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29/06/2021 | MALI | N°224

Mali | Mali, Cour suprême, 29 juin 2021, 224


Texte (pseudonymisé)
COUR SUPREME DU MALI REPUBLIQUE DU MALI

SECTION JUDICIAIRE Un Peuple-Un But-Une Foi

2ème CHAMBRE CIVILE ==========

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POURVOI N°468 du 27 Décembre 2016

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ARRET N°224 du 29 Juin 2021.

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NATURE : Annulation de vente.



La Cour Suprême du Mali a, en son audience publique ordinaire du ...

COUR SUPREME DU MALI REPUBLIQUE DU MALI

SECTION JUDICIAIRE Un Peuple-Un But-Une Foi

2ème CHAMBRE CIVILE ==========

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POURVOI N°468 du 27 Décembre 2016

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ARRET N°224 du 29 Juin 2021.

==========

NATURE : Annulation de vente.

La Cour Suprême du Mali a, en son audience publique ordinaire du Vingt-Neuf Juin Deux Mille Vingt et Un à laquelle siégeaient :

Monsieur Fatoma THERA, Président de la Section Judiciaire de la Cour Suprême, Président ;

Monsieur Amadou Abdoulaye SANGHO, Conseiller à la Cour, membre ;

Monsieur Moussa DIARRA, Conseiller à la Cour, membre ;

En présence de Monsieur Karamoko DIAKITE, Avocat Général près ladite Cour, occupant le banc du Ministère Public ;

Avec l’assistance de Maître Souleymane SAMAKE, Greffier ;

Rendu l’arrêt dont la teneur suit 

Sur le Pourvoi de Maître Bôh CISSE, Avocat inscrit au Barreau du Mali, agissant au nom et pour le compte de Monsieur Ad Y, né le … … … à …, commerçant de nationalité malienne, domicilié à Baco-Djicoroni, Bamako, demandeur d’une part ;

Contre : l’Arrêt n°581 du 29 Juin 2016 de la Chambre civile de la Cour d’Appel de Bamako et Monsieur Ah X, né le … … … à …, Cercle de Kati, Employé de Commerce de nationalité malienne, domicilié à Am Ak, ayant pour Conseil Maître Yacouba FOFANA, Avocat inscrit au Barreau du Mali, défendeur d’autre part ;

Sur le rapport de Monsieur Moussa DIARRA, Conseiller à la Cour Suprême et les conclusions écrites du premier Avocat Général Tamba Namory KEITA et orales de l’Avocat Général Karamoko DIAKITE.

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

En la forme

Par acte n°468 établi le 27 Décembre 2016, le Greffier en Chef de la Cour d’Appel de Bamako a reçu la déclaration en date du 27 Décembre 2016 par laquelle Maître Bôh CISSE, Avocat à la Cour, agissant au nom et pour le compte de Monsieur Ad Y, né le … … … à …, Commerçant, de nationalité malienne, domicilié à Baco-Djicoroni a déclaré formé pourvoi contre l’arrêt n°581 du 29 Juin 2016 de la Chambre Civile de la Cour d’Appel de Bamako dans une instance en annulation de vente l’opposant à Monsieur Ah X ayant pour conseil Maître Yacouba FOFANA, Avocat à la Cour ;

L’expédition de l’arrêt n°581 du 29 Juin 2016 de la Cour d’Appel de Bamako a été signifiée à Monsieur Ah X, à son domicile, par acte servi le 20 Décembre 2016 par le Ministère de Maître Adama DIAKITE, Huissier de Justice près le ressort judiciaire de la Cour d’appel de Bamako ;

Le recours est intervenu dans le délai de deux (02) mois à compter de la signification s’agissant d’une décision contradictoire, indiqué à l’article 132.1 de la loi n°2016-046 du 23 Septembre 2016 portant loi organique fixant l’organisation, les règles de fonctionnement de la Cour Suprême et la procédure suivie devant elle ;

La déclaration de pourvoi satisfait aux conditions prescrites à peine de nullité par l’article 133 de la loi n°2016-046, à savoir les renseignements relatifs aux parties en cause, l’indication de la décision attaquée, celle du jugement, la signature du déclarant et la copie de la décision ;

Par ailleurs, le conseil du demandeur au pourvoi, Maître Bôh CISSE, a, en application des dispositions de l’article 147 de la loi n°2016-046, déposé le 07 Avril 2017 au Greffe de la Cour Suprême un mémoire ampliatif en date du 27 Mars 2017 et s’est acquitté le 07 Avril 2017 de la consignation (cf. certificat de dépôt n°173 du 07 Avril 2017 établi par le Greffier en Chef) ;

Il ressort des développements qui précèdent que le recours satisfait, en la forme, aux conditions prescrites par la loi ;

SUR L’EXAMEN AU FOND DU RECOURS :

I- Faits et procédure :

Monsieur Ad Y a attrait Monsieur Ah X devant le Tribunal de première instance de la Commune V du District de Bamako pour venir entendre statuer sur le mérite de sa requête en annulation de vente aux enchères publiques ;

Le Tribunal a, par jugement n°3058 du 1er Décembre 2014, rejeté l’assignation de Monsieur Y comme mal fondée ;

Saisi sur appel relevé par Maître Bôh CISSE, Avocat à la Cour, au nom et pour le compte de son client Monsieur Ad Y, la Cour d’Appel de Bamako a, par arrêt n°581/2016 du 29 Juin 2016, confirmé le jugement entrepris ;

Monsieur Y a formé pourvoi contre cette dernière décision ;

II- Exposé des moyens de pourvoi et du mémoire en défense :

Dans le mémoire ampliatif du 27 Mars 2017 produit par son conseil Maître Bôh CISSE, Avocat à la Cour, Monsieur Ad Y a invoqué contre n°581/2016 du 29 Juin 2016 de la Chambre Civile de la Cour d’Appel de Bamako deux moyens de pourvoi à savoir la violation de la loi et l’insuffisance de motivation ;

Sur le premier moyen de pourvoi, il y a exposé qu’il est de jurisprudence constante que la violation de la loi se rencontre dans trois hypothèses à savoir la non application de la loi, la fausse application de la loi et la fausse interprétation de la loi ; que l’arrêt querellé a procédé d’une violation de la loi par fausse application de celle-ci notamment l’article 9 du CPCCS ;

Qu’en effet, pour confirmer le jugement d’instance, les juges d’appel ont retenu qu’il n’a pas apporté la preuve de ses allégations ; qu’or, il a bel et bien satisfait aux exigences de l’article 9 du CPCCS parce qu’il a clairement démontré les différentes violations des articles 121, 122 et 123 de l’acte uniforme de l’OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement des créances et des voies d’exécution ; que l’irrégularité des actes ayant concouru à la vente saute à l’œil et ne peuvent échapper à la vigilance de la Cour ; qu’il ressort du procès-verbal de vente aux enchères publiques que la vente a eu lieu le 15 Août 2014 alors que la sommation d’y assister qui lui a été servie le 13 Juin 2014 la fixait au lundi 30 Juin 2014 à 9 heures et qu’aucun autres document ou exploit d’huissier ne lui a été notifié ou affiché quelque part pour indiquer la date que porte le procès-verbal ; que l’article 121 de l’acte uniforme prévoit des formalités de publicité à effectuer et les modalités pour l’accomplir avant la vente ; que l’article 122 du texte énonce que l’huissier ou l’agent d’exécution doit certifier l’accomplissement des formalités ; qu’aucun acte de certification de l’accomplissement des formalités de publicité n’a été établi par l’Huissier ; que le lieu de la vente n’a pas été indiqué comme l’exige l’article 123 de l’acte uniforme ; qu’il est donc établi que la vente est intervenue en violation des dispositions des articles 121, 122 et 123 de l’acte uniforme ; qu’en occultant toutes ces réalités, l’arrêt querellé procède d’une fausse application de la loi et s’expose à la censure de la Cour ;

Sur le second moyen de pourvoi tiré de l’insuffisance de motifs :

Il y a soutenu que l’article 463 du CPCCS dispose que « le jugement doit exposer succinctement les prétentions respectives des parties et de leurs moyens, il doit être motivé à peine de nullité » ; que pour motiver son jugement, le juge du second degré a déclaré que « la demande d’annulation de l’appelant ne peut prospérer et en la rejetant comme mal fondée, le premier juge ne viole aucune disposition légale et justifie bien sa décision conformément aux dispositions de l’article 9 du CPCCS… » ;

Que cette motivation est aussi inappropriée qu’injustifiée ; que la Cour constatera que dans leur démarche les juges du fond se refusent de répondre aux violations des dispositions des articles 121, 122 et 123 de l’acte uniforme ; que l’arrêt querellé pêche d’insuffisance de motifs et s’expose à la cassation pure et simple ;

Monsieur Y a sollicité de la Cour Suprême, en la forme de recevoir son pourvoi comme régulier et au fond le déclarant bien fondé, casser et annuler l’arrêt n°581 du 29 Juin 2016 de la Chambre Civile de la Cour d’Appel de Bamako et renvoyer la cause et les parties devant la même Cour d’Appel autrement composée ;

Le défendeur au pourvoi, Monsieur Ah X, dans le mémoire en réplique du 14 Juillet 2017 de son conseil, Maître Yacouba FOFANA, déposé au greffe le même jour, a soutenu qu’avant de l’examen des moyens développés dans le mémoire ampliatif du demandeur au pourvoi, il entend soulever l’exception d’irrecevabilité du pourvoi pour défaut de droit d’agir d’une part et la forclusion d’autre part ;

Il a exposé que l’article 556-1 du CPCCS a précisé que le délai d’appel des jugements contradictoire court à compter de la notification du jugement dont appel ; que cette disposition légale n’a pas été respectée par Monsieur Y ; que l’examen de l’acte d’appel n°123 du Greffier en Chef du Tribunal de Grande Instance de la Commune V fait apparaitre que la déclaration d’appel a été faite directement après la notification entre avocats ; que cette notification entre avocats devait être suivie par la signification du jugement à toutes les parties au près par voies d’huissier ; que cette signification qui fait courir le délai d’appel n’a pas été effectuée ; qu’avant l’accomplissement de cette formalité le droit d’appel n’est pas ouvert ; que la jurisprudence de la Cour Suprême du Mali a été fixée dans ce sens (cf/arrêt n°165 du 03 Août 2015 de la 1ère Chambre Civile, affaire Ac B Contre Aj Ag C) ; que l’appel interjeté par Monsieur Y doit être déclaré irrecevable pour défaut de droit d’agir ;

Il a également soutenu que les pièces du dossier démontrent que la vente a eu lieu et le produit distribué ; que l’article 144 de l’acte uniforme a indiqué que la nullité de la saisie pour un vice de forme ou de fond autre que l’insaisissabilité des biens compris dans la saisie ne peut être demandée par le débiteur que jusqu’à la vente des biens saisie ; que la jurisprudence a retenu de façon constance cette position (cf/Daloa, arrêt n°129 du 21 Mai 2003, Yao Ae contre Ab Af, Juriscope.org, CCJA, 1ère Ch. Arrêt n°13 du 29 Juin 2006, AGETIPE-MALI contre Société Smeets et Zonen, Juriscope.org, Ohada.com/ohadata J-07-27) ; que la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage tient au respect scrupuleux du délai prévu en matière d’action en nullité de la saisie (cf/CCJA, arrêt n°012/2009 du 26 Février 2009) ; qu’il échet de déclarer la demande en annulation de vente aux enchères publiques irrecevable pour forclusion ;

Sur le moyen relatif à la violation de la loi :

Monsieur X a rétorqué que la citation à volonté de façon erronée des dispositions des articles 121, 122 et 123 de l’acte uniforme de l’OHADA portant sur les procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution n’est pas la preuve dune quelconque violation de la loi ; que toutes les formalités requises pour la validité de la saisie vente ont été scrupuleusement respectées ; que l’annonce de l’avis de vente aux enchères publiques en date du 27 Juin 2014 de Maître Jacob SIDIBE, Commissaire priseur à Bamako, sur une station radio, a respecté les termes de l’article 121 de l’acte uniforme qui prescrit que « la publicité peut également être annoncée par voie de presse écrite ou parlée… » ; que le procès verbal de vérification avec sommation d’assister à la vente, l’apposition du placard et le procès verbal d’apposition du placard de l’étude de Maître Mohamed SANOGO, Huissier de Justice à Bamako, respectent les dispositions des articles 121, 122 et 123 de l’acte uniforme ; qu’il en va de même de la sommation d’assister à la vente en date du 13 Juin 2014 servie à Monsieur Ad Y par l’étude de Maître Abdoulaye NIMAGA, huissier de justice à Kati ; que la procédure de saisie vente a été scrupuleusement respectée jusqu’à la vente ;

Sur le second moyen tiré de l’insuffisance de motifs :

Il a fait observer que l’arrêt de la Cour d’Appel a bien motivé les arguments avancés ; qu’il est utile de constater qu’il appartient au juge de qualifier souverainement les faits conformément à l’article 12 du CPCCS ; que dépourvu de moyens de cassation avéré, Monsieur Ad Y a tenté de soulever une insuffisance de motifs en mentionnant de façon isolée un paragraphe parmi tant d’autres retenus comme motivation par la Cour d’Appel ;

Il a demandé à la Cour Suprême, de recevoir les exceptions d’irrecevabilité, les déclarer bien fondées et déclarer le pourvoi irrecevable ; au fond, rejeter purement et simplement le pourvoi déféré comme étant mal fondé et condamner le demandeur aux dépens ;

III- Analyse des moyens de pourvoi et du mémoire en défense :

Monsieur Ad Y, demandeur au pourvoi, parle truchement de son conseil Maître Bôh CISSE, Avocat à la Cour, a formé pourvoi contre arrêt n°581/2016 du 29 Juin 2016 de la Chambre Civile de la Cour d’Appel de Bamako rendu dans une instance en annulation de vente l’opposant à Monsieur Ah X, ayant pour conseil Maître Yacouba FOFANA, avocat à la cour ;

Il a fondé son recours sur deux moyens de pourvoi à savoir : la violation de la loi et l’insuffisance de motivation ;

Mais, avant d’examiner les moyens du pourvoi et les arguments du mémoire en défense, il parait important de se prononcer sur la régularité de la saisine de la Cour Suprême d’une affaire ayant fait appel à l’application de dispositions d’un acte uniforme de l’OHADA ;

En effet, l’article 87 alinéa 1 de la loi n°2016-046 du 23 Septembre 2016 portant loi organique fixant l’organisation, les règles de fonctionnement de la Cour Suprême et la procédure suivie devant elle, n’a consacré la compétence de la Section Judiciaire de la Cour Suprême que relativement à « …toutes les décisions rendues en matière civile, sociale, pénale et commerciale par les juridictions de la République… » ; À l’exception de celles relevant du « …Contentieux des actes uniformes de l’OHADA » ;

En l’espèce, l’instance ayant opposé les parties porte sur l’annulation d’une vente aux enchères publiques effectuée à la suite d’une saisie vente pratiquée en application des dispositions de l’acte uniforme de l’OHADA portant procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ;

Or, l’article 615 alinéa 2 du CPCCS, tirant les conséquences de l’adhésion de la République du Mali au traité relatif à l’Organisation pour l’Harmonisation du Droit des Affaires en Afrique (OHADA) a prescrit que « lorsque le pourvoi…a été formé dans une matière relevant du domaine du droit des Affaires tel que défini à l’article 2 du traité relatif à l’Organisation pour l’Harmonisation du Droit des Affaires en Afrique, la procédure est celle prévue par le traité précité et par le règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage » ;

Est-il, alors, régulier pour la Cour Suprême du Mali de continuer à connaitre de l’affaire ?

La jurisprudence de la juridiction, en la matière, a été fixée dans le sens de renvoyer la cause et les parties devant la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA, (Affaire Aa Ai contre Al A, arrêt n°15 du 20 Juin 2017 de la Chambre Commerciale de la Cour Suprême du Mali) ;

PAR CES MOTIFS

La Cour,

En la forme : Se déclare incompétente ;

Renvoie la cause et les parties devant la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’OHADA ;

Met les dépens à la charge du demandeur.

Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an que dessus.

ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 224
Date de la décision : 29/06/2021

Origine de la décision
Date de l'import : 12/04/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ml;cour.supreme;arret;2021-06-29;224 ?
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