanmoins force est de constater que la loi accorde à la juridiction de fond le pouvoir de requalifier les faits qui lui sont soumis ;
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Que ce pouvoir de requalification se déduit de la teneur des articles 333, 436, 461, 475 du code de procédure pénale, et par conséquent, l'exhaustivité de cette allégation avancée par la défense est inopérante ; quant au grief qui a été soulevé au sujet de la nullité des aveux de l'accusé au motif qu'ils lui ont été extorqués sous la contrainte et la torture, cet argument est réfuté par le fait que l'accusé lui-même a avoué les faits devant le juge d’instruction, « en expliquant l'intérêt qu’il avait pour les mouvements djinadistes, et le voyage qu’il a effectué en vue de l'adhésion à un mouvement djihadiste et l’entrainement aux armes et le nom de instructeur , ensuite son second voyage pour rejoindre Al Qaida à laquelle il a fourni les informations recueillies sur le groupe avec lequel, il a combattu ; que ces propos ont été révélés devant une autorité judiciaire en présence de l’avocat ; que l'intéressé n'a pas avancé un argument pouvant être retenu comme motif de recevabilité de son pourvoi, conformément au texte de l'article 540 du code de procédure.
Considérant que le grief soulevé par le Ministère public selon lequel les faits reconnus par l’accusé constituent des infractions continues, la cour a constaté que l'arrêt attaqué n’a pas évoqué cet aspect de la question et, donc n’a pas précisé la loi applicable aux faits imputables à l'accusé, et en quoi ces faits constituent des infractions instantanées ou continues, quand bien même une partie de la doctrine considère que la loi nouvelle s'applique directement aux infractions ayant un caractère continu ; qu’en conséquence l’argument que le parquet a avancé comme motif de cassation de l’arrêt attaqué constitue un motif valable de cassation en vertu de l’alinéa 7 de l'article 545 du code de procédure, dès lors que la décision attaquée n’a pas discuté le caractère instantané ou continu des actes reprochés à l’accusé., conformément aux orientations de la Cour suprême ;
Quant à la peine prononcée, en application des articles 6, alinéas(1-2-3) et l’article 91, dernier alinéa, il ressort que les peines infligées par la cour ne sont pas proportionnelles à la gravité des faits et l’arrêt attaqué n’a pas justifié le fondement juridique des peines retenues contre l'accusé de façon à permettre à la Cour suprême d'exercer son contrôle sur ce point, en vertu des dispositions de l'article 547 du code de procédure ; en conséquence, la cassation de l’arrêt attaqué s'impose, conformément à l’alinéa 4 de l'article 545 du code de procédure et le renvoi de l'affaire devant une cour d’appel autrement composée.
PAR CES MOTIFS:
La Cour, siégeant en Chambres Réunies, déclare le pourvoi en cassation formé par la défense de l'accusé recevable en la forme et le rejette au fond, et le pourvoi en cassation formé par le ministère public, recevable en la forme, et au fond, casse l'arrêt attaqué et renvoie l'affaire devant la même cour qui l’a rendu autrement composée.
Le Président Le Rapporteur Le Greffier en chef