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09/02/2021 | MALI | N°02

Mali | Mali, Cour suprême, 09 février 2021, 02


Texte (pseudonymisé)
COUR SUPREPME DU MALI REPUBLIQUE DU MALI

SECTION JUDICIAIRE Un Peuple- Un But- Une Foi

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CHAMBRE SOCIALE ============

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POURVOI N°57 du 17/07/2020

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ARRET N°02 du 09/02/2021

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NATURE : Réclamation de droits et dommages-intérêts.





LA COUR SUPREME DU MALI



En son audience publique ordinaire du Mardi Neuf Février deux mille Vingt et Un à laque...

COUR SUPREPME DU MALI REPUBLIQUE DU MALI

SECTION JUDICIAIRE Un Peuple- Un But- Une Foi

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CHAMBRE SOCIALE ============

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POURVOI N°57 du 17/07/2020

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ARRET N°02 du 09/02/2021

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NATURE : Réclamation de droits et dommages-intérêts.

LA COUR SUPREME DU MALI

En son audience publique ordinaire du Mardi Neuf Février deux mille Vingt et Un à laquelle siégeaient :

Monsieur Lasséni SAMAKE, Président de la formation, Président ;

Monsieur Christian Idrissa DIASSANA, Conseiller à la Cour, membre ;

Monsieur Amadou Abdoulaye SANGHO, Conseiller à la Cour, membre ;

En présence de Monsieur Yaya KONE, Avocat Général de ladite Cour occupant le banc du Ministère public ;

Avec l’assistance de Maître Diènèba FOFANA, Greffier ;

A Rendu l’arrêt dont la teneur suit :

SUR LE POURVOI DE : La SCP-MTK et Associés Cabinet d’Avocats, agissant au nom et pour le compte de sa cliente la SOTELMA-SA, sise à Hamdallaye ACI 2000 près du palais des sports, demanderesse ;

D’UNE PART,

CONTRE : L’arrêt n°88 du 18/06/2020 rendu par la Chambre Sociale de la Cour d’Appel de Bamako et Ad Ac B, ayant pour conseil Maîtres Jean De Ae X et la SCP YATTARA-SANGARE, défendeur ;

D’AUTRE PART,

Sur le rapport de Monsieur Christian Idrissa DIASSANA, Conseiller à la cour, les conclusions écrites du Premier Avocat Général Tamba Namory KEITA et orales de l’Avocat Général Yaya KONE ;

I- EN LA FORME :

Par acte n°57 en date du 17 juillet 2020 du greffe de la Cour d’Appel de Bamako, la SCP MTK Associés, par l’organe de Maitre Abdourhamane Boubacar MAIGA, Avocat inscrit au Barreau du Mali, agissant au nom et pour le compte de la SOTELMA-SA sise à Hamdallaye ACI 2000, s’est pourvue en cassation contre l’arrêt n°88 du 18 juin 2020 de la Chambre Sociale de la Cour d’Appel de Bamako, arrêt notifié le 09 juillet 2020 au Cabinet SCP- MTK et Associés et signifié à la SOTELMA -SA le 14 juillet 2020 ;

En vertu de l’article L.202 du Code du travail, la demanderesse est dispensée de l’obligation de verser une consignation, elle a produit un mémoire ampliatif enregistré sous le n°2919 du 11 septembre 2020 par le Greffe de la Cour Suprême ; ledit mémoire a été notifié le 23 septembre 2020 à Maitre Jean De Ae X, assurant la défense des intérêts de monsieur Ad Ac B, défendeur et a fait l’objet de réplique le 05 octobre 2020.

Il résulte de ce qui précède que le pourvoi a satisfait aux exigences de la loi et doit être déclaré recevable en la forme

II-AU FOND :

Rappel succinct des faits et de la procédure

Par requête en date du 30 juin 2016, monsieur Ad Ac B saisissait le tribunal de travail de Bamako d’une instance aux fins de régularisation de situation administrative et de réclamation de dommages-intérêts, dirigée contre son ex-employeur, la SOTELMA- SA. Monsieur Ad Ac B expliquait qu’après avoir fait valoir ses droits à la retraite, il avait constaté que l’indemnité qui lui était due ainsi que la bonification y rattachée avaient été minorées. Sa requête portait donc sur la régularisation de cette situation, le versement subséquent à son profit des sommes qu’il estimait manquer et l’allocation de dommages-intérêts pour réparer le préjudice subi.

Par jugement n°47 du 24 avril 2017, le tribunal de travail le déboutait de sa demande, décision confirmée en appel par l’arrêt n°36 du 15 mars 2018 de la Chambre Sociale de la Cour d’Appel de Bamako.

Sur pourvoi de monsieur Ad Ac B, la Chambre sociale de la Cour Suprême, suivant arrêt n°37 du 15 octobre 2019 cassait cet arrêt et renvoyait la cause et les parties devant la Chambre Sociale de la Cour d’Appel de Bamako autrement composée. Celle-ci, le 18 juin 2020, rendait l’arrêt n°88 dont le dispositif est ainsi conçu :

« En la Forme : Reçoit la fin de non-recevoir relative à la forclusion mais la déclare mal fondée et la rejette ;

Reçoit la fin de non-recevoir relative à la prescription, la rejette partiellement ;

Reçoit l’appel interjeté par Monsieur Ad Ac B.

Au fond : Infirme le jugement entrepris sur toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau :

Déclare l’appel bien fondé, condamne l’intimée à lui payer la somme de 353.724.160 FCFA à titre principal et celle de 20 000 000 FCFA à titre de dommages-intérêts et l’en déboute du surplus de sa demande.

Met les dépens à la charge du Trésor Public ».

C’est cet arrêt qui fait l’objet du présent pourvoi.

III.- Présentation des moyens du pourvoi

La demanderesse au pourvoi, sous la plume de Maitre Abdourhamane Boubacar MAIGA, son conseil, invoque au soutien de son recours deux moyens tirés de la violation de la loi et du défaut de base légale.

1.- Sur le premier moyen tiré de la violation de la loi, le demandeur présente un argumentaire en six branches :

- Première branche, sur la violation de l’article L.216 alinéa 1 du Code du travail

En ce que ce texte prévoit un délai de 15 jours pour interjeter appel, alors que la SCP YATTARA-SANGARE, pour le compte de Ad Ac B a interjeté appel le 17 Août 2017 contre le jugement n°47 rendu depuis le 24 Avril 2017, soit plus de 15 jours après le prononcé, d’où il suit selon le demandeur que c’est à tort que l’arrêt a déclaré que cet appel est recevable pour avoir été formé dans les formes et délais légaux ; et de conclure que l’arrêt attaqué viole le texte susvisé par refus d’application de la loi et encourt par conséquent la cassation ;

- Deuxième branche sur la violation de l’article 118 du CPCCS,

En ce que l’arrêt a visé l’article 118 du CPCCS pour soutenir que la fin de non-recevoir tirée de la forclusion et de la prescription doit être présentée avant toute défense sur le fond alors que ledit texte n’impose pas cette condition, ce qui, selon la demanderesse, devrait entrainer la cassation de l’arrêt pour fausse application de la loi ;

- Troisième branche, sur la violation de l’article 119 du CPCCS,

En ce que l’arrêt attaqué a rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la SOTELMA-SA tirée de la forclusion au motif que la fin de non-recevoir devait intervenir avant le fond, contrairement aux dispositions de l’article 119 CPCCS qui stipule que les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, d’où il ressort selon la demanderesse que l’arrêt doit être cassé pour violation de l’article 119 du CPCCS par refus d’application de la loi ;

- Quatrième branche, sur la violation de l’article 121 du CPCCS,

En ce que ce texte indique que « les fins de non-recevoir doivent être relevées d’office lorsqu’elles ont un caractère d’ordre public, notamment lorsqu’elles résultent de l’inobservation des délais dans lesquels doivent être exercées les voies de recours ou de l’absence d’ouverture d’une voie de recours » ; par conséquent, estime le demandeur, en rejetant cette fin de non-recevoir tirée de la forclusion au motif qu’elle n’a pas été soulevée devant le premier juge, les juges d’appel ont refusé d’appliquer l’article 121 CPCCS, ce qui expose leur arrêt à la censure ;

- Cinquième branche, sur la violation de l’article L.95 du Code du travail,

Aux termes duquel, « à conditions égales de travail, de qualification professionnelle et rendement, le salaire est égal pour tous les travailleurs, quels que soient leur origine, leur sexe, leur âge et leur statut… », prétendue violation selon la demanderesse qui bat en brèche les exemples cités par l’arrêt, en ce que lesdits exemples sont impuissants à prouver que Ad Ac B a subi une injustice, notamment :

- Le cas de la différence de salaire entre Ad Ac B et son collègue de même catégorie Aa C, de catégorie A11 selon l’arrêt alors qu’en réalité, le premier serait de la catégorie A09 et le second de la catégorie A10, ce qui aurait induit en faveur de ce dernier, du fait en outre de son ancienneté, une différence de 820.49 FCF sur le salaire ; et de s’interroger sur la véracité des bulletins de salaire fournis par Ad Ac B et sur la présence éventuelle desdits bulletins dans le dossier ;

- Le cas de la différence de traitement dans l’avancement entre Ad Ac B et Ab A et qui s’expliquerait par le fait que l’avancement dont a bénéficié Ab a résulté d’un changement de catégorie et celui dont a bénéficié Ad Ac B d’une bonification à la suite d’une formation ;

- Le cas des 10 tickets d’essence offerts à tous les membres de la Commission de régularisation excepté à Ad Ac B ne serait qu’une affirmation gratuite et mensongère de ce dernier ;

- Le cas de la gratification de 100 000 FCFA pour Tabaski et 100 000 FCA pour le Ramadan versée aux travailleurs musulmans parallèlement aux mêmes sommes versées respectivement aux chrétiens pour Noels et pour Pacques , loin de constituer un traitement inégalitaire, montrerait au contraire, contrairement aux énonciations de l’arrêt, un traitement juste et équitable en faveur de tous les travailleurs sans distinction aucune, à l’occasion d’une prestation sociale au surplus non obligatoire ; le demandeur au pourvoi concluait qu’il y avait là une fausse application des faits ayant entrainé une mauvaise application de l’article L.95 du code du travail ;

Sixième branche sur la violation de l’article 09 du CPCCS, en ce que, conformément à ce texte, la SOTELMA a produit toutes les preuves de nature à établir que la situation de Ad Ac B ne souffrait d’aucune irrégularité au moment de son départ à la retraite et que par conséquent, faute par la Cour d’Appel de l’avoir reconnu, son arrêt devrait être censuré pour violation de l’article 9 CPCCS par refus d’appliquer la loi.

2.2.-Sur le deuxième moyen tiré du défaut de base légale, en ce que :

- les juges d’Appel n’ont pas précisé les droits retenus (licenciement, préavis, congés…) et par conséquent n’ont pas expliqué comment, et à partir de quel mode de calcul ils sont parvenus aux chiffres de 353.724.160 FCFA et de 20.000.000 FCFA de dommages-intérêts ;

- les juges d’Appel ont rejeté la fin de non-recevoir tirée de la forclusion et accueilli favorablement partiellement la fin de non-recevoir tirée de la prescription, alors que toutes les fins de non-recevoir répondent au même régime juridique, à savoir, qu’elles peuvent être soulevées à toute hauteur de la procédure ;

- les juges d’Appel se seraient contredits en indiquant que la prescription concerne la période allant de 2002 au 29 juin 2013 et incluant encore cette date du 29 juin 2003 comme date à partir de laquelle la prescription n’est plus applicable alors que selon le demandeur, la date à partir de laquelle la prescription n’est plus applicable aux termes de l’arrêt devrait en toute logique être celle du 30 juin 2013 ;

- l’arrêt querellé recèlerait une incohérence de motifs pour s’être fondé sur l’article 125 du RGO pour se prononcer sur la réparation de la situation administrative, lors que le texte visé concerne plutôt la réparation de préjudice, de sorte que l’on ne saurait trop si le montant de 353.724.160 FCFA concerne des dommages-intérêts ou des droits ;

- l’arrêt se fonde seulement sur la dispense de l’obligation de verser une amende de consignation prévue à l’article 202 du code du travail pour estimer que « l’appel est recevable pour avoir été fait dans les forme et délai de la loi », sans préciser en quoi les autres formes ont été respectées, ce qui traduirait une insuffisance de motif constitutive de défaut de base légale ;

- l’arrêt reprend à son compte la déclaration inexacte de Ad Ac B selon laquelle celui-ci aurait effectué un travail dévolu à deux entités différentes, alors que depuis la fusion-absorption intervenue en 2009 entre Malitel-SA et SOTELMA-SA, le poste de Chef de Département avait disparu de l’organigramme de la nouvelle société SOTELEMA-SA, de sorte que c’est à tort que Ad Ac B a demandé son reclassement à raison de cette prétendue double responsabilité ;

- la somme de 20.000.000 de FCFA a été allouée à titre de dommages-intérêts sur le fondement de l’article 123 du RGO, alors que ce texte n’est applicable que dans l’hypothèse où le juge accorde une réparation en nature et accorde des dommages-intérêts, ce qui n’est pas le cas en l’espèce, d’où il suit, selon le demandeur que la décision attaquée manque de base légale.

SUR QUOI,

3.- Analyse des moyens

Attendu que la violation de la loi et le défaut de base légale constituent des cas d’ouverture à pourvoi aux termes de l’article 88 de la loi n°2016-046 du 23 septembre 2016 portant loi organique fixant l’organisation, les règles de fonctionnement de la Cour Suprême et la procédure suivie devant elle ;

3.1.-Sur le premier moyen tiré de la violation de la loi :

Attendu que la Cour Suprême exerce son contrôle en cas de violation de la loi, laquelle se réalise soit par fausse interprétation de la loi, soit par fausse qualification des faits, soit par fausse application ou refus d’application de la loi ;

Attendu que le demandeur au pourvoi invoque ce moyen sur plusieurs branches, à savoir : Violation des articles L.216 et L.95 du code de travail, articles 118, 119, 121 et 9 du CPCCS.

- Sur la première branche : Violation de l’article L.216 du code de travail :

Attendu que la demanderesse au pourvoi reproche à l’arrêt attaqué de ne pas avoir tenu compte du délai de 15 jours prévu à l’article L.216 du code du travail pour exercer le recours contre le jugement entrepris :

Attendu que ce texte est ainsi libellé : « l’appel doit être interjeté dans les 15 jours délai légal du prononcé du jugement et dans les formes prévues à l’article L.191 paragraphe 2. En ce qui concerne les jugements rendus par défaut, ce délai prend effet du jour de la signification. L’appel est transmis dans la huitaine de la déclaration d’appel à la Cour d’Appel avec une expédition du jugement et des lettres mémoires et documents déposés par les parties. L’appel est jugé sur pièces.

Toutefois les parties peuvent demander à être entendues ; en ce cas la représentation des parties obéit aux règles fixées par l’article L.204 » ;

Attendu que contrairement aux arguments développés par la demanderesse au pourvoi, le délai d’appel en matière sociale est et demeure régi par la seule disposition susvisée de la loi n°92-020 du 23 Septembre 1992 portant code du travail à l’exclusion de toute application de l’article 782 du CPCCS sur les notification et est au sens dudit texte de 15 jours à compter du prononcé du jugement si celui-ci est contradictoire ; Que dans le cas de figure, le jugement entrepris ayant été contradictoirement rendu le 24 Avril 2017 et l’appel de Ad Ac B , interjeté le 17 Aout 2017 soit plus de trois (03) mois après le prononcé de celui-ci, il convient de dire que l’arrêt attaqué viole l’article L.216 du code du travail par refus d’application de la loi et d’accueillir ce moyen comme pertinent ;

Attendu que dans le cas de figure aucune autre solution n’étant envisageable, il n’y a plus rien à juger ; Qu’en application de l’article 164 de la loi n°2016-046 du 23 Septembre 2016, il y a lieu de casser sans renvoi l’arrêt attaqué ;

Attendu que dès lors, l’analyse des autres moyens soulevés par la demanderesse devient superfétatoire ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR :

En la forme : Reçoit le pourvoi ;

Au fond : Casse et annule l’arrêt déféré ;

Dit n’y avoir lieu à renvoi.

Met les dépens à la charge du Trésor Public.

Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour, mois et ans que dessous.

ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER./.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 02
Date de la décision : 09/02/2021

Origine de la décision
Date de l'import : 12/04/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ml;cour.supreme;arret;2021-02-09;02 ?
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