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22/03/2016 | MALI | N°06

Mali | Mali, Cour suprême, 22 mars 2016, 06


Texte (pseudonymisé)
CHAMBRE COMMERCIALE

ARRET N° 06 DU 22 Mars 2016.

Opposition au jugement.

SOMMAIRE 

En appréciant souverainement le comportement des parties contractantes pour situer leur responsabilité dans la rupture d’un contrat, les juges d’appel n’ont nullement violé l’article 77 du RGO.

Peut être censuré le défaut de base légale se caractérisant par une insuffisance de motivation de la décision attaquée ne permettant pas à la juridiction suprême de vérifier que les juges du fond ont fait une application correcte de la règ

le de droit.

FAITS ET PROCEDURE :

Courant décembre 2008, la société Salam Const...

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRET N° 06 DU 22 Mars 2016.

Opposition au jugement.

SOMMAIRE 

En appréciant souverainement le comportement des parties contractantes pour situer leur responsabilité dans la rupture d’un contrat, les juges d’appel n’ont nullement violé l’article 77 du RGO.

Peut être censuré le défaut de base légale se caractérisant par une insuffisance de motivation de la décision attaquée ne permettant pas à la juridiction suprême de vérifier que les juges du fond ont fait une application correcte de la règle de droit.

FAITS ET PROCEDURE :

Courant décembre 2008, la société Salam Construction SARL signait avec plusieurs municipalités du cercle de Sikasso différents contrats portant sur la réalisation de 15 forages positifs de 80 mètres de profondeur et l’équipement des puits en pompe à motricité humaine pour un délai d’exécution allant de 30 à 90 jours selon le forage. Le financement du projet était assuré par le gouvernement malien et la coopération danoise dans le cadre du programme d’appui au secteur Eau Potable, Assainissement et Ressources en Eau (PASEPARE).

Courant janvier 2009 pour l’exécution de ce projet, la Société Salam Construction SARL entrait en pourparlers avec la Société GX- Mines SCP d’Ingénieurs  en vue de la signature d’un contrat de sous-traitance. Ainsi la société GX MINE SC d’Ingénieurs proposait un projet d’accord qui fut signé le 20 avril 2009 par la gérante de la société Salam Construction SARL et pour un montant de 53 .550.000 FR CFA.

Suite à une mise en demeure en date du 30 mars 2009 du maitre d’ouvrage délégué l’invitant à prendre toutes les mesures pour terminer les travaux le 30 avril 2009,la Société Salam Construction SARL ,sous-traitait alors le marché avec une autre entreprise pour exécuter le marché à temps.

L’exécution du contrat nécessitant la mobilisation vers le Mali d’engins, de machines et de matériaux lourds ainsi que le personnel, la Société GX MINES SCP d’ingénieurs n’a pu faire cette mobilisation que courant octobre 2009.

A l’arrivée à Sikasso avec les équipements et les opérateurs, la société GX MINES SCP d’Ingénieurs aurait constaté que les accessoires et garnitures de forage que Salam construction devait livrer sur chaque site ne s’y trouvaient pas. La société se serait ainsi trouvée dans l’impossibilité de réaliser les travaux.

Estimant que ce comportement de la Société Salam Construction SARL est une violation des clauses contractuelles traduisant la rupture et qui lui a causé d’énormes préjudices, la société GX MINES SCP d’Ingénieurs  a assigné sa cocontractante devant le tribunal de commerce de Bamako en résolution de contrat et en réclamation de dommages –intérêts. Par un jugement n°79 du 26 janvier 2011, le tribunal de commerce de Bamako a fait droit à la demande de la société GX MINES SCP d’Ingénieurs. Suite à la signification faite de ce jugement le 16 mai 2012, la dame A., gérante de la société Salam Construction SARL a formé opposition suivant acte au greffe du même jour. Ainsi par jugement n°560 du 14 novembre 2012, le tribunal a reçu l’opposition, rétracté le jugement n°79 du 26 janvier 2011 et débouté GX MINES SCP d’Ingénieurs de ses demandes. Ce jugement a été confirmé par la cour d’appel de Bamako suivant arrêt n°35 du 12 juin 2013. C’est contre cet arrêt que la société GX MINES SCP d’Ingénieurs a formé pourvoi.

EXPOSE DES MOYENS DE CASSATION :

Le conseil de la demanderesse, invoque trois moyens de cassation tirés de la violation de la loi par fausse application des dispositions des articles 763 et 9 du CPCCS ; de la violation de la loi par dénaturation des dispositions de l’article 77 du RGO et du manque de base légale par insuffisance de motivation ;

I VIOLATION DE LA LOI PAR FAUSSE APPLICATION DES ARTICLES 763 ET 9 DU CPCCS :

En ce que l’arrêt a considéré que la signification n’a pas été faite à personne ou à toute autre personne habilitée à cet effet ;

Alors que la demanderesse a fait servir une assignation à dame A. qui a alors été citée en la personne de son employée B.;

Que l’arrêt s’est gardé de préciser en quoi B.n’était pas habilitée à cet effet.

Que selon l’article 763 du CPCCS « la signification à une personne morale est faite (…°) à toute personne habilitée à cet effet.

Qu’en considérant que la signification n’a pas été faite à personne ou à toute personne habilitée à cet effet sans préciser en quoi B.n’était ici pas habilitée à cet effet, l’arrêt attaqué viole les dispositions des articles 763 et 9 du CPCCS et encourt la censure.

II VIOLATION DE LA LOI PAR DENATURATION DES DISPOSITIONS DE L’ARTICLE 77 DU RGO ET REFUS D’APPLICATION DES DISPOSITIONS CONTRACTUELLES :

En ce que dans sa motivation ,l’arrêt se borne à indiquer qu’il ressort du procès verbal du 28 octobre 2009 de maître Dramane Kokè Sacko , Huissier de justice à Sikasso , qu’entre la signature du contrat de sous-traitance et l’arrivée de la société GX MINES SCP d’Ingénieurs sur le terrain ,il s’est écoulé 8 mois ,cette dernière n’ayant pas prévenu Salam Construction SARL de son arrivée sur le terrain plus tard, de sorte qu’elle ne saurait se prévaloir de sa propre turpitude , et qu’en plus elle n’ a pas respecté le délai imparti tel que stipulé dans la convention liant les parties.

Alors que selon l’article 77 du RGO « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ce qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou pour les causes que la loi autorise .Elles doivent être exécutées de bonne foi ».

Que les juges d’appel se sont gardés de préciser en quoi la Société GX MINES SCP d’Ingénieurs n’a pas respecté les délais qui lui étaient impartis pour réaliser les forages.

Que le contrat de sous-traitance prévoyait que pour la réalisation des travaux de forage, Salam Construction SARL devait livrer sur chaque site des accessoires et garnitures, chose qui n’a jamais été faite.

Que l’arrêt s’est refusé de faire ce constat.

Que de plus aucun délai n’était imparti par le contrat pour la réalisation des forages.

Qu’il est prouvé au dossier que la société GX MINES SCP d’Ingénieurs, a mobilisé sur le terrain les engins et machines ;

Que l’arrêt attaqué n’a pas tiré les conséquences de cette mobilisation des engins à Sikasso

Que c’est la non fourniture en accessoires et garnitures des sites par Salam Construction -SARL qui a rendu impossible l’exécution par GX MINES SCP d’ Ingénieurs de ses obligations contractuelles.

Que l’arrêt attaqué, en ne retenant pas ce manquement commis par Salam Construction SARL, procède d’une dénaturation des dispositions de l’article 77 du RGO et d’un refus d’application des dispositions contractuelles.

Qu’il y a lieu donc de casser l’arrêt attaqué.

III DU MANQUE DE BASE LEGALE :

En ce que pour justifier leur décision les juges d’appel n’ont trouvé mieux que de soutenir que GX Mines SCP d’Ingénieurs « n’a pas respecté le délai imparti tel que stipulé dans la convention » ;

Alors que les juges ont l’obligation de motivation leur décision de manière à justifier qu’ils ont fait une application correcte de la règle de droit.

Qu’une telle analyse ne saurait satisfaire l’obligation de motiver mise à la charge des juges d’appel.

Qu’en l’espèce l’arrêt s’est contenté des affirmations simples et gratuites du conseil de Salam Construction SARL sans référence à aucun élément relatif au contrat signé entre les parties.

Que de la motivation de l’arrêt querellé aucun élément ne permet de se rendre compte de ce que GX MINES SCP d’Ingénieurs n’a pas respecté les délais impartis dans la convention pour la réalisation des forages.

Qu’en fondant leur décision uniquement sur les causes relevées par le conseil de Salam Construction-SARL, les juges d’appel n’ont pas donné de base légale à leur arrêt.

Que pour cela l’arrêt doit être annulé.

Les conseils de la défenderesse ont conclu au rejet du pourvoi comme étant mal fondé.

ANALYSE :

I VIOLATION PAR FAUSSE APPLICATION DES DISPOSITIONS DES ARTICLES 9 ET 763 DU CPCCS :

Il est fait grief à l’arrêt attaqué de la violation des articles 9 et 763 du CPCCS pour avoir considéré que la signification n’ a pas été faite à personne ou à personne habilitée à cet effet alors que l’assignation a été servie à dame A. qui a ainsi été citée en la personne de son employée B.

Attendu que les articles dont la violation est invoquée sont ainsi conçus :

Art 9 du CPCCS : « il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention ».

Article 763 du CPCCS : « la signification doit être faite à personne. La signification à une personne morale est faite à personne lorsque l’acte a été délivré à son représentant légal, à un fondé de pouvoir de ce dernier, ou à toute personne habilitée à cet effet ».

Attendu que cet article 763 a trait à la signification et non à la citation qui est traitée par les articles 31 et suivants du CPCCS ;

Attendu que le problème juridique posé ici par la demanderesse est la recevabilité de l’opposition formée contre le jugement du 26 janvier 2011 dont l’examen nécessite une analyse des textes

traitant des citations qui déterminent la nature du jugement et par conséquente les voies de recours appropriées.

Attendu que selon l’article 33 du CPCCS « si au jour indiqué par la citation, l’une des parties ne comparait pas, ne se fait pas représenter ou ne produit pas de mémoire, la cause sera jugée par défaut… ».

Le même article prévoit que «  si le défendeur a été cité à personne et qu’il ne comparait pas, il sera jugé par jugement réputé contradictoire à son égard, susceptible d’appel ».

Attendu que le jugement, dont opposition, n’indique pas que la défenderesse a été citée à sa personne.

Qu’il ne pouvait alors être rendu que par défaut et non par réputé-contradictoire.

Attendu que dans tous les cas, la qualification inexacte d’un jugement par les juges qui l’ont rendu, est sans effet sur le droit d’exercer un recours selon l’article 552 du CPCCS ;

Attendu qu’en l’espèce pour rejeter l’exception d’irrecevabilité soulevée par le demandeur, les juges d’appel ont indiqué qu’il ressort clairement du jugement d’instance n° 79 du 26 janvier 2011 ,qu’il a été rendu par défaut à l’égard de la défenderesse (intimée en appel) celle-ci ayant été citée en la personne de son employée B..

Attendu que les articles 9 et 763 du CPCCS dont la violation est invoquée ici n’ont pas trait à la forme de la citation qui détermine la nature contradictoire, réputé contradictoire ou par défaut du jugement rendu.

Qu’on ne peut alors reprocher aux juges d’appel leur violation, le problème juridique posé ici ne rentant pas dans leur champ d’application.

Qu’il convient donc de rejeter ce premier moyen.

II VIOLATION DE LA LOI PAR DENATURATION DES DISPOSITIONS DE L’ARTICLE 77 DU RGO ET REFUS D’APPLICATION DES DISPOSITIONS CONTRACTUELLES :

Il est reproché à l’arrêt attaqué la violation par dénaturation des dispositions de l’article 77 du RGO et des dispositions contractuelles en ce qu’il a retenu que la Société GX MINES SCP d’Ingénieurs n’est arrivée sur le terrain que 8 mois après la signature du contrat de sous-traitance sans prévenir sa cocontractante et sans respecter le délai à lui imparti dans la convention les liant ,alors qu’aucun délai n’était prévu dans le contrat et qu’en plus SALAM CONSTRUCTION-SARL n’a pas fourni les sites de forage en accessoires et garnitures comme prévu au contrat rendant du coup impossible son exécution.

Mais attendu que pour confirmer le jugement d’instance, l’arrêt entrepris fait état du délai d’exécution prévu dans les contrats liant Salam Construction SARL aux municipalités de Sikasso allant de 30 à 90 jours ,de l’arrivée sur le terrain de la société GX MINES SCP d’Ingénieurs 8 mois après la signature du contrat de sous-traitance pour retenir que celle-ci n’a pas respecté le délai imparti tel que stipulé dans la convention la liant à l’intimée.

Attendu qu’en statuant ainsi les juges d’appel ne violent pas les dispositions de l’article 77 du RGO, l’appréciation du comportement des parties contractantes, pour situer leur responsabilité dans la rupture d’un contrat, relevant du pouvoir souverain des juges du fond d’une part et d’autre part un contrat de sous-traitance pour des forages ne pouvant faire fi des délais prévus dans la convention mère.

Qu’il y a lieu alors de rejeter ce deuxième moyen comme inopérant.

III DU MANQUE DE BASE LEGALE POUR INSUFFISANCE DE MOTIVATION :

Il est fait grief à l’arrêt attaqué de manquer de base légale par insuffisance de motivation pour avoir retenu que la société GX MINES SCP D’Ingénieurs n’a pas respecté le délai imparti tel que stipulé dans la convention en s’appuyant sur les affirmations simples et gratuites du conseil de Salam Construction SARL et sans référence à aucun élément du contrat liant les parties.

Attendu que le défaut de base légale se caractérise par une insuffisance de motivation de la décision attaquée qui ne permet pas à la juridiction suprême de vérifier que les juges du fond ont fait une application correcte de la règle de droit.

Attendu qu’en l’espèce pour justifier leur décision , les juges d’appel énoncent : « considérant qu’il ressort des pièces du dossier que dans le cadre de la réalisation des forages à Sikasso ,l’intimée a signé des contrats avec les municipalités dudit cercle pour un délai d’exécution allant de 30 à 90 jours ;que ce sont ces contrats qu’elle a sous-traités avec l’appelante ; qu’or il ressort du procès verbal de constat du 28 octobre 2009 de Maître Dramane Koké Sacko , Huissier de justice à Sikasso qu’entre la signature du contrat de sous-traitance et l’arrivée de l’appelante sur le terrain il s’est écoulé huit mois ;que mieux l’appelante n’ a point prévenu en ce qui concerne son déplacement ou son arrivée sur le terrain ; qu’il ne saurait donc se prévaloir de sa propre turpitude. Considérant qu’en l’espèce l’appelante n’a pas respecté le délai imparti tel que stipulé dans la convention la liant à l’intimée, que c’est donc à bon droit que le premier juge l’a déboutée de son action comme mal fondée ».

Attendu qu’en se déterminant ainsi, les juges du fond ont suffisamment motivé leur décision et lui ont donné une base légale.

D’où il suit que ce troisième moyen est également à rejeter.

…le rejette ;…


Synthèse
Numéro d'arrêt : 06
Date de la décision : 22/03/2016

Analyses

Opposition au jugement.


Origine de la décision
Date de l'import : 06/03/2020
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ml;cour.supreme;arret;2016-03-22;06 ?
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