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13/07/2015 | MALI | N°159

Mali | Mali, Cour suprême, 13 juillet 2015, 159


Texte (pseudonymisé)
2ème CHAMBRE CIVILE

Arrêt n°159 du 13 0707 / 2015

Réclamation de sommes.

SOMMAIRE : 

L’action in rem verso n’est point justifiée au regard de l’article 161 du RGO lorsqu’il est établi que l’enrichissement a une cause légitime et trouve sa source dans un acte juridique, même passé entre l’enrichi et un tiers.

1. Faits et procédure : Par exploit en date du 26 novembre 2012, Monsieur B ayant pour conseil la SCP Diop-Diallo Avocat associés, a assigné Monsieur Adevant le

Tribunal Civil de la Commune IV du District de Bamako aux fins de réclamation de sommes ;

Il expose q...

2ème CHAMBRE CIVILE

Arrêt n°159 du 13 0707 / 2015

Réclamation de sommes.

SOMMAIRE : 

L’action in rem verso n’est point justifiée au regard de l’article 161 du RGO lorsqu’il est établi que l’enrichissement a une cause légitime et trouve sa source dans un acte juridique, même passé entre l’enrichi et un tiers.

1. Faits et procédure : Par exploit en date du 26 novembre 2012, Monsieur B ayant pour conseil la SCP Diop-Diallo Avocat associés, a assigné Monsieur Adevant le Tribunal Civil de la Commune IV du District de Bamako aux fins de réclamation de sommes ;

Il expose que courant 2009 ; il a acheté deux parcelles situées sur l’avenue Cheick Zayed à l’ACI 2000 Bamako ;

Qu’après acquisition des deux parcelles, il avait chargé Monsieur Ac Ab, son gérant, de faire construire deux immeubles identiques ; que par la suite, il constata que l’une des parcelles avait été acquise au nom de Asans son consentement, alors qu’il avait investi la somme de 357.753.130F CFA pour la construction ; que c’est pourquoi, il réclame le remboursement par Adu prix de la parcelle (75.000.000F) et les investissements effectués par lui soit la somme totale de 432.753.130 FCFA.

Le Tribunal Civil de la Commune IV du District de Bamako a, par jugement n° 75 du 25 mars 2013, condamné Aà lui payer la somme de 432.753.130 FCFA au titre du remboursement du prix de la parcelle et des constructions y édifiées.

Sur appel de A, la Cour d’Appel de Bamako a, par arrêt n°207 du 5 mars 2014, infirmé le jugement entrepris et, statuant à nouveau, débouté Ade sa demande.

C’est cet arrêt qui fait l’objet du présent pourvoi.

EXPOSE DES MOYENS :

Le demandeur au pourvoi a, sous la plume de Maître Magatte SEYE et celle de la SCP Diop-Diallo produit deux mémoires ampliatifs.

I - Mémoire produit par Maître Magatte SEYE

Ce mémoire soulève deux moyens de cassation tirés de la violation de la loi et du manque de base légale.

1- Premier moyen tiré de la violation de la loi :

En ce que l’arrêt attaqué énonce qu’il ressort du dossier que Aa acquis la parcelle objet du T.F n° 15.280 de Ag X 2000 suivant acte notarié de Maître Mohamed Lamine Ag Hamid et que l’existence de cet acte fait échec à l’application de l’article 161 du RGO.

Qu’or, Aa soutenu que son frère a acheté deux immeubles non bâtis dont l’un à son nom et que c’est après la construction que son frère a semblé regretter cette libéralité et a demandé la restitution de la valeur de l’immeuble ;

Que An’a jamais eu la volonté réelle de donner cet immeuble à A; Qu’à supposer même que l’acte notarié en question soit valable, il ne peut concerner que la parcelle nue ; Qu’en effet, cet acte a été établi avant la construction de la parcelle par B.

Que S.M reconnait que l’acte a été établi avant la construction ; qu’il s’ensuit que si la donation était retenue, elle ne pourrait concerner les constructions édifiées sur la parcelle ;

Qu’il n’existe aucun acte qui précise que les constructions font partie de la prétendue donation ;

Qu’en l’absence d’un acte juridique, il est établi que As’est enrichi aux dépens de Ade la valeur de l’immeuble ; que celui-ci est donc en droit de réclamer cette valeur ;

Qu’en se déterminant comme elle l’a fait, la Cour d’Appel a méconnu les dispositions de l’article 161 du R.G.O et expose sa décision à la censure de la haute juridiction ;

2- Deuxième moyen tiré du manque de base légale :

En ce que l’arrêt attaqué prétend de façon péremptoire que l’acte a été établi sur instructions précises de T.M qui était physiquement présent au moment de son établissement ;

Que cependant, il n’existe aucune pièce dans le dossier qui soutient une telle déclaration ;

Que l’arrêt persiste à faire croire que l’immeuble construit par le demandeur bien après le soit disant acte de donation notarié est devenu la propriété de A;

Qu’il s’ensuit que les motifs de l’arrêt attaqué en raison de leur imprécision et de leur insuffisance, ne permettent pas à la haute juridiction d’exercer son contrôle ;

II Mémoire produit par la SCP- Diop-Diallo :

Ce mémoire contient deux moyens de cassation tirés du défaut de base légale et de la violation de la loi.

1- Premier moyen tiré du défaut de base légale :

En ce que pour procéder à l’infirmation du premier jugement, l’arrêt attaqué estime que Aa acquis la parcelle objet du TF n°15280 suivant acte notarié de Maître Mohamed Lamine Ag Hamid notaire à la résidence de Bamako ;

Que le même arrêt poursuit en soutenant que « … Cela a eu lieu sur instructions précises de son jeune frère T.M qui était physiquement présent au moment de l’établissement dudit acte… 

Qu’il s’ensuit que la seule présence de l’acte authentique dans les relations transactionnelles des frères Y fait échec à l’application de l’article 161 du R.G.O précité… » ;

Que cette affirmation des juges d’appel est ambigüe et ; manque de précision ; qu’en effet, tel que libellé, l’arrêt attaqué veut-il dire que « la seule présence de l’acte authentique » non signé par Avaut une transaction authentique entre deux personnes ?

Qu’en motivation ainsi sa décision, la Cour d’Appel de Bamako a crée un doute sur l’existence ou non d’acte authentique dans les relations qu’elle qualifie de « transactionnelles des frères Y » ;

Qu’en statuant comme il l’a fait, l’arrêt attaqué a manqué de base légale par la constatation imprécise des faits ;

2- Deuxième moyen tiré de la violation de la loi :

En ce que l’arrêt attaqué pour débouter Ade sa demande fondée sur l’action de in rem verso, a retenu la présence imaginaire d’acte authentique dans les relations transactionnelles des frères Y pour refuser d’appliquer l’article 161 du R.G.O.

Qu’il est cependant indéniable que c’est dans des termes très clairs que l’article 161 du R.G.O a indiqué qu’en l’absence d’acte juridique, celui qui s’enrichit aux dépens d’autres est tenu de l’indemniser ;

Que dans le cas soumis, il n’y a pas eu d’acte authentique entre les frères Y comme l’ont voulu le faire croire les juges d’appel ; Que dès lors, en statuant comme ils l’ont fait, les juges d’appel ont procédé d’un refus d’appliquer l’article 161 du R.G.O à une situation qu’il régit normalement ;

Que dès lors, leur arrêt encourt la cassation ;

Le demandeur sollicite, en cas de cassation, l’application de l’article 651 du CPCCS ;

Monsieur A, défendeur au pourvoi a, par le truchement de ses conseils Maître Abdramane Sanogo et le cabinet Cissé-Barry répliqué aux mémoires ampliatifs produits par le demandeur et a demandé le rejet du pourvoi.

ANALYSE DES MOYENS :

Le demandeur au pourvoi a produit deux mémoires ampliatifs provenant de Maître Magatte Seye et la SCP Diop-Diallo-Diallo.

Les moyens contenus dans ces deux Mémoires se résument en violation de la loi (art 161 du R.G.O) et en défaut de base légale ;

I- Sur le premier moyen tiré de la violation de la loi :

Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué d’avoir refusé d’appliquer les dispositions de l’article 161 de la loi n°87-31/AN-RM du 29 Août 1987 fixant le Régime Général des Obligations alors qu’il est établi que A, en l’absence d’un acte juridique s’est enrichi aux dépens de C;

Attendu que l’article 161 du R.G.O dont la violation est alléguée est ainsi conçu :

Art 161 R.G.O : ‘’Celui qui en l’absence d’un acte juridique, s’enrichit aux dépens d’autrui est tenu de l’indemniser dans la mesure de son propre enrichissement jusqu’à concurrence de l’appauvrissement ’’.

Mais attendu que l’action de in rem verso ne doit être admise que dans les cas où le patrimoine d’une personne se trouvant, sans cause légitime, enrichi au détriment de celui d’une autre personne, celle-ci ne jouirait, pour obtenir ce qui lui est dû, d’aucune action naissant d’un contrat, d’un quasi-contrat, d’un délit ou d’un quasi-délit, et elle peut être intentée en vue d’échapper aux règles par lesquelles la loi a expressément défini les effets d’un contrat déterminé (Civ.2 mars 1915) ;

De même, il a été jugé que l’enrichissement a une cause légitime quand il trouve sa source dans un acte juridique, même passé entre l’enrichi et un tiers (Civ .3è- 28 mai 1986).

Attendu que dans le cas d’espèce, il est versé au dossier un acte de vente notarié établi par devant Maître Mohamed Lamine Ag Hamid, notaire qui atteste que les nommés Ae Ad Af et Aa Ah ont vendu à Ala parcelle n°848 sise à Ag X 2000 objet du titre foncier n°15.280 inséré au livre foncier du District de Bamako.

Que par ailleurs, il ressort du contrat de construction passé entre la Société SOTIMEX-BTP représentée par Ac Ab et Aque celui-ci a financé les travaux de construction des deux immeubles objets des titres fonciers n°15.279 et n°15.280.

Qu’il ressort également des déclarations de Ac Ab devant le premier juge que c’est B, sans aucune contrainte, qui a dit de mettre un des immeubles au nom de Aet ce, en présence du notaire ;

Qu’au regard de ce qui précède, il est établi que l’enrichissement de Aa une cause légitime, puisque trouvant sa source dans la libéralité faite par son frère Aet dans l’acte notarié passé en l’étude de Maître Mohamed Lamine Ag Hamed ;

Que dès lors, en se déterminant comme elle l’a fait, la Cour d’Appel n’a nullement violé les dispositions de l’article 161 du R.G.O susvisé.

Qu’il s’ensuit que ce moyen n’est pas pertinent ;

II- Sur le deuxième moyen tiré du défaut de base légale :

Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir énoncé que Monsieur A a acquis la parcelle objet du TF n°15280 suivant acte notarié de Maître Mohamed Lamine Ag Hamid , et ce, sur instructions précises de son jeune frère Aqui était physiquement présent au moment dudit acte ;

Que la seule présence de l’acte authentique dans les relations transactionnelles des frères Y fait échec à l’application de l’article 161 du R.G.O ;

Attendu que le défaut de base légale se définit comme une insuffisance des constatations de faits qui sont nécessaires pour statuer sur le droit ;

Attendu que pour justifier sa décision, la Cour d’Appel énoncé « … qu’il résulte du dossier que S.M a acquis la parcelle, objet du TF n°15280 sise à Hamdallaye ACI 2000 suivant acte notarié de Maître Mohamed Lamine Ag Hamid notaire à la résidence de Bamako.

… que cela a eu lieu sur instructions précises de son jeune frère Aqui était physiquement présent au moment de l’établissement dudit acte ; qu’il s’ensuit que la seule présence de l’acte authentique dans les relations transactionnelles des frères Y fait échec à l’application de l’article 161 du R.G.O… » ;

Qu’en se déterminant par de tels motifs, démontrant ainsi que l’appauvrissement de Aet l’enrichissement corrélatif de Atrouvaient leur source dans un acte de vente notarié, bien que celui-ci soit passé entre Aet un tiers ; la Cour d’Appel a légalement justifié sa décision ;

D’où il suit que ce moyen ne peut prospérer ;

…Le rejette ;…


Synthèse
Numéro d'arrêt : 159
Date de la décision : 13/07/2015

Analyses

Réclamation de sommes.


Origine de la décision
Date de l'import : 06/03/2020
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ml;cour.supreme;arret;2015-07-13;159 ?
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