La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/10/2016 | MALI | N°287

Mali | Mali, Cour suprême, 10 octobre 2016, 287


Texte (pseudonymisé)
2ème CHAMBRE CIVILE

Arrêt n°287 du 10 / 10 / 2016

Cessation de troubles.

Sommaire :

Viole les dispositions des articles 9 et 491 CPCCS, la cour d’appel qui refuse de faire droit à une mesure de cessation de trouble alors que les auteurs du trouble reconnaissent avoir investi les lieux prétextant de leur droit de copropriété.

Faits et procédure : Par requête en date du 2 février 2016, Monsieur Ac dit Y B, chef de village de Kontza Peulh, a saisi le juge des référés du Tribuna

l de Mopti d’une action aux fins de cesation de troubles contre les nommés Ai Af X, Ac Ac X, A...

2ème CHAMBRE CIVILE

Arrêt n°287 du 10 / 10 / 2016

Cessation de troubles.

Sommaire :

Viole les dispositions des articles 9 et 491 CPCCS, la cour d’appel qui refuse de faire droit à une mesure de cessation de trouble alors que les auteurs du trouble reconnaissent avoir investi les lieux prétextant de leur droit de copropriété.

Faits et procédure : Par requête en date du 2 février 2016, Monsieur Ac dit Y B, chef de village de Kontza Peulh, a saisi le juge des référés du Tribunal de Mopti d’une action aux fins de cesation de troubles contre les nommés Ai Af X, Ac Ac X, Ae Ag C, Ah Ag C et Aa A.

Par ordonnance n°09 du 6 mars 2015, le juge des référés a ordonné la cessation des troubles de jouissance par Ai Af X et autres sur les bourgoutières dénommées Kadial,Pimba, Tiékoye, et MayelSeyo sous astreinte de 20 000FCFA par jour de retard ;

Sur appel des susnommés, la Cour d’appel de Mopti a, par arrêt n°9 du 16 mars 2016, infirmé l’ordonnance entreprise et, statuant à nouveau, débouté Ac B dit Y de sa demande.

D’où le pourvoi formé par celui-ci.

EXPOSE DES MOYENS

Le demandeur au pourvoi a produit deux mémoires ampliatifs par l’intermédiaire de Maître Mahamoudou H SIDIBE et le cabinet ARTEMIS.

I°) Mémoire produit par Me SIDIBE

Ce mémoire soulève un moyen unique de cassation tiré de la violation de l’article 491 du CPCCS.

Au soutien de ce moyen, le demandeur expose que Monsieur Ac B dit Y est à la fois le chef de village de Kontza et le Dioro de ladite localité ; qu’à ce titre, il est investi de certaines prérogatives liées à sa fonction ; que dans le cadre de la gestion des bourgoutières appartenant à sa communauté, il doit faire face à certaines dépenses pour la prise en charge des agents de maintien d’ordre en vue de faire respecter le calendrier des traversées d’animaux dans les bourgoutières et le financement des cérémonies ;

Que toutes ces charges nécessitent des ressources qui occasionnent parfois la vente de certaines bourgoutières ; que c’est ainsi que pour accomplir sa mission, le Dioro a vendu 4 bourgoutières sur 11 ;

Que les défendeurs s’opposent à cette vente au motif que les dites bourgoutières constituent la propriété commune des familles X et B ;

Que l’arrêt attaqué, pour infirmer l’ordonnance entreprise, s’est fondé sur le fait que les acquéreurs des bourgoutières continuent à jouir de celles-ci et qu’aucun constat d’huissier ne confirme la matérialité des faits et que les défendeurs n’avaient pas été consultés lors de la vente ;

Que les défendeurs continuent d’envahir les bourgoutières concernées sans le consentement des bénéficiaires auxquels revient l’usage exclusif pendant toute la durée de la campagne ; que cela constitue un trouble de jouissance auquel il était demandé au juge des référés de mettre fin ;

Que les juges d’appel en affirmant qu’il n’y a eu aucun trouble de jouissance, ont fait une mauvaise application de l’article 490 du CPCCS ;

Que s’il est vrai que la décision du commandant de Cercle versée au dossier, attribue la propriété des bourgoutières aux familles B et X, elle précise cependant que la gestion de celles-ci revient à la famille B dont le demandeur est le Dioro désigné ; que les défendeurs sont dès lors tenus de respecter ses décisions ;

Que les défendeurs expliquent leur geste par le fait qu’ils sont copropriétaires des bourgoutières concernées ;

Qu’en refusant d’ordonner la cessation de ces troubles, les juges d’appel ont violé les dispositions de l’article 491 du CPCCS et exposent leur arrêt à la cassation ;

II°) Mémoire produit par la SCP ARTEMIS-CONSEIL

Attendu que ce mémoire contient deux moyens de cassation tirés de la dénaturation des faits et de la violation de la loi.

1°) Premier moyen tiré de la dénaturation des faits

En ce que dans son raisonnement, la Cour d’appel feint d‘ignorer le trouble dont la cessation est demandée en se fondant sur la qualité de copropriété des BAH sur les bourgoutières ;

Qu’or, en l’espèce, il ne s’agit point de copropriété dans la mesure où la gestion desdites bourgoutières relève exclusivement du DIORO suivant une coutume ancestrale et en vertu d’une décision du commandant de cercle ;

Que le DIORO élu est de par ses prérogatives, seul habilité à gérer les bourgoutières dans l’intérêt de la collectivité ; qu’ainsi, il peut les vendre ou les louer pour faire face aux dépenses de la collectivité ;

Que l’usage fait par Ac B dit Y, propriétaire légitime des bourgoutières, est conforme aux usages ;

Que cependant, les quatre bourgoutières vendues par lui se trouvent illégalement occupées par les défendeursqui troublent la jouissance des acquéreurs ;

Qu’en ne reconnaissant pas cet état de fait, l’arrêt attaqué s’expose à la censure ;

II°) Deuxième moyen tiré de la violation de la loi

En ce que l’arrêt attaqué affirme que « les acquéreurs des bourgoutières vendues par l’intimé continuent à disposer de celles-ci sans encombre », alors qu’il est versé au dossier un procès-verbal d’huissier en date du 25 janvier 2016 et un procès-verbal d’audition établi le même jour qui attestent de la présence d’animaux autres que ceux des acquéreurs notamment ceux de Dioro Af X et autres ;

Que ceci dénote de la volonté de ceux-ci de ne pas céder à l’autorité du Ai Ac B dit Y ;

Qu’en ignorant ces éléments de preuve, les juges d’appel violent les dispositions de l’article 9 du CPCCS ;

Monsieur Ai Af X et autres défendeurs au pourvoi, n’ont pas produit de mémoire en réplique.

ANALYSE DES MOYENS

Le demandeur au pourvoi a, sous la plume de ses conseils produit deux mémoires ampliatifs dont les moyens se résument à la dénaturation des faits et la violation de la loi.

I°) Sur le premier moyen tiré de la dénaturation des faits

Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué d’avoir dénaturé les faits en ignorant le trouble dont la cessation est demandée et en faisant ressortir la qualité de copropriétaires de Dioro Af X et autres ;

Mais attendu qu’il y’a lieu de rappeler que seul un écrit peut faire l’objet d’un grief de dénaturation, l’appréciation des faits relevant du pouvoir souverain des juges du fond ;

Que dès lors, ce moyen doit être déclaré irrecevable ;

II°) Sur le deuxième moyen tiré de la violation de la loi

Attendu que moyen se subdivise en deux branches : la violation des articles 490 et 491 du CPCCS et celle de l’article 9 du CPCCS.

1°) Première branche du moyen tirée de la violation des articles 490 et

491 du CPPCCS

Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué d’avoir violé les dispositions des articles 490 et 491 du CPCCS pour avoir en dépit des troubles occasionnés par les défendeurs, refusé d’ordonner la cessation des troubles ;

Que selon le pourvoi, il est versé au dossier un acte administratif consacrant la copropriété des bourgoutières des familles B et X ; que le même acte dispose en son article 2 que la gestion des bourgoutières revient à la famille B ; que le Dioro désigné de cette famille est Ac B qui, de par ses prérogatives peut vendre des bourgoutières pour faire face aux dépenses de souveraineté résultant de sa charge ;

Que c’est ainsi qu’il a vendu 4 bourgoutières sur les 11 dont il avait la gestion ; que les défendeurs sous prétexte qu’ils sont copropriétaires desdites bourgoutières, troublent les acquéreurs dans leur jouissance ;

Que saisie par voie de référé pour faire cesser ces troubles, la Cour d’appel refuse de considérer l’invasion par les défendeurs des bourgoutières concernées, comme trouble de jouissance, aux motifs qu’ils sont copropriétaires et qu’ils n’auraient pas été consultés pour les ventes ;

Qu’une telle attitude s’analyse comme une violation de la loi par refus d’application de la loi ;

Attendu en effet qu’il ressort des éléments de preuve versés au dossier (procès-verbaux de constats et d’audition) qu’en dépit des ventes des bourgoutières par Ac B dit Y aux nommés Ac C, Ab B, Ad Aj, les défendeurs continuent de les occuper, troublant ainsi les acquéreurs dans leur jouissance ;

Que dès lors, la Cour d’appel, en refusant d’ordonner la cessation des troubles occasionnés, a méconnu les dispositions des articles susvisés qui indiquent que le président peut toujours même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite 

Qu’il s’ensuit que ce moyen mérite d’être accueilli ;

2°) Sur la deuxième branche du moyen tirée de la violation de l’article 9 du CPCCS

Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir, en dépit des éléments de preuve versés au dossier (procès-verbal de constat d’huissier du 25 janvier 2016 et procès-verbal d’audition du même jour), déclaré que le demandeur n’apporte pas la preuve du trouble de jouissance subi ;

Attendu que s’il est vrai que les juges du fond apprécient souverainement les éléments de preuve à eux soumis, il demeure qu’en cas d’aveu, ils sont sans aucun doute liés ;

Que dans le cas d’espèce, les défendeurs ont reconnu avoir investi les bourgoutières vendues par Ac B dit Y parce que disent-ils ne reconnaissent pas lesdites ventes étant eux-mêmes copropriétaires ;

Que dès lors, énonçant que «  le requérant n’ayant pu prouver l’existence d’un trouble à faire cesser, il y a lieu conformément aux dispositions de l’article 9 du CPCCS, d’infirmer l’ordonnance entreprise… », Alors que les défendeurs eux-mêmes ne contestent pas avoir investi les bourgoutières concernées, la Cour d’appel a ignoré les dispositions de l’article susvisé et expose sa décision à la cassation ;

…Casse et annule l’arrêt déféré ;

Renvoie la cause et les parties devant la Cour d’appel de Mopti autrement composée ;…


Synthèse
Numéro d'arrêt : 287
Date de la décision : 10/10/2016

Analyses

Cessation de troubles.


Origine de la décision
Date de l'import : 06/03/2020
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ml;cour.supreme;arret;2016-10-10;287 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award