La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/03/2016 | MALI | N°13

Mali | Mali, Cour suprême, 21 mars 2016, 13


Texte (pseudonymisé)
ARRÊT N° 13 du 21 Mars 2016.

Abus de confiance.



Violation de la loi- violation de la loi par fausse qualification des faits- cassation de l’arrêt déféré, sans donner lieu à renvoi



Abus de confiance – obligation préciser à quel titre il (le prévenu) a reçu les tickets de carburant et obligation de préciser s’il devait les rendre ou les représenter.





Sommaire :

Au sens de l’article 282 du Code Pénal, pour qu’il y ait abus de confiance il faut une remise volontaire de la chose par le propriétaire ou dét

enteur à l’auteur du détournement, à charge pour celui de la rendre ou de la représenter. La décision qui condamne pour abus de ...

ARRÊT N° 13 du 21 Mars 2016.

Abus de confiance.

Violation de la loi- violation de la loi par fausse qualification des faits- cassation de l’arrêt déféré, sans donner lieu à renvoi

Abus de confiance – obligation préciser à quel titre il (le prévenu) a reçu les tickets de carburant et obligation de préciser s’il devait les rendre ou les représenter.

Sommaire :

Au sens de l’article 282 du Code Pénal, pour qu’il y ait abus de confiance il faut une remise volontaire de la chose par le propriétaire ou détenteur à l’auteur du détournement, à charge pour celui de la rendre ou de la représenter. La décision qui condamne pour abus de confiance doit être motivée en référence aux éléments de faits de l’espèce.

FAITS ET PROCEDURE : 

Courant 2008 à la suite d’un contrôle de la gestion des carburants de la société « BUROTIC SERVICES » au titre des exercices 2007 et du 1er trimestre 2008 dont B., en sa qualité de chef comptable avait la charge, la directrice générale déclarait y avoir constaté de graves irrégularités. Elle soutenait que les qualités commandées étaient supérieures aux besoins estimés et que celles distribuées n’étaient pas non plus conformes aux dotations arrêtées.

Estimant le préjudice total à 5.553.550 F elle adressait à l’intéressé une demande d’explication le 22 mai 2008.

En réponse à cette demande B. tant en admettant le principe d’un déficit estimait plutôt son montant à 1.570.640 F.

Le Procureur de la République près le Tribunal de Première Instance de la Commune III fut saisi par la directrice générale d’une plainte pour abus de confiance le 14 août 2008.

Le Tribunal correctionnel de la Commune III par jugement n° 456 du 25 septembre 2009 relaxera B. des fins de la poursuite pour abus de confiance.

Sur appel du Procureur de la République et de la partie civile la chambre correctionnelle de la Cour d’appel de Bamako suivant arrêt n° 211 du 12 juillet 2010 infirmait le jugement n° 456 du 25 septembre 2009 et condamnait B. à 3 mois d’emprisonnement avec sursis et au paiement à la partie civile de la somme de 157.000 F à titre de remboursement et 200.000 F de dommages intérêts.

Sur le pourvoi en cassation de B. la Cour Suprême suivant arrêt n° 57 du 20 juin 2011 cassait et annulait l’arrêt de la Cour d’Appel avec renvoi de la cause et des partis devant la Cour d’Appel de Bamako autrement composée, qui par arrêt n° 653 en date du 7 octobre 2013 statuait en ces termes : « ………..reçoit les appels interjetés infirme le jugement déféré statuant à nouveau Déclare B. coupable des faits d’abus de confiance…… Le condamne à 3 mois d’emprisonnement avec sursis ; reçoit la constitution de partie civile de la société Bureautique Service représentée par C, y faisant droit :

Condamne le prévenu à lui payer la somme de 1.630.000 F à titre de remboursement de la somme détournée, celle 3.917.600 F au titre des frais d’expertise et 1.000.000 F à titre de dommages intérêts…….. ».

Par acte en date du 19 octobre A. par le truchement de son conseil Maître Modibo Aly Doumbia Avocat au Barreau du Mali déclarait se pourvoir en cassation contre cet arrêt.

Dispensé de consigner il a produit un mémoire ampliatif qui à été notifié au conseil de la partie civile.

PRESENTATION DES MOYENS DE CASSATION :

Par l’intermédiaire de son conseil Maître Etienne Ballo X soulève contre l’arrêt attaqué deux (2) moyens de cassation : La dénaturation des faits (1) et la violation de la loi (2).

1er moyen : La dénaturation des faits.

En ce que la cour d’appel pour se déterminer énonce dans sa décision que le rapport de l’expertise ordonnée par elle est pertinent et qu’il y a lieu de l’adopter.

Alors que dans la partie du rapport intitulée « résultat » il est mentionné « qu’il conviendrait de préciser qu’il n’y avait pas à Bureautique Service au moment des faits de procédures formalisées ou d’instructions clairement définies par la direction pour la gestion du carburant. En tout cas ces éléments ne non ont pas été donné. En l’absence de procédures formalisés ou d’instruction claires de la direction pour la gestion du carburant, nous n’avons pu vérifier le bien fondé des prétentions de Madame C. et le bien fondé des déclarations de B. et nous n’avons pu les vérifier par d’autre procédure » (cf p. 80 et 81).

Qu’en adoptant ce rapport d’expertise la Cour admet le constat d’absence de procédure formalisée, d’absence d’instructions clairement définies pour la gestion du carburant et d’impossibilité d’établir le bien fondé des accusations de la directrice générale de Bureautique Service contre B..

Qu’elle se pouvait donc tirer argument de ce même rapport pour condamner B. sans le dénaturer, car la Cour de cassation considère qu’il y a dénaturation des faits lorsque la décision n’a pu donner une analyse des faits qu’au prix d’une méconnaissance des termes clairs d’un document écrit invoqué comme élément de preuve (attestation de témoin, procès verbal de police, rapport d’expertise etc.) la technique de cassation de Ac Aa Ab Ad et Xavier édition 2010 p. 88.

2è moyen : La violation de la loi (article 282 CP) fausse qualification des faits :

En ce que la Cour d’Appel a retenu les faits d’abus de confiance à l’encontre de B. au motif qu’il n’a pas rapporté la preuve qu’il a avec l’autorisation de la direction de Bureautique Service distribué des tickets carburants.

Alors que contrairement à ce que retient la cour, il n’est nullement acquis qu’il fallait « un mandat spécial » de la direction de Bureautique Service pour que B. puisse donner les tickets de carburant aux agents de l’administration.

Que qualifier cette distribution de détournement frauduleux au sens de l’article282 du code pénal pour la simple raison qu’elle aurait été faite sans mandat spécial de la direction de Bureautique Service, procède d’une fausse qualification des faits.

Dans son mémoire en réplique Bureautique Service conclut au rejet du pourvoi.

SUR CE, LA COUR :

Sur le 1er moyen pris de la dénaturation des faits.

Attendu qu’à travers ce moyen, il est fait grief à l’arrêt de s’être fondé sur le rapport d’expertise pour déclarer le sieur A.S. coupable d’abus de confiance ; alors qu’il résulte dudit rapport « qu’il n’y avait pas à Bureautique Service aux moments des faits de procédure formalisées ou d’instructions clairement définies par la direction pour la gestion du carburant ».

Que l’arrêt fait ainsi dire au rapport ce qu’il ne contient pas, ce qui constitue une dénaturation.

Attendu cependant, qu’il ne résulte d’aucune énonciation de l’arrêt que celui s’est fondé sur le rapport d’expertise pour déclarer A.S. coupable d’abus de confiance.

Que le moyen manque donc en fait et doit être déclaré irrecevable.

Sur le 2è moyen pris de la violation de l’article 282 du Code Pénal pur fausse qualification des faits :

(Vu l’article 282 Code Pénal) ;

Attendu que s’il est constant que l’appréciation des faits échappe au contrôle du juge de cassation, leur qualification par contre relève de son contrôle, sa démarche consistant à vérifier si la qualification donnée aux faits est conforme à la loi.

Attendu que l’article 282 CP est ainsi libellé « est qualifié d’abus de confiance le détournement frauduleux commis au préjudice du propriétaire ou du détenteur d’une somme d’argent, d’un document ou d’un objet quelconque qui aurait été confié à quelque titre que ce soit par ledit propriétaire ou détenteur à l’auteur du détournement à charge pour celui –ci de le rendre ou de le représenter ».

Attendu que pour qu’il y ait abus de confiance il faut une remise volontaire de la chose par le propriétaire ou détenteur à l’auteur du détournement, à charge pour celui de la rendre ou représenter, et la décision qui condamne pour abus de confiance doit être motivée en référence aux éléments de faits de l’espèce.

Attendu que l’arrêt querellé déclare A.S. coupable d’abus de confiance au motif qu’il n’avait pas mandat de son employeur pour distribuer des tickets de carburants à certains agents publics en vue d’obtenir des marchés publics.

Mais attendu que l’arrêt ne dit pas à quel titre il a reçu les tickets de carburant et surtout s’il devait les rendre ou les représenter, encore qu’il résulte du rapport d’expertise « qu’à Bureautique Service au moment des faits il n’y avait pas de procédures formalisées ou d’instructions clairement définies pour la gestion du carburant » ;

Attendu que les faits d’abus de confiance ne sont donc pas caractérisés.

Attendu que l’arrêt procède donc d’une violation de l’article 282 CP par fausse qualification des faits.

Qu’il y a donc lieu de faire application de l’article 543 CPP.

…Annule l’ordonnance déféré ;

Dit n’y avoir lieu à renvoi ;…


Synthèse
Numéro d'arrêt : 13
Date de la décision : 21/03/2016

Analyses

Abus de confiance.


Origine de la décision
Date de l'import : 06/03/2020
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ml;cour.supreme;arret;2016-03-21;13 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award